Notes de la rédaction
Ceci est le communiqué de presse relatif à l'article de Michel De Beule publié le 1 mars 2010. Accéder à la publication.
Diviser la ville en zones aussi spécialisées que possible, tel fut, résumé à l’extrême, le programme urbanistique dit « fonctionnaliste ». Bruxelles porte encore les stigmates de l’action de ceux qui, portés par ce courant théorique, prétendirent faire d’elle une ville moderne (v. Brussels Studies 22 et 29).
Expression urbanistique de la rationalité humaine, le fonctionnalisme avait besoin d’un bras armé ; ce fut, tout naturellement, la planification.
Dans la 36ème livraison de Brussels Studies, Michel De Beule (Observatoire des bureaux de la Région de Bruxelles-Capitale) s’interroge sur les relations entre la planification et l’implantation de bureaux à Bruxelles. S’attachant notamment à l’histoire de l’installation des institutions européennes, il analyse les heurs et malheurs de la planification. L’on y apprend à quels affres Bruxelles a échappé : « Les solutions avancées dans cet avant-projet, qui couvre 320 km², sont trop radicales pour être présentées au public. Le Groupe Alpha veut transformer tout Bruxelles et son hinterland. Il dépeuple le centre urbain, sans air, sans lumière et sans soleil. Il redistribue l’habitat, suivant des normes précises, et limite l’expansion des quartiers périphériques par une ceinture verte. Douze cités-satellites maintiendraient dans une orbite de 25 à 30 kilomètres la main-d’œuvre dont la capitale a besoin. »
Par bonheur, pourrait-on presque dire, il y a loin de la planification à la réalisation et le Quartier européen sera transformé de manière pragmatique et erratique. Les hésitations sur la localisation du siège de la CEE ont encouragé l’attentisme et la mise en place de solutions provisoires, appelées à durer.
La toile de fond de ce dossier est l’accroissement et la concentration formidables du parc immobilier de bureaux à Bruxelles : 615.000 m2 en 1949, 1,3 millions une dizaine d’années plus tard et 3,3 millions à la fin des années 1960, soit un quintuplement en vingt ans.
Ce qui nous apparaît aujourd'hui comme la destruction d’une ville s’effectue alors sans protestation, les habitants abandonnant volontiers leurs maisons du Quartier Léopold et des alentours moyennant une forte plus-value. Et les plans continuent de voir le jour (comme le célèbre Plan Manhattan, voir Brussels Studies 29), et les autoroutes urbaines d’attirer de nouveaux immeubles de bureaux.
En 1970, un nouvel avant-projet de plan de secteur modère la radicalité des options retenues jusqu’alors (démolition-reconstruction), sans pour autant régler le sort du Quartier Léopold. S’ouvre alors une période de luttes et de contestations de l’implantation anarchique des bureaux dans la capitale. La régionalisation et l’adoption du plan de secteur ne permettent cependant pas de stopper la bruxellisation. Si le plan de secteur n’abandonne qu’une zone aux bureaux – le Quartier européen – il va être détricoté pendant vingt ans, au gré d’innombrables dérogations. L’implantation de bureaux restera donc peu encadrée. C’est ainsi que, fin 1999, 47% des 10 millions de m2 de bureaux (installés dans des entités immobilières comptant au minimum 1000 m2) sont comptabilisés en dehors des zones administratives définies par le plan de secteur.
Aujourd’hui, entre Plan régional de développement (PRD, 1 et 2), Plan régional d’affectation du sol (PRAS), schémas directeurs (Brussels Studies 30), crise immobilière et hausse du marché immobilier résidentiel, se pose la question de l’avenir de la planification. Après une suite de rendez-vous manqués et d’échecs de la planification, assisterons-nous à un développement urbanistique maîtrisé et démocratique ?
Pour citer cet article
De Beule, Michel, « Bureaux et planification à Bruxelles, 50 ans d’occasions manquées ?», Brussels Studies [En ligne], Collection générale, n° 36, mis en ligne le 1 mars 2010, URL : https://journals.openedition.org/brussels/751
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