Données scientifiques produites :
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Introduction

3Dans le cadre de sa collaboration avec le MoTA, le CEAlex a entrepris deux opérations d’envergure : la construction du mur d’enclos de la parcelle du dépôt archéologique de Tabiyet Nahassin, ainsi que la restauration et la mise en place dans les nouvelles salles du Musée gréco-romain d’une série de mosaïques.

4Enfin, la treizième édition des journées du patrimoine alexandrin, intitulée « Aller-retour Alexandrie », s’est tenue du 12 au 20 novembre 2022. Dans ce cadre, l’équipe du CEAlex a conçu, avec le mécénat de CMA-CGM, l’exposition Ports d’Alexandrie depuis l’Antiquité jusqu’à nos jours.

5L’UAR a été renouvelée par ses tutelles CNRS et Ifao à compter du 1^er janvier 2022. Valérie Pichot a effectué une mobilité vers la MSHE de Besançon ; Nadia Cantin a pris ses fonctions de responsable du laboratoire de caractérisation des matériaux au 1^er juillet 2022. Le nouveau directeur du CEAlex, Thomas Faucher, a été nommé au 1^er janvier 2023 ; Marie-Dominique Nenna a rejoint le Centre Camille Jullian à Aix-en Provence. Le CEAlex a accueilli deux nouveaux doctorants : Lauriane Lequette, allocataire de la MITI (thèse intitulée « L’Égypte de l’Antiquité tardive face à la peste justinienne : étude archéo-anthropologique et comparative d’un cimetière de crise à Alexandrie (Garage Lux) », sous la direction de Pascal Sellier, Dominique Castex et M.-D. Nenna, université Paris 1) et Augustin Roche-Lévêque, bénéficiaire d’un contrat doctoral avec mobilité internationale de l’InSHS (« Alexandrie, “machine à cash” ? : l’économie monétaire fermée de l’Égypte des deux premiers Ptolémées [323-246 av. J.-C.] », sous la direction de T. Faucher et Arnaud Suspene, université de Bordeaux 3).

1. Kôm Bahig

Aude Simony, Étienne Forestier, Kathrin Machinek, Romain Séguier, Georges Soukiassian

Responsable d’opération : Aude Simony (archéologue‑céramologue, CNRS, UAR 3134 CEAlex), assistée par Shady Morsi et Khaled Mohamed (contremaîtres, CEAlex) avec une vingtaine d’ouvriers.

6Participants : Kathrin Machinek (archéologue-architecte, CNRS, UAR 3134 CEAlex) ; Romain Séguier (archéologue, CNRS, UAR 3134 CEAlex) ; Georges Soukiassian, (archéologue, CEAlex) ; Cécile Shaalan (ingénieur topographe-cartographe, CNRS, CEAlex) ; Ismaël Awad (ingénieur topographe-cartographe, CEAlex) ; Ragab Wardani (assistant topographe, CEAlex) ; Étienne Forestier (photographe, CNRS, UAR 3134 CEAlex) ; Mahmoud Fathy (en charge des relevés de terrain, CEAlex) ; Sherine El Sayed et Aly Ahmed (en charge de la supervision de l’opération de levage et de déplacement des blocs calcaires). Le traitement du matériel archéologique (lavage, marquage, enregistrement, conditionnement, stockage) a été systématiquement réalisé en parallèle de la fouille par Hisham Aboud (CEAlex). Le tri, le comptage et l’étude de la céramique ont été effectués par Walid Abd El-Bary (céramologue) et Aude Simony, tandis que les dessins de céramiques et d’amphores ont été réalisés par Ahmed El-Naggar (dessinateur, CEAlex). Sont également intervenus pour des périodes plus courtes : Nicolas Morand (archéozoologue) et Essam Ahmed Soliman Ali (archéobotaniste).

Autorité nationale présente : Le ministère du Tourisme et des Antiquités (MoTA) était représenté par Mennat-Allah Magdy Abdel Salam du 8 mai au 7 juin, par Mohamed Hassan Mohamed Mahmoud Ahmed du 7 au 29 juin, et par Soha Abdel Salam Sherif Abdel Salam du 22 mai au 22 juin 2022.

Organismes financeurs : Les travaux menés sur le site de Kôm Bahig bénéficient du soutien du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères (MEAE, quadriennal 2020-2023).

1.1. Secteur 20000

Kathrin Machinek, Aude Simony, Georges Soukiassian

1.1.1. Secteur 20000 S : l’escalier 20092, les structures semi-circulaires, la pièce SE et le mur E/W

1.1.1.1. L’escalier 20092

7Le secteur 20000 a été étendu de 3,5 m vers le sud. La précédente campagne avait permis de mettre au jour les degrés de deux marches d’un escalier de pierre (20092) partiellement pris dans la berme marquant la limite sud du secteur. La première marche de l’escalier repose directement sur le dallage calcaire d’orientation nord-sud (20014), tandis que la deuxième marche est fondée sur une couche sableuse de nivellement d’une vingtaine de cm d’épaisseur (20093). Le dégagement, dans la partie sud du secteur, de l’épaisse couche de surface (20001), d’une couche de débris calcaires (20056) présentant un fort pendage est-ouest, et d’une couche sableuse d’abandon (20013) recouvrant les vestiges de l’escalier 20092 a été réalisé. Ainsi, trois marches supplémentaires, partiellement récupérées et assez érodées, composées de blocs de remploi et menant à la partie sud du secteur, ont été mises au jour.

8À la différence des deux marches inférieures, elles sont composées de grosses dalles calcaires remployées, mal jointoyées, comportant par endroits des manques probablement liés à une récupération ultérieure ainsi que des bourrages de petites pierres calcaires de taille et de forme irrégulières. En raison des récupérations, de la qualité de la construction et du recours à des matériaux en remploi, les dimensions exactes des marches supérieures sont parfois difficiles à déterminer. Toutefois, elles semblent globalement relativement profondes (66 à 70 cm de large sur 3,70 à 3,80 m de long) et présentent une contremarche, lorsqu’elle est conservée, plutôt basse, d’une hauteur moyenne de 10 à 16 cm. Au total, l’escalier 20092 était composé d’au moins cinq marches. La cinquième marche, probablement beaucoup plus large que celles qui la précèdent, semble mener aux éventuels vestiges d’un petit édifice ou à une sixième marche au sud de la berme.

1.1.1.2. Le mur 20179 et les structures semi-circulaires

9Une seconde extension de 2 m a été réalisée vers l’est dans la moitié sud du secteur afin de mettre au jour des structures superposées de forme semi-circulaire (20107, 20122, 20137) découvertes en 2021, d’en préciser la nature et d’en proposer une identification.

10À l’angle des bermes sud et est, un mur d’orientation nord-sud (20179) de 3,43 m de long et 35 m à 45 cm de large a été dégagé sous un amas de blocs calcaires et de mortier suivant un léger pendage est-ouest (20178). Mis en œuvre à partir de pierres calcaires de taille et de forme irrégulière, il délimite vers l’est une petite pièce qui devait se poursuivre sous la berme orientale du secteur. Le dernier niveau de fonctionnement de cette pièce (20186) bute contre la partie supérieure du mur 20179. Ce niveau de sol de nature sableuse a été atteint entre la cote de 11,80 m et 11,60 m. La pièce est dotée, dans cet état, de deux murets parallèles (20203) d’une seule rangée de briques de couleur brun orangé (22 cm de large environ), dont les joints sont parfois difficilement distinguables en raison de l’érosion. D’orientation est-ouest, ils sont espacés de 55 cm environ, et mesurent 1,03 m de long pour le muret nord et 1,40 m pour le muret sud.

11La pièce SE (20204) est délimitée à l’ouest par le mur nord/sud 20179 et, au sud, par un mur est-ouest perpendiculaire de pierres calcaires 20205, conservé sur 1 m, partiellement dégagé dans la berme sud. Ce dernier est fondé sur un remblai de nivellement sableux très compact contenant de petits éclats de calcaire (20219). Sous le remblai de démolition 20219, deux petits murs parallèles en pierres calcaires dures d’orientation est-ouest (20230 et 20231) se poursuivent dans la berme est. Le niveau de sol fonctionnant avec ces murs, de même que le niveau de fondation du mur 20179 n’ont pas été atteints.

