- 1 Kalliontzis, Müller 2020.
- 2 Kalliontzis 2020.
1La Béotie n’en finit pas de livrer de nouveaux documents, ni de montrer qu’il s’agit de l’une des régions les plus prometteuses pour faire avancer notre connaissance des institutions et des pratiques civiques à l’époque hellénistique. Tout récemment, Yannis Kalliontzis et Christel Müller ont ainsi publié pas moins de sept nouveaux catalogues militaires de la petite cité de Chorsiai, gravés à la suite sur la même stèle1. On doit au même Yannis Kalliontzis une thèse tout juste parue, qui présente une nouvelle version de la chronologie béotienne et où figurent plusieurs autres textes inédits d’Akraiphia, d’Orchomène ou de Mégare2. L’enjeu du présent article est de relever les problèmes chronologiques que posent les nouvelles listes de conscrits de Chorsiai. Cette première phase de l’étude amènera, dans un second temps, à remettre en cause certains fondements de la chronologie des archontes fédéraux béotiens. De nouvelles hypothèses auront alors à être testées.
- 3 Voir notamment Barratt 1932, p. 74‑75 ; Feyel 1942, p. 36 ; Étienne, Knoepfler 1976, p. 301‑305 ; K (...)
2Les nouveaux catalogues de Chorsiai publiés par Y. Kalliontzis et Chr. Müller sont au nombre de sept, gravés l’un après l’autre sur la même stèle. Ce nombre exceptionnel n’est en fait pas tellement surprenant : la pratique qui consiste à graver à la suite plusieurs catalogues militaires est bien attestée dans d’autres petites cités béotiennes, et doit se comprendre comme une mesure d’économie, qui permettait d’éviter d’ériger une nouvelle stèle chaque année, qui plus est dans des localités où les listes de conscrits tenaient en deux ou trois lignes. Le cas le plus emblématique est Aigosthènes, où une série de documents, des listes de conscrits et des décrets de proxénie, en somme l’ordinaire épigraphique de cette cité, ont été gravés à la suite sur un même bloc qui sert désormais de linteau à l’église de la Panaghia (IG VII, 207‑218). Ces séries sont extrêmement précieuses pour asseoir la chronologie béotienne, étant entendu que les catalogues ont bien évidemment été gravés dans l’ordre chronologique, les derniers catalogues étant nécessairement postérieurs aux premiers. La série d’Aigosthènes est ainsi l’un des piliers de la chronologie béotienne : dès les premières tentatives de reconstitution d’une chronologie des archontes fédéraux béotiens, il a été pris pour principe que ces textes se suivaient chronologiquement, à l’année près, permettant de restituer une suite continue de neuf archontes3, et en outre de fixer cette série dans une chronologie absolue, d’après la date d’adhésion de la Mégaride au koinon béotien.
- 4 Dans Kalliontzis 2020, cet ensemble d’archontes est décalé d’un an (224/223, etc.).
- 5 Dans la chronologie présentée dans Kalliontzis 2020, cet ensemble d’archontes est décalé d’un an (1 (...)
- 6 Kalliontzis, Müller 2020, p. 213, 221.
3Face à ce principe, l’une des difficultés soulevées par les nouveaux catalogues de Chorsiai réside dans la chronologie adoptée par les auteurs de l’article, qui est en réalité celle présentée par ailleurs par Y. Kalliontzis dans son ouvrage : les trois premiers catalogues se suivent d’assez près (archontes Kaphisias (I), 223/222 ; Hippias (I), 221/220 ; Potidaïchos, 220/219)4. Le quatrième, en revanche, vient après un « trou » de quatorze ans (archonte Philon [II], 206/205) ; puis neuf ans séparent encore ce quatrième catalogue de la fin de la série (archontes Euklidas, 197/196 ; Kalliklès, 196/195 ; Kaphisotimos, 194/193)5. Vingt‑neuf années séparent ainsi le premier catalogue de la série du dernier, ce qui est d’autant plus étonnant que toutes ces listes, d’après les éditeurs, ont été gravées par le même lapicide6. Face à cette difficulté, Y. Kalliontzis et Chr. Müller ont émis l’hypothèse que la série ait pu être gravée après coup, en une seule fois. Cependant, c’est là une pratique qui n’est pas autrement attestée. En outre, la seule raison qui aurait pu pousser les Chorsiéens à re‑graver ainsi une série de listes de conscrits serait d’en rendre l’affichage plus pratique et systématique ; mais dans ce cas on s’explique mal les larges trous de quatorze et neuf ans dans la série. Vu la petite taille de la cité, bien sûr, il est possible et même probable qu’il ait pu y avoir des années sans un seul conscrit (on reviendra sur ce point) ; mais il est exclu, pour des raisons démographiques évidentes, qu’il y ait eu des périodes aussi longues sans un seul conscrit (en somme, un seul jeune homme, sous Philon, parvient à l’âge adulte dans l’intervalle de vingt‑trois ans qui sépare Potidaïchos d’Euklidas…). Enfin, pour une série gravée en une seule fois, on s’attendrait à une certaine uniformité du point de vue de la forme aussi bien que du formulaire. Or, ce n’est pas le cas : pour désigner les nouveaux conscrits, le formulaire oscille entre le terme de thyréaphores et celui de peltophores ; pour ce qui est de la forme, les quatre premières listes sont gravées à la suite les unes des autres, tandis que les trois suivantes sont bien détachées par une ligne vacante. Ces petites variations s’expliqueraient mieux si les listes avaient été gravées au fil de l’eau, année après année, plutôt qu’en une seule fois.
- 7 Voir sur ce point Kalliontzis 2020. Selon lui, l’attestation la plus ancienne de peltophores serait (...)
- 8 Kalliontzis, Müller 2020, p. 222.
4Une autre caractéristique troublante de la série de Chorsiai réside dans le fait que les intitulés des catalogues utilisent tantôt le terme de thyréaphores (1, 2, 4, 7), tantôt le terme de peltophores (5, 6). En particulier, la réapparition du terme de thyréaphores dans le dernier catalogue de la série, daté par les éditeurs de 194/193 av. J.‑C., vient semer le doute sur tout ce qu’on croyait savoir de la réforme de l’armée béotienne, où l’armement des peltophores est censé s’être imposé dès les années 230 av. J.‑C.7. Une possibilité, évoquée par les éditeurs, serait qu’à Chorsiai ce terme aurait persisté par habitude de langage, même après la mise en application de la réforme8. Il s’agit là d’une solution envisageable, mais la persistance du terme plus de trente ans après la réforme paraît tout de même peu probable. En tout état de cause, la réforme a bien fini par avoir lieu à Chorsiai, puisque les seules autres listes de conscrits qu’on connaisse pour cette petite cité (IG VII, 2389-2390) sont bien des listes de peltophores. La réapparition du terme dans la dernière liste de la nouvelle série de Chorsiai se comprendrait mieux si celle‑ci était chronologiquement proche des autres textes. Cela reviendrait à dire que la réforme a bien eu lieu à Chorsiai, mais avec un peu de retard (puisque l’archonte Hippias, le deuxième de la série, date à Aigosthènes une liste de peltophores), et après un temps d’adaptation bien compréhensible de quelques années, durant lesquelles on a pu, par habitude, revenir au terme de thyréaphore. C’est là une hypothèse qui paraît plus probable que le retour du terme plus de dix ans après sa dernière attestation dans la cité – elle‑même nettement postérieure aux attestations de ce terme dans d’autres cités béotiennes.
