Nos remerciements s’adressent à Fathy Yassin, directeur des Antiquités de Haute Égypte, et à Mustapha Soghayar, directeur général des temples de Karnak et de Médamoud. Enfin, le soutien du fond Khéops pour l’archéologie a permis de financer la mise en valeur du site.
1Sous les auspices de l’Ifao, de Sorbonne Université (UMR 8167 Orient et Méditerranée) et de la commission des fouilles du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères, la mission française de Médamoud (MFM) s’est déroulée du 10 février au 14 mars 2023. L’équipe était composée de Zulema Barahona Mendieta, Nathalie Favry, Thierry Joffroy, Matjaž Kačičnik, Nadia Licitra, Mohammed Abdu Hussein, Hassan Mohamed Ahmed, Nicolas Morand, Felix Relats Montserrat, Romain Séguier, Dominique Valbelle et de Daniel Vives Menor. Plusieurs étudiants ont également participé à la mission : Coralie David, Maria Gonzalez, Giulia Nicatore et Judith Simon. Lorenzo Medini, qui n’a pas pu se déplacer en Égypte, a poursuivi l’édition des inscriptions du temple depuis la France.
[F. Relats Montserrat]
2Depuis 2011, la mission française de Médamoud (MFM) structure ses recherches autour de trois objectifs complémentaires : tout d’abord, étudier les secteurs inexplorés du kôm entourant le temple, afin de comprendre son environnement urbain, économique et social ; ensuite, réexaminer la documentation issue des fouilles du début du xxe s., dont les résultats doivent être précisés et actualisés ; enfin, assurer la mise en valeur du site. En 2023, nous avons poursuivi l’étude de l’environnement urbain autour (et sur) l’enceinte augustéenne, et l’exploration du secteur J9/K9, situé au centre du kôm, qui avait livré une riche succession d’occupations artisanales dédiées à la production céramique (fig. 1).
Fig. 1. Zones fouillées entre 2018 et 2023 (Ifao/MFM, M. Gaber, R. Séguier).
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3L’abondante documentation épigraphique mise au jour lors des fouilles françaises du début du xxe s. date entre le début du IIe millénaire av. J.-C. et l’époque gréco-romaine. Depuis 2020, la mission se concentre sur deux projets éditoriaux importants, portant respectivement sur les inscriptions du temple gréco-romain et sur le dernier propylône thébain inédit, connu sous le nom de la « porte de Tibère ». Ce monument, qui constituait l’entrée du secteur cultuel de Médamoud, était décoré d’un résumé de la théologie du temple. En 2023, le premier volume de La porte de Tibère (en trois fascicules), publié par D. Valbelle, est paru aux presses de l’Ifao. L’auteure, qui en poursuit l’édition, a passé un court séjour sur le terrain lors de la campagne 2023 afin de documenter les restes de polychromie présents sur les blocs de la porte, qui était à l’origine entièrement peinte.
4En parallèle, N. Favry a été chargée de l’inventaire des pièces provenant des fouilles du début du xxe s. conservées dans les magasins du site. Le contrôle des numéros d’inventaire a été finalisé, tout comme les schémas de positionnement des blocs sur les mastabas 1 à 8. Enfin, un numéro d’inventaire spécifique a été assigné aux 30 blocs déposés par le Service des Antiquités de l’Égypte suite aux fouilles menées dans le village, en dehors de la concession, par leurs soins.
5L’exploration des abords de l’enceinte augustéenne avait pour objectif de préciser les informations livrées par les premiers fouilleurs du site. Il s’agissait tout d’abord de comprendre le tracé de cette enceinte dont le plan n’était pas assuré, puis de mener une étude architecturale du monument afin de proposer des protocoles de conservation adaptés aux vestiges et aux conditions environnementales du site. De plus, aucune réflexion n’avait encore été menée pour comprendre comment cette enceinte, qui marquait pourtant la limite de la dernière phase du téménos, structurait le tissu urbain de la ville de Médamoud à l’époque romaine. Deux secteurs de fouille (O10 et N10), qui devaient théoriquement donner un accès rapide au bâti antique, ont ainsi été ouverts en 2021. Toutefois, la présence de vestiges qui n’avaient pas été signalés par les premiers fouilleurs – qui n’ont mis que partiellement au jour le parement ouest et n’ont pas documenté les occupations tardives qui avaient pourtant profondément entaillé sa maçonnerie –, nous a amené à prendre en considération l’évolution de ce type de structure. En 2023, nous avons donc poursuivi l’étude des maçonneries de l’enceinte et celle des structures contemporaines et postérieures installées à proximité ou sur son bâti (fig. 2).