12À l’ouest de la pièce SE, la dépose de la structure 20107 a permis de mettre au jour une seconde structure (20190) plus à l’ouest (sommet à 11,82 m) d’environ 1,7 m de long, composée de pierres calcaires probablement en remploi grossièrement installées en arc de cercle. Le sol contemporain (20186) correspond au niveau de fondation de la structure 20107 et s’apparente au dernier niveau de fonctionnement de la pièce SE. Il repose sur un remblai sableux délimité par le muret 20190 (20191). Au-dessous, les vestiges d’un seuil et les marches d’un petit escalier (20195), composés de gros blocs de calcaire, ont été dégagés. Le seuil est fondé sur un remblai de nature sableuse (20196) et un niveau d’empierrement composé de gros blocs de calcaire dur (20197). Il fonctionne avec la structure 20190 et avec une structure semi-circulaire du niveau intermédiaire (20122) partiellement dégagée lors de la campagne. 20122, de 1,60 m de long, est située (sommet à 11,44 m) en contrebas de 20190. Son sol, de nature sableuse (20198 = 20200), fonctionne avec le seuil et l’escalier 20195, et correspond également au niveau de fondation des quatrième et cinquième marches de l’escalier 20092. Le sol 20198 présentait de nombreux tessons de céramiques posés à plat de même que quelques fragments de plaques de marbre portant des inscriptions grecques datées des ii^e-iii^e siècles apr. J.-C.

13La structure 20122 est fondée sur une accumulation limoneuse de sable jaune très fin présentant quelques plaques humidifiées, quelques éclats de calcaire, des tessons de céramique et des dépôts noirâtres (20216). Ce niveau correspond également au second niveau de fonctionnement de la structure en arc de cercle du niveau inférieur (20137, sommet à 11,32 m) et bute contre la base de la troisième marche de l’escalier 20092. Sous 20216, un sol de sable fin (20221) a été mis au jour. Il constitue à la fois le niveau de fondation et le premier niveau d’usage associé à la structure 20137 qui vient s’appuyer contre la face est du mur 20159. Ce dernier, partiellement dégagé lors de la campagne 2021, présente une orientation nord/sud et est composé de deux assises de dalles calcaires de largeur variable (50 à 80 cm), de longueur et de forme très irrégulières. L’assise supérieure est en boutisse. L’alignement régulier des blocs sur la face du mur donnant vers l’escalier 20092 indique que la façade devait se trouver du côté ouest, tandis que du côté de la face arrière du mur (à l’est) les blocs ne présentent pas d’alignement particulier. Ce mur, dégagé sur une longueur de 3,96 m, venait coffrer le niveau de sable tassé 20229. Du côté sud, il rejoint perpendiculairement un mur de pierres calcaires d’orientation est/ouest, partiellement pris dans la berme sud (20235). Au nord, 20159 s’appuie contre la façade sud du petit édifice en forme de podium à double escalier (20121).

14Le niveau de sable tassé 20229 succède à une importante inondation localisée entre les murs 20179, 20235 et 20159 et le petit édifice 20121, et matérialisée par la présence d’une cuvette de sable jaune très fin formé par une coulée d’eau et de boue suivant une orientation est-ouest (20236). Elle précède l’installation des différents niveaux de structures semi-circulaires (20137, 20122, 20190, 20107). Cet évènement pourrait être à l’origine de la dégradation de la face sud de l’édifice 20121. Dans la partie nord, la zone inondée a été, semble-t-il, recouverte par la suite par un remblai composé de sable compact, de petits débris de quartz et de calcaires et de charbon de bois (20123). Vers le sud, 20123 recouvre partiellement les marches inférieures de 20121. Sa limite nord correspond à la face sud du mur 20144 tandis qu’à l’est, sa limite irrégulière s’étend pratiquement jusqu’à la berme orientale.

15L’exploration des zones sud et est du secteur 20000 suggère qu’elles étaient toujours fréquentées au Haut-Empire malgré un ensablement progressif. La topographie générale du site et la position de la zone, en contrebas de la pente occidentale du Kôm E, semblent avoir favorisé son ensablement lié au ruissellement depuis le sommet du kôm. Ce phénomène est par ailleurs toujours observable aujourd’hui lors d’épisodes de fortes pluies hivernales. Ainsi, le mur 20159 et les structures semi-circulaires 20137, 20122, 20190 et 20107 peuvent être interprétés comme de petits murets de soutènement destinés à empêcher ou, à défaut, contenir et ralentir les coulées d’eau et de sable dévalant les pentes du kôm. Ces installations devaient ainsi permettre d’éviter l’accumulation trop rapide de sédiments dans la zone du dallage et prévenir la dégradation des édifices et constructions qui s’y trouvaient. Il semblerait toutefois que, malgré la présence de ces différents dispositifs de soutènement à l’est, l’ensablement soit resté à la fois significatif et progressif, conduisant à la création de l’escalier 20092. Les marches de cet escalier semblent en effet avoir été ajoutées au fur et à mesure de l’élévation du niveau de la zone, maintenant ainsi l’accès à un secteur situé au sud des limites actuelles du secteur.

1.1.1.3. Le mur E/W 20019/20144

16L’extension sud-est du secteur a permis de vérifier la continuité du mur d’orientation est-ouest (20019/20144), mis au jour lors de la campagne précédente, et d’en comprendre les différentes étapes de construction.

17Dans une première phase, un soubassement composé de gros blocs calcaires de taille régulière bien taillés présentant des joints rectilignes très fins (20165) est installé sur un nivellement de sable jaune fin (20171). Ce soubassement, qui n’est toutefois visible que de manière partielle sous le mur 20019, est conservé sur une longueur minimum de 2 m. Sa largeur n’est pas connue à ce jour. Dans une seconde phase, le mur 20019, constitué de dalles de calcaire irrégulières mais présentant des joints fins et relativement rectilignes, est installé. Il s’étend sur une longueur de 6,80 m et repose, à l’ouest, sur le soubassement 20165 et, à l’est, sur un nivellement de sable jaune très fin (20135). Au sud, il se poursuit sous le sol 20123. Vers le nord, les blocs qui constituaient les murs 20019 et 20165 ont été arrachés, récupérés ou déplacés.

18Ce mur est-ouest semble conserver un tracé identique sur la longue durée. Il est toutefois prolongé vers l’est dans une seconde phase (20019) et surélevé dans une troisième et dernière phase (20144). Au sud, le dégagement du sol 20123 lors de la prochaine campagne pourrait permettre d’en dégager la face sud et mieux comprendre sa relation avec les dallages de pierres successifs (20014/20022) et l’édifice en forme de podium à double escalier 20121.

19Au nord du mur 20019 et à la limite orientale du secteur, la fouille de la fosse 20163, déjà en partie explorée dans sa partie ouest lors de la dernière campagne, s’est poursuivie. Le fond de la fosse repose sur le niveau de sable 20135.

1.1.2. Secteur 20000 centre et nord : la phase des dallages de pierres calcaires

1.1.2.1. Dallages et structures situés aux abords du dallage 20014

21Une série de dégagements et nettoyages limités ont été réalisés autour de la partie nord du dallage calcaire d’orientation nord/sud (20014). Pour rappel, il avait été déterminé lors des premières campagnes de fouille que ce dallage avait été partiellement arraché dans sa partie nord. Il est conservé, du nord au sud sur une longueur de 6,20 m environ et présente une largeur maximale comprise entre 3,90 et 4 m. 20014 est fondé sur une couche sableuse (20021) permettant de régler son horizontalité. Cette couche de pose recouvre un autre dallage d’orientation est/ouest (20022) uniquement visible en coupe et fondé sur un niveau sableux d’une épaisseur de 15 cm environ (20166). Une première phase de nettoyage aux abords de la fosse 20077, localisée au nord-est du dallage 20014 a révélé la présence de deux dalles calcaires (20170) appartenant à un dallage ou à un petit édifice antérieur à l’installation de 20022 et 20014.

22Au nord-ouest de 20014, le dégagement d’une partie effondrée de l’installation 20075, composée de dalles calcaires en remploi scellées par un mortier gris très épais et correspondant à une phase de réfection postérieure au démontage de la partie nord de 20014, a été effectué. Cette installation, qui repose sur une épaisse couche de nivellement composée de débris de calcaire (20081), avait en effet été entamée, à l’est, par le creusement de la fosse 20077. La découverte dans ce niveau d’un fragment de stèle inscrite datée du règne de Trajan permet de fournir une première datation pour ce remblai. Cette opération a également permis de révéler la présence d’un dallage calcaire d’orientation nord-sud directement sous le remblai et reposant sur le dallage 20022 (20240).

23Le dallage 20240, dont une seule rangée de dalles est conservée, présente une orientation nord-sud, identique à celle du dallage 20014. D’autre part, la limite du dallage 20022 semble se trouver encore 1 m plus au nord, comme le suggère la découverte d’une dalle calcaire visible en coupe sous la structure tardive 20078 et dans l’alignement de 20022.

24Enfin, au nord-ouest de 20014, une épaisse couche sableuse d’abandon (20168) recouvrait partiellement la bordure calcaire adjacente au dallage 20014 (20084 et 20085) ainsi qu’un massif de briques crues (20180) servant de fondation de la bordure formée par 20084 et 20085. 20180 présentait l’empreinte de blocs arrachés ainsi que des résidus de mortier dans sa partie nord.