5Ainsi, l’application mécanique de la chronologie de Y. Kalliontzis aux nouveaux catalogues de Chorsiai fait émerger des difficultés chronologiques insolubles. En somme, ces nouveaux catalogues sont une excellente pierre de touche pour tester la validité de la nouvelle version de la chronologie béotienne publiée en même temps qu’eux. Les problèmes qu’ils soulèvent laissent penser que cette nouvelle chronologie n’est pas sûre.
6Les différents problèmes que nous avons vus, au fond, découlent du fait que les séries de catalogues militaires de Chorsiai et d’Aigosthènes présentent deux successions d’archontes différentes. La nouvelle série de Chorsiai donne la succession d’archontes suivante :
Kaphisias – Hippias – Potidaïchos – Philon – Euklidas – Kalliklès – Kaphisotimos,
7tandis que celle d’Aigosthènes (IG VII, 207‑218) donne :
- 9 Sur les archontes Potidaïchos et Andronikos dans cette série, voir Étienne, Knoepfler 1976, p. 301, (...)
Kaphisias – Onasimos – Hippias – Potidaïchos – Andronikos9
– Charilaos – Mnason – Aristoklès – Théotimos.
8Il y a bien des recoupements au début des deux séries, mais pour le reste elles ne concordent pas. Or, la série d’Aigosthènes, connue depuis longtemps, a servi de pivot pour fixer la chronologie des archontes fédéraux béotiens, aussi bien d’ailleurs la chronologie relative que la chronologie absolue, en suivant le principe qu’une telle série de textes n’avait pu qu’être gravée dans un laps de temps très court : pour économiser les frais de gravure, les habitants d’Aigosthènes ont volontairement érigé une pierre de grandes dimensions qu’ils ont utilisée pendant plusieurs années consécutives pour leurs listes de conscrits et leurs décrets de proxénie. Si ce principe est valable à Aigosthènes, on comprend mal pourquoi cette mesure de bon sens n’aurait pas été suivie à Chorsiai également, où la situation est, somme toute, la même : une petite cité où les listes ne font que quelques lignes, qui exploite une surface de grande taille pour y graver une série de documents.
9Ainsi, de deux choses l’une :
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soit la loi générale selon laquelle les séries de textes gravés à la suite sur le même bloc sont des suites chronologiques n’est pas valable, auquel cas c’est la chronologie béotienne dans son ensemble qui doit être révisée, puisqu’elle repose en grande partie sur de telles séries de catalogues, à Aigosthènes ou à Akraiphia. Une fois la validité de ce principe remise en question, il n’y a en définitive aucune raison de penser que la série d’Aigosthènes doive primer sur celle de Chorsiai ; |
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soit les habitants de Chorsiai gravaient leurs textes sans trop de logique : après avoir érigé une stèle pour graver leurs catalogues militaires, ils l’ont délaissée pendant de longues années alors qu’elle comportait encore de l’espace, ce qui implique qu’ils ont dû graver des catalogues ailleurs ; puis ils ont repris la gravure sur cette stèle, à deux reprises, après des intervalles de dix ans ; ou bien, pour une raison inexpliquée, ils ont re‑gravé a posteriori une série très lacunaire de leurs listes de conscription. |
10Il existe en fait une solution simple à cet épineux problème, qui ne remet en cause ni la loi générale ni le bon sens des habitants de Chorsiai : il se pourrait bien que le problème vienne de la série d’Aigosthènes, et non de celle de Chorsiai.
- 10 Il faut d’ailleurs relever que cette deuxième série comporte uniquement des listes de conscrits, co (...)
- 11 M. Feyel est le seul à avoir évoqué cette possibilité d’un laps de temps entre ce qu’il appelait le (...)
- 12 Kalliontzis 2020, no 7.
- 13 Kalliontzis 2020, nos 4‑6.
11En l’occurrence, les catalogues gravés sur la stèle d’Aigosthènes ne forment pas une unique série continue, mais bien deux séries distinctes : une partie des documents, dont les listes de conscrits IG VII, 209 (Kaphisias), 210 (Onasimos), 211 (Hippias), 212 (Potidaïchos) et 214 (Andronikos), sont gravés sur la face principale de la stèle, tandis que la fin de la série, comprenant les catalogues IG VII, 215 (Charilaos), 216 (Mnason), 217 (Aristoklès) et 218 (Théotimos), est gravée sur la face latérale du bloc10. Il a pu s’écouler un temps relativement long, plusieurs années en tout cas, entre le remplissage de la face principale de la stèle et l’exploitation de l’espace disponible sur sa face latérale – l’autre face latérale de la stèle, inaccessible, a pu notamment servir à graver des listes entre les deux, mais il n’est pas exclu que d’autres supports aient été utilisés dans l’intervalle11. L’un des archontes de la série de Chorsiai, Kalliklès, est du reste attesté à Aigosthènes, où il date un autre catalogue militaire12 ; celui‑ci est gravé sur le côté d’un bloc portant sur sa face principale la dédicace IG VII, 224, et il est précédé sur le bloc par un décret de proxénie et deux autres catalogues militaires, datés des archontes Damatrios et Komaddos13.
12Le début de la nouvelle série de catalogues découverte à Chorsiai correspond peu ou prou à la première série d’Aigosthènes, à deux détails près : l’absence des archontes Onasimos et Andronikos. Cependant, dans une cité aussi petite que Chorsiai, où bien des catalogues ne recensent qu’un seul nom, il a pu exister aussi des années sans un seul conscrit, comme du reste le soulignent les auteurs ; et au vu du nombre de listes à un seul nom, il n’est pas douteux que de telles années sans conscrit aient pu arriver assez fréquemment. La solution la plus économique du point de vue de la chronologie consiste donc à considérer que les années où Onasimos et Andronikos étaient archontes furent des années sans conscrit à Chorsiai. L’archontat d’Onasimos vient s’intercaler entre deux années particulièrement fastes pour Chorsiai, avec sept et cinq conscrits ; il se peut qu’on ait, par commodité, regroupé les conscrits de l’année d’Onasimos avec ceux de l’année précédente ou de l’année suivante. De la même manière, il pourrait y avoir, parmi les trois conscrits sous Potidaïchos, un ou deux jeunes gens âgés de 19 ans au lieu des 20 réglementaires, ce qui expliquerait l’absence de liste l’année de l’archontat d’Andronikos. La fin de la série de Chorsiai pourrait donc venir s’intercaler entre les deux séries d’Aigosthènes, avec là encore au moins deux années sans un seul conscrit, celles des archontes Damatrios et Komaddos.
13En combinant les séries d’Aigosthènes et de Chorsiai, on obtient ainsi une unique série :
- 14 On pourrait par exemple placer ici les archontes Agathokleis, Kaphisias (II) et Athanias, dont les (...)
Kaphisias (I) – Onasimos – Hippias – Potidaïchos – Andronikos – année(s) sans conscrit à Chorsiai ? – Philon (I) – année(s) sans conscrit à Chorsiai ? – Euklidas – année(s) sans conscrit à Chorsiai ? – Damatrios (I) (?) – Komaddos (?) – Kalliklès – année(s) sans conscrit à Chorsiai ? – Kaphisotimos – un ou plusieurs archontes ?14 – Charilaos – Mnason – Aristoklès – Théotimos.
- 15 On observe déjà, l’année de l’archonte Potidaïchos (IG VII, 212), un bref retour au formulaire neut (...)