Fig. 2. Plan général du mur d’enceinte en 2023 (Ifao/MFM, R. Séguier).
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[N. Licitra]
- 1 L’appareillage, clairement visible sur le fond du sondage, est assez régulier à l’est, à proximité (...)
6Au cours de la mission de 2023, le travail s’est d’abord concentré sur deux sondages : l’un réalisé au cœur même de l’enceinte dans le secteur P10 et l’autre ouvert dans le secteur O10, le long de l’emplacement présumé du parement ouest de l’enceinte. Le premier, en forme de « L », d’environ 3,30 m (est-ouest) × 3 m (nord-sud) et d’une largeur de 1,5 m environ, a été réalisé à l’intérieur de l’enceinte augustéenne, à proximité du montant sud de la porte de Tibère, dans le but de parvenir à une lecture plus claire de l’appareillage des briques crues (fig. 3). Le sondage a permis d’observer que, lors de la construction de l’enceinte, un plus grand soin a été attaché à l’appareillage du parement, alors que la partie centrale de la maçonnerie témoigne d’un travail plus hâtif et de l’emploi de briques résiduelles, retaillées, ainsi que de fragments, dans le but d’utiliser l’ensemble des matériaux de construction, y compris ceux de rebut, disponibles sur le chantier1. En ce qui concerne le mortier, il a pu être observé que les briques ont été posées dans certains cas les unes à côté des autres avec peu de liant, voire à sec. Un mortier de terre a néanmoins été utilisé pour les joints verticaux ainsi que pour combler les vides entre les briques, là où l’appareillage était plus irrégulier, atteignant parfois une épaisseur de plusieurs centimètres. Du mortier a aussi été systématiquement utilisé entre deux assises de briques.
Fig. 3. Vue générale du sondage réalisé dans la partie nord de l’enceinte d’Auguste, depuis le sud (Ifao/MFM/Projet Nile’s Earth/ENSAG, N. Licitra).
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[D. Vives Menor, F. Relats Montserrat, R. Séguier]
7En 2022, nous avions voulu mieux comprendre l’environnement urbain autour de l’enceinte augustéenne en étendant l’exploration du secteur (O10), ouvert en 2021. Une zone de fouille de 17 m de long (nord-sud) par 5,50 m de large avait alors été sondée à l’ouest de l’enceinte romaine. L’exploration avait rapidement révélé toute une série de structures d’époque impériale appartenant à – au moins – deux phases d’occupation différentes dont le terminus ante quem remonte aux iiie-ive s. apr. J.-C. selon les premières datations céramologiques. La campagne de 2023 avait donc pour but d’étendre les recherches dans cette zone, à la fois spatialement et en profondeur, tout en affinant les relations stratigraphiques et chronologiques des deux bâtiments mis au jour.
8Un dernier objectif était de localiser la limite sud des occupations mises au jour en 2022. Nous avons, en conséquence, étendu l’emprise de la fouille dans cette direction, sur près de 6 m. Toutefois, la présence de phases d’occupations plus récentes masque encore la réponse à cette interrogation. Au contraire, l’extension sud a révélé une nouvelle pièce qui conserve une grande partie de son pavement en briques cuites (US 1229), très érodé. Ses dimensions sont de 4,40 × 3,10 m, sa limite occidentale n’étant pas connue. La zone n’avait pas fait l’objet d’interventions archéologiques de la part des premiers fouilleurs car toute la surface de la pièce présentait des niveaux d’effondrement (US 1222, 1226, 1227, 1228, 1230). Ils contiennent de nombreuses briques cuites et fragments de récipients en céramique, dont certains complets. Leur datation (ive-vie s. apr. J.-C.), ainsi que l’organisation spatiale différente de cette pièce semblent indiquer que toute la zone sud appartient à une phase d’occupation postérieure par rapport aux autres maçonneries au nord.