1.1.2.2. Les dallages 20029, 20109, 20143, 20157 et la structure 20090/20099

25Dans la partie nord-ouest, le retrait des couches de démolition 20055a et 20101 a révélé les niveaux de pose des dallages de calcaire (20029, 20109, 20143) : une couche de sable jaune très fin d’environ 20 cm d’épaisseur (20169) pour les dallages 20029 (d’orientation est-ouest), 20109 (d’orientation nord-sud) et le soubassement 20090. Deux dalles calcaires ajoutées à l’ouest du soubassement 20090 (20099) reposaient, quant à elles, sur un remblai sableux postérieur (20095). En revanche, le dallage 20143 (d’orientation nord-sud) localisé sous le pavement 20037 et en bordure ouest de la fosse 20054, a été installé, au nord, sur une assise de dalles calcaires posées de chant (certaines similaires à celles des dallages) et de blocs calcaires en remploi (20046) ainsi que sur un massif de briques (20047). Sa bordure occidentale semble suivre l’axe de la banquette 20139. Sous cette dernière, un muret bas d’orientation est-ouest (20194) est conservé sur une longueur de 2,60 m et composé d’une rangée de briques crues (39 × 19 cm) de couleur brun orangé disposées sur une ou deux assises. Dans sa partie orientale, 20194 repose sur de petits blocs de calcaire dur (20188). Enfin, il coffrait un remblai compact d’une quarantaine de cm d’épaisseur environ et composé de sable et de fragments de briques (20193).

26Le niveau 20188 se développe sous le mur de briques crues sur lequel reposaient des dalles calcaires posées à plat (20157), partiellement récupérées, à l’extrémité nord. Ces dalles sont de modules similaires à celles des dallages situés plus au sud (80 × 30 cm). Elles constituent les vestiges d’une portion de dallage d’orientation est/ouest, ayant fait l’objet d’une récupération.

27Le muret 20194, le remblai 20193 et les niveaux de fondations des différents dallages (20046, 20095, 20169) reposent sur le niveau 20224. Il consiste en une surface relativement plane composée de fragments de briques, de sable compact et de poches cendreuses et correspondant à la démolition et au nivellement de la zone nord-ouest antérieure à l’installation des dallages de pierres.

1.1.3. Secteur 20000 Nord : les niveaux antérieurs à l’installation des dallages

28À l’angle nord-est du secteur, la fosse 20225 qui coupait le niveau 20152/20141 en bordure de la fosse 20054 a été entièrement fouillée. Elle était elle-même recoupée par une petite fosse 20234 contenant un fond d’amphore daté de la période ptolémaïque (20233).

29Le niveau de démolition et de nivellement de la zone nord-ouest du secteur (20224), antérieur à l’installation des dallages de pierres, a été retiré. Il comprenait un fragment de stèle en calcaire représentant la partie inférieure d’un personnage agenouillé en position d’offrande. Plusieurs murs de briques crues arrasés, appartenant à la même phase d’occupation, sont apparus : sept murs d’orientation nord-sud (20242, 20243, 20245, 20246, 20249, 20251, 20252), trois murs d’orientation est-ouest (20241, 20244, 20250), ainsi qu’une structure composée de briques (20247). Les murs 20241, 20242 et 20243 sont chaînés. Les briques composant ces différentes structures sont de trois types principaux (jaunes à nodules blancs, grises et brun orangé) et de module relativement homogène (38 à 40 × 18 à 20 × 10 cm). Ces murs, dont la nature reste à définir, n’ont été observés que partiellement, les dallages supérieurs ayant été laissés en place.

30Au nord-ouest du secteur, un dallage de briques crues (20161), mis au jour en 2021, a été dégagé vers le sud sur une longueur maximale de 4,5 m (soit 10 rangées de briques) et une largeur de 4,5 m (soit 26 rangées de briques). Il est formé à partir de briques de module régulier (42 à 44 cm × 18 × 10 cm), de couleur brun orangé. Ce dallage est antérieur aux murs de brique 20241-20243. Notons que l’ensemble des huit murs de briques présente une orientation nord-ouest/sud-est similaire à celle du dallage de briques 20161. Les constructions anciennes suivent ainsi une orientation légèrement différente de celle des constructions liées à la phase des dallages de pierres.

31Le dallage 20161 présente des traces de rubéfaction (certaines briques sont rougies sur leur face supérieure) et est percé par de petites fosses dont une (20162) a été fouillée.

32De forme rectangulaire (1,80 × 2,20 m), ce creusement a également largement entamé le remblai 20193 coffré par le muret 20194 et traversé le dallage 20161 dans sa partie sud. Le niveau de pose du dallage 20161 (20207) localisé à l’altitude de 9,40 m est constitué d’un remblai blanchâtre, épais de quelques centimètres seulement, contenant des inclusions calcaires sous forme de poudre ou de petits fragments. Il est installé sur une série de sols successifs de nature cendreuse (20208) qui reposent sur une couche argileuse brun orangé comportant quelques fragments de calcaire et des tessons de céramique (20209). Celle-ci correspond au niveau d’arasement de trois murs de briques crues de 1,4 à 1,5 m de longueur chacun : le mur 20212, d’orientation est-ouest ; le mur 20211, d’orientation nord-sud ; et le mur 20210, d’orientation est-ouest. Composés d’une seule assise de briques crues de module régulier (38 × 17 × 9 cm), ils sont fondés sur un niveau de sable argileux brun orangé. Ces murs qui semblent délimiter de petits espaces forment les structures les plus anciennes attestées dans ce secteur.

1.1.4. Synthèse sur le secteur 20000

33Les extensions sud et sud-est du secteur ont permis de documenter les phases d’occupation les plus tardives, précédant l’abandon et la destruction de la zone à l’époque byzantine. Les informations recueillies témoignent d’un ensablement progressif de la zone sud au Haut-Empire et de la mise en place d’installations destinées à le ralentir. Ainsi, cette occupation se traduit par l’installation d’une pièce, l’aménagement de murs de soutènement semi-circulaires afin de protéger la zone et de conserver l’accès au secteur au moyen de l’escalier 20092. La poursuite des dégagements des niveaux situés à l’est et au sud du dallage 20014 semble donc nécessaire afin de tenter d’atteindre et de documenter les niveaux contemporains et antérieurs à l’installation de 20014.

34Dans la partie centrale comme dans la partie nord du secteur, la fouille a non seulement permis d’avancer dans la compréhension du fonctionnement des dallages en pierre, mais surtout d’explorer les niveaux d’occupation antérieurs à leur installation, matérialisés par des dallages et murs de briques crues délimitant de petits espaces et remontant vraisemblablement à la Troisième Période intermédiaire.

1.2. Secteur 40000

Romain Séguier

35Le secteur 40000 est dédié à un chantier-école pour la formation de terrain d’inspecteurs égyptiens du MoTA, ainsi que des étudiants de l’université d’Alexandrie. L’ensemble des participants a acquis les bases de la fouille de terrain : méthodes de fouille, enregistrements stratigraphiques, photographies, relevés et prises de niveaux.

36La fouille a mis au jour deux bâtiments en pierre imposants de l’époque hellénistique : le plus récent, datant de la fin de la période est très arasé, tandis que le plus ancien présente des contextes mieux conservés.

1.2.1. L’arase d’un bâtiment en pierre de la fin de la période hellénistique et de ses abords extérieurs

37Les murs 40002, 40014 et 40048 forment les limites extérieures orientales d’un imposant bâtiment qui se développait sur le flanc ouest du kôm. Au nord, rien n’indique la présence d’une construction adjacente, suggérant ainsi la présence d’un espace de circulation. Au sud, à l’inverse, un second bâtiment en pierre, ayant une phase de contemporanéité avec le premier, est attesté par le mur 40049.

38Dans la partie est du secteur, les allées dallées 40007 et 40023 sont constituées d’un sédiment argilo-sableux de couleur brune, homogène et très induré, marqué par des négatifs de blocs (moyenne de 50 × 25 cm), disposés généralement en épis, puis récupérés (40006, 40021) à l’époque romaine. Elles fonctionnent à l’ouest avec le mur 40002 d’après une ligne de mortier de chaux visible sur 1,10 m de longueur nord-sud environ, dimension donnant la largeur moyenne des dallages.

39L’extension de cette année a révélé la continuité de 40007 et de 40023 de 3 m vers l’est, qui se prolongent au-delà des limites de fouille. Au nord, l’allée 40007 se développe sur une longueur ouest-est d’au moins 7,50 m, avec un retour perpendiculaire vers le nord situé à 4 m à l’est de 40002, d’emprise estimée à 2 m de longueur sud-nord par 0,90 m de largeur, et qui se poursuit sous la berme nord. En bordure est du secteur, le mur N-S 40039 (3,50 × 0,80 m) paraît lié à l’installation des massifs 40007 et 40023 et semble servir en partie de fondation à 40007 et 40023. Vers le nord, 40039 est interrompu sur environ 1,60 m par la tranchée de fondation de 40007 (40025 et 40045) et par le massif en lui-même, puis se poursuit sur au moins 2 m. Au sud, une interruption similaire se trouve en partie masquée par la présence d’une dépression (creusement d’origine anthropique ?) venue araser plus en profondeur 40023, mais il est clair qu’à cet endroit le comblement de la fondation du massif (US 40024) venait recouvrir les blocs de 40039. Il faut supposer soit une fondation commune à 40007, 40023 et 40039, soit que les massifs 40007 et 40023 se soient surimposés à 40039, qui pourrait alors appartenir à une phase de construction antérieure.