14Les premiers archontes sont à dater de la décennie 230‑220 et, plus précisément, en raison de la date d’adhésion de la Mégaride au koinon béotien, après l’année 224 : cette observation, en effet, ne remet pas en cause la validité de la date proposée par Y. Kalliontzis pour la réforme de l’armée béotienne, probablement vers 230, et il paraît clair que l’archonte Hippias, qui date une liste de peltophores à Aigosthènes et une liste de thyréaphores à Chorsiai, est à dater relativement peu de temps après la mise en application de la réforme, d’où un certain flottement dans l’intitulé d’une cité à l’autre. À Aigosthènes même ce flottement s’observe également, puisque le premier catalogue de la série emploie un formulaire neutre qu’on retrouve aussi à Mégare, τοίδε ἐξ ἐφήβων (IG VII, 209, archonte Kaphisias), suivi par trois catalogues mentionnant explicitement les peltophores (IG VII, 210, 211, 214)15, avant que le formulaire neutre ne s’impose de nouveau. Il est possible que les habitants d’Aigosthènes, par excès de zèle, aient tenu dans un premier temps à faire figurer expressément le terme de peltophore dans leurs listes de conscrits, avant que le formulaire usuel ne reprenne le dessus.
15Kaphisotimos, le dernier archonte de la série de Chorsiai, malgré l’existence assurée d’années sans conscrit, peut difficilement dater d’après 210 av. J.‑C. La nouvelle série de Chorsiai correspond donc à une tranche d’une douzaine d’années, ce qui ferait en moyenne une liste tous les deux ans ou même un peu mieux. Enfin, pour les archontes inscrits sur le côté de la grande stèle d’Aigosthènes, Charilaos – Mnason – Aristoklès – Théotimos, il est difficile de proposer une date précise étant donné qu’on ne peut estimer exactement le laps de temps qui s’est écoulé entre la gravure de la face principale et la mise en exploitation de la face latérale. En particulier, il n’est pas exclu qu’il faille intercaler une ou plusieurs années (et donc un ou plusieurs archontes) entre Kaphisotimos et Charilaos16.
- 17 La continuité de la série documentaire d’Aigosthènes, comme on l’a vu, est un point essentiel de la (...)
- 18 Voir Kalliontzis 2020, nos 22‑25. Pour l’heure, je ne sais pas s’il faut placer les archontes Agath (...)
- 19 À Akraiphia, cet archonte date la liste de conscrits Kalliontzis 2020, no 29.
16Il est bien évident qu’une telle hypothèse est de nature à remettre en cause bien des éléments de la chronologie béotienne qui étaient jusque‑là tenus pour acquis : elle oblige, par un jeu de chaises musicales, à re‑dater bon nombre d’archontes17. L’étape suivante est de vérifier la plausibilité de l’hypothèse chronologique qu’on vient de voir. Les données d’Akraiphia peuvent ici aider. Le riche corpus épigraphique d’Akraiphia a été utilisé à plusieurs reprises pour ancrer certains points de la chronologie béotienne. Ainsi, le dernier archonte de la série de Chorsiai, Kaphisotimos, date un catalogue de conscrits inscrit sur la base d’Eugnotos, suivi de plusieurs autres listes datées des archontes Agathokleis, Kaphisias (II) et Athanias, qui doivent donc être des successeurs proches de Kaphisotimos18 ; c’est surtout à partir de ces textes d’Akraiphia que Y. Kalliontzis a fixé l’archonte Kaphisotimos au début du iie siècle av. J.‑C. Cependant, cette date découle uniquement de quelques rapprochements prosopographiques : tout d’abord, cette série d’archontes est datée d’après deux rapprochements avec l’archontat de Lykinos19 : sous l’archontat d’Agathokleis, on trouve à Akraiphia un conscrit, Philoklidas fils d’Asklapinos, qui devient secrétaire des polémarques sous Lykinos. Comme les conscrits sont âgés de 20 ans et qu’il est reconnu que les secrétaires sont en moyenne plus jeunes que les polémarques, cela tendrait à indiquer que l’archontat d’Agathokleis a de bonnes chances de précéder de dix à vingt ans l’archontat de Lykinos. L’un des polémarques sous Athanias, Aminokleis fils de Thémon, est à nouveau polémarque sous Lykinos. C’est là encore le signe que l’archontat de Lykinos doit suivre d’assez près la série inaugurée par Kaphisotimos. En admettant que Kaphisotimos soit bien un prédécesseur proche des archontes Agathokleis, Kaphisias (II) et Athanias, ce qui en soi reste à prouver, il est en somme difficile d’envisager qu’il y ait plus de vingt‑cinq ans entre Kaphisotimos et Lykinos, à moins de renoncer totalement à l’idée d’une série groupée sur la base d’Eugnotos.
- 20 Kalliontzis 2020, p. 35‑40.
- 21 IThesp 161 (mentionnant l’archonte Lykinos) ; IThesp 163 (liste sans nom d’archonte, datée vraisemb (...)
- 22 Robert 1951 ; Kalliontzis 2020, p. 36‑38. Sur ce point également, voir Savalli-Lestrade 2006, qui p (...)
- 23 Arnaud 2018, p. 406‑408. On préférera la démonstration plus détaillée de P. Arnaud à celle de L. Ro (...)
17Or, l’archonte Lykinos, daté depuis les travaux de Maurice Holleaux de la fin du iiie siècle, a été assigné au début du iie siècle par Y. Kalliontzis ; plus précisément, celui‑ci le date de 180 environ20. L’argument décisif pour proposer cette date plus basse est une liste de vainqueurs aux Mouseia de Thespies datée de l’archontat de Lykinos, dont un vainqueur au moins provient de la cité d’Antioche du Pyrame en Cilicie21. Or, la fondation d’Antioche du Pyrame est à dater du début du iie siècle, comme le rappelle de façon convaincante Y. Kalliontzis – à la suite de Louis Robert22 –, et, plus précisément, après l’année 197. On dispose surtout désormais d’un article de Pascal Arnaud sur la question, qui vient confirmer les conclusions chronologiques de L. Robert23 : la cité de Mallos a changé de nom pour Antioche du Pyrame, probablement au début du iie siècle, sous Antiochos III, avant de reprendre le nom de Mallos après le règne d’Antiochos IV, en 164. Toutes les mentions d’un citoyen d’Antioche du Pyrame doivent donc être datées de la période 197‑164 av. J.‑C. Ce point‑là paraît incontestable, et Y. Kalliontzis a eu raison d’abaisser la date de l’archonte Lykinos.
- 24 Sur les relations entre les Béotiens et Antiochos III, voir notamment Kalliontzis 2020, p. 124‑125, (...)
18Cependant, ce constat permet seulement de proposer la date de 197 comme terminus post quem. Il n’y a en revanche aucune raison de proposer une date aussi basse que 180. En particulier, la présence simultanée à Thespies de deux vainqueurs originaires d’Antioche et d’Antioche du Pyrame, là où tous les autres vainqueurs sont originaires de Béotie ou d’Oponte, n’est sans doute pas due au hasard. Elle doit s’inscrire dans le cadre d’une tentative de rapprochement entre la Béotie et Antiochos III. Cette opération diplomatique autant qu’agonistique doit probablement précéder la défaite d’Antiochos III dans sa malheureuse expédition contre les Romains en Grèce, en 192‑191, ou en tout cas la paix d’Apamée en 188 : une telle action diplomatique serait difficile à concevoir après la défaite d’Antiochos III face aux Romains, surtout si ce sont les Béotiens qui en ont pris l’initiative24. Sur cette base, on peut proposer pour l’archonte Lykinos une date assez précise, entre 197 et 188, le plus probable étant encore une date avant 191.
