Données scientifiques produites :
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1Nous souhaitons remercier explicitement les autorités de la région de Louqsor pour leur soutien : Fathi Yasseen, directeur général des Antiquités de Haute Égypte, Mustafa es-Saghir, directeur de Karnak et de l’avenue des sphinx, ainsi qu’Abd el-Khalek Abd el-Hamid, directeur du temple de Karnak. Nous tenons également à exprimer notre gratitude à Ghada Ibrahim Fouad, chef des missions étrangères à Karnak, et Ahmed Dowi, directeur général des magasins à Karnak. Enfin, nous remercions vivement notre collaborateur, Tarek Ahmed Radwan, pour son aide dans la manipulation des objets.
2En raison de la pandémie de Covid-19, notre mission n’a pu réaliser aucune campagne sur le site de Karnak en 2021.
- 1 Voir Hein 2020 ; Hein 2021.
- 2 Jacquet-Gordon 1988, pl. LVII.
3Lors des saisons précédentes1, une attention particulière avait été portée aux fragments de reliefs en calcaire provenant de la décoration murale du Trésor de Touthmosis Ier. Leur qualité, correspondant au style du début de la XVIIIe dynastie, est des plus raffinées. Des traces de peinture, comme sur l’abeille de la fig. 1, sont parfois encore visibles2. La documentation photographique et le stockage de ces reliefs ont été achevés en 2020 et une base de données est en cours d’élaboration.
Fig. 1. Fragments de relief C148/20+C158/21+C182/7+12 provenant de la scène 1 du magasin 6 du Trésor de Touthmosis Ier (I. Hein).
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4Le site de Karnak-Nord a été exploré de 1970 à 1978 et de 1986 à 1992 sous la direction de Jean Jacquet. Un grand nombre d’objets ont été mis au jour dans la zone située autour du Trésor de Thoutmosis Ier. Après les fouilles, une grande partie de ce matériel a été déposée dans des réserves construites sur le site. En 2013, en raison d’investigations menées dans le district de Montou, l’Ifao, à la demande du MoTA et en collaboration avec l’Université de Vienne, a déplacé le matériel. Ce travail a été l’occasion de vérifier les inventaires et de produire une couverture photographique numérique de l’ensemble des objets.
5Le Trésor, qui date du début de la XVIIIe dynastie, recoupe des couches plus anciennes, du Moyen Empire et de la Deuxième Période intermédiaire. D’après la culture matérielle, l’occupation du site s’étend sur une très longue période allant du Moyen Empire à la période romaine3.
- 4 Jacquet 1983 ; Jacquet 1994 ; Jacquet 2001 ; Jacquet-Gordon 1988 ; Jacquet-Gordon 1999 ; Jacquet-G (...)
6Six volumes consacrés au site ont été publiés par Jean Jacquet et Helen Jacquet-Gordon4, qui y ont travaillé jusqu’en 2010. Ils portent sur différents types d’objets, tels que les fragments de statues, les fragments de reliefs, ou encore sur la typologie de la céramique. Cependant, certaines catégories sont restées inédites, comme les objets non céramiques. L’objectif du travail en cours est de les recenser, et d’enregistrer les inventaires existants dans une base de données numérique afin de les rendre accessibles en ligne.
7Le premier objectif de la campagne 2022 était de poursuivre la documentation photographique des petits objets non céramiques, qui, à l’exception de quelques pièces, sont restés inédits jusqu’à présent. Il s’agit essentiellement d’objets en faïence, en pierre, en silex, en métal et en argile.
8Le deuxième consistait à numériser les archives conservées à l’Ifao. En effet, l’ensemble des objets dits « petits » ont été inventoriés sur un registre papier par H. Jacquet-Gordon lors des travaux de terrain. Une partie a été photographiée en noir et blanc dans les années 1980 et 1990. Pour certains, des dessins ont également été réalisés, dont quelques-uns mis au propre à l’encre de Chine. Ces documents ne couvrent cependant pas l’ensemble des découvertes, de sorte qu’il faut établir une comparaison de ces fonds documentaires dans des listes de concordance. En 2022, ils ont été numérisés et enregistrés par Irmgard Hein et Gerda Esche, avec l’aide de Sherouk Shehata, dans une base de données en vue de leur publication. Ce travail n’est pas encore terminé puisque les journaux de fouilles et les livres d’inventaire manuscrits doivent encore être numérisés. Rédigés dans un format spécial, ils nécessitent un traitement particulier.
