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Dossier thématique

Ignorance et argument scientifique

Le cas de la dématérialisation des ressources (phyto)génétiques
Pierre Walckiers
p. 125-136

Résumés

Cette contribution analyse l’utilisation d’arguments scientifiques dans les négociations internationales sur le statut des Digital Sequence Information (DSI), notamment à la Convention sur la diversité biologique (CDB), le Traité international sur les ressources phytogénétiques pour l’alimentation et l’agriculture (TIRPAA), ainsi que dans d’autres instruments connexes. Le terme DSI désigne les informations résultant du séquençage des ressources génétiques. Tandis que la CDB ou le TIRPAA réglementent l’usage des ressources génétiques « physiques » par des règles d’Accès et de Partage des Avantages (APA), la question des DSI n’est pas claire, voire délibérément ignorée. Avec une approche interdisciplinaire, cette contribution examine l’utilisation de narratifs scientifiques dans ces débats. Bien qu’ils soient essentiels dans ces discussions, les arguments scientifiques peuvent être utilisés de manière épistocratique, et leur utilisation n’est pas toujours cohérente selon les instruments.

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Texte intégral

  • 1 Convention sur la diversité biologique, adoptée le 5 juin 1992 à Rio de Janeiro, entrée en vigueur (...)
  • 2 Traité international sur les ressources phytogénétiques pour l’alimentation et l’agriculture (avec (...)
  • 3 K. Raustiala et D.G. Victor, « The Regime Complex for Plant Genetic Resources », International Orga (...)

1Dans le cadre de nos réflexions communes sur l’ignorance et le droit, cette contribution analysera de manière critique l’utilisation d’arguments scientifiques dans les négociations internationales sur le statut juridique des Digital Sequence Information (DSI). Les DSI sont au cœur de vives négociations dans les instruments internationaux relatifs aux règles d’Accès et de Partage juste et équitable des Avantages (APA) pour les ressources génétiques, notamment auprès de la Convention sur la diversité biologique (CDB)1 et le Traité international sur les ressources phytogénétiques pour l’alimentation et l’agriculture (TIRPAA)2. La CDB est la convention-cadre pour l’ensemble des ressources génétiques, mais d’autres instruments existent pour encadrer des domaines spécifiques, comme les semences, les virus, ou encore les ressources génétiques marines3.

  • 4 M. A. Bagley, «  “Just” Sharing : The Virtues of Digital Sequence Information Benefit-Sharing for t (...)
  • 5 C. Frison, op. cit., p. 83.
  • 6 R. Wynberg et al., « Farmers’ Rights and Digital Sequence Information : Crisis or Opportunity to Re (...)
  • 7 M. A. Bagley, art. cité, p. 6.

2Le phénomène de dématérialisation des ressources génétiques fragilise ces instruments d’APA, pourtant déjà critiqués4. Pour Frison, les DSI sont le résultat d’un processus de « dématérialisation » des ressources génétiques, soit l’extraction des informations d’une ressource génétique, traitée et échangée en tant que telle5. Avec les progrès en matière de séquençages, les pratiques scientifiques utilisent de plus en plus de DSI sans passer par les ressources génétiques physiques6. Derrière ce vocable « DSI », l’étendue et le type d’informations comprises sont encore sujets à discussion. Retenons temporairement que les DSI pourraient inclure les données ADN et ARN, les séquences de protéines, les métabolites, ou les connaissances associées, ou encore les savoirs traditionnels7.

  • 8 S. Aubry, « The Future of Digital Sequence Information for Plant Genetic Resources for Food and Agr (...)

3Cependant, le statut juridique de ces DSI est sujet à d’importantes controverses. Contrairement aux ressources génétiques physiques qui entrent dans le champ d’application de la CBD et du TIRPAA et sont soumises aux règles d’APA, le statut juridique des DSI est ambigu, incertain et parfois délibérément ignoré. De fait, ceux-ci sont stockés dans des bases de données librement accessibles, sans identification, et sans répondre aux règles d’APA8. Dans cette voie, de vives tensions et des blocages apparaissent dans les négociations internationales sur les DSI, en ce qui concerne leur (non)-régulation. Dans les conférences des parties (COP) à la CBD et les réunions de l’organe directeur (GB) du TIRPAA, il y a eu de persistantes oppositions entre Nord-Sud sur ces questions, avant de récemment parvenir à un accord (encore à négocier) lors de la COP15 en 2022.

  • 9 O. Corten, Méthodologie du droit international public, Bruxelles, Éditions de l’université de Bruxe (...)
  • 10 A. Viala (dir.), Demain, l’épistocratie ?, Le Kremlin-Bicêtre, Mare et Martin, 2022, p. 17 ; B. Lat (...)