19Une fois la date de Lykinos ainsi fixée, il n’y a aucune objection à placer l’archontat de Kaphisotimos vers 215‑210, ce qui est la conclusion vers laquelle tendaient déjà les listes de Chorsiai, comme on l’a vu. La date des archontes Agathokleis, Kaphisias (II) et Athanias ne peut en revanche être déduite avec précision, car il a pu s’écouler un laps de temps assez long entre chacune des inscriptions inscrites sur ce bloc.
20Par ailleurs, selon Y. Kalliontzis, un autre réseau assez dense de relations prosopographiques à Akraiphia obligerait à placer Kaphisotimos et ses successeurs au iie siècle : un conscrit sous Kaphisotimos, Kaloklidas fils de Mantixenos, est polémarque dans le catalogue militaire IG VII, 2718. Sous Kaphisias (II), un conscrit, Xénantichos fils de Heiron, a un fils polémarque dans le catalogue militaire IG VII, 2715, tandis qu’un autre, Kaphisodoros fils de Diodoros, a un fils conscrit dans le catalogue IG VII, 2720, et un dernier, Thémon fils de Kaphisodoros, a un fils polémarque dans le catalogue Kalliontzis 2020, no 30. Enfin, l’un des conscrits sous Athanias, Nikomachos fils de Tanious, a également un fils conscrit dans le catalogue Kalliontzis 2020, no 30. Or, les listes de conscrits IG VII, 2715, 2718, 2720 et Kalliontzis 2020, no 30 sont toutes datées par Y. Kalliontzis après la dissolution du koinon béotien en 171 av. J.‑C., au motif que leur intitulé ne mentionne pas d’archonte fédéral. Ce réseau de liens avec des textes supposés postérieurs à 171 tendrait donc à conforter l’idée que le groupe d’archontes Kaphisotimos – Agathokleis – Kaphisias (II) – Athanias date du iie siècle, et non de la fin du iiie siècle.
- 25 Voir la liste des catalogues préservés à Copai dans Kalliontzis 2020, p. 78.
- 26 Voir Kalliontzis 2020, p. 78, n. 135.
21Cependant, ce constat repose en grande partie sur un postulat chronologique contestable, à savoir que les listes sans archonte fédéral datent nécessairement d’après 171. L’omission de l’archonte fédéral dans l’intitulé des listes de conscrits est en fait un phénomène relativement fréquent, même avant la dissolution du koinon. Par exemple, dans la cité voisine de Copai, seule une liste de conscrits parmi les treize préservées pour cette cité mentionne l’archonte fédéral25. Plusieurs nouveaux catalogues y ont été récemment découverts, et il semble qu’ils ne portent pas non plus le nom de l’archonte fédéral26. Pour cette raison, Y. Kalliontzis assigne l’essentiel des listes de Copai à la période qui suit la dissolution du koinon béotien. Cela est proprement impossible : parmi les listes en question, l’une, IG VII, 2781, précise que les conscrits ont été inscrits dans les rangs des hoplites ; ceux‑ci sont en outre nommés de façon quasi systématique avec un adjectif patronymique au lieu du patronyme au génitif. Ces deux éléments indiquent clairement une date antérieure à 230 av. J.‑C. – c’est là un principe qui doit primer absolument sur toute autre considération chronologique, y compris l’absence d’archonte fédéral. Pour les autres catalogues concernés, il serait pour le moins curieux que le hasard nous ait permis de préserver à Copai presque uniquement des listes postérieures à la dissolution du koinon, alors que dans le reste de la Béotie de telles listes sont plutôt rares. Il est donc très probable que ces listes datent d’avant la dissolution du koinon, et qu’il était simplement courant à Copai de ne pas inscrire le nom de l’archonte fédéral en tête des listes de conscrits. De même, à Chorsiai, la liste de conscrits IG VII, 2389 ne porte pas de mention de l’archonte fédéral ; elle est pourtant suivie sur le bloc par une autre liste de conscrits, IG VII, 2390, qui est quant à elle datée de l’archonte fédéral Sostrotos.
- 27 Voir sur ce point Müller 2021.
- 28 Voir sur ces catalogues le commentaire qu’en donnent R. Étienne et D. Knoepfler (Étienne, Knoepfler(...)
22Il n’y a guère que dans le cas de Hyettos que l’on peut dater des catalogues sans archonte fédéral des années qui ont suivi la dissolution du koinon27 : on connaît dans cette cité trois listes sans nom d’archonte fédéral (IG VII, 2828, 2831, 2832) ; mais, dans deux d’entre elles (IG VII, 2828, 2831), seul le nom de l’archonte fédéral a été laissé vacant, tandis que son titre était gravé sur la pierre, précédé d’une lacune que les Hyettiens espéraient pouvoir combler par la suite. IG VII, 2832 commence par une ligne avec trait de réglage laissée vide, et le titre de l’archonte local est inscrit de la manière suivante : ἐπὶ πόλιος δὲ, ce qui signifie là aussi très clairement que l’on avait l’intention de graver la ligne précédente, avec le titre et le nom de l’archonte fédéral28. Ces trois listes doivent donc renvoyer très précisément à la période d’incertitude qui a suivi la dissolution du koinon ; les Hyettiens ont continué à graver les noms des conscrits, tout en laissant une place vacante pour le cas où la Confédération pourrait renaître. Dès qu’ils ont été fixés sur le sort du koinon, ils ont tout à fait cessé d’inscrire les noms.
- 29 Comme on l’a vu, un conscrit sous Kaphisias (II) aurait un fils polémarque dans IG VII, 2715 et un (...)
- 30 Il est difficile de se prononcer sur la date de toutes ces listes sans archonte ; mais la liste Kal (...)
23Par ailleurs, dans les quelques cités où des listes clairement postérieures à 171 existent, comme à Thespies, elles montrent de façon irréfutable un déclin très important du nombre de conscrits, signe que, en l’absence de contrainte fédérale, l’éphébie n’était plus obligatoire et s’était transformée en une institution élitiste, qui ne concernait plus qu’une minorité de jeunes gens. Dans un tel contexte, il serait incompréhensible qu’une cité modeste comme Akraiphia ait pu maintenir une éphébie florissante après 171, avec notamment une année à trente‑sept conscrits (Kalliontzis 2020, no 30), un record pour cette cité. Si l’on devait accepter les hypothèses de Y. Kalliontzis, il faudrait admettre que cette pratique aurait perduré au bas mot jusque dans la seconde moitié du iie siècle29. Il me semble bien plutôt qu’à Akraiphia, de manière moins systématique qu’à Copai, on a fréquemment omis le nom de l’archonte fédéral dans l’intitulé des listes de conscrits : les listes sans archonte représentent environ un quart des listes préservées dans la cité30.
- 31 Kalliontzis 2020, no 20.
- 32 Kalliontzis 2020, p. 18‑21.
24En revanche, plusieurs autres éléments dans les listes d’Akraiphia inscrites sur la base d’Eugnotos pointent vers une date plus haute : en particulier, un polémarque sous l’archontat de Kaphisotimos, Ptoïokleis fils d’Athanadoros, a un homonyme également polémarque sous l’archontat de Dorkylos31, qui est un prédécesseur proche d’Onasimos, daté par Y. Kalliontzis de 228/22732. Si cette date à l’année près n’est pas assurée à mon sens, il paraît clair en tout cas que cet archonte est à dater entre 235 et l’archontat de Kaphisias (I), en 223. Face à ce recoupement prosopographique, Y. Kalliontzis, pour justifier la datation basse de Kaphisotimos, était obligé de supposer qu’il s’agissait là de deux personnes distinctes, un grand‑père et son petit‑fils homonyme. Si l’on place Kaphisotimos avant 210, en revanche, il n’y a plus que quinze à vingt‑cinq ans entre les deux archontes ; il est donc tout à fait possible qu’il s’agisse là d’un seul et unique magistrat.