9Au cours des missions 2019 et 2020, un total de 749 petits objets faits en divers matériaux ont été enregistrés, le groupe le plus nombreux étant constitué d’objets en faïence (257 objets).
10Au cours des quatre semaines de notre saison 2022, un total de 2 732 objets (fig. 2) ont été documentés et enregistrés, le groupe le plus important étant constitué de silex, avec 1 313 pièces, soit près de 48 % des objets enregistrés. Les autres objets se répartissent en six groupes, formés de 170 à 393 objets chacun : 393 objets en faïence (soit 14 %), 192 objets en métal (7 %), 192 objets en argile (7 %), 201 objets en terre cuite (7 %), 170 empreintes de sceaux (6 %) et 271 objets en matériaux divers (10 %).
11Tout le matériel est enregistré et décrit dans des fichiers Excel, qui seront ultérieurement intégrés dans une base de données. Au cours de cette campagne, nous avons pu photographier et fournir de brèves descriptions des objets, pour qu’ils soient identifiés de manière unique. Tous les objets ont été ensuite conditionnés dans des petites boîtes en plastique conservées dans de grandes caisses en bois.
Fig. 2. Petits objets documentés en 2022 : graphique par groupe de matériaux (I. Hein).
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- 5 Jacquet 1983, p. 84-90, de XVIIIe dynastie ; Jacquet 1994, p. 12, de la Deuxième Période intermédi (...)
12Le groupe de matériaux le plus important numériquement est celui des objets lithiques, qui inclut principalement des outils en silex, mais aussi des restes d’autres outils en pierre et des déchets de matières premières. La plupart des silex sont des outils, tels que des lames de faucille, des racloirs ou des couteaux. Seuls quelques objets sont complets. Une quantité considérable de matériaux bruts et de déchets a également été trouvée, ce qui démontre que la zone de Karnak-Nord était utilisée comme atelier5 (fig. 3, 4 et 5).
Fig. 3. Silex avec des retouches latérales au niveau du côté dentelé, recto, KNUV 2022-1387, inv. no A2554 (photo 2230832, A. el-Gamal).
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Fig. 4. Silex avec des retouches latérales au niveau du côté dentelé, verso, KNUV 2022-1387, inv. no A2554 (photo 2230833, A. el-Gamal).
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Fig. 5. Dessin encré du silex inv. no. A2554, signé « R.M. » en date du « 25-3-82 » (archives Karnak-Nord, Ifao).
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- 6 Jacquet 1994, p. 25-26.
13Des restes de nodules d’agate et de cornaline font également partie du corpus. Il s’agit de perles (colliers et autres bijoux notamment) probablement fabriquées dans des ateliers locaux, comme l’avait déjà proposé J. Jacquet, vraisemblablement au cours de la XIXe dynastie, à une époque où le bâtiment du Trésor était réutilisé6. La présence, parmi les silex, d’un grand nombre d’outils de perçage nécessaires à la production de telles perles (fig. 6-7) renforcent cette hypothèse.
Fig. 6. Silex, perceur, recto, KNUV 2022-198, inv. no B1901 (G. Heumesser).
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Fig. 7. Silex, perceur, verso, KNUV 2022-198, inv. no B1901 (G. Heumesser).
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14393 objets en faïence ont été documentés au cours de la saison 2022. Ils peuvent être attribués à différents groupes. La plupart sont des amulettes en forme d’yeux-oudjat (28 pièces), comme celle des fig. 8-9 modelée sur deux faces. Sur la face avant, la coloration noire de la pupille et du sourcil est encore visible, tandis que le verso ne montre que la glaçure verdâtre monochrome.
Fig. 8. Œil-oudjat en faïence, recto, KNUV 2022-0748, inv. no A212 (photo 2231887, A. el-Gamal).