[R. Séguier, N. Licitra]
9La campagne 2022 avait permis de mettre en lumière l’existence d’occupations postérieures implantées profondément dans la maçonnerie de l’enceinte augustéenne (structure semi-excavée F.98 ; fig. 2). Ces occupations n’avaient pas été identifiées par les premiers fouilleurs, d’où la nécessité de procéder à leur exploration. Les premiers résultats avaient mis en évidence un espace dédié à la production du pain datant de l’époque byzantine, attribué au vie s. apr. J.-C. Un des principaux objectifs de la campagne de 2023 a été de poursuivre la fouille de ces niveaux d’occupation.
- 2 Monteix, Noûs 2021, § 50-56, ou « four à cloche » (§ 50).
- 3 Des études archéologiques et ethnologiques ont montré que la présence d’un seul four de ce type su (...)
10F.98 se caractérise par un creusement irrégulier de 3,10 m (nord-sud) × 2,90 m (est-ouest), soit d’environ 9 m². La mise au jour de quatre fours de type « four à sole verticale »2 au sein de son emprise oriente l’interprétation vers une unité de production artisanale en relation avec la cuisson du pain : les fours F.99 (1-0,90 m de diamètre) et F.100 (0,80-0,75 m de diamètre) se situent respectivement au nord-est et au nord-ouest de l’espace de travail F.98. Ils ont fonctionné en batterie, accolés l’un à l’autre. F.99 s’insère à l’emplacement d’un autre four plus ancien (F.104), qui a été arasé à cette occasion. Un dernier four (F.101 ; 1 m de diamètre) a été fouillé au sud de F.98. Il est établi postérieurement aux précédents et a pu augmenter le rendement de production de l’unité. Nous proposons d’interpréter F.98 comme un espace ayant accueilli une partie de la chaîne de production d’une boulangerie, voire d’une activité commerciale de restauration (échoppe, taverne, auberge, etc.). Plusieurs indices étayent cette hypothèse : 1. La présence d’un nombre suffisant de fours à pain pouvant fonctionner en même temps (2 à 3)3 ; 2. Les dimensions relativement importantes des fours ; 3. La présence abondante de céramiques appartenant à la phase d’utilisation de F.98 ainsi qu’à un dépotoir contemporain de sa destruction, suggérant la préparation, la transformation et/ou la consommation d’aliments (fig. 4) ; 4. La localisation géographique centrale de cet espace artisanal entre les occupations installées à l’intérieur du téménos après l’abandon des cultes et celles qui se sont développées autour du dromos ; F.98, en tant qu’espace de production, prend subitement fin avec le recouvrement de la zone par une séquence de niveaux (US 1160, 1158, 1156 et 1133) s’accumulant sur près de 70 cm d’épaisseur. Ils reflètent à la fois la démolition de F.98 et/ou un remblai provenant d’un environnement proche. La campagne 2023 a également voulu interroger le fonctionnement de la structure (indices de la circulation au sein de F.98 et de sa possible connexion avec des espace annexes), les rapports avec les occupations antérieures (outre celle de l’enceinte elle-même), ainsi que la nature de celle-ci.
Fig. 4. Gargoulettes complètes trouvées dans la boulangerie (Ifao/MFM, Z. Barahona Mendieta).
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- 4 Des cupules sont visibles sur sa face supérieure, ainsi que sur la face latérale nord. Le bloc pro (...)
11Au nord de la boulangerie F.98, des vestiges liés à une occupation antérieure avaient été repérés en 2022, mais ils n’avaient pas pu être documentés. Au cours de la mission de 2023, un nettoyage a permis de mettre au jour un seuil en grès long de 1,20 m et large de 30 cm (+ 74,97 m), témoignant de la présence d’une porte donnant accès à un espace implanté sur l’arasement de l’enceinte au nord de la boulangerie F.98. Cette porte donnait accès à une pièce, séparée de F.98 au sud par un mur est-ouest qui n’a pas encore été mis au jour intégralement. En revanche, des restes de la porte s’ouvrant à l’origine dans ce mur étaient encore conservés (F.117). Il s’agit du jambage oriental de la porte, constitué probablement d’un bloc de remploi4 en grès (US 1219), et d’un seuil constitué de deux éléments en grès (US 1218) recouvert par deux assises de briques crues (US 1217) vraisemblablement utilisées pour boucher le passage dans une phase ultérieure d’utilisation de l’espace, lors de la création de la boulangerie au sud.