25En somme, ce premier aperçu confirme que les données d’Akraiphia ne sont pas incompatibles avec la séquence chronologique proposée à partir des listes de Chorsiai et d’Aigosthènes – même si cette brève étude n’épuise nullement le corpus d’Akraiphia, dont l’analyse plus détaillée devrait permettre de proposer d’autres avancées chronologiques. Il faut préciser ici également que les groupes d’archontes d’Akraiphia ne sont pas de même nature que les séries de Chorsiai ou d’Aigosthènes, puisqu’il s’agit de listes gravées côte à côte sur des supports préexistants, et non de documents gravés les uns sous les autres sur la même stèle ; on pourrait facilement envisager, sur le modèle de Hyettos, un emploi opportuniste des monuments disponibles, qui ne passerait pas par la mise en exploitation systématique et ordonnée des surfaces. Dans ce cas, il deviendrait très difficile d’arguer de la place des textes sur les blocs pour reconstituer des séries.
- 33 Il faudrait pour cela être en mesure d’estimer la durée maximale d’une carrière de magistrat. Or, o (...)
- 34 Par homonymie stricte, j’entends les individus partageant le même nom et le même patronyme – il s’a (...)
26Le corpus de listes de conscrits de Hyettos offre une mine assez riche de recoupements prosopographiques susceptibles d’aider à valider (ou infirmer) une chronologie donnée. Il n’est pas question de refaire ici la chronologie béotienne dans son ensemble. En revanche, la prosopographie de Hyettos peut aider temporairement à vérifier la plausibilité de la nouvelle chronologie de Y. Kalliontzis et des hypothèses présentées ici. Cet exercice est évidemment difficile ; comme il est impossible d’estimer l’âge exact des magistrats, tous les rapprochements entre magistrats sont imprécis33. En revanche, les rapprochements entre conscrits (i. e. untel, conscrit telle année, est le père d’untel, conscrit telle autre année) ou entre conscrits et magistrats sont plus sûrs, étant donné qu’on connaît au moins l’âge des conscrits, 20 ans. Par ailleurs, en cas d’incompatibilité chronologique entre deux individus liés par une homonymie stricte ou inversée34, il est toujours possible d’invoquer des liens de parenté plus éloignés dans les branches collatérales d’une même famille, ou même une homonymie fortuite, pour résoudre les contradictions. La multiplication de tels stratagèmes, ou de petites anomalies comme des magistrats très jeunes, très vieux ou à la carrière très longue, doit bien évidemment amener à remettre en question la validité d’une étude prosopographique, et de telles hypothèses ne doivent être proposées qu’en dernier recours.
- 35 Voir notamment Kalliontzis 2020, p. 187, où la date de ca 185 est avancée.
- 36 L’archonte Eumaridas est sobrement présenté comme antérieur à 190 dans la liste proposée dans Kalli (...)
- 37 Précisons que, dans les deux cas, il ne peut s’agir d’un grand‑père et de son petit‑fils homonyme. (...)
- 38 Kalliontzis 2020, p. 25. R. Étienne et D. Knoepfler voyaient dans ces cinq attestations, sans doute (...)
27Pour commencer, on peut tester la chronologie proposée par Y. Kalliontzis à partir des données de Hyettos. Plusieurs problèmes se posent d’emblée au lecteur. On peut prendre comme exemple une liste de la fin de la série, où les erreurs chronologiques devraient apparaître plus nettement. Le catalogue daté de l’archonte Kaphisias (II) (IG VII, 2818) constitue un bon exemple. Cet archonte est daté par Y. Kalliontzis du début du iie siècle, et plus précisément du milieu de la décennie 190‑18035. Un premier problème réside dans la présence du polémarque Damocharidas fils de Poliouchareis, conscrit sous Eumaridas (IG VII, 2819), moins de dix ans auparavant36. Un autre polémarque sous Kaphisias (II), Kapion fils de Timon, est également conscrit sous Eumaridas. Cela fait donc deux polémarques âgés de 26 ans environ37, ou deux cas d’homonymie troublante. Quant au troisième polémarque, Timasion fils de Timasithios, c’est un Hyettien bien connu, qui a été magistrat pour la première fois, selon Y. Kalliontzis, sous Nikias (215/214), en tant que secrétaire (IG VII, 2821)38 – il serait ensuite attesté comme polémarque à quatre reprises. Cela fait donc pour ce personnage une belle carrière étalée sur trente ans. Enfin, un conscrit sous Kaphisias (II) s’appelle Agasandros fils de Phénidas ; on connaît un Phénidas fils d’Agasandros, conscrit sous Dioniousios (IG VII, 2817), mais cela peut difficilement être son père puisque Y. Kalliontzis date cet archonte de 206/205 – il aurait alors eu son fils à 21 ans.
- 39 Agatharchidas est daté de 182 environ par Y. Kalliontzis (Kalliontzis 2020, p. 192). Les deux premi (...)
28Chacune de ces difficultés, prise individuellement, pourrait trouver une solution satisfaisante : à proprement parler, aucune des situations en question n’est impossible. Mais prises ensemble, elles amènent à douter fortement de la validité de la séquence chronologique proposée par Y. Kalliontzis ; cela ne veut pas nécessairement dire que c’est l’archontat de Kaphisias (II) qui doit être re‑daté ; les problèmes pourraient aussi se trouver en amont. On retrouve bon nombre de difficultés chronologiques du même ordre sur une autre liste de la fin de la série telle qu’elle est datée par Y. Kalliontzis, celle de l’archonte Agatharchidas (IG VII, 2823)39.
29On peut également prendre pour pierre de touche les trois listes sans archonte fédéral IG VII, 2828, 2831 et 2832, datées des années qui ont suivi la dissolution du koinon béotien. Un polémarque dans IG VII, 2832, Philokritos fils de Timon, a un homonyme conscrit dans IG VII, 2822 (archonte Théotimos), daté par Y. Kalliontzis de 216/215. Le secrétaire dans IG VII, 2831 a également un homonyme conscrit sous Théotimos. Épaminondas fils de Warmichos, enfin, polémarque dans les deux listes IG VII, 2831 et 2832, a un homonyme conscrit dans IG VII, 2809 (archonte Apollodoros), daté par Y. Kalliontzis de 213/212. L’écart entre les textes est cependant trop important pour qu’il s’agisse des mêmes hommes – ou bien cela ferait une concentration remarquable de magistrats âgés de plus de 60 ans ; mais pour qu’il s’agisse de grands‑pères et de petits‑fils, il faudrait dater IG VII, 2831 et 2832 vers 150 au plus tôt, ce qui est impossible. Là aussi, cette difficulté révèle au fond, très probablement, des problèmes dans le reste de la chronologie.