4En nous concentrant sur les argumentations venant des États, nous chercherons à identifier les utilisations des arguments scientifiques dans les négociations sur les DSI. Nous mobiliserons une approche interdisciplinaire avec de la technique juridique, de la philosophie du droit, de la philosophie des sciences et de l’analyse discursive9. Notre hypothèse est que les membres impliqués dans les négociations mobiliseront des « narratifs scientifiques » pour justifier des décisions et des interprétations qui leur seraient favorables. Bien que l’appui de la science semble indispensable dans ces questions techniques, les arguments scientifiques peuvent aussi être utilisés de manière rhétorique pour renforcer les positions juridiques ou politiques. En l’occurrence, un argument scientifique peut être utilisé comme étant « objectif » et se placer au-dessus des discussions politiques10. Malgré le côté technique de la problématique, elle entraîne aussi des questions éthiques, politiques et ontologiques qui ne peuvent être disqualifiées a priori. Après la présentation du régime juridique des ressources génétiques (I), nous présenterons les problématiques des DSI et analyserons les usages des sciences dans ces débats (II).

I.Le Regime Complex des ressources génétiques face aux DSI

5Cette partie a pour objectif d’identifier les règles de droit international public relatives aux ressources génétiques et les implications des DSI sur celui-ci.

A.Le Regime Complex des ressources génétiques

  • 11 K. Raustiala et D.G. Victor, art. cité, p. 7.
  • 12 J. Tschersich, « Norm conflicts as governance challenges for Seed Commons : Comparing cases from Ge (...)

6Les ressources génétiques font partie d’un « Regime Complex », car plusieurs instruments internationaux et (supra)nationaux indépendants coexistent et corégulent ce sujet11. Outre les règles d’APA, le Regime Complex des ressources génétiques est également influencé par le droit de propriété intellectuelle, les règles sanitaires, d’accès au marché, etc.12.

  • 13 Protocole de Nagoya sur l’accès aux ressources génétiques et le partage juste et équitable des avan (...)
  • 14 CDB, art. 1 ; TIRPAA, art. 1 ; C. Lawson, F. Humphries et M. Rourke, « The future of information un (...)
  • 15 A. Alexis, « Les controverses sur le séquençage numérique des ressources génétiques à la Convention (...)
  • 16 Id.

7Une branche de ce Regime Complex concerne les mécanismes d’APA, avec la CBD (adoptée en 1992) en tant que convention-cadre pour l’ensemble des ressources génétiques. Pour mettre en œuvre le mécanisme d’APA, le Protocole de Nagoya a été conclu en 201013. La CBD a pour objectif la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité, établissant des règles d’accès aux ressources génétiques et de partage juste et équitable des avantages découlant de leurs utilisations14. La CDB reconnaît le droit souverain des États sur leurs ressources génétiques : leurs accès se fait à la condition d’un consentement préalable en connaissance de cause (CPCC) et de conditions convenues de communs accords (CCCA)15. En quelque sorte, l’accès aux ressources génétiques est négocié en échange de partage des avantages, par le biais d’un contrat bilatéral, ce qui est parfois critiqué pour être long et complexe16.

  • 17 J. Tschersich, art. cité, p. 2‑3.
  • 18 R. Wynberg et al., art. cité, p. 8.
  • 19 C. Frison, op. cit., p. 85.
  • 20 A.-R. Hampton, « Pathogen dematerialization and the ABS loophole », Journal of Law and the Bioscien (...)

8Pour des types spécifiques de ressources génétiques (les semences, les virus, les ressources génétiques marines), des instruments spécifiques de droit international ont été adoptés17. Par exemple, le TIRPAA est un traité juridiquement contraignant spécialisé pour les semences, lequel établit un système multilatéral d’APA18. Ce système multilatéral vise à faciliter l’accès aux semences tout en assurant un partage juste et équitable des avantages découlant de leur utilisation19. D’autres instruments spécifiques d’APA peuvent être mentionnés. Pour les ressources marines, il y a la Convention des Nations unies sur le droit de la mer et son récent Accord sur les zones ne relevant pas de la juridiction nationale. Dans le cadre de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), le cadre de préparation en cas de grippe pandémique (PIP) est un mécanisme (non contraignant) adopté en 2011 pour l’accès et le partage des avantages concernant le virus de la grippe20. Notons que les DSI ont été des sujets importants dans les négociations d’instruments plus récents, comme le nouvellement adopté Traité sur les ressources génétiques et les savoirs traditionnels associés (adopté en mai 2024) ou dans les négociations à l’OMS pour l’adoption d’un traité sur la pandémie.

