Décomposer la variation morphologique avec le package prWarp : quelles applications pour l’étude des primates humains et non-humains ?
Texte intégral
1Les caractères morphologiques des humains résultent d’une longue histoire évolutive au cours de laquelle notre espèce a dû s’adapter à une grande variété d’environnements. Ces changements morphologiques sont eux-mêmes biaisés par des contraintes fonctionnelles, génétiques ou développementales. Par conséquent, il est souvent difficile de déterminer les processus évolutifs ayant eu le plus d’influence dans l’apparition et/ou le maintien d’un caractère morphologique donné, surtout dans les cas d’autapomorphies ou lors de radiations adaptatives, dans lesquelles les modifications adaptatives sont corrélées à la phylogénie. Si les changements adaptatifs peuvent se produire simultanément à ceux qui sont liés à la dérive génétique, ces deux processus n’affectent néanmoins pas exactement les mêmes structures, puisque les premiers touchent nécessairement des régions ayant une importance fonctionnelle, tandis que les seconds peuvent être neutres. Il suffit donc de décomposer une structure anatomique en deux composantes, l’une fonctionnelle et l’autre non, pour séparer les deux signaux. Le package prWarp, développé pour le logiciel R, permet de réaliser ce type de décomposition à partir de données de morphométrie géométrique. J’en montrerai deux applications à la morphologie crânienne des primates. Chez les humains, une décomposition mathématique de la variation entre ses composantes à petites et grandes échelles permet de déterminer le mode de croissance des os du crâne – coordonnée ou compensatoire. Chez les primates cercopithécoïdes, une décomposition biologiquement informée de la variation morphologique permet la distinction entre un signal adaptatif contenu dans la variation globale du contour et un signal phylogénétique contenu dans la variation locale résiduelle notamment au niveau des sutures. Ces deux nouvelles techniques de décomposition de la morphologie ont de multiples applications potentielles pour l’étude des hominines, par exemple pour reconstruire une phylogénie en l’absence de données moléculaires, ou pour comprendre les interactions entre le volume du cerveau et la morphologie des structures environnantes.
Pour citer cet article
Référence électronique
Anne Le Maître, « Décomposer la variation morphologique avec le package prWarp : quelles applications pour l’étude des primates humains et non-humains ? », Bulletins et mémoires de la Société d’Anthropologie de Paris [En ligne], 37(S) | 2025, mis en ligne le 16 janvier 2025, consulté le 10 février 2025. URL : http://journals.openedition.org/bmsap/15108 ; DOI : https://doi.org/10.4000/133ow
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