40Au sud, l’allée 40023, longue d’au moins 8 m en ouest-est, forme un « H » avec un retour perpendiculaire de 1,60 m (nord-sud) par 0,90 m de largeur (comme 40007 au nord) situé également à 4 m plus à l’est du mur 40002. Juste à l’est de ce retour nord-sud, une séquence stratigraphique de remblais (40041, 40042, voire 40038) a été laissée sous forme de plot de 1,30 m² par la récupération des blocs de dallages à l’époque romaine (40019, 40021). Sa fouille a montré que 40023 avait été conçu comme une surface nivelée d’au moins 4 m² d’emprise à partir des 4 m à l’est de 40002, sur laquelle le dallage a été installé, sur une épaisseur de 0,40-0,50 m, au moyen de deux niveaux de blocs dont l’assise supérieure n’est pas connue. Cette hauteur est corroborée par la profondeur de la tranchée de fondation de 40023, ainsi que par celle de la séquence de remblais du plot stratigraphique dont la base est jointive (altimétrie, composition sédimentaire, présence de mortier de chaux) avec 40023.

41L’ensemble de ces données abonde dans le sens d’une vaste aire ouverte (ou semi-ouverte) fonctionnant à l’est du bâtiment situé sur le flanc ouest du kôm, et avec lequel était connecté un réseau de petites allées dallées se croisant à angle droit. L’emprise totale de ces aménagements n’est pas encore connue et pourrait appartenir à une cour arrière du bâtiment, à des dépendances de jardins, ou à un complexe plus important encore (avec portique ?).

1.2.2. Les vestiges antérieurs d’au moins un autre bâtiment en pierre

(fig. 15)

42La fouille a mis en évidence un autre bâtiment en pierres calcaires appartenant à une phase antérieure, qui explique la construction irrégulière de 40002. À 2,70 m au nord de l’angle que forment les murs 40002/40048, les restes de la fondation d’un puissant mur d’orientation est-ouest (40046) ont été mis en relation avec le mur 40015, découvert en 2018. De 1,30 m de largeur, 40046 est installé dans une tranchée de fondation large de 1,60 m et est visible sur 1,40 m de longueur à partir du parement ouest de 40002 qui vient se poser sur sa fondation. Cette dernière est grossièrement agencée au moyen de blocs bien taillés (dont certains récupérés comme l’attestent les traces de mortier blanc sur certaines faces) avec un double parement et un remplissage intérieur de plus petits fragments. L’angle droit que forme 40046 avec 40015 au nord a été en partie arraché par une récupération postérieure (40016-40017) datée de l’époque romaine.

43Selon toute vraisemblance, 40002, 40014 et 40048 se surimposent à au moins un autre bâtiment plus ancien composé des murs 40015, 40046 et 40050 et semble s’étendre vers l’est. 40046 et 40050 se trouvent précisément dans l’alignement ouest-est du massif 40023 rattaché à 40002 et qui recouvre encore toute la partie est du secteur. Or, la fouille d’un second plot stratigraphique de 4 × 1,50 m à l’ouest du mur 40002 a mis en évidence une partie de la tranchée de fondation du mur 40050. Le remblai accueillait en son sein deux vases de stockage de la période ptolémaïque (40034, 40035) vraisemblablement enterrés sous leur niveau de fonctionnement qui devait se situer juste au-dessus de 40033.

44Vu leur disposition spatiale et la composition sédimentaire du remblai, il est possible que ce niveau corresponde à un sol construit. En dessous sont apparues deux couches d’une importance décisive pour la compréhension de cette fenêtre stratigraphique : un possible niveau d’occupation (40043) limono-sableux, de couleur brun moyen, relativement compact et homogène, non fouillé cette année, recoupé par la tranchée de fondation (40051) du mur 40050, comblée par le remblai 40047. Ce dernier contenait, entre autres, des fragments d’enduits peints et de figurines en terre cuite, de la céramique et de la faune, et atteste donc la destruction d’une occupation antérieure au mobilier et au bâti riches. La tranchée de fondation est bien marquée, repérée sur 4 m de longueur ouest-est, pour une largeur oscillant entre 0,50 et 0,70 m, et une profondeur minimale de 0,80 m. Le mur 40050 qui y prend place est pressenti sur 8,40 m de longueur depuis l’angle est de 40002/40048, sur une largeur de 1,30 m et quatre assises au minimum de blocs de module moyen, souvent équarris et produisant des assises réglées. Il faut donc considérer que la séquence stratigraphique de la fondation de 40050, jusqu’à l’installation des céramiques 40034-40035, appartient à une même phase d’occupation, antérieure à l’ensemble des vestiges du bâtiment de la fin de l’époque hellénistique.

1.2.3. Les espaces domestiques ouest et central (époque hellénistique)

(fig. 15)

45Les autres fenêtres de fouille laissées entre les vestiges des structures de pierres sont encore trop réduites et distantes spatialement pour envisager leurs relations. Il apparaît cependant une cohérence d’occupations qui semblent davantage se rattacher au domaine domestique, que ce soit à l’ouest ou au centre du secteur.

46L’espace domestique ouest est d’une emprise de 4,20 m en nord-sud et d’environ 1,80 m en est-ouest, circonscrite par les murs 40002 à l’est, 40014 au nord, 40015 à l’ouest et 40046 au sud. Cet espace est situé stratigraphiquement plus bas que l’espace central du secteur et a subi l’installation profonde de ces structures en pierres. La fouille n’a que peu avancé dans cet espace par rapport à 2021. Un épisode de démolition (US 40026), caractérisé par des inclusions cendreuses et de brique crue décomposée, dont certains fragments se sont enfoncés dans les niveaux d’occupation sous-jacents, venait recouvrir l’arase d’une portion de mur en briques crues (40031), d’une fosse (40028) elle-même installée dans son massif, ainsi que d’un premier sol d’occupation (40030). Fosse 40028 et mur 40031 appartiennent à une phase d’occupation postérieure au niveau de sol 40030 mis en évidence.

47La partie dite centrale est, au nord et au sud, délimitée par les tranchées d’installation des massifs 40007 et 40023, à l’ouest par le mur 40002, à l’est par le mur 40039 et la fosse postérieure de récupération de matériaux (40037). Suite à l’extension de 2022, sa fouille a été poursuivie.

48Une fois les niveaux supérieurs (40001, 40004) retirés, la même séquence stratigraphique a été retrouvée en partie est : une démolition (ou remblai à base d’éléments de démolition) 40018, et l’exposition d’un premier sol 40020. Limono-sableux, de couleur brun-gris, homogène, mais plus compact dans sa partie ouest sud au niveau d’une légère dépression, il contenait des inclusions de nodules de charbon régulières et des fragments de céramique reposant à plat sur sa surface. Il recouvrait un deuxième sol (40040), fouillé avec ses recharges antérieures. De nature similaire à 40020, il est plus compact sur l’ensemble de son emprise et contient des nodules de charbon fréquents, de la brique crue décomposée de manière régulière, et parfois des inclusions cendreuses, avec du mobilier céramique ainsi qu’un peu de faune. Son épaisseur varie de quelques centimètres à près de 20 cm au centre, remplissant une large cuvette. La fouille s’est arrêtée en cours de dépose de l’US 40040, alors qu’un sol antérieur (40052), de composition sablo-argileuse, couleur beige-orangé, très compact et homogène, signale la poursuite de la séquence d’occupation.

2. Carte archéologique de Maréotide

Valérie Pichot, avec la collaboration d’Aude Simony, Ismaël Awad et Étienne Forestier

Responsable d'opération : Valérie Pichot (ingénieure de recherche CNRS, archéologue).

Participants : Aude Simony (céramologue, ingénieure de recherche, CNRS, UAR 3134 CEAlex) ; Ismaël Awad (ingénieur topographe-cartographe, CEAlex) ; Étienne Forestier (photographe-photogrammètre) ; Ragab El Wardany (opérateur topographe).

L’équipe de documentation du mobilier, qui est intervenue sur site le 3 novembre et du 5 au 7 décembre, était composée d’Hisham Aboud (photographies et dessins), Wael ElKashtoukhy (dessins), Ahmed Hassan (dessins) et Shadi Elwahsh (photographies).