B.Les DSI et la fragmentation du Regime Complex

  • 21 S. Aubry et al., « Bringing access and benefit sharing into the digital age », Plants, people, plan (...)
  • 22 M. R. Bond et D. Scott, « Digital biopiracy and the (dis)assembling of the Nagoya Protocol », Geofo (...)
  • 23 M. Halewood et al., « Plant genetic resources for food and agriculture : opportunities and challeng (...)

9Ces instruments d’APA sont face à un tournant dû à la dématérialisation des ressources génétiques. Les DSI sont de plus en plus générés et publiés grâce aux avancées technologiques qui ont accéléré et réduit les coûts de séquençage21. Les DSI présentent de nombreux avantages pour la recherche et la manière de travailler des scientifiques a radicalement changé22. Par exemple, les DSI sont utilisés pour mieux caractériser une ressource génétique, créer des vaccins, ou sélectionner ou modifier des plantes23.

  • 24 M.A. Bagley, art. cité, p. 21, 22.
  • 25 C. Lawson, F. Humphries et M. Rourke, art. cité.
  • 26 A. Bendimred et C. Frison, « Séquençage des données issues des ressources génétiques : trouble-fête (...)

10Néanmoins, cet usage sans règles des DSI n’est pas sans critique. Dans cette voie, plusieurs pays et activistes dénoncent un « biopiratage numérique », car des ressources génétiques peuvent être extraites, séquencées, publiées, commercialisées et privatisées sans le consentement des pays fournisseurs24. Contrairement aux ressources génétiques physiques, les DSI ne permettent pas aux États d’exercer leur souveraineté en termes d’accès aux ressources et de suivi de leurs utilisations25. En pratique, des entreprises peuvent accéder gratuitement au matériel génétique séquencé sans négocier ni compenser les connaissances locales, alors qu’elles peuvent ensuite privatiser les usages des ressources génétiques physiques par des systèmes de propriété intellectuelle26. Le contraste est frappant : les variétés génétiques qui circulent dans le monde se présentent désormais sous la forme de DSI librement accessibles, tandis que l’échange physique de semences entre agriculteurs se heurte à des obstacles juridiques dans certains pays.

  • 27 S. Aubry et al., art. cité, p. 6 ; M. R. Bond et D. Scott, art. cité.
  • 28 A.-R. Hampton, art. cité, p. 15.

11À ce stade, cet accès illimité aux DSI est la conséquence d’un statu quo soigneusement maintenu sur la différence entre les ressources génétiques « matérielles » et « immatérielles ». Il y a eu de longues discussions pour savoir si les DSI peuvent être compris dans la définition du « matériel génétique » de l’article 2 de la CDB et du TIRPAA27. Sans entrer dans des analyses juridiques détaillées dans cette contribution, les négociations internationales peuvent se résumer par des oppositions fortes entre les groupes d’États sur ce sujet28.

  • 29 C. Lawson et M. Rourke, « Digital sequence information as a marine genetic resource under the propo (...)
  • 30 A. Bendimred et C. Frison, art. cité, p. 419.
  • 31 C. Lawson et M. Rourke, art. cité, p. 8.

12En effet, les pays du Nord vont considérer que les DSI ne sont pas des ressources génétiques et qu’il faudrait renégocier les traités pour les inclure (notamment l’Australie, le Canada, l’Union européenne, le Japon, la Corée du Sud, les États-Unis et la Suisse) (COP15)29. Par exemple, le Canada affirme que le système d’APA ne s’applique qu’au matériel génétique, et que le terme matériel n’inclut pas les informations intangibles comme les DSI (COP13, COP 15)30. Pour l’Australie, les DSI ne répondent pas aux définitions de matériel génétique ou à ses utilisations, et on ne peut y appliquer les règles d’APA sans renégocier le système (COP15)31. Ces pays vont affirmer que réguler les DSI va limiter le progrès de la science, et que la mise en libre accès des DSI serait un partage des avantages non monétaires (COP15).

  • 32 M. R. Bond et D. Scott, art. cité, p. 9.
  • 33 Ibid., p. 2.
  • 34 Ibid., p. 27.
  • 35 A. Bendimred et C. Frison, art. cité, p. 424.

13De manière opposée, plusieurs pays du Sud global estiment que l’usage des DSI doit impliquer les règles d’APA, et certains ont adapté leurs règles nationales en ce sens (COP14, COP15)32. La Namibie avait signalé que l’usage des séquences génétiques allait impacter fortement la CDB (COP13)33. L’Indonésie, le Brésil ou encore la RDC avaient également rappelé l’applicabilité de la souveraineté nationale sur les DSI (COP13, COP15)34. En outre, le Brésil et l’Argentine rappellent l’ambiguïté du terme matériel, utilisé comme substantif et non adjectif, et qui n’est pas l’équivalent de tangible (COP15)35.