[F. Relats Montserrat]
- 5 Les US ont été regroupées en « faits » eux-mêmes réunis en « ensembles ».
12Le second secteur de fouilles porte sur les espaces inexplorés entourant le temple, qui correspondent aux trois quarts du kôm antique. Une première tranchée de diagnostic, ouverte par R. Séguier en 2018 (zone J9/K9), est toujours en cours de fouilles. Celle-ci peut désormais être divisée en trois grandes zones distinctes : la première, au nord, conserve un atelier de production céramique datable du milieu du ixe s. av. J.-C. (ensemble 1 = E.1)5 ; la deuxième, au centre, abrite à la fois un espace de travail d’époque gréco-romaine (E.2) et des vestiges d’occupation du début de la XVIIIe dynastie ; la troisième se localise dans la partie sud et est séparée des deux premières par un mur de clôture en briques de 2,80 m d’épaisseur (F.23). Elle a préservé deux zones d’activités artisanales céramiques du milieu de la XVIIIe dynastie (E.3), ainsi que des xe-ixe s. av. J.-C. (E.4). La fouille de 2023 s’est concentrée sur l’ensemble E.1 et le four F.40 (appartenant à E.3).
[R. Séguier, F. Relats Montserrat, Z. Barahona Mendieta]
- 6 Voir les rapports précédents, en partie repris dans Relats Montserrat 2020, § 6, fig. 2 ; Relats M (...)
- 7 Relats Montserrat et al. 2023, § 6-7, fig. 2.
- 8 Barahona Mendieta, Relats Montserrat, Séguier 2023.
13L’« atelier nord » (E.1) regroupe des structures appartenant à une même séquence d’occupation liée à une officine de production céramique datée de la Troisième Période intermédiaire (TPi ; seconde moitié du ixe s. – première moitié du viiie s. av. J.-C.). Trois campagnes de fouilles successives (2018-2020) ont permis de dégager, sur une emprise de 14 m de longueur nord-sud et 10 m de largeur est-ouest (soit 140 m²), une partie conséquente de l’atelier6. Après deux années de pause dans cette partie du secteur, l’année 2023 a permis de compléter la documentation de E.1 en portant l’emprise de la fouille à 16 m (nord-sud) par 15 m (est-ouest) dans l’espace nord de la tranchée (soit 240 m²). Elle a aussi révélé les limites de l’occupation en lien avec cet atelier, puisque seuls de rares vestiges de E.1 subsistaient sous les extensions ouest et nord réalisées. Au sud, une fosse de travail d’époque romaine (E.2) a décaissé la stratigraphie antérieure7, et l’est de la zone se trouve occupé par le chemin d’accès principal au chantier. L’ensemble du secteur a montré une forte érosion d’origine anthropique due à l’activité des sebakhīn. Cette dernière se manifeste à la fois par une absence de conservation des vestiges postérieurs à la TPi, ainsi que par de nombreuses fosses de récupération. L’ensemble de ces éléments explique l’état de préservation de l’atelier E.1. Les premiers résultats de synthèse viennent tout juste d’être publiés dans la revue Journal of Archaeological Science: Reports et intègrent les données de la dernière campagne de 20238. La publication complète de cet atelier prendra la forme d’une monographie ad hoc.
[R. Séguier]
14F.40 a été pour la première fois mis au jour durant la campagne de 2019. En 2020, faisant suite à son dégagement complet en surface, l’excavation de l’intérieur de la structure s’était portée sur sa moitié ouest. Malgré l’effondrement de la sole, la préservation de son laboratoire a été observée sur un peu plus d’1 m de hauteur. La campagne de 2021, quant à elle, a permis de documenter l’autre moitié de ses comblements laissés en tant que berme-témoin et de descendre jusqu’à 3,20 m de profondeur (arrêt à 73,50 m au niveau de la nappe phréatique). Il aura fallu attendre la campagne de 2023, avec la reprise des fouilles sur ce secteur, pour atteindre le fond de sa chambre de chauffe, avec l’appui d’un équipement de pompage (fig. 5).
