1On n’attendra guère de cet ouvrage qu’une première esquisse sur le « réseau des hôpitaux d’Aragon au Moyen Âge » dont la thèse récente (mais inédite) de Mercedes Blasco Solana, soutenue à Saragosse en 2014, avait offert un panorama précis touchant le développement des institutions d’assistance dans les campagnes aragonaises. Cristina Pérez Galá s’était déjà attachée quant à elle au volet urbain de l’hospitalisation, pour Huesca et Saragosse notamment (2013). Comme ailleurs, les sources documentaires sont extrêmement dispersées, selon un éparpillement qui correspond à l’histoire propre de chaque établissement et à une conception hospitalière extensive : les travaux d’érudition locale ou les études souvent ponctuelles se doivent d’être rassemblés pour aboutir à des inventaires de plus large échelle ; on commence ainsi à avoir progressivement une image de plus en plus complète pour l’Europe entière. Pour la péninsule ibérique, Maria de Lurdes Rosa a par ex. donné une première évaluation touchant au Portugal dans le volume que nous avions dirigé sur l’Archéologie et l’architecture hospitalières de l’Antiquité tardive à l’aube des temps modernes (Paris, Boutique de l’histoire, 2004). C’est une forte densité d’implantations qui est ici constatée : 272 établissements répartis en 170 localités sont repérables depuis la fin du xi^e s. (à Jaca en 1080 puis 1115 ; au Somport v. 1100, à Barbastro en 1103 et, en 1413, la fondation à Alcañiz du premier grand hôpital général du royaume, amorce un mouvement de regroupement appelé à remplacer les anciennes formules). 203 sont bien documentés dès l’époque médiévale, parmi lesquels on distingue une demi-douzaine ‒ ce qui est une faible proportion, en l’état actuel des investigations ‒ de léproseries (informées à Huesca à partir de 1195 ou à Saragosse en 1199) et quelques structures d’assistance juives (plus tardivement attestées, à Huesca toujours en 1279, ou encore à El Frajo, Luna ou Saragosse). Huit tableaux et cartes sont proposés par district ainsi qu’une carte générale : une première géographie hospitalière apparaît donc ici, à peine commentée, alors qu’on est frappé du plus grand nombre situé à l’ouest en particulier entre Calatayud et Lechago et d’apparition documentaire plus tardive ; l’idée rémanente des installations liées aux voies de pèlerinage (que n’a-t-on dit de Santiago ?!) demeurant ici une hypothèse vivace. Celle de « réseau », proprement dit, reste à davantage démontrer.

2Hormis une typologie générale des sources fort théorique (p. 24-25), aucun détail n’en transparaît et aucune ne semble avoir été directement consultée : les seuls référencements renvoient à des travaux généraux (Antonio Serrano, La población de Aragón, Saragosse, Institución Fernando el Católico, 1997, par ex.), ou à des éditions que l’on a parfois du mal à retrouver dans la bibliographie générale (Francisco Castillón, 1997, entre autres). L’a. ne livre aucun des dossiers relatifs à chaque communauté, ni l’ensemble des ressources utilisables (recensements, archives ecclésiastiques ou seigneuriales, cartes, documentation plus large, iconographique ou topographique par ex., on ne note qu’une seule courte allusion à l’archéologie). La bibliographie, précieuse sur le thème régional, ignore les travaux en d’autres langues que castillane, catalane ou italienne ce qui est dommageable pour une réflexion approfondie sur le phénomène à analyser. Elle ignore quand même le beau travail d’Antoni Cardoner Planas, Història de la Medicina a la Corona d’Aragò, 1162-1479, édité à Barcelone en 1973, domaine qu’il eût été bon de relier à cette approche. Enfin, plutôt qu’une restriction à la géographie de l’actuelle province d’Aragon, une investigation étendue aux fonds d’archives catalanes apparaîtrait plus que nécessaire quand on sait l’union pluriséculaire de ces territoires en un même royaume. Une vision d’historien s’impose : peut-être à venir ?