  • 36 CDB, Decision 15/9. Digital sequence information on genetic resources, CBD/COP/DEC/15/9, 19 déc. 20 (...)
  • 37 TIRPAA, Résolution 16/24/ consideration of Digital Sequence Information / Genetic Sequence Data on (...)

14Plus récemment, les dernières réunions ont éclipsé cette première question sur le matériel génétique, pour se concentrer sur l’application de règles d’APA ad hoc aux DSI. En fait, un début de solution (encore à négocier) a été initié en 2022. En effet, la récente conférence des parties (COP15) de la CDB a ouvert la voie à un système multilatéral avec un fonds global intégrant les avantages liés à l’utilisation des DSI, et un accord sur le fait que les bénéfices de l’usage des DSI doivent être partagés équitablement (Décision 15/9)36. Malgré des différends, cette décision a été « accueillie » par la dernière réunion de l’organe directeur du TIRPAA en novembre 2023 (Résolution 16/2023)37.

C.Les DSI comme un problème hybride

  • 38 B. Latour, Nous n’avons jamais été modernes, Paris, La Découverte, 2013, p. 13 ; I. Stengers, Une a (...)
  • 39 G. de Vries, Bruno Latour. Une introduction, Paris, La Découverte, 26 avr. 2018, p. 161 ; I. Stenge (...)
  • 40 B. Latour, op. cit., p. 20.
  • 41 I. Stengers, Au temps des catastrophes, Paris, La Découverte, 2013.

15Pour conclure, les négociations sur les DSI peuvent rappeler les problématiques « hybrides » que Latour ou Stengers ont théorisées. Ces hybrides vont mettre à mal ce « grand partage » qui sépare les sciences naturelles (chargées de comprendre la nature) de la politique (régulant la vie sociale)38. Au contraire, les hybrides lient les problématiques techniques, la gestion de l’ignorance et leurs grandes implications sociales39. En somme, ce sont des problématiques qui combinent des questions techniques, de l’incertitude et des préoccupations légitimes pour des acteurs hétérogènes40. Démontrant des continuités complexes entre nature et politique, les exemples d’hybrides peuvent être les OGM, le trou dans la couche d’ozone, ou la crise de la vache folle, etc.41.

  • 42 S. Whatmore, Hybrid geographies : natures, cultures, spaces, Londres, Sage, 2002, p. 103 ; B. Latou (...)
  • 43 A. Alexis, art. cité, p. 57.
  • 44 M.A. Bagley, art. cité, p. 6.

16Les DSI sont bien des problématiques « hybrides », car il y a une combinaison de questions techniques, des objectifs politiques divergents, des questions éthiques, ontologiques et politiques et des conséquences sociales importantes (pour les politiques et industriels, les peuples autochtones et les communautés agricoles)42. Sur ces questions hybrides, il n’est pas possible de faire appel à la science comme arbitre neutre et désintéressé. Et pourtant, les négociations à la CBD et au TIRPAA se sont marquées par une volonté de faire un processus de politique basé sur la science43. C’est à partir de ce prisme que nous voulons analyser l’usage des sciences dans les DSI. En effet, dans ce contexte, les rhétoriques scientifiques ne sont pas neutres et exercent des influences sur les négociations internationales44.

II.Les usages des sciences dans les DSI

  • 45 B. Latour, op. cit., p. 30.
  • 46 A. Viala, op. cit., p. 17.
  • 47 J. Tallberg et M. Zürn, « The legitimacy and legitimation of international organizations : introduc (...)

17Lorsqu’on analyse les débats relatifs aux DSI, les parties mobilisent des narratifs scientifiques, non pas dans une approche pour créer des savoirs, mais afin de construire un argument. Pour présenter nos positions, nous sommes critiques sur l’utilisation épistocratique des arguments scientifiques afin de revendiquer une prétendue vérité neutre et objective, et faire autorité dans les discussions politiques45. Nous utiliserons le concept d’épistocratie, qui identifie un idéal type de justification dans lequel le pouvoir serait légitime en fonction de l’expertise savante46. En l’occurrence, ce concept est utile pour identifier l’émergence de narratifs et de justifications techniques et scientifiques par les États47.

  • 48 Pour d’autres analyses : C. S. Vogeler et al., « Agri-food technology politics : Exploring policy n (...)
  • 49 J. Favre, « Épistocratie et droit global », in A. Viala (dir.), Demain, l’épistocratie ?, op. cit., (...)

18Selon nous, les narratifs scientifiques seraient utilisés stratégiquement pour renforcer la légitimité des positions politiques. Plusieurs présupposés de ces narratifs scientifiques peuvent être identifiés : la science serait le raisonnement privilégié dans ces domaines techniques, les politiques basées sur la science seraient plus rationnelles, logiques et analytiques, les approches scientifiques sont guidées par des approches à long terme, et sans intérêts particuliers48. Sur ce point, Favre a montré que les relations internationales sont un terrain fertile pour l’usage épistocratique des sciences, comme un moyen de techniciser et de dépolitiser des questions sensibles49.