15F.40 fait partie de la famille des fours à tirage vertical et possède le diamètre le plus large (3,45 m de diamètre extérieur pour 2,35 m de diamètre intérieur) jamais mis au jour à Médamoud pour ce type de structure ; il est vraisemblablement aussi le four le plus gros documenté pour la période dans la vallée du Nil. Au niveau de la paroi nord de son laboratoire, un démontage méthodique a été débuté en 2023, sur une emprise de 60 cm de largeur. Cinq assises de briques ont été documentées pour le moment, permettant de constater une régularité dans le montage. Malgré la destruction de la sole et de son support, les traces d’un pilier de voûte de la sole maçonnée sont visibles en paroi sud. Elles permettent de restituer la largeur du support de sole (80 cm) et son épaisseur (50 cm ; partie supérieure estimée à 75,25 m d’altitude), l’épaisseur de la sole (entre 20-15 cm), ainsi que le diamètre d’un carneau entre 12-10 cm. Sous le pilier sud est apparu l’accès à la chambre de chauffe. Le fond de la structure a aussi été atteint cette année, à 4,35 m depuis l’assise la plus haute conservée du laboratoire. Il a été établi directement à même le substrat, sans aménagement particulier. Il a donc été possible de documenter la séquence stratigraphique complète de ses comblements qui offre un aperçu des logiques et des dynamiques d’utilisation/réutilisation ainsi que d’abandon de la structure, sur un temps exceptionnellement long. L’intérêt de l’étude de F.40 est, de ce fait, de mieux pouvoir apprécier la durée et le potentiel d’utilisation de ce type de structure, observations encore peu documentées pour l’Égypte ancienne. En effet, la campagne 2023 a permis d’observer plusieurs phases de fonctionnement de ce four, visibles par plusieurs restaurations de sa structure (jusqu’à la mise en place d’un deuxième fond – cette fois-ci maçonné). L’étude des comblements du four, encore en cours, devra nous permettre de proposer une datation pour ces différentes phases d’utilisation.
Fig. 5. Photogrammétrie zénithale du four F.40 après le démontage de ses premières assises, et des structures adjacentes (Ifao/MFM, R. Séguier).
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[F. Relats Montserrat, T. Joffroy]
16Chaque année, la mission restaure un tronçon du temple : les anciennes restaurations au ciment, réalisées par les premiers fouilleurs au début du xxe s., sont enlevées et un traitement est appliqué sur les blocs afin de lutter contre les remontées salines. En 2023, les travaux de restauration ont porté sur les porches qui marquent l’entrée du temple. En parallèle, les blocs du musée en plein air ont été restaurés en vue de leur installation sur des banquettes pour leur future exposition.
17Une action de conservation de l’enceinte augustéenne, planifiée en 2022, a été mise en œuvre dans le cadre du partenariat avec le projet ANR Nile’s Earth. L’intervention a concerné les huit premiers mètres de la maçonnerie située immédiatement au sud de le porte de Tibère, de façon à ne pas recouvrir les niveaux d’occupation postérieurs mis au jour sur l’enceinte. Pour assurer la réversibilité, nous avons privilégié une reconstruction légère : deux murs de parement ont été bâtis de part et d’autre des vestiges antiques et un remplissage compacté (fait de terre de déblais tamisée et débarrassée des matières végétales) a été mis en œuvre entre ces deux murs. Afin d’assurer une bonne visibilité depuis l’entrée du site tout en limitant les volumes à mettre en œuvre, le mur oriental a atteint une hauteur d’environ 1,80 m, alors que le mur occidental ne mesure que 80 cm. La couche de terre compactée a été mise en œuvre de manière à créer une surface convexe, facilitant l’écoulement des eaux de pluie afin de prévenir les dégradations qui en découleraient. Avec le choix de cette technique, l’intervention sur les vestiges subsistants a été minimale, d’autant plus que ceux-ci ont été protégés par l’application d’une couche de géotextile avant l’édification de la reconstruction.
[Z. Barahona Mendieta]
18Les travaux céramologiques de la campagne 2023 ont consisté à poursuivre l’étude des céramiques associées au four F.40, aussi bien les sols d’ateliers (F.133), auxquels le four est lié, que les remplissages postérieurs à son abandon. Nous nous sommes également efforcée d’enregistrer la céramique issue des fouilles en cours.
