2Comme tout numéro Varia, ce volume rassemble des contributions diversifiées. Il réunit des approches disciplinaires variées : géographie, sociologie politique, histoire et études littéraires. Il éclaire, du début du xx^e siècle à la période contemporaine, différentes sociétés de la région, de la frontière italo-yougoslave à celles de la Turquie, en passant par la Grèce et l’Albanie, et étend le regard aux appartenances diasporiques bosniaques en France.

3Au-delà de la diversité des contributions, ce numéro se penche sur des objets communs, en particulier les circulations et les intermédiations.

4Il y est question des échanges et du « partage littéraire » entre deux figures du surréalisme serbe et français – Marko Ristić et Louis Aragon (Biljana Andonovska). Toujours dans le domaine des études littéraires, la question récurrente des frontières des Balkans se voit renouvelée à la lumière des expériences migratoires des auteurs et autrices, via le rapprochement original des essais de Fulvio Tomizza (1935-1999), Slavenka Drakulić (1949) et Kapka Kassabova (1973) (Roberto Gómez Martínez). La question des frontières revient également dans les comptes rendus : celui de l’ouvrage consacré par le moderniste Egidio Ivetic à l’histoire de la mer Adriatique, cette « Méditerranée minimale », sur la longue durée (Fabrice Jesné), ainsi que la lecture croisée que le premier fait de l’ouvrage que Jesné dédie aux rapports de l’Italie à ses voisins adriatiques (Egidio Ivetic). La recension de la réédition critique du récit de voyage d’Amédée Chaumette des Fossés en Bosnie-Herzégovine au début du xix^e siècle interroge quant à elle les apports heuristiques des circulations d’auteurs voyageurs (Bernard Lory).

5Par ailleurs, deux articles concernent des mobilisations d’intermédiaires sociaux et politiques. Tout d’abord, celles d’artistes pour des luttes environnementales contemporaines en Grèce du Nord. Elles sont ici abordées au prisme géographique des « fronts » et plus précisément des médiations entre les cadrages artistiques, touristiques et énergétiques des luttes écologiques (Sylvain Guyot, Véronique André-Lamat, Isabelle Sacareau, Pablo Salinas-Kraljevich). Doan Dani analyse quant à lui la mobilisation par un régime autoritaire – l’Albanie communiste des décennies 1950-1960 – de collaborateurs disséminés sur le territoire, nommés « agitateurs », à une époque où les difficultés de communication et le niveau d’instruction de la population rendaient nécessaire la présence d’intermédiaires proches des populations cibles. Une note de recherche sur la diaspora bosniaque se situe au croisement du champs des études sur le religieux et les minorités en migration. Elle met également en évidence des figures de médiateurs : les imams bosniaques en France (Dževada Šuško). La recension de l’ouvrage consacré par Husref Tahirović au médecin et homme de lettres de Bosnie-Herzégovine Isak Samokovlija (1889-1955) éclaire elle aussi les fonctions de l’écrit dans la médiation entre médecine préventive et littérature (Daniel Baric). C’est en étudiant le monde associatif dans la Bosnie post-ottomane que Fabio Giomi, dont l’ouvrage est ici recensé, étudie les transformations du statut des femmes musulmanes et de leur participation à la société (Anne Madelain).

6D’autres fils se tissent entre les textes : outre les éclairages apportés à l’histoire sociale et politique de la Bosnie-Herzégovine (Lory, Madelain, Šuško), ils offrent une exploration de l’entre-deux-guerres dont il est intéressant de décrypter aujourd’hui la modernité (Andonovska, Madelain).