30On peut maintenant tester la séquence chronologique que je propose ici. L’enjeu n’étant pas de refaire l’ensemble de la chronologie, je me bornerai à huit listes de Hyettos, qui correspondent à la séquence comprise entre 225 et ca 205 av. J.‑C. On prendra en compte uniquement les liens qui unissent ces listes entre elles ou avec des listes plus anciennes. D’autres liens existent avec des listes plus tardives, mais l’incertitude de la chronologie au iie siècle oblige à faire abstraction de ces liens dans un premier temps. On se contentera de donner après coup une estimation de la date de certains archontes postérieurs. Il est à noter que je favorise pour la datation des archontes une date correspondant à une unique année du calendrier julien plutôt qu’une date à cheval sur deux années, comme le fait Y. Kalliontzis : on sait en effet que les archontes éponymes béotiens entraient en charge au solstice d’hiver, ce qui permet de faire correspondre leur mandat, à peu de chose près, à une année civile du calendrier julien.
31Beaucoup des difficultés entrevues pour la liste IG VII, 2818 peuvent se résoudre si on accepte d’y voir l’archonte Kaphisias (I), et non Kaphisias (II). Deux grandes familles de Hyettos se croisent dans ce texte :
- 40 Le nom Timasion est attesté à Hyettos dans d’autres familles, mais la fréquence exceptionnelle des (...)
- 41 L’archonte Hipparchos est à placer vers 200 ; à cette date, Timasithios devrait avoir au bas mot 55 (...)
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un polémarque (Damocharidas fils de Poliouchareis) a déjà exercé cette magistrature sous Kallistratos (Étienne, Knoepfler 1976, no 1 ; SEG 26, 498) ; son fils était conscrit sous Kallistratos, puis devient polémarque sous Philon (I) (IG VII, 2813) ; son petit‑fils est conscrit sous Eumaridas (IG VII, 2819) et secrétaire sous Agatharchidas (IG VII, 2823) : polémarque l’année où son fils était conscrit sous Kallistratos, entre 235 et 225 av. J.‑C., Damocharidas avait alors probablement 45 ou 50 ans. Il n’y a donc pas vraiment d’objection à ce qu’il soit devenu à nouveau polémarque par la suite ; |
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un polémarque (Timasion fils de Timasithios) a de multiples homonymes à Hyettos : un polémarque sous Artylaos (IG VII, 2812), sous Agatharchidas (IG VII, 2823), sous Damatrios (II) (IG VII, 2826), et le secrétaire sous Nikias (IG VII, 2821) : pour Y. Kalliontzis, il s’agit du même homme, magistrat à cinq reprises sur plus de trente ans. R. Étienne et D. Knoepfler, au contraire, distinguaient un grand‑père et son petit‑fils. C’est bien cette hypothèse qui doit être retenue : on verra plus loin que Damatrios (II) doit être daté très bas, vers ou après 180. Le Timasion (I) polémarque en 223 a donc toutes les chances d’être le grand‑père du Timasion (II) attesté au iie siècle. Une quarantaine d’années séparant les deux, cela ne pose guère de difficultés : homme mûr en 223, Timasion (I) a probablement un fils déjà adulte ; il peut fort bien avoir eu un petit‑fils peu de temps avant, qui fera une belle carrière au iie siècle. Notons enfin que le Timasion archonte local sous Kallistratos (Étienne, Knoepfler 1976, no 1) est sans doute le même homme que le polémarque de 22340 ; et le Timasithios archonte local sous Hipparchos (IG VII, 2814) a de bonnes chances d’être son fils41. Le Timasion polémarque sous Artylaos est probablement Timasion (II), âgé alors d’une trentaine d’années – ce qui ne pose pas de difficultés pour un jeune homme issu d’une famille qui occupait l’un des tout premiers rangs à Hyettos. |
32Enfin, un troisième rapprochement est plus problématique :
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le secrétaire (Damatrios fils de Philostratos) a un petit‑fils conscrit sous Damatrios (I) (IG VII, 2825) : il faut admettre qu’on est ici en présence d’un secrétaire âgé d’une soixantaine d’années, pour que son petit‑fils puisse être conscrit moins de dix ans plus tard. |
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Un conscrit (Pithioullos fils de Warmichos) est le fils d’un polémarque sous Kteisias (IG VII, 2830) : Kteisias est antérieur à 225 ; Warmichos peut parfaitement avoir un fils conscrit quelques années après sa polémarchie ; |
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un conscrit (Kaphision fils de Xennias) est le fils d’un polémarque sous Damatrios (I) (IG VII, 2825) : Damatrios (I), on va le voir, est postérieur de quatre ans ; un père peut sans difficulté être polémarque avec un fils de 24 ans (il aurait alors probablement entre 50 et 60 ans) ; |
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un polémarque (Kallon fils de Kallon) est à nouveau polémarque sous Damatrios (I) (IG VII, 2825) : Kallon a exercé deux fois la polémarchie à cinq ans d’intervalle, ce qui ne pose aucune difficulté ; |
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un polémarque (Athanadoros fils de Philomeilos) est à nouveau polémarque sous Euklidas (IG VII, 2827) : là encore, Euklidas est tout proche chronologiquement. Cela ne pose aucune difficulté. |
- 42 Sur l’identification entre Ar… et Aristomachos, voir Feyel 1942, p. 34 ; Étienne, Knoepfler 1976, p (...)
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Le secrétaire (Proppidas fils de Damoxenos) est le fils d’un polémarque en activité cette année‑là, puis il est polémarque sous Kaphisotimos (IG VII, 2829) et Ar… (IG VII, 2816) : Proppidas, magistrat en même temps que son père, doit être assez jeune (ca 25‑35 ans, père âgé de 50‑65 ans). Il a donc environ 30‑40 ans sous Kaphisotimos, et entre 35 et 50 ans sous Ar…, qui est probablement Aristoklès, comme on va le voir, et non Aristomachos (I) ou (II)42 ; |
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un polémarque (Kalonikos fils de Klistheneis) est polémarque sous Nikasaretos ( Étienne, Knoepfler 1976, no 2) et Apollodoros (IG VII, 2809) ; il est à nouveau polémarque sous Aristoklès (IG VII, 2816) : le lien avec Aristoklès n’est pas problématique. En revanche, la date de Nikasaretos et d’Apollodoros l’est : ces archontes peuvent soit dater de 230‑225, soit de 200 environ. Dans les deux cas, la carrière de Kalonikos est plausible ; |
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un polémarque (Poliouchareis fils de Damocharidas) était conscrit sous Kallistratos ( Étienne, Knoepfler 1976, no 1) : Poliouchareis est un jeune polémarque (35 ans environ) ; mais cela est cohérent, car son fils est attesté comme conscrit bien plus tard, sous Eumaridas (IG VII, 2819). |
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Un conscrit (Moukrinos fils de Damon) est le fils d’un polémarque sous Théotimos (IG VII, 2822) : Damon, le père de Moukrinos, doit être âgé de 45‑50 ans sous Euklidas ; il peut parfaitement avoir été polémarque dix ans plus tard ; |
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un polémarque (Athanadoros fils de Philomeilos) a déjà été polémarque sous Potidaïchos (IG VII, 2820) : voir supra ; |
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un polémarque (Athanadoros fils de Philomeilos) a un fils conscrit sous Agatharchidas (IG VII, 2823) : en conséquence, Agatharchidas ne peut guère être daté après 190. |
- 43 Deux listes voisines, à Hyettos, sont datées d’un archonte Damatrios (IG VII, 2825 et 2826). Il doi (...)