19En 2023, l’objectif principal du travail céramologique était l’étude chronologique, statistique et typologique de la production céramique issue de la fouille du sol de tessons F.133. Les conclusions préliminaires ont été présentées lors du congrès international des égyptologues, qui s’est tenu à Leyde en août 2023. Le travail comprenait l’étude de trois unités stratigraphiques (US 10007, 10009 et 10067) couvrant une surface d’environ 30 m2. Au total, 968 kilos de poterie ont été examinés, dont 3 428 diagnostics. L’examen a montré que plus de 99 % des fragments sont constitués de pâtes calcaires appartenant aux types Marl A2 et Marl A4, qui correspondent aux pâtes typiques de la production identifiée sur le site de Médamoud. La production est très diversifiée, avec de multiples catégories formelles différentes (fig. 6-7). Sont attestés aussi bien des récipients de stockage et de transport (comme des amphores, des « meat jars » et des jarres décorées), de la vaisselle de table (comme des assiettes et des plats), ainsi que des types plus spécifiques comme des supports ou des « spinning bowls ». Un grand nombre de pièces, de différentes catégories typologiques, présente une décoration peinte réalisée avant la cuisson. Parmi les pièces décorées, il faut signaler la présence de pièces peintes à décor bleu. Bien que celles-ci correspondent à moins de 10 % de l’ensemble du matériel de la zone étudiée, cette découverte fait de Médamoud le premier site égyptien permettant de documenter une zone de production de ce type de céramiques.
Fig. 6. Fragments de jarres décorées avec des pétales de lotus (Ifao/MFM, Z. Barahona Mendieta)
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Fig. 7. Meat jar et fragment surcuit provenant de la production du four F.40 (Ifao/MFM, Z. Barahona Mendieta).
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20En parallèle, nous avons étudié le matériel issu de la fouille de l’intérieur du four F.40 lui-même, où ont été documentées une série d’US avec une grande quantité de céramiques qui correspondaient probablement aux dernières cuissons du four lui-même, ainsi qu’à des déchets de productions issus des fours voisins, installés à proximité du four F.40 pendant la TPi (fig. 8). D’après les premières observations, cette documentation illustre l’évolution des typologies de cette période, déjà observées lors des campagnes antérieures (fig. 9).
Fig. 8. Raté de cuisson d’un bord d’amphore de l’US 10252 (Ifao/MFM, Z. Barahona Mendieta).
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Fig. 9. Évolution de la morphologie des bords d’amphores dans les unités les plus importantes documentées dans le four F.40 (Ifao/MFM, Z. Barahona Mendieta).
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21Outre l’étude des contextes associés au four F.40, la documentation céramologique examinée cette année a aussi inclus ceux en cours de fouille. Un des secteurs examinés concerne la boulangerie d’époque byzantine identifiée dès 2022. Pendant la campagne 2023, la plupart des céramiques découvertes dans ce contexte ont été reconstruites et collées (fig. 10). Si nous n’avons pu encore étudier la totalité du matériel mis à jour, en raison de sa quantité, nous avons assuré la datation de cette occupation.
Fig. 10. Sélection de pièces découvertes dans le secteur de l’enceinte augustéenne, reconstituées lors de la campagne 2023 (Ifao/MFM, Z. Barahona Mendieta).
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[N. Morand]
22Les fouilles conduites dans les secteurs urbains et artisanaux depuis 2019 à Médamoud ont livré un grand nombre de restes fauniques. Le matériel étudié en mars 2023 englobe les vestiges collectés manuellement entre 2019 et 2022, ainsi que le mobilier exhumé lors de la campagne en cours. Ils proviennent pour l’essentiel du comblement de fours mis au jour dans l’agglomération (fig. 11). Un protocole de flottation/tamisage a été parallèlement mis en place afin d’optimiser la collecte des restes végétaux (graines, charbons) et animaux (poissons, oiseaux).