  • 50 L. Tuhiwai Smith, Decolonizing Methodologies : Research and Indigenous Peoples, Londres, Zed Books, (...)
  • 51 L. Whitt, Science, Colonialism, and Indigenous Peoples : the cultural politics of law and knowledge(...)
  • 52 Ibid., p. 17, p. 157.

19Enfin, l’usage épistocratique des sciences peut être critiqué par le tournant ontologique et décolonial de la philosophie des sciences50. Dans cette voie, Whitt dénonce une double instrumentalisation des sciences qu’elle qualifie de bioimpérialisme. D’une part, la science peut être utilisée de manière rhétorique pour imposer un récit dominant (en se présentant comme le résultat de l’objectivité et de l’universalité)51. D’autre part, la science servirait à disqualifier les savoirs traditionnels pour les exploiter librement : c’est seulement une fois que ces savoirs bruts seraient traduits en innovation et invention qu’ils seraient valorisables52. Dans les négociations internationales sur les DSI, on retrouve les usages épistocratiques des sciences occidentales, et une tendance à dévaloriser ou à exclure les savoirs traditionnels.

A.Les sciences pour définir les DSI

  • 53 C. Lawson, F. Humphries et M. Rourke, art. cité, p. 7 ; M. A. Bagley, art. cité, p. 29.
  • 54 M.A. Bagley, art. cité, p. 27.
  • 55 M. R. Bond et D. Scott, art. cité, p. 7.

20Au fil des négociations sur les DSI, on retrouve une volonté de plusieurs parties d’élaborer une « politique basée sur la science », comme on peut le voir dans les demandes de définir « scientifiquement » les DSI53. Dans ce contexte, la CDB a commandé plusieurs études sur l’état actuel des DSI (concept, portée et utilisation actuelle), leurs traçabilités et leurs utilisations et sur les potentiels scénarios pour adapter les règles d’APA aux DSI54. Ces études sont fréquemment reprises dans les négociations politiques des DSI, sans recul critique sur le processus de problématisation en lui-même. En ce sens, la formulation des questions conduira inévitablement à certaines conclusions, et le choix des sujets d’études commanditées va guider les futures négociations55. Abordant la question sous l’angle de l’épistocratie, on pourra dénoncer une stratégie visant à justifier et à encadrer les réponses politiques sous couvert d’arguments scientifiques. Allant plus loin, ces savoirs scientifiques sont créés pour répondre à des « ignorances artificialisées », prenant le pas sur les réponses politiques.

  • 56 M.-S. de Clippele, « Numériser les collections scientifiques naturelles : à qui les droits d’accès (...)
  • 57 W. Houssen, R. Sara et M. Jaspars, art. cité, p. 47 ; C. Oguamanam, « Indigenous peoples rights in (...)

21En ce qui concerne l’usage des termes, il faut rappeler que le nom DSI est un terme générique, étant donné que sa portée exacte n’est pas encore déterminée56. En effet, plusieurs types d’informations peuvent être compris sous le vocable des DSI. Une étude commanditée par la CDB a théorisé quatre groupes de plus en plus inclusifs57 :

  • Groupe 1 : ADN et ARN.
  • Groupe 2 : groupe 1 et les séquences de protéines.
  • Groupe 3 : groupe 2 et les métabolites résultants.
  • Groupe 4 : groupe 3 et les connaissances associées, les savoirs traditionnels, les interactions écologiques.
  • 58 A. Alexis, art. cité, p. 58.
  • 59 C. Lawson, F. Humphries et M. Rourke, Access and Benefit Sharing of Genetic Resources, Information (...)
  • 60 C. Oguamanam, art. cité, p. 355.
  • 61 R. Ajates, « From land enclosures to lab enclosures : digital sequence information, cultivated biod (...)
  • 62 C. Oguamanam, art. cité, p. 355.