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Un conscrit (Damatrios fils de Philostratos) est secrétaire sous Kaphisias (II) (IG VII, 2818) : voir supra ; |
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un polémarque (Kallon fils de Kallon) a déjà été polémarque sous Potidaïchos (IG VII, 2820) ; un autre polémarque (Xennias fils de Kaphision) est le père d’un conscrit sous Potidaïchos : voir supra ; |
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le secrétaire (Damagathos fils de Mnasippos) est le fils ou le père d’un polémarque sous Aristomachos (IG VII, 2810) ; il est ensuite polémarque sous Kaphisotimos (IG VII, 2829) et Philon (II) (IG VII, 2815) : Aristomachos est très probablement Aristomachos (I), qui doit dater d’avant 225 ; il n’y a aucune objection à ce qu’un homme soit secrétaire une dizaine d’années après la polémarchie de son père. Damagathos est ensuite devenu polémarque sous Kaphisotimos. Philon (II) est probablement à placer vers 200, en tout cas avant 190. |
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Un polémarque (Wanaxandros fils de Dioniousiodoros) a été conscrit sous Aristomachos (IG VII, 2810) ; il est à nouveau polémarque sous Philon (II) (IG VII, 2815) : Wanaxandros est un jeune polémarque (un peu moins de 40 ans) ; il a de nouveau été polémarque à un âge plus avancé, mais probablement avant ses 60 ans. Ce lien tend à confirmer la date proposée pour Philon (II) : il y a deux magistrats en commun entre les listes de Kaphisotimos et de Philon (II), qui ne peut donc être postérieur de plus de vingt ans. Il est à noter que Wanaxandros a un fils secrétaire sous Ariston (IG VII, 2824) et polémarque sous Eumaridas (IG VII, 2819), ce qui invite à placer ces deux archontes après 200 ; |
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un polémarque (Damagathos fils de Mnasippos) est le fils d’un polémarque sous Aristomachos (IG VII, 2810) ; il a été secrétaire sous Damatrios (I) (IG VII, 2825) et Philon (II) (IG VII, 2815) : voir supra ; |
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le troisième polémarque (Proppidas fils de Damoxenos) a été secrétaire sous Philon (I) (IG VII, 2813) ; il est à nouveau polémarque sous Aristoklès (IG VII, 2816) : voir supra. |
33Deux des polémarques sous Kaphisotimos sont indéniablement assez jeunes, puisque l’un a été conscrit sous Aristomachos, un peu plus de dix ans auparavant, tandis que l’autre a été secrétaire peu de temps auparavant et doit donc avoir 40 ans environ. Cela explique qu’ils aient pu poursuivre leur carrière ensemble, sous Philon (II), dix à vingt ans plus tard.
34Seules les deux premières lettres du nom de cet archonte sont préservées sur la pierre ; je propose de voir dans cet archonte, traditionnellement interprété comme Aristomachos (I) ou (II), l’archonte Aristoklès. Au prix de cette hypothèse, la liste IG VII, 2816 s’insère parfaitement dans la suite chronologique présentée ici.
- 44 Pour Artylaos, cela est très net : un conscrit sous Artylaos, Mnasinos fils de Polioukleis, est le (...)
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Un polémarque (Kalonikos fils de Klistheneis) a déjà été polémarque sous Nikasaretos (Étienne, Knoepfler 1976, no 2), Apollodoros (IG VII, 2809) et Philon (I) (IG VII, 2813) : voir supra. La présence de ce polémarque à la longue carrière oblige à placer Aristoklès en 208 ou très peu après ; par conséquent, il y a probablement peu d’archontes à insérer dans la série décrite ci‑dessus ; |
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un polémarque (Proppidas fils de Damoxenos) a été secrétaire sous Philon (I) (IG VII, 2813) et polémarque sous Kaphisotimos (IG VII, 2829) : voir supra ; |
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un polémarque (Eumeilos fils de Dason) a été secrétaire sous Kteisias (IG VII, 2830) ; son fils est conscrit sous Théotimos (IG VII, 2822) : Kteisias doit être daté d’avant 225, et probablement très précisément de l’année 226. Tout jeune secrétaire à ce moment (30 ans environ), Eumeilos a parfaitement pu devenir polémarque une vingtaine d’années après, à un âge mûr ; d’ailleurs, son fils est attesté comme conscrit l’année suivante. Un polémarque homonyme est attesté sous Artylaos et sous Ariston ; ces deux archontes doivent dater de la fin du iiie siècle44, et il pourrait donc s’agir du même homme, qui aurait ainsi eu une belle carrière, étalée sur une vingtaine d’années. |
- 45 Il a donc probablement été secrétaire après avoir été polémarque. Y. Kalliontzis énonce à plusieurs (...)
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Un conscrit (Dason fils d’Eumeilos) est le fils d’un polémarque sous Aristoklès (IG VII, 2816) : voir supra ; |
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un conscrit (Pouthodoros fils de Hermaïondas) est secrétaire sous Philon (II) (IG VII, 2815) : Philon (II) est à dater au tournant du iiie et du iie siècle av. J.‑C., comme on l’a vu. Il s’agit donc d’un jeune secrétaire, âgé de 30 ans ou même un peu moins ; |
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un polémarque (Polioukleis fils de Mnasinos) a un fils conscrit sous Artylaos (IG VII, 2812) ; un polémarque du même nom est attesté sous Agatharchidas (IG VII, 2823), et un secrétaire sous Philoxenos (IG VII, 2811) : Polioukleis a déjà au moins 40 ans sous Théotimos, car l’archontat d’Artylaos est à placer peu de temps après ; il n’est pas possible que le Polioukleis magistrat sous Agatharchidas soit son petit‑fils, car cela obligerait à placer cette liste très bas, après 180, et cela n’en ferait pas moins un très jeune magistrat. Je crois donc plutôt que c’est bien le même Polioukleis qui a poursuivi sa carrière pendant une quinzaine d’années45. |
35On peut maintenant proposer une date pour les archontes postérieurs attestés à Hyettos. Il faut entendre cette date, bien entendu, comme une approximation : un archonte daté vers 200 peut en réalité être rattaché aux dernières années du iiie siècle aussi bien qu’aux premières années du iie siècle – et il ne s’agit là que d’une première approche, qui demande à être confirmée par d’autres données.
- 46 En conséquence, Pouthogeneis fils de Damonikos, polémarque dans ces deux listes, est nécessairement (...)
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vers 200 av. J.‑C. : Artylaos, Dioniousios, Philon (II), Philoxenos |
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vers 190 av. J.‑C. : Agatharchidas, Ariston, Eumaridas, Hipparchos |
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vers 180 ou après : Damatrios (II), Nikias46 |
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date incertaine : Apollodoros, Nikasaretos. |
36La date d’Apollodoros et de Nikasaretos est problématique. Une hypothèse haute, appuyée par la présence d’un unique adjectif patronymique dans la liste de l’archonte Apollodoros (IG VII, 2809 : le polémarque Ϝαρµίχω Ϝαρµιχίω), consisterait à placer ces deux archontes vers 230 ; cependant, l’un des magistrats communs de ces deux listes, Thrasoulaïdas fils de Kallidamos, a un fils conscrit sous Eumaridas, quarante ans plus tard environ – il faudrait donc qu’il ait été père très tard. L’hypothèse basse consiste à faire fi de la présence de cet unique adjectif patronymique pour dater ce groupe vers 200 ; les autres liens attestés entre ces listes et avec d’autres catalogues ne posent guère de problème à cet égard.