23L’exploration de cette ville de la vallée du Nil offre l’opportunité de mieux connaître les stratégies alimentaires dans ce grand centre de production céramique et notamment de sa communauté d’artisans-potiers. Les vestiges fauniques mis au jour proviennent de trois contextes différents : ceux découverts dans les secteurs K9-J9 sont datés de la fin du IIe millénaire à la première moitié du Ier millénaire av. n. è. (XVIIIe dynastie, XXIIe-XXVe dynasties) ; les fouilles entreprises près de l’enceinte (secteur O10) ont mis au jour quelques restes des époques romaine et romaine tardive ; enfin, des os du secteur M6 complètent l’ensemble. Au total, 3 518 restes animaux ont été examinés et enregistrés dont 51 % ont été déterminés taxonomiquement. Cet ensemble constitue l’un des plus importants assemblages archéozoologiques d’un espace non-religieux dans la vallée du Nil. Cette première étude a mis en évidence la présence importante de caprinés dans les ensembles des XXIIe-XXVe dynasties, suivis des bovins. Les individus immatures et arrivés à maturité pondérale indiquent qu’une viande de bonne qualité a été privilégiée. Des analyses détaillées des âges d’abattage et de la répartition anatomique apporteront des précisions sur les pratiques d’élevage et le choix des morceaux. Les restes de gibier et des ressources du Nil sont également présents et fournissent des indices de l’exploitation du milieu aride et de la vallée. La poursuite des fouilles archéologiques permettra de vérifier si ces premières tendances sont semblables dans l’ensemble de la ville et d’envisager une analyse socio-topographique.
Fig. 11. Exemple de restes fauniques mis au jour dans le comblement d’un four (échelle : 1 cm) (Ifao/MFM, N. Morand).
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Z. Barahona Mendieta, « Medamud Blue Painted Production », XIIIth International Congress of Egyptologists, 6th-11th August 2023, Leiden.
F. Relats Montserrat, R. Séguier, « Medamud in the New Kingdom: An Overview of the City, Its Artisanal Districts and the Relationship with Its Temple. Results of the Excavations of the French Mission of Medamud », XIIIth International Congress of Egyptologists, 6th-11th August 2023, Leyden.
D. Valbelle, La porte de Tibère à Médamoud I. le décor, MIFAO 151, Le Caire, 2023.
Z. Barahona, F. Relats Montserrat, R. Séguier, « Tracing the Specialisation and the “chaîne opératoire” of a Pottery Workshop in Egypt (Mid 9th-Mid 8th Century B.C.): The Example of Medamud », Journal of Archeological Science: Reports 51, Octobre 2023, https://doi.org/10.1016/j.jasrep.2023.104203.
F. Relats Montserrat, « Les ouvriers de Médamoud : le fonctionnement d’un chantier français en Égypte au début du xxe siècle », dans H. Navratilova, T.L. Gertzen, M. De Meyer, A. Dodson, A. Bednarski (éd.), Adressing Diversity: Inclusive Histories of Egyptology, Investigatio Orientis 9, Münster, 2023, p. 319-338.
F. Relats Montserrat, « Les relations du Service des Antiquités avec les missions françaises au début du xxe siècle : diplomatie, pragmatisme et domination (semi)-coloniale », dans M. de Meyer, V. Oeters, J. Vandersmissen, H. Willems (éd.), Pyramids and Progress: Perspectives on the Entanglement of Imperialisms and Early Egyptology (1800-1950), OLA, (article rendu le 1er janvier 2023).
F. Relats Montserrat, « Les fouilles du “temple primitif” de Médamoud (1938-1939) : étude archivistique d’un bâtiment polémique », dans O. El-Aguizy, B. Kasparian (éd.), ICE XII: Proceedings of the Twelfth International Congress of Egyptologists, 3rd-8th November 2019, Cairo, BiGen 71, Le Caire, 2023, vol. I, p. 603-613.
D. Valbelle, « Le très ancien taureau vénérable qui réside à Médamoud : contribution du décor de la porte de Tibère à l’état de la question », BIFAO 123, 2023, p. 511-538.
F. Relats Montserrat, Z. Barahona Mendieta, N. Licitra, L. Medini, R. Séguier, « Médamoud (2022) » [notice archéologique], Bulletin archéologique des Écoles françaises à l’étranger, 2023 [en ligne], Égypte, mis en ligne le 01 juin 2023, https://journals.openedition.org/baefe/8259.
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