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3. Histoire

Tamás Pálosfalvi, From Nicopolis to Mohács: A History of Ottoman-Hungarian Warfare, 1389-1526

Vincent Thérouin
Référence(s) :

Tamás Pálosfalvi, From Nicopolis to Mohács: A History of Ottoman-Hungarian Warfare, 1389-1526, Leyde-Boston, Brill, 2018, 518 p., ISBN : 9789004365841

Texte intégral

  • 1  T. Pálosfalvi reprend ainsi le travail entamé par F. Szakály dans son article « Phases of Turco-Hu (...)

1La conquête des Balkans par l’Empire ottoman, opérée entre la fin du xive siècle et le début du xvie siècle, ne peut être pleinement comprise sans tenir compte du rôle qu’occupa l’autre puissance régionale de la période tardo-médiévale : le royaume de Hongrie. Cet ouvrage entend proposer un aperçu de l’ensemble des actions armées opposant la Hongrie et les Ottomans dans les Balkans durant près d’un siècle et demi1.

2Son auteur, Tamás Pálosfalvi, est spécialiste de l’histoire politique et militaire de la Hongrie tardo-médiévale. En 2012, il a soutenu à la Central European University une thèse intitulée « The Noble Elite in the Country of Körös (Krizevci) 1400-1526 ». Plus récemment, il s’est intéressé à l’histoire socio-économique en contexte tardo-médiéval ainsi qu’aux relations entre la Hongrie et l’Empire ottoman.

  • 2  cf. Fodor, Pál, et Géza Dávid. Ottomans, Hungarians, and Habsburgs in Central Europe: The Military (...)

3En introduction, T. Pálosfalvi propose un bref rappel du contexte historiographique ainsi que du contexte historique immédiatement antérieur à la période étudiée (l’invasion mongole du xiiie siècle et ses conséquences). Puis, l’auteur résume, à destination d’un lectorat non magyarophone, les résultats des dernières recherches sur les guerres hongro-ottomanes. À la différence des publications récentes qui portent essentiellement sur des épisodes postérieurs à la bataille de Mohács (1526)2, T. Pálosfalvi a pour objectif de couvrir, à travers une monographie, l’ensemble des conflits opposant Hongrois et Ottomans entre la fin du xive siècle et le début du xvie siècle. Il présente, ensuite, les sources utilisées, principalement des documents hongrois de chancellerie et de correspondance diplomatique. Enfin, il revient sur une thématique qui constituera le fil rouge de son ouvrage : la mise en perspective de l’histoire militaire de la Hongrie tardo-médiévale avec son histoire sociale et économique.

4Les cinquante-neuf figures qui jalonnent l’ouvrage proposent un aperçu de la culture matérielle de la Hongrie tardo-médiévale (notamment pour l’armement et les arts du livre). On peut toutefois regretter l’absence des références précises pour la majorité d’entre elles. L’appareil critique se compose d’une bibliographie générale ainsi que d’un index réunissant toponymes et anthroponymes. Enfin, cinq cartes particulièrement détaillées sont également insérées, constituant ainsi, pour chacun des chapitres, un précieux support.

5L’ouvrage est organisé en six chapitres suivis d’une conclusion. Le premier se distingue par son approche thématique et son cadre chronologique : l’auteur expose l’organisation militaire de la Hongrie pour l’ensemble de la période considérée, soit entre la fin du xive siècle et le début du xvie siècle. À travers six sous-chapitres traitant chacun d’une dynastie ou d’un souverain, T. Pálosfalvi retrace l’évolution des effectifs et des différents corps militaires qui constituent l’armée hongroise. Il présente également les armes utilisées, l’encadrement, la formation et le recrutement des troupes ainsi que des modalités de commandement. Dans cette présentation les questions fiscales ne sont pas oubliées.

6Cinq chapitres de taille variable (de vingt-cinq pages environ pour le chapitre 2 à plus de cent pages pour le chapitre 3) forment le corps de l’ouvrage proprement dit. Indépendamment de la chronologie dynastique, chacun d’entre eux aborde une période précise du conflit hongro-ottoman. En effet, ces chapitres s’ouvrent et se concluent généralement avec une bataille ou un siège majeur (Golubac en 1428, Belgrade en 1456, Belgrade en 1521, etc.). Chacun présente l’organisation suivante : au regard du contexte antérieur, l’auteur revient sur les actions prises par le souverain hongrois pour soutenir l’effort de guerre (changement dans la fiscalité, nouvelle levée des troupes, nouveaux modes de recrutement, action diplomatique, etc.). Le cas échéant, une brève digression apporte des précisions quant aux contextes politique, diplomatique ou militaire dans lesquels s’inscrivent les décisions prises par le souverain (il s’agit, le plus souvent, de la question du nombre de troupes à mobiliser sur la frontière avec l’Empire ottoman malgré les guerres menées par la Hongrie en Europe centrale). Il est ensuite question des préparatifs de la nouvelle campagne, de l’itinéraire emprunté par l’armée hongroise ainsi que de la taille et de la composition des armées engagées. Dans la mesure où les sources le permettent, le siège ou la bataille donnent lieu à un déroulé détaillé. Enfin, l’issue de l’évènement déterminera un ensemble de décisions prises par le souverain, lesquels constituent l’introduction du chapitre suivant. Au terme de la période étudiée (la bataille de Mohács en 1526), l’auteur revient, dans sa conclusion, sur les deux principales causes de la défaite décisive de la Hongrie face aux Ottomans : un défaut d’organisation militaire et, surtout, des ressources économiques limitées.