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Fig. 9. Œil-oudjat en faïence, verso, KNUV 2022-0748, inv. no A212 (photo 2231888, A. el-Gamal).
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15Il existe également des fragments de petites sculptures en faïence, comme la partie inférieure d’une Isis assise avec l’enfant d’Horus sur ses genoux (fig. 10-11), en faïence verdâtre. La partie supérieure de cette petite sculpture a disparu, mais la partie inférieure, d’environ 10,5 cm de haut, est conservée. Elle représente le siège de la déesse installé sur un socle rectangulaire, avec les jambes d’une figure enfantine sur ses genoux. Deux trous de fixation en lien avec le processus de fabrication sont visibles à la base du socle.
Fig. 10. Partie inférieure d’une figure en faïence assise, probablement Isis avec l’enfant Horus, KNUV 2022-2465, inv. no A506 (photo 2233817, A. el-Gamal).
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Fig. 11. Dessin encré de la partie inférieure d’une figure en faïence assise, probablement Isis avec l’enfant Horus, KNUV 2022-2465, inv. no A506. Dessin daté de « 06/93 » et signé « Azim » (?).
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16Les perles en faïence sont de formes diverses : discoïdale, lenticulaire ou sphérique. On trouve également des fragments de bijoux, notamment des bagues dont l’élément décoratif pourrait avoir servi à sceller. Parmi eux, un exemplaire en faïence verdâtre (fig. 12), dont seule la moitié est conservée (L. 2,7 cm), conserve des signes qui peuvent être interprétés comme t3wj. Le reste paraît être des écritures fantaisistes.
Fig. 12. Fragment de bague sigillaire, faïence, KNUV 2022-0754, inv. no A406 (photo 223189, G. Heumesser).
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17Nous avons pu documenter les restes de quelques objets en bronze (166). La plupart d’entre eux sont incomplets et fortement corrodés. Il s’agit de clous, de petites aiguilles et des petites tiges, des couteaux ou des fragments de garnitures de meubles en bronze. Plusieurs morceaux de scories sont également présents et laissent suggérer l’existence d’un atelier de métallurgie à proximité.
Par ailleurs, des fragments de 16 petites figurines en bronze figurent à l’inventaire. Toutes sont des représentations de divinités, conservées jusqu’à une hauteur maximale de 8,3 cm. La plupart sont en mauvais état de conservation, en raison de leur stockage dans le sol, et toutes présentent des signes de corrosion. Parmi elles se trouve une figurine d’Osiris (fig. 13), dont les pieds sont manquants, coiffé de la couronne-atef, les bras croisés sur la poitrine tenant en mains les sceptres du pouvoir.
Fig. 13. Osiris en bronze, KNUV 2022-2319, inv. no 2407 (photo 2233275, A. el-Gamal).
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Rainer Pauer
18En 2022, 201 objets en céramique ont été enregistrés. Il s’agit principalement de figurines qui peuvent être divisées en trois groupes : les figurines féminines, masculines et animales.
Les figurines féminines (64 pièces) sont, pour la plupart, dans un état très fragmentaire, et présente une grande diversité de types. Le type le plus représenté est caractérisé par : des hanches larges, combinées à un triangle pubien très proéminent dont les poils sont figurés par des points ou des traits incisés (fig. 14) ; des cuisses épaisses divisées par une ligne, et un front très haut et allongé, avec une coiffure lourde composée d’un ou deux pans tombant sur les épaules (fig. 15). D’autres traits, comme les yeux et les seins, ont été appliqués avec des morceaux d’argile après que la figurine a été façonnée à l’aide d’un moule ouvert. Plusieurs d’entre elles présentent des traces de peinture à l’ocre rouge. Ces figurines ont été fabriquées aussi bien en pâte alluviale qu’en argile marneuse.
Fig. 14. Figurine féminine, partie inférieure, KNUV 2019-5168, inv. no B0005 (photo 2232751, G. Heumesser).
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Fig. 15. Figurine féminine, partie supérieure, tête, KNUV 2019-5159, inv. no B0883 (photo 2232949, G. Heumesser).
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- 7 Waraksa 2009, p. 30-31.