Autorité nationale présente : Le MoTA était représenté par Ahmed Sayed Mohamed Taher Isa (Département des Antiquités d’Alexandrie) du 11 octobre au 9 novembre et par Souraia Abdel Bari Ghitany Ahmed (Département des Antiquités d’Alexandrie) du 9 novembre au 8 décembre 2022.

Tableau 1. Liste des sites prospectés en octobre-décembre 2022.

2.1. Secteur entre Huwareya et Bahig

(fig. 22)

2.1.1. GMR0231 – KR0148/KR0662/KR0695 (région d’Al-Mithaq)

51Le site est localisé à 1,15 km à l’ouest de GMR0230 et directement au sud de GMR0224 (associé à KR0148 et KR0662, prospecté en 2021), dont il est séparé actuellement par un canal. Il est associé en même temps à KR0148 (portion de l’angle ouest), à KR0662-2 (portion du talus sud) et à KR0695 (portion du talus nord et occupation associée).

52Le secteur, qui n’offre pas beaucoup d’informations fiables sur les cartes anciennes, a été très perturbé par sa mise en culture et ce, avant les années 1960. Les karms sont difficilement identifiables dans le paysage et les images satellites Corona 1965 nous donnent quelques informations qui restent néanmoins insuffisantes pour comprendre le secteur dans le détail : doit-on considérer GRM0224 et GMR0231 comme un seul et même site ? KR0148 et KR0695 sont-ils deux karms différenciés ou composent-ils un karm composite ? Ici c’est l’étude archéologique en prospection de surface qui permet de trancher ces questions.

53Le terrain présente trois zones qui livrent les vestiges de structures et de bâtiments. Elles sont séparées les unes des autres par des espaces vides offrant seulement en surface un sédiment orangé typique des karms de la région correspondant chacune aux vestiges d’un karm différent.

54La partie nord-est de GMR0231 correspond aux vestiges de l’angle ouest de KR0148, karm orienté nord-ouest/sud-est d’environ 540 m de longueur sur 340 m de largeur. Ce secteur présente en surface de nombreux vestiges de bâtiments enfouis (alignements de blocs et mortier, blocs épars) et les restes du talus visibles sur près de 14 m (fig. 23).

55À une soixantaine de mètres plus à l’ouest, se trouvent les vestiges de la partie orientale du talus sud de KR0662-2, partie sud d’un karm composite orienté nord/sud. Le talus a été en partie aplani, mais il se distingue encore par la présence du sédiment orangé typique (sur environ 170 m de longueur). On note la présence de nombreux blocs épars et de quelques alignements de blocs visibles en surface (fig. 24).

56À environ 70 m au sud-est, le troisième secteur (moitié sud de GMR0231) présente d’importants vestiges d’occupation situés sur le talus nord du karm KR0695 à proximité de son angle nord-est. Ce secteur livre de nombreux alignements de blocs et mortier, vestiges de bâtiments enfouis, des blocs épars en abondance et quelques fragments de colonnettes en marbre ou en calcaire local.

57L’ensemble du matériel céramique sur les trois secteurs est tout à fait homogène et est daté de la période romaine tardive et du début de l’époque islamique (amphores LRA 1, LRA 5/6, jattes à décor d’arceaux ou à bord digité). On notera la présence d’un élément daté de la période ptolémaïque (amphore cnidienne) dans la partie nord-est, et de quelques éléments datés du Haut-Empire (AE 4) dans les secteurs nord-est et sud-est.

2.1.2. GMR0232 – Mohamed Saad el-Sherbiny (propriété de) (région d’Al-Mithaq)

58Situé à près de 210 m au sud-ouest de GMR0231, cette légère proéminence couverte d’un sédiment pulvérulent orangé au milieu de parcelles agricoles se développe sur plus de 200 m nord/sud, entre deux promontoires rocheux (l’un au nord, l’autre à l’ouest). GMR0232 pourrait être le dernier vestige de l’angle nord-ouest du karm KR0695. La moitié nord du site a été fortement décaissée sur environ 2 m de hauteur et ne livre que quelques blocs épars et des fragments d’enduits dispersés le long de la bordure orientale. La partie sud du site se compose de deux parties. La zone la plus au sud est la moins lisible, recouverte d’un sédiment pulvérulent à l’est et d’une végétation importante à l’ouest, aucune structure n’apparaît en surface. La zone au nord a été légèrement décaissée par un bulldozer qui a raclé l’ensemble de la surface faisant apparaître de nombreux vestiges de bâtiments enfouis (fig. 25) : alignements de blocs en calcaire local et mortier, lignes d’enduit, sol recouvert de mortier gris. Cette zone est couverte de gros blocs épars, de fragments d’enduit blanc (parfois sous forme de concentration) et d’enduits rouges et de stuc plus rares, de nombreux fragments de mortier gris.

59Le matériel provenant de la zone de bâtiments est peu abondant, très érodé et fragmenté. Il est daté du Haut-Empire (amphore AE 4) et de la période romaine tardive au début de l’époque islamique (amphores LRA 1, LRA 5/6).

60Les promontoires rocheux ne livrent aucune trace d’aménagement antique. Quelques céramiques visibles sur leur pente viennent compléter celles découvertes en surface sur le secteur d’occupation. Si le promontoire nord offre un mobilier céramique abondant mais très fragmenté et non identifiable, le promontoire ouest livre en surface un matériel peu abondant daté de la période hellénistique (amphore rhodienne) à romaine tardive (amphore LRA 1).

2.1.3. GMR0238 – Hassan Hussein (propriété d') (région de Bahig)

61À l’extrémité orientale du village de Bahig, le site préservé s’étend environ sur 68 m nord-ouest/sud-est et 65 m nord-est/sud-ouest. Il est entouré de champs cultivés dont la mise en place a détruit la presque totalité du site initial. En effet, il correspond à une partie du talus ouest d’un karm repéré sur les images satellites Corona 1965 et aujourd’hui disparu.

62Ce site a fait l’objet de sondages de la part du MoTA dans les années 1990-1995. Il se présente sous la forme d’un kôm entouré d’une enceinte de parcellaire actuel et dont le pourtour a été décaissé lors de la mise en culture de ce secteur. Les vestiges les plus remarquables proviennent des zones sondées par le MoTA dans la partie centrale du kôm. À l’ouest le secteur livre les vestiges d’un pressoir qui se développe sur 16 m nord/sud avec au moins une zone de foulage et une potentielle cuve (fig. 26).

63À 14 m à l’est du pressoir on note les vestiges de bains privés dont seules deux pièces ont été fouillées : celle du sud, à laquelle on accède par le sud, possède deux baignoires disposées de chaque côté de la pièce ; celle du nord, à laquelle on accède par la pièce sud, possédait probablement une baignoire au nord-est (fig. 27). Le passage entre ces deux pièces montre encore deux phases d’enduit peint de très bonne qualité : un enduit brun doré et blanc recouvert par un enduit blanc et rouge.

64Le reste du site offre de nombreux alignements de blocs et d’enduit en surface, mais reste néanmoins, dans l’ensemble, peu lisible. On note la présence, d’une part, au nord-est du pressoir, d’un ou de deux bâtiments qui pourraient avoir une fonction de stockage, et d’autre part, au sud de la zone centrale occupée par le pressoir et les bains, d’un grand bâtiment d’une vingtaine de mètres de côté (fonction domestique ?).

65Le mobilier céramique est très abondant sur l’ensemble du site. Il est daté de la période ptolémaïque (amphore AE 2, écuelle), du Haut-Empire (sigillée ESA, cratère égyptien imitant le type Paphos 40, amphores AE 3 et AE 4) et de l’époque romaine tardive au début de la période islamique (amphores LRA 1, LRD, sigillées ARSW, jattes rubanées et jattes carénées).

2.2. Secteur de Qasimiya

(fig. 22)

2.2.1. GMR0246 – El-Sarahna (cimetière) (région d’Ezbet el-Sarahna)

66Localisé à 1,2 km à l’ouest du rond-point d’Huwareya, le site se compose d’un santon et d’un cimetière ancien encore utilisé. L’ensemble est installé sur une légère proéminence couverte d’un sédiment pulvérulent beige orangé, dernier vestige du talus sud d’un karm, visible sur les images satellites Corona 1965, orienté est/ouest, de 553 m sur 340 m.

67Des alignements de blocs et mortier, parfois appartenant à des murs très épais (fig. 28) apparaissent en périphérie du cimetière qui offre, quant à lui, de nombreux blocs épars ou en remploi ainsi que quelques fragments de colonnes. Le site semble continuer dans les parcelles privées voisines à l’ouest et à l’est. Il s’agit certainement d’une partie de la villa agricole qui gérait le karm auquel est aussi associé un atelier de production d’amphores du Haut-Empire AE 3 et AE 4 (GMR0063) repéré par J.-Y. Empereur et M. Picon dans les années 1980 (atelier 26), situé contre le talus ouest du karm à environ 300 m au nord-ouest.