22Ces groupes ont été distingués par la démarche scientifique et selon leur degré de « proximité » vis-à-vis de la ressource génétique. Dans certains argumentaires, le groupe 4 serait « tellement éloigné » de la ressource génétique ou en terme de traçabilité, qu’il serait préférable de ne pas les inclure dans les définitions des DSI58. Pourtant, ce critère de proximité est tout à fait discutable sur les plans scientifique, politique et ontologique. Il présuppose sur une approche moléculaire et cartésienne des ressources génétiques, laquelle n’est pas neutre et provient d’un contexte scientifique occidental59. Pour Oguamanam, problématiser les DSI par le prisme des sciences occidentales (limité à des approches moléculaires et cartésiennes des phénomènes) va plus facilement conduire à dissocier les ressources génétiques physiques et immatérielles, et va exclure les savoirs traditionnels60. Ces catégories sont aussi arbitraires si l’on prend cette question sous l’angle des approches et des ontologies autochtones (dont certaines manifestations témoignent d’un prisme relationnel et holiste avec les ressources génétiques) ou de la sociologie des sciences (quels éléments humains et non humains ont des agentivités dans les processus de création des savoirs ?)61. Nuançons pour finir, car, comme Oguamanam le souligne, l’intégration du groupe 4 est un choix plus inclusif qu’auparavant, les connaissances traditionnelles associées n’ayant pas été incluses dans les précédentes études sur le champ d’application des DSI62.

B.Les usages des sciences par les États

  • 63 A. Bendimred et C. Frison, art. cité, p. 408.
  • 64 S. Aubry et al., art. cité, p. 1.
  • 65 Ibid., p. 6.

23Pour revenir aux champs politiques, il y a des tensions et des divergences sur l’étendue du DSI63. Plusieurs soumissions d’États reconnaissent qu’il s’agit d’un terme générique, et certaines contributions insistent sur le fait que la communauté scientifique utilise le terme Genetic Sequence Data64. L’accord de la COP15 de la CDB utilise le terme de DSI comme un vocable temporaire pour les négociations. Cependant, la récente GB10 du TIRPAA montre un changement, car les deux termes sont associés : DSI/GSD. La distinction entre les termes DSI ou GSD est importante, car ces deux termes n’englobent pas les mêmes données. En effet, le champ d’application des GSD est plus restreint que celui du DSI, car les GSD se limitent à « l’ordre des nucléotides présents dans une molécule d’ADN ou d’ARN », excluant alors les données métabolomiques, phénotypiques ainsi que les autres connaissances associées65.

  • 66 CBD, « Compilation of views and information on digital sequence information on genetic resources su (...)
  • 67 Corée du Sud ; Japon ; Union européenne et ses États membres (COP15).

24Les soumissions des États à la CDB et au TIRPAA, analysées pour cette contribution, accordent une attention particulière à l’utilisation des termes pour les DSI/GSD66. En outre, on peut voir que les préférences terminologiques vont influencer juridiquement l’étendue des groupes couverts et aussi l’application des règles d’APA. Dans notre analyse des contributions pour la COP15, nous constatons des divergences majeures dans les termes revendiqués. Plusieurs pays (Canada, Union européenne et ses États membres, Japon, Corée du Sud, Suisse, États-Unis) ont insisté pour utiliser le concept de GSD au lieu de DSI. Selon leurs arguments, ce concept est plus précis et c’est le terme utilisé par la communauté scientifique67.

  • 68 R. Ajates, art. cité, p. 1060.

25Certaines déclarations sont plus explicites. Par exemple, pour la Commission de l’Union africaine : « a prolonged focus on terminology is not helpful for obtaining clarity on the concept of ‘DSI’. The goal of a focus on terminology is to narrow the scope of applicability of the Nagoya Protocol, and have certain subject matter excluded from it » (COP15). En adoptant une approche critique, nous trouvons un lien entre les termes avancés et les positions défendues sur l’intégration des DSI aux règles d’APA. Cet objectif est repris par les États-Unis : « GSD are neither genetic material nor a genetic resource. It is essential to maintain a conceptual and definitional distinction between genetic material itself and data associated with that material » (COP15). À l’inverse, l’Afrique du Sud souhaite que la définition fasse explicitement un lien entre les DSI et le matériel génétique : « We need to consider what constitute the genetic resources and work on a definition that explicitly make reference to the genes or genetic material which constitute a genetic resource » (COP15)68.

  • 69 C. Lawson et M. Rourke, art. cité, p. 5.
  • 70 M. Rourke et M. Eccleston-Turner, « The Pandemic Influenza Preparedness Framework as a ‘specialized (...)
  • 71 PIP, « Implementation of Decision WHA70(10) 8(b) - Compilation II. GSD Analysis », U.N. Doc. 2017. (...)