- 8 Spencer 1983, p. 38-39, 49-50, pl. 40, no 172-173 ; Mysliwiec 1987, p. 181, pl. 32.
19Un nombre important de figurines de ce type a également été trouvé dans le district de Mout, la plupart provenant d’une grande fosse-dépotoir située derrière le mur d’enceinte intérieur et de tranchées situées derrière le lac sacré7. On peut donc affirmer une certaine longévité de ce type particulier, du Nouvel Empire au début de la Basse Époque (XVIIIe jusqu’aux XXVe-XXVIe dynasties). Leur comparaison avec des trouvailles identiques provenant de différents sites8 suggère une datation de la Troisième Période intermédiaire.
- 9 Williams 1983, p. 97-98, pl. 102 et 103C.
- 10 Säve-Söderbergh 1989, p. 146, pl. 61, 6. Figurine provenant de la tombe 71.1 du site 179, désignée (...)
- 11 Steindorff 1935, p. 122-123, pl. 73-74. Provenant du cimetière N.
- 12 Aston, Bietak 2012, p. 25-55.
20La petite sculpture en pâte alluviale enregistrée cette année est incomplète, les extrémités et la tête manquent, mais le col de l’animal est préservé. La pièce est néanmoins intéressante : sa surface est polie ; sur le dos et la nuque de l’équidé, une sorte de crinière minimaliste est suggérée par de courtes lignes incisées ; sur le tronc, les omoplates et le début des cuisses sont représentés par des pointillés, arrangés en rectangle, gravés au moyen d’un instrument à cinq ou six dents (fig. 16-17). En Égypte, il est fréquent de voir des figurines d’animaux en argile dans des contextes d’habitat mais, à notre connaissance, ce type de décor n’est pratiquement pas attesté, c’est pourquoi nous envisageons une origine nubienne pour ces objets. En effet, on trouve des décorations similaires sur les figurines du groupe C : des figures humaines décorées de pointillés sont attestées, par exemple, sur le site d’Adindan9 (lignes de points dans des losanges). Une figure animale présentant un décor en pointillés, également du groupe C, se trouve dans la publication de Torgny Säve-Söderbergh sur les sites de Moyenne Nubie10. Plusieurs figures animales du groupe C sont attestées à Aniba11, dont une présente quelques pointillés. En Égypte, le décor en pointillés n’est également pas courant dans la céramique, à l’exception du type « Tell el-Yahudieh ware » dont l’origine n’est toutefois pas non plus égyptienne12.
Fig. 16. Figure animale, équidé, KNUV 2022-0637, inv. no B0878 (photo 2231826, G. Heumesser).
© Ifao. 17223_2022_NDMPM_012
Fig. 17. Figurine animale, torse, équidé, KNUV 2022-0637, inv. no B0878 (dessin A. Haidegger).
© Ifao/Universität Wien, 17223_2022_NDMDM_003
21362 objets en argile non cuite constituent un autre grand groupe. Ceux-ci étaient utilisés pour la fermeture de récipients (bouchons) ou pour sceller des boîtes, des coffres ou des rouleaux de papyrus. Une grande quantité d’empreintes de nattes de roseaux, d’empreintes textiles provenant d’emballages, de boutons ou d’empreintes de cordons ont été observées sur la face arrière de ces objets. Un autre groupe, ne contenant que des morceaux d’argile informes, n’a été que partiellement documenté.
22Les empreintes de sceaux (170) seront enregistrées en détail lors d’une prochaine saison. Un exemplaire présente une double empreinte de sceau (fig. 18) au nom de Mn-ḫpr-Rʿ. L’écriture présente une variante dans le positionnement des hiéroglyphes. Le placement côte à côte, plutôt inhabituel, est courant sur les petits objets ; ce type correspond au no 12 de la typologie de Bertrand Jaeger13.
Fig. 18. Empreinte de sceau au nom de Mn-ḫpr-Rʿ, KNUV 2022-2502, inv. no A2183 (photo 2233878, A. el-Gamal).
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23On trouve également une faible quantité de petits objets en pierre (calcite, jaspe, basalte, feldspath vert, stéatite et granit), ainsi que des fragments de verre et de fritte bleue.
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