68Céramiques et amphores de surface sont datés de la période ptolémaïque (céramiques à vernis noir, amphores AE 2, rhodienne, cnidienne et assiette à lèvre interne), du Haut-Empire (amphores AE 3 et AE 4, ESB), de l’époque romaine tardive et du début de la période islamique (amphore LRA 1, sigillées LRD…).

2.3. Secteur à l’est d’Huwareya

(fig. 22 et fig. 29)

2.3.1. GMR0228 – KR0691 (région d’Huwareya)

69À environ 2 km à vol d’oiseau au sud-est du rond-point d’Huwareya, le site préservé se compose de trois secteurs séparés par un canal et des champs labourés dont la mise en place a détruit en grande partie le site initial. L’ensemble correspond aux vestiges d’un karm rectangulaire allongé (KR0691) d’environ 690 m (nord-est/sud-ouest) sur 250 m (nord-ouest/sud-est), visible sur la carte satellite Corona 1965. Du karm, il ne reste que les trois secteurs composant GMR0228 et le site connu sous le nom de « Chapelle byzantine » (GMR0062) qui semble faire partie de son angle nord-ouest.

70Le premier secteur, situé au nord-est, en bordure de canal, qui faisait partie du talus nord du karm à proximité de l’angle nord-est, est une parcelle (88 m × 65 m) surélevée par rapport aux terres agricoles environnantes, sur laquelle deux zones sont à différencier. La première qui correspond aux deux-tiers ouest semble être le résultat du décaissement partiel de la parcelle sur environ 1,50 m de hauteur. Ce décaissement semble avoir été effectué anciennement, puisqu’il est nettement identifiable sur les images satellites des années 1960. Aucune structure n’est visible en surface : la végétation rase mais relativement dense et le sédiment pulvérulent recouvrent l’ensemble. Des blocs épars sont présents surtout à l’est à proximité de la seconde zone. La stratigraphie ouest du site offre un faciès de talus de karm sans autre structure apparente. Un puits contemporain, aujourd’hui abandonné, est installé en bordure sur l’axe de la stratigraphie à environ 32 m de la piste qui longe le canal au sud.

71La seconde zone correspond à la bordure orientale (entre 9 et 15 m de largeur) de la parcelle. Elle présente en surface le niveau de sol originel du site issu de l’effondrement de bâtiments antiques. Le sédiment pulvérulent provenant de l’effondrement de murs en briques crues empêche la lecture des structures, en revanche on note de nombreux blocs épars ; les stratigraphies ouest et est (issues des décaissements pour la mise en culture) révèlent à certains endroits la présence de structure en briques crues (murs, sols ?) (fig. 30). Cette zone d’occupation devait se poursuivre vers l’est mais l’ensemble a été décaissé entre les années 1965 et 1985.

72Le deuxième secteur est situé à une soixantaine de mètres au sud, de l’autre côté du canal. Il correspond une butte d’environ 4 m de haut, vestige d’une portion du talus sud du karm (fig. 31).

73Le troisième secteur, autre vestige du talus sud, est localisé à 230 m au sud-ouest et à environ 178 m au sud-est de GMR0062. La surface de cette proéminence allongée de plus de 80 m le long d’un petit canal secondaire est composée d’un sédiment pulvérulent caractéristique des karms du secteur et est recouverte à certains endroits de couches résultant du dragage du canal et de dépotoirs actuels.

74Sur l’ensemble du site quelques tessons (surtout des fragments de panses) très érodés ont été relevés. Les éléments identifiables sont datables du Haut-Empire (Amphore Égyptienne) et de la période romaine tardive au début de l’époque islamique (LRA 1).

2.3.2. GMR0247 – El-Sheikh Goubran (cimetière) (région d’Huwareya)

75Localisé à 1,7 km à l’est du rond-point d’Huwareya, ce site se compose d’une proéminence, restes d’un petit kôm, occupée par un santon et un cimetière ancien encore utilisé et en cours de réaménagement. Le santon (structure architecturale) est en grande partie détruit (fig. 32) : il s’agissait d’un enclos entourant la tombe du Sidi et les tombes associées, dont les murs étaient construits en blocs calcaires de remploi. L’entrée se faisait par le nord-est. L’enclos possédait une niche semi-circulaire (Mihrab ?) encore visible dans ce qui reste du mur d’enceinte au sud-est. La tombe du Sidi est accompagnée de celles de cinq membres de sa famille.

76La proéminence sur laquelle est installé le cimetière est vraisemblablement un site antique, mais le nombre et la densité des sépultures empêchent toute lecture de vestige en surface. En revanche, de nombreux exemplaires de fragments de colonnes, colonnettes et chapiteaux ainsi que de très nombreux blocs sont visibles, épars ou réemployés dans les tombes sur l’ensemble du site. Le mobilier de surface est plutôt abondant et s’échelonne entre la fin de la période romaine tardive et l’époque fatimide (glaçure).

2.4. Secteur de Borg el-Arab Qadim

(fig. 22 et fig. 33)

2.4.1. GMR0256 – Sidi Mohamed el Garâri (région de Nag'a Halis)

77Localisé à 760 m au sud-sud-est de Sidi Weheida (GMR0255), ce site présente les derniers vestiges (angle nord-est) d’un karm visible sur les images satellites Corona 1965 mais non topographié sur les cartes anciennes : la carte de 1940 topographie seulement un kôm aux dimensions du site. Sur les cartes anciennes nous trouvons la mention d’un cimetière et d’un bîr (1914), de Sîdi Mûh el Garâri, de la Sanyet el-Habbâbiya (1940).

78Préservé par la présence d’un grand cimetière et d’un santon dominant le paysage, et entouré de parcelles agricoles décaissées, le site se compose de cinq secteurs.

79Au nord on note les vestiges de la sanya el-Habbâbiya et d’aménagements hydrauliques associés : l’ensemble est abandonné et en grande partie caché sous une importante végétation. Dans le prolongement de ce secteur, au sud, une zone aplanie fait office d’entrée du site : on y note quelques murs en surface.

80À l’ouest, un troisième secteur se compose d’un grand kôm qui est, d’une part, la portion conservée du talus nord du karm et, d’autre part, un secteur d’occupation installé contre le versant extérieur du talus. Il est occupé par un santon et grand cimetière ancien encore utilisé (fig. 34) et livre quelques vestiges de murs en surface (alignements de blocs, lignes d’enduit), de nombreux blocs épars ou en remploi dans les tombes.

81Un peu plus à l’est, le terrain est occupé par un petit kôm sur lequel on trouve une tombe isolée (sidi ?) et qui montre une importante concentration de céramiques, et quelques murs en surface.

82Le cinquième secteur, le plus à l’est, s’étend vers le sud sur 136 m et se compose d’un promontoire rocheux sur lequel se développe un important secteur d’occupation (angle du karm) et contre lequel s’appuie la partie nord du talus oriental du karm (fig. 35). Si la partie nord est illisible, couverte de très nombreux blocs épars brouillant la lisibilité des vestiges, la partie sud livre, en surface ou dans quelques sondages, les vestiges de nombreux bâtiments (alignements de blocs et mortier, lignes d’enduit, sols en mortier). On note l’existence au sud-est d’un bâtiment associé à des canalisations (dont une partie a été retrouvée dans des déblais au sud) partiellement visible en surface (fig. 36).

83Le secteur ouest est celui qui a livré le plus de mobilier : les nombreux gros fragments de céramique sont datables de la période romaine tardive (amphores LRA 1, LRA 5/6, AE 3T, plats de cuisson, coupes du groupe O) à la période fatimide (glaçures). Sur le reste du site, le matériel est moins abondant mais présente une datation similaire.

2.5. Secteur de Borg el-Arab Gedida

(fig. 33)

2.5.1. GMR0257 – Karm Soukkarah (Cultnat 110335 ; région de Hod Sukkarah)

84Localisé à 4,5 km au sud-ouest de Sidi Mohamed el-Garâri (GMR0256), ce site s’étend sur plus de 250 m nord/sud et 140 m est/ouest à l’entrée d’un village. Il correspond aux derniers vestiges de l’angle sud-est d’un karm (KR0038). Topographié sur les cartes du Survey of Egypt de 1914 et de 1940, très reconnaissable sur les images satellites Corona 1965, il a aujourd’hui presque totalement disparu en raison des différents aménagements du secteur surtout à partir du début des années 2000. Le karm était orienté nord-nord-est/sud-sud-ouest et mesurait 783 m sur 592 m.

85Les cartes anciennes mentionnent un bîr au niveau de l’angle sud-est (1914, 1930), ou une « sanyet sukkara » (1940) au même endroit. À une cinquantaine de mètres à l’est d’une ancienne maison de Bédouin (zone centrale du site), le puits et le système hydraulique (petits bassins, canalisations) sont encore visibles et bien conservés. On les mettrait volontiers en relation avec un système de remontée de l’eau de type shadouf ou puits à balancier plutôt qu’avec une sakieh.