7Cet important volume (près de cinq cent pages) présente principalement une histoire événementielle du conflit opposant Hongrois et Ottomans entre la fin du xive siècle et le début du xvie siècle. Cependant, en réinscrivant les étapes de ce conflit dans un temps long, il permet de décloisonner la question du conflit hongro-ottoman à la seule région de l’Europe du sud-est, de l’ouvrir aux préoccupations hongroises en Europe centrale. En insistant sur l’impact de ce conflit sur la vie politique et économique de la Hongrie tardo-médiévale, T. Pálosfalvi revient sur plusieurs aspects, généralement sous-estimés, dans l’affrontement entre Hongrois et Ottomans. Tout d’abord, il rappelle que la Hongrie reste une puissance majeure en Europe du sud-est durant la période médiévale qui conserve et entretien de nombreux vassaux dans les Balkans. Il met également en lumière le changement de paradigme dans la stratégie hongroise, conséquence du contact avec les Ottomans : jusqu’alors puissance offensive, la Hongrie ne chercha plus, après la défaite de Kosovo Polje en 1448, à livrer bataille sur le territoire ottoman mais tenta, tant que bien que mal, à préserver son intégrité territoriale. T. Pálosfalvi souligne, également, l’adaptation et les transformations des armées hongroises dans leurs combats menés contre les Ottomans, de plus en plus marqués par des raids transfrontaliers réguliers et des campagnes saisonnières contre des sites précis. Dans ce nouveau contexte, la cavalerie légère ­hongroise se développe tandis que la frontière sud et Belgrade sont fortifiées. Enfin, cet ouvrage souligne les changements politiques et sociaux qu’entraîne le poids économique de ces guerres sur la Hongrie. Ces derniers s’alourdissent à mesure que l’affrontement s’intensifie. Selon l’auteur, ces transformations sont essentiellement dues à l’apparition d’une frontière directe entre Hongrois et Ottomans. Celle-ci, particulièrement étendue, fut progressivement fortifiée et protégée par des mercenaires ou des troupes permanentes, autant d’éléments nécessitant d’importants investissements financiers de la part de la couronne hongroise. L’augmentation des taxes ou les tentatives de certains souverains à rechercher des alternatives – comme celle consistant à confier la gestion et la défense de la frontière à des barons locaux sous les Jagellons – illustrent, en partie, les conséquences du conflit hongro-ottoman sur la politique intérieure hongroise.

8En fondant ses recherches sur les sources hongroises médiévales, en choisissant un cadre chronologique suffisamment large et en ouvrant sur les territoires voisins de la Hongrie, T. Pálosfalvi nous invite à une analyse globale des évènements et de leurs conséquences. Cet ouvrage fait ainsi figure de bréviaire pour le lecteur souhaitant s’initier à l’histoire de l’Europe du sud-est au sortir de la période médiévale.

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Notes

1  T. Pálosfalvi reprend ainsi le travail entamé par F. Szakály dans son article « Phases of Turco-Hungarian Warfare before the Battle of Mohács » (in Acta Orientalia Academiae Scientiarum Hungaricae, no 33, 1979).

2  cf. Fodor, Pál, et Géza Dávid. Ottomans, Hungarians, and Habsburgs in Central Europe: The Military Confines in the Era of Ottoman Conquest. Leyde, Brill, 2000 et Fodor, Pál. The battle for Central Europe: the Siege of Szigetvár and the death of Süleyman the Magnificent and Nicholas Zrínyi (1566). Leyde, Brill, 2019.

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Pour citer cet article

Référence électronique

Vincent Thérouin, « Tamás Pálosfalvi, From Nicopolis to Mohács: A History of Ottoman-Hungarian Warfare, 1389-1526 »Bulletin critique des Annales islamologiques [En ligne], 36 | 2022, mis en ligne le 01 mai 2021, consulté le 22 mai 2025. URL : http://journals.openedition.org/bcai/1141 ; DOI : https://doi.org/10.4000/bcai.1141

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Auteur

Vincent Thérouin

Doctorant Sorbonne Université - UMR 8167 Orient & Méditerranée

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