Palenque-Lakamha’, la liminarité et l’inframonde : une perspective non-linéaire à partir de l’archéo-thanatologie et de la bio-anthropologie
Texte intégral
1L’aire maya antique est caractérisée par une grande diversité funéraire qui est souvent interprétée en termes de culte aux ancêtres et/ou d’hommage aux membres de dynasties. L’étude des espaces sépulcraux, notamment ceux contenus à l’intérieur de temples pyramidaux, donnerait ainsi des arguments en faveur de l’existence de hiérarchies sociales et de relations coercitives entre les habitants des anciennes agglomérations mayas. Hormis la monumentalisation sur une période de temps limitée et l’existence de stèles qui font mention de lignages, peu d’éléments existent cependant pour corroborer l’expression de tels rapports de pouvoir. L’étude archéo-thanatologique récente de l’ensemble de contextes mortuaires et l’analyse bio-anthropologique des caractéristiques biologiques et culturelles des personnes inhumées pendant le Classique maya, juste avant "l’effondrement", à Palenque-Lakamha’ (Chiapas) suggèrent d’autres chemins interprétatifs. L’échantillon analysé englobe les squelettes de personnes dont la fouille du contexte sépulcral a eu lieu au cours de ces 75 dernières années – il représente un total de 132 contextes mortuaires et de 277 individus. L’existence de séquences rituelles funéraires sur le temps long, la sélection d’individus adultes, la distribution d’espaces sépulcraux sur l’ensemble du lieu et dans tous types d’espaces, l’identification d’un patron codifié de traitement mortuaire suggèrent que Palenque-Lakamha’ pourrait avoir été un site sacré de pèlerinage lié au moment liminal de passage dans l’inframonde. Bien qu’un groupe réduit d’individus semble avoir bénéficié de manière élitiste du lieu pendant une courte période de temps, son organisation "nécropolitaine" indique une autre fonction que celle de centralisation du pouvoir. Les retours fréquents aux espaces sépulcraux impliquent par exemple et avant tout l’existence d’une communauté de morts-vivants. La situation topographique du site, le type d’agriculture pratiquée, ainsi que des éléments iconographiques et épigraphiques, et la comparaison avec des données ethnographiques coïncident avec l’interprétation de Palenque-Lakamha’ comme un lieu clé de la cosmo-géographie maya antique.
Pour citer cet article
Référence électronique
Alizé Lacoste Jeanson et Luis Fernando Núñez Enríquez, « Palenque-Lakamha’, la liminarité et l’inframonde : une perspective non-linéaire à partir de l’archéo-thanatologie et de la bio-anthropologie », Bulletins et mémoires de la Société d’Anthropologie de Paris [En ligne], 37(S) | 2025, mis en ligne le 16 janvier 2025, consulté le 10 février 2025. URL : http://journals.openedition.org/bmsap/15054 ; DOI : https://doi.org/10.4000/133ot
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