26Finalement, nous pouvons identifier des discours similaires en faveur d’une « politique basée sur la science », lesquels renforcent des positions qui conviennent aux États membres. Derrière ces rhétoriques scientifiques, il y a des intérêts politiques plus ou moins assumés. D’une part, le choix des termes pour les DSI/GSD va influencer la portée et le contenu des instruments négociés. D’autre part, il y a un rapport symétrique entre le choix du terme le plus restreint (GSD) et des positions restrictives sur l’intégration des DSI dans le système d’APA. Certains États vont même assumer la portée politique des narratifs scientifiques, comme les États-Unis et l’Afrique du Sud. Encore ces narratifs scientifiques ne sont-ils pas constants, et sont-ils même contradictoires. En effet, nous avons également entrepris une analyse comparative des commentaires des États lors des renégociations du PIP (cadre d’APA pour les virus de la grippe). Ce contexte était différent, car le PIP avait déjà une définition du « matériel biologique » (art. 4.1) distincte des GSD (art. 5)69. Cependant, les GSD n’avaient pas suffisamment été anticipés du temps de l’adoption du PIP, et un processus de révision a été enclenché en 2016 pour mieux intégrer les GSD dans le système d’APA. Même si ces négociations n’ont pas mené à des propositions concrètes70, certains États ont défendu des positions plus ouvertes vis-à-vis de l’inclusion des GSD dans les mécanismes d’APA alors qu’ils défendaient le contraire à la CBD et au TIRPAA. En effet, bien que les États-Unis, l’Australie, l’Allemagne (les seuls États qui ont remis leurs positions pour les trois instances) étaient stricts sur le fait que les DSI ne sont pas couverts par la CDB et le TIRPAA, ils ont estimé que les GSD devraient être mieux inclus dans le PIP compte tenu de ses objectifs ; et, allant plus loin, ils se sont inquiétés de l’érosion du fonctionnement du PIP par ce contournement du partage des avantages71.

***

27Cette contribution avait pour objectif d’explorer l’utilisation des arguments et narratifs scientifiques dans les négociations internationales sur les DSI. Nous avons présenté le Regime Complex des ressources génétiques, la problématique « hybride » des DSI et une position critique sur l’usage épistocratique d’arguments scientifiques. Dans ces discussions, plusieurs parties prétendaient adopter une position « basée sur la science ». Pourtant, l’utilisation de ces narratifs scientifiques semble être plaidée seulement lorsque c’est conforme aux intérêts des États, notamment en ce qui concerne leurs préférences pour le GSD dans la définition des DSI. Certaines contributions ont à la fois assumé ou dénoncé les enjeux liés à ces termes (États-Unis, Afrique du Sud, Commission de l’Union africaine). Les narratifs scientifiques peuvent également être contradictoires. Nous avons vu que certains États (l’Australie, l’Allemagne et les États-Unis) étaient stricts quant à l’inclusion des DSI dans le champ d’application de la CDB et du TIRPAA ; alors qu’ils ont défendu que les GSD doivent être inclus dans le PIP. Ces quelques analyses discursives viendront remettre en cause les prétentions de neutralité et d’objectivité des sciences dans ces débats.

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Notes

1 Convention sur la diversité biologique, adoptée le 5 juin 1992 à Rio de Janeiro, entrée en vigueur le 29 décembre 1993, avec 196 parties à ce jour (Nations unies, Recueil des Traités, vol. 1760, I-30619).

2 Traité international sur les ressources phytogénétiques pour l’alimentation et l’agriculture (avec annexes), adopté le 3 novembre 2001 à Rome et entré en vigueur le 29 juin 2004, avec 150 parties à ce jour (Nations unies, Recueil des Traités, vol. 2400, I-43345).

3 K. Raustiala et D.G. Victor, « The Regime Complex for Plant Genetic Resources », International Organization 2004, 58(2), p. 277.

4 M. A. Bagley, «  “Just” Sharing : The Virtues of Digital Sequence Information Benefit-Sharing for the Common Good », Harvard International Law Journal 2022, vol. 63 ; C. Frison, Redesigning the Global Seed Commons, Londres, Routledge, 2018.

5 C. Frison, op. cit., p. 83.

6 R. Wynberg et al., « Farmers’ Rights and Digital Sequence Information : Crisis or Opportunity to Reclaim Stewardship Over Agrobiodiversity ? », Frontiers in Plant Science 2021, vol. 12, p. 2.

7 M. A. Bagley, art. cité, p. 6.

8 S. Aubry, « The Future of Digital Sequence Information for Plant Genetic Resources for Food and Agriculture », Frontiers in Plant Science 2019, vol. 10, p. 6.

9 O. Corten, Méthodologie du droit international public, Bruxelles, Éditions de l’université de Bruxelles, 2017, p. 30 ; E. A. Shanahan, M. D. Jones et M. K. McBeth, « How to conduct a Narrative Policy Framework study », The Social Science Journal 2018, 55(3), p. 332‑345.

10 A. Viala (dir.), Demain, l’épistocratie ?, Le Kremlin-Bicêtre, Mare et Martin, 2022, p. 17 ; B. Latour, Politiques de la nature, Paris, La Découverte, 2004, p. 30.

11 K. Raustiala et D.G. Victor, art. cité, p. 7.

12 J. Tschersich, « Norm conflicts as governance challenges for Seed Commons : Comparing cases from Germany and the Philippines », Earth System Governance 2021, vol. 7, p. 2‑3.