37On connaît enfin à Hyettos trois listes sans nom d’archonte, sans doute datées de la décennie 170‑160 ; comme leur date est assurée pour des raisons externes, elles peuvent servir à vérifier la plausibilité des dates proposées ici :
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un conscrit dans IG VII, 2828 (Pasion fils de Pasion) est probablement le fils d’un conscrit sous Dioniousios (IG VII, 2817) : une génération (en toute probabilité, vingt‑cinq à quarante ans) sépare ces deux listes, ce qui est cohérent avec la date proposée pour Dioniousios ; |
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un conscrit dans IG VII, 2828 (Kaphisodoros fils de Polioureitos) est le fils d’un conscrit sous Ariston (IG VII, 2824) : là aussi, une génération sépare ces deux listes ; |
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un conscrit dans IG VII, 2831 (Diodoros fils de Diodoros) a un homonyme conscrit sous Nikasaretos (Étienne, Knoepfler 1976, no 2) : il peut s’agir soit d’un grand‑père et de son petit‑fils (hypothèse haute, qui conduirait à placer Nikasaretos avant 225), soit d’un père et de son fils (hypothèse basse, qui amènerait à dater Nikasaretos vers 200) ; |
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un conscrit dans IG VII, 2831 (Ariston fils d’Aristokleis) est le fils d’un conscrit sous Hipparchos (IG VII, 2814) ; |
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un conscrit dans IG VII, 2831 (Dioniousiodoros fils de Dioniousiodoros) est le fils d’un conscrit sous Agatharchidas (IG VII, 2814) ; |
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un conscrit dans IG VII, 2832 (Antigeneis fils d’Euodos) est le fils d’un conscrit sous Artylaos (IG VII, 2812) : encore une fois, cet écart d’une génération confirme la date proposée pour Hipparchos, Agatharchidas et Artylaos ; |
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un polémarque dans IG VII, 2831 (Tharson fils de Lileis) est le fils d’un polémarque sous Hipparchos (IG VII, 2814) et Ariston (IG VII, 2824) : c’est un argument de plus pour asseoir Hipparchos et Ariston une génération plus tôt, donc vers 200‑190. Un autre Tharson fils de Lileis est secrétaire sous Potidaïchos (IG VII, 2820). Il s’agit du grand‑père, magistrat une vingtaine d’années avant son fils et une cinquantaine d’années avant son petit‑fils. Tout cela est très cohérent ; |
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un polémarque dans IG VII, 2831 et 2832 (Épaminondas fils de Warmichos) a un homonyme conscrit sous Apollodoros (IG VII, 2809) : la date d’Apollodoros est problématique, comme on l’a vu. Ce lien prosopographique net tendrait à confirmer l’hypothèse basse, vers 200 (Épaminondas serait alors âgé de 50 ans environ) ; |
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le secrétaire dans IG VII, 2831 (Xenoklidas fils de Timon) a été conscrit sous Théotimos (IG VII, 2822) ; un autre conscrit sous Théotimos (Philokritos fils de Timon) est polémarque dans IG VII, 2832 : cela oblige à faire de Xenoklidas un secrétaire assez âgé, 60 ans environ, mais cela n’a rien d’impossible. Une alternative consisterait à insérer une séquence chronologique assez longue entre la première et la deuxième série d’Aigosthènes pour abaisser la date de Théotimos. |
38On le voit, la séquence chronologique que j’ai proposée pour le dernier quart du iiie siècle et ses implications ne produisent pas d’aberrations manifestes dans les dernières listes de la série.
39L’enjeu principal de cet article était de résoudre une difficulté posée dans la chronologie béotienne par les nouveaux catalogues militaires de Chorsiai publiés par Y. Kalliontzis et Chr. Müller. Une séquence chronologique alternative a été proposée pour la fin du iiie siècle, et ses implications ont été testées à partir des données prosopographiques de Hyettos. Cette mise à l’épreuve, si elle ne suffit pas à valider cette nouvelle séquence chronologique, montre en tout cas qu’elle est plausible.
- 47 Pol. 2.65.2. Sur ce type de combattant, voir Foulon 1996, p. 238 ; Hatzopoulos 2001, p. 66‑73 ; Juh (...)
- 48 Voir IThesp 84, l. 20‑25 ; IThesp 94, l. 2‑3 ; IThesp 201 ; SEG 3, 354. Le corps de l’agéma est gén (...)
40La chronologie récemment publiée par Y. Kalliontzis, sur bien des points, améliore considérablement les chronologies antérieures ; notamment, l’abaissement de la date de la réforme de l’armée béotienne paraît un fait acquis de façon certaine. La nouvelle date est validée par des éléments externes : le peltophore béotien qui apparaît après cette réforme est un avatar d’un type de fantassin hellénistique bien connu, le peltaste, qui est, contrairement à son homologue de la période classique, un fantassin de la ligne et non un fantassin léger ; or, la première attestation qu’on ait de ce peltaste hellénistique le place dans l’armée antigonide, à l’époque de la bataille de Sellasie (222 av. J.‑C.)47. Il est bien évident que ce sont les Béotiens qui ont imité les Macédoniens et non l’inverse – ce dont témoigne également l’apparition en Béotie du corps d’infanterie d’élite de l’agéma, attesté à partir du dernier quart du iiie siècle48. Le corps des peltastes antigonides qui apparaît à Sellasie a dû être créé quelque temps avant, sous le règne d’Antigone Doson ou, plus probablement, de Démétrios II ; la réforme militaire béotienne est donc nécessairement postérieure à 236, et est à placer dans une période de bonnes relations avec la Macédoine.
41Cependant, on a vu que l’application de cette chronologie aux données existantes posait de sérieux problèmes, à Chorsiai comme à Hyettos. Cette nouvelle chronologie ne saurait donc être considérée comme définitive, et elle ne sera pas la dernière. Chaque nouveau document publié est susceptible de bouleverser jusqu’aux points qui paraissaient les plus solidement acquis. La raison en est due à la très grande rareté des éléments externes susceptibles d’accrocher cette chronologie ; on a vu plus haut tout le parti qu’on pouvait tirer de la fondation d’Antioche du Pyrame, mais à part ce point et la date d’adhésion de la Mégaride au koinon béotien, on possède en réalité trop peu d’éléments sûrs pour passer d’une chronologie relative à une chronologie absolue.
42La base documentaire existante est pourtant riche. Il me semble que, pour l’avenir, deux pistes doivent être retenues pour l’exploiter dans les meilleures conditions et pour en extraire, autant que possible, la substantifique moelle :
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les tentatives précédentes ont largement été des travaux individuels, un nouveau chercheur s’attelant à la tâche à chaque génération – on peut mentionner cependant l’exception notable de la fructueuse collaboration entre D. Knoepfler et R. Étienne. Il me semble désormais que le progrès sur ces questions de chronologie béotienne ne peut venir que de la collaboration de plusieurs chercheurs s’associant pour tirer le meilleur parti de chaque ensemble documentaire – nous avons vu les cas d’Akraiphia et de Hyettos, mais il y a également beaucoup à faire à Orchomène, à Thespies ou à Oropos. Cela fait décidément trop pour qu’un chercheur seul puisse mener la tâche à bien ; |
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les nouvelles approches doivent mettre en place des outils informatiques pour simplifier l’étude ; le passage en revue de la prosopographie hyettienne que j’ai présenté ci‑dessus repose sur l’usage de tels outils, qui m’ont permis de mettre facilement en évidence les liens qui unissent les différentes personnes attestées. Il reste cependant beaucoup à faire pour mettre en place l’outil et la méthodologie adaptés sur ce point – une entreprise qui est susceptible d’intéresser non seulement les spécialistes de la Béotie, mais tous les épigraphistes travaillant sur les questions de prosopographie. |
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