86Le site est constitué de plusieurs secteurs qui livrent les vestiges de très nombreuses structures en surface sous la forme d’alignements de blocs et mortier, de lignes d’enduit, de sols en mortier… Dans sa partie nord, le site a été fortement décaissé au nord et à l’est. Le secteur se compose d’un grand kôm, zone d’occupation accolée au talus oriental du karm et dont l’élévation a été protégée par la présence d’un ancien cimetière encore utilisé. Les nombreuses tombes brouillent en surface la lecture de possibles structures enfouies, mais on remarque de très abondants blocs épars ou en remploi dans les tombes. Sur le versant nord-ouest du kôm, un bâtiment est nettement visible en surface (murs, sol en mortier) : il pourrait s’agir d’un pressoir (fig. 37). De nombreux bâtiments aux pièces allongées (fonction de stockage ?) apparaissent au pied du kôm, au sud et surtout à l’est, tandis qu’à l’ouest on identifie encore les restes du talus du karm. Le matériel vu en surface sur ce secteur est peu abondant. Il est daté entre la période ptolémaïque (amphore cnidienne) et le Haut-Empire (amphore AE 4, amphore de Cos, cratère égyptien d’imitation Paphos 40).

87La partie centrale du site se compose de deux ensembles : une zone occupée par une ancienne maison de Bédouin (maison et cour) qui semble installée sur un bâtiment antique et à 25 m au sud la seconde zone traversée par une piste. Elle livre plusieurs petites proéminences qui montrent en surface des sols en mortier, des alignements d’enduit, de blocs, et qui correspondent chacune à un bâtiment enfoui (fig. 38). La céramique retrouvée dans ce secteur est peu abondante. Aux abords de l’ancienne maison de Bédouin elle est présente sous forme de gros fragments peu érodés, tandis que plus au sud le matériel est très fragmenté. Sur l’ensemble du secteur le mobilier est daté de la période romaine tardive et début de la période islamique (amphores LRA 1, LRA 4, LRA 5/6, sigillées LRD, jatte).

88Le secteur sud est occupé par une proéminence, reste du talus du karm, préservé par un ancien cimetière. Il livre en nombre des blocs épars ou en remploi, des fragments de colonnes, et des vestiges de structures enfouies. Le matériel est peu abondant et très fragmenté, il est exclusivement daté de la période romaine tardive et du début de l’époque islamique (amphores LRA 1 et LRA 5/6, jattes calcaire, sigillées LRD). À l’est, de l’autre côté de la route menant au village, le secteur se poursuit. Légèrement décaissé, il sert de dépotoir aux habitants de la zone et montre les vestiges d’un bâtiment sur une petite proéminence (au nord) et de nombreuses lignes d’enduit et alignements de blocs visibles en surface. Seuls quelques éléments datés de la période romaine tardive et du début de l’époque islamique ont été identifiés (amphore LRA 1, plat du groupe K).

2.5.2. GMR0258 – Zawyet Meheisna (Cultnat 110311 ; région de Borg el-Arab)

89Localisé à 1,7 km à l’ouest de Karm Soukkarah (GMR0257), le site correspond aux derniers vestiges d’un karm composite (KR0033), composé de trois karms : un grand carré KR0033-2 encadré par deux autres : à l’est un plus petit rectangulaire KR0033-3, à l’ouest un moyen carré KR0033-1 (fig. 39). L’ensemble était orienté nord-est/sud-ouest et mesurait 1,13 km sur 577 m maximum. Il est topographié partiellement sur la carte du Survey de 1914 avec les mentions « bîr » et « Zâwyet el-Miheisni » (à proximité du talus nord) et sur la carte de 1920/1930 avec les mentions d’un puits sec, de « Dauwâr Hamad » (à proximité du talus nord), et « Sîdi Shîbûb » (au nord du village). Il est topographié complètement sur la carte de 1940 avec les mentions « Sanyet el Miheisna » et « Dauwâr Hamad » (à proximité du talus nord).

90Sur les quatre secteurs, derniers vestiges du karm aujourd’hui disparu par la mise en culture de la zone, trois secteurs se situent au nord : deux sur le talus nord (un à l’ouest, l’autre à l’est) et le troisième, entre les deux premiers, extérieur au karm et accolé au talus nord. Le quatrième secteur se situe au sud du site.

91Le secteur nord-ouest correspond à l’angle nord-est de KR0033-1. On suit le talus sur plus de 90 m (fig. 40). On note les traces d’une structure enfouie dans la partie centrale sous la forme de mortier et pierres en surface surtout sur la pente nord. L’extrémité orientale du talus livre de nombreux vestiges de structures antiques : trois proéminences correspondent à des bâtiments enfouis et montrent des sols en mortier gris, des alignements de blocs et d’enduit. Plus au nord, sur la partie plane qui borde le talus du karm, une zone légèrement surélevée est partiellement occupée par un cimetière actuel. Cet espace offre en surface les vestiges d’un grand bâtiment difficilement interprétable en l’état : alignements de bloc et d’enduit, présence de nombreux fragments de mortier gris et d’enduit rouge et blanc.

92Le matériel est rare sur le talus. En revanche sur les petites proéminences associées, il est abondant mais très fragmenté. Il couvre les périodes romaine (amphore AE 4) et romaine tardive au début de l’époque islamique (amphore LRA 5/6, LRA 1, plats de cuisson, marmites).

93Le secteur nord-est correspond à une partie du talus nord et à l’angle nord-est de KR0033-2. La zone sert de dépotoir au village. Le talus du karm en partie décaissé semble avoir été étalé au nord pour former une zone plane à proximité du village qui sert de place et de terrains de football. Le talus a été coupé à certains endroits, mais on le suit facilement sur 250 m environ (fig. 41). La grande partie du secteur offre peu de vestiges autres que le talus lui-même, excepté un fragment de sol et quelques blocs dans le talus dans la partie centrale du secteur. En revanche l’extrémité orientale du secteur (partie de l’angle nord-est) livre de nombreux vestiges de bâtiments enfouis (alignement de blocs et mortier, lignes d’enduits, sol en mortier gris avec grande quantité de coquillages, mosaïque en place, etc.). Le matériel y est abondant mais très fragmenté. Il est daté du Haut-Empire (amphores AE 4) et surtout de la période  omaine tardive/début de l’époque islamique (amphores LRA 1, LRA 4, LRA 5/6, sigillées du groupe O, ARSW, LRD).

94Le secteur nord central est situé à une centaine de mètres au nord-est du secteur ouest et à 70 m au nord-ouest du secteur oriental. Il s’agit d’un ensemble de 142 m nord/sud et 135 m est/ouest, qui se développe à l’extérieur du karm mais accolé au talus nord, au niveau de l’angle nord-ouest de KR0033-2. Il est composé de trois kôms qui ont été protégés par d’anciens cimetières, dont un seul est encore utilisé (kôm sud, sur lequel est installé le santon). Dans l’ensemble la lisibilité de surface est médiocre : les kôms livrent de très nombreux blocs épars et de fragments d’enduit et de mortier gris, qui, associés aux nombreuses tombes, brouillent la lisibilité du terrain. On remarque cependant à certains endroits des bâtiments enfouis sous la forme d’alignement de blocs et mortier et/ou de lignes d’enduits, de sols en mortier (fig. 42). Généralement ces vestiges, qui indiquent que le site était densément occupé sur l’ensemble de sa surface, apparaissent dans les zones autour des cimetières (sur le versant et au pied des kôms), là où les traces d’occupation anciennes ne sont pas effacées par la présence des tombes. On note de nombreux fragments de colonnes ou colonnettes en marbre ou en calcaire local errants ou en remploi dans les tombes.

95Le matériel associé à ce secteur est abondant mais très fragmenté, principalement concentré dans la zone du cimetière contemporain. Il est daté de la période romaine tardive et du début de la période islamique (nombreuses amphores LRA 5/6 et LRA 1, jattes rubanées et sigillées LRD).

96Le secteur sud correspond aux restes du talus sud du karm KR0033-2, qui a été en grande partie décaissé dans son épaisseur. La partie conservée est de plus de 6 m de hauteur à certains endroits et on suit encore le tracé du talus sur environ 340 m. La partie orientale de 205 m de longueur est la mieux préservée (fig. 43). Un seul fragment de céramique a été trouvé dans ce secteur : il s’agit d’un fond d’amphore égyptienne d’époque gréco-romaine.

2.6. Karm Hûd (KR0023) : secteur d’el-Gharbâniyât

(fig. 33)

97Karm Hûd était un des plus grands karms de la région. Il s’agit d’une structure agricole talutée composite topographiée sur les cartes anciennes (1914, 1940) encore bien visible sur les images satellites Corona 1965 et sur Landsat 1985. Il était composé de quatre karms alignés, KR0023-1 à 4 d’ouest en est, auquel s’ajoutait au sud un grand karm rectangulaire, KR0023-5 (fig. 44). Situé dans l’inter-crête entre la ride IV et V au sud-ouest du village d’El-Gharbânyât, cette structure agricole était orientée nord-est/sud-ouest et faisait plus de 3 km de longueur sur plus d’1,5 km de largeur maximale. Ce karm a été en grande partie détruit par la mise en culture du secteur, surtout à partir des années 1990-2000. Sa destruction continue actuellement avec l’aménagement d’un grand canal nord/sud qui le traverse. Les vestiges conservés du karm se répartissent sur six sites (GMR0240 à GMR0245). Les éléments de datation indiquent une occupation large de l’époque hellénistique à l’époque romaine tardive et début de la période islamique.

2.7. Secteur occidental, crête V, au sud-ouest de Karm Hud

(fig. 33)

2.7.1. GMR0259 – Sidi Abou el-Kassar (région d’el-Hammam)

98À 3,9 km au sud-ouest de Karm Hûd C, ce site est occupé par un santon associé à un cimetière installé sur un kôm qui a été en partie détruit par la mise en culture du secteur à partir de 2007 et par le tracé d’un canal qui longe le site à l’ouest. Il a fait l’objet de sondages de la part du MoTA en 1998. Aujourd’hui le kôm conservé fait environ 50 m de diamètre. Le santon est en grande partie détruit et le cimetière abandonné. Une partie des gravats provenant du creusement du canal a été déposée sur la partie ouest du kôm, ce qui contribue à la difficulté de lecture des vestiges enfouis. Quelques murs apparaissent en surface (alignements de blocs et mortier), surtout dans les sondages : le plus remarquable, situé dans la partie occidentale du site, fait plus d’un mètre d’épaisseur et porte encore de l’enduit blanc de chaque côté (fig. 45). On note la présence de nombreux blocs épars, de fragments d’enduit, et de marbre blanc.

99Le matériel céramique, très fragmenté et peu abondant, est daté de la période romaine tardive et du début de l’époque islamique (jattes à décor peint, amphores LRA 1, LRA 5/6, marmites à bord biseauté).

2.8. Photogrammétrie

100Les protocoles de photogrammétrie ont été mis au point en tenant compte d’une part des contraintes de terrain (ensoleillement, luminosité, hauteur des vestiges, …) et des équipements utilisés (appareil Sony A7III avec une focale 16 mm, perche de 3,50 m à 4 m ; flash cobra sur pied avec deux déports à la chaîne dans partie souterraine de la carrière) et d’autre part des objectifs visés.

2.8.1. La carrière GMR0178

2.8.1.1. Objectifs

101Obtenir un modèle complet de cette carrière rectangulaire (c. 40 m sur 25 m), qui se développe en profondeur sur une douzaine de mètres et qui est dotée d’une salle souterraine reliée à la surface par deux puits, et connectée à la partie principale par une troisième ouverture située dans la partie basse de la paroi nord. Le modèle géoréférencé doit permettre d’avoir une vision générale du site, de faire des mesures à grande et moyenne échelle pour analyser les décrochements, ainsi qu’à très petite échelle de façon à pouvoir étudier les traces d’outils.

2.8.1.2. Traitement prévisionnel 

10210 002 photos. L’ensemble est traité avec le logiciel Metashape. En alignant toutes les photos, en intégrant les références (points topographiques, marqueurs sur les échelles), en nettoyant les points et en optimisant l’alignement, on génère ensuite un modèle en capacité maximale. On obtient un modèle général d’environ 170 millions de polygones (fig. 46). À partir de ce modèle, on cherchera dans un second temps à obtenir des détails (sur des surfaces aux dimensions très différentes). Ces morceaux choisis sont sélectionnés au préalable, certains sont des sous-parties des mêmes ensembles. Le modèle sera dupliqué autant de fois qu’il y a de morceaux choisis (19), puis découpé et masqué en fonction du morceau. Pour chacun, on génère ensuite un nouveau modèle en capacité maximale, variant de 100 à 170 millions de polygones. Ainsi les 20 modèles obtenus se correspondent parfaitement au niveau de l’échelle comme du géoréférencement et permettent d’avoir une excellente résolution à grande, moyenne et petite échelle, comme souhaité pour l’étude générale du site, l’analyse des décrochements et l’étude des traces d’outils utilisés pour l’exploitation de la carrière.

2.8.2. Le talus sud de Shaher Rowhoh (GMR0177)

2.8.2.1. Objectifs

103Réaliser un modèle 3D du talus sud du karm de Shaher Rowhoh. Cette acquisition avait plusieurs finalités : l’enregistrement de sauvetage (cette partie étant en cours de destruction) ; l’élaboration d’un protocole d’acquisition et d’évaluation du temps nécessaire à sa mise en œuvre ; et trouver une manière visuellement parlante de représenter ce type de structure.

2.8.2.2. Pré-traitement et traitement prévisionnel

1044 505 photos. L’ensemble est traité avec le logiciel Metashape. L’aire couverte lors de cette mission a été d’environ 2 ha. Le modèle dans sa vue générale semble totalement dépourvu de relief tellement il est étendu et la pente douce, donnant une impression différente de celle qu’on a sur le terrain à proximité du talus (fig. 47). Néanmoins, il permet d’explorer de nombreuses pistes graphiques complémentaires afin de représenter le karm de manière pertinente et d’affiner le protocole et les objectifs pour la partie nord-ouest du karm plus difficile à effectuer car au moins deux fois plus vaste et non entrecoupé de portions négligeables.

2.9. Conclusion

105Notre recherche menée dans la région de la Maréotide montre d’année en année toute la richesse archéologique et patrimoniale de cette partie du territoire alexandrin et l’urgence que revêt le travail de terrain pour documenter cette région en cours de destruction rapide et irréversible. Le secteur entre Huwareya et Bahig, qui a demandé trois missions de prospection pour être totalement inventorié et documenté, a livré 49 sites répartis sur 2 786 ha, et illustre une longue occupation de l’Ancien Empire (VI^e dynastie) à l’époque fatimide, avec une forte densité aux époques hellénistique, romaine et romaine tardive.

106La mission de prospection 2022 montre que les zones de Borg el-Arab et d’el-Gharbâniyât offrent encore un potentiel important pour l’étude des karms dont un grand nombre n’ont pas été topographiés sur les cartes anciennes, mais sont nettement identifiables sur la carte satellite Corona 1965. Bien que ces structures agricoles soient aujourd’hui en grande partie détruites dans ces secteurs, de nombreux sites offrent encore des portions de talus de karms bien préservées et des zones d’occupation associées très riches en vestiges.

107Enfin cette mission a permis de continuer à documenter les santons de Maréotide. Sur les 194 santons répertoriés d’après les différentes séries de cartes de 1801 à 1940, 55 se trouvent dans la zone couverte par l’autorisation de prospection. L’étude des cartes satellitaires montre que, parmi ces 55 santons, 13 avaient déjà disparu en 2017 et 11 étaient dans un état de conservation incertain. Au total 35 santons ont été inventoriés et documentés par les prospections menées par le CEAlex entre 2016 et 2022 : 28 répertoriés existant par l’étude des cartes, 6 incertains et un disparu.

3. Opérations d’aménagement, de restauration et de valorisation

3.1. Construction du mur d’enclos du dépôt archéologique de Tabiyet Nahassin

3.2. Mise en place dans le Musée gréco-romain des mosaïques restaurées par le laboratoire de restauration du CEAlex

109L’équipe de restaurateurs du CEAlex est mobilisée depuis le mois de juillet 2022 pour préparer l’exposition dans les nouvelles salles du Musée gréco-romain des mosaïques, qu’elle avait restaurées dans les années antérieures. Il s’agit non seulement de mosaïques mises au jour par le CEAlex (mosaïque à la Méduse du théâtre Diana) et par le MoTA (mosaïque de Persée et d’Andromède), mais aussi de découvertes plus anciennes conservées au Musée gréco-romain, telle la mosaïque nilotique de Thmuis (fig. 50) et la mosaïque du Chasseur.

3.3. Les 13^es journées du patrimoine alexandrin

110Les treizièmes journées du patrimoine alexandrin, coordonnées par le CEAlex depuis 2010, se sont tenues du 4 au 11 novembre 2022. Intitulées « Aller-Retour Alexandrie » (fig. 51), elles invitaient les partenaires à explorer le double voyage Alexandrie-Europe-Alexandrie des milliers de voyageurs, partant d’Alexandrie pour les métropoles méditerranéennes et européennes, passant par l’Égypte pour se rendre sur les lieux saints, venant en Égypte pour accomplir une mission – diplomatique, commerciale, scientifique – ou pour satisfaire la curiosité de découvrir le pays et ses habitants.