13 Protocole de Nagoya sur l’accès aux ressources génétiques et le partage juste et équitable des avantages découlant de leur utilisation relatif à la Convention sur la diversité biologique, adopté le 29 octobre 2010 à Nagoya et entré en vigueur le 12 octobre 2014, avec 141 Parties à ce jour [UNEP/CBD/COP/DEC/X/1].

14 CDB, art. 1 ; TIRPAA, art. 1 ; C. Lawson, F. Humphries et M. Rourke, « The future of information under the CBD, Nagoya Protocol, Plant Treaty, and PIP Framework », The Journal of World Intellectual Property 2019, 22(3‑4), p. 117.

15 A. Alexis, « Les controverses sur le séquençage numérique des ressources génétiques à la Convention sur la diversité biologique. Regards pragmatiques sur le droit international en train de se faire », CDST 2023, n° 17, p. 37.

16 Id.

17 J. Tschersich, art. cité, p. 2‑3.

18 R. Wynberg et al., art. cité, p. 8.

19 C. Frison, op. cit., p. 85.

20 A.-R. Hampton, « Pathogen dematerialization and the ABS loophole », Journal of Law and the Biosciences 2023, 10(1), p. 3.

21 S. Aubry et al., « Bringing access and benefit sharing into the digital age », Plants, people, planet 2022, 4(1), p. 5.

22 M. R. Bond et D. Scott, « Digital biopiracy and the (dis)assembling of the Nagoya Protocol », Geoforum 2020, vol. 117, p. 24‑32.

23 M. Halewood et al., « Plant genetic resources for food and agriculture : opportunities and challenges emerging from the science and information technology revolution », New Phytologist 2018, 217(4), p. 1410; W. Houssen, R. Sara et M. Jaspars, « Digital sequence information on genetic resources : concept, scope and current use », U.N. Doc. CBD/DSI/AHTEG/2020/1/3, 2020.

24 M.A. Bagley, art. cité, p. 21, 22.

25 C. Lawson, F. Humphries et M. Rourke, art. cité.

26 A. Bendimred et C. Frison, « Séquençage des données issues des ressources génétiques : trouble-fête du régime international d’accès et de partage des avantages du Protocole de Nagoya », Annales de droit de Louvain 2022, n° 2, p. 34.

27 S. Aubry et al., art. cité, p. 6 ; M. R. Bond et D. Scott, art. cité.

28 A.-R. Hampton, art. cité, p. 15.

29 C. Lawson et M. Rourke, « Digital sequence information as a marine genetic resource under the proposed UNCLOS legally binding instrument », Marine Policy 2020, vol. 122, p. 8.

30 A. Bendimred et C. Frison, art. cité, p. 419.

31 C. Lawson et M. Rourke, art. cité, p. 8.

32 M. R. Bond et D. Scott, art. cité, p. 9.

33 Ibid., p. 2.

34 Ibid., p. 27.

35 A. Bendimred et C. Frison, art. cité, p. 424.

36 CDB, Decision 15/9. Digital sequence information on genetic resources, CBD/COP/DEC/15/9, 19 déc. 2022.

37 TIRPAA, Résolution 16/24/ consideration of Digital Sequence Information / Genetic Sequence Data on plant genetic resources for food and agriculture for the objectives of the International Treaty, ITPGRFA/G10/16/23.

38 B. Latour, Nous n’avons jamais été modernes, Paris, La Découverte, 2013, p. 13 ; I. Stengers, Une autre science est possible !, Paris, La Découverte, 2017, p. 23.

39 G. de Vries, Bruno Latour. Une introduction, Paris, La Découverte, 26 avr. 2018, p. 161 ; I. Stengers, Cosmopolitiques, Paris, Les Empêcheurs de penser en rond, 2022, p. 566.

40 B. Latour, op. cit., p. 20.

41 I. Stengers, Au temps des catastrophes, Paris, La Découverte, 2013.

42 S. Whatmore, Hybrid geographies : natures, cultures, spaces, Londres, Sage, 2002, p. 103 ; B. Latour, op. cit., p. 13.

43 A. Alexis, art. cité, p. 57.

44 M.A. Bagley, art. cité, p. 6.

45 B. Latour, op. cit., p. 30.

46 A. Viala, op. cit., p. 17.

47 J. Tallberg et M. Zürn, « The legitimacy and legitimation of international organizations : introduction and framework », The Review of International Organizations 2019, 14(4), p. 581‑606.

48 Pour d’autres analyses : C. S. Vogeler et al., « Agri-food technology politics : Exploring policy narratives in the European Parliament », European Policy Analysis 2021, 7(S2), p. 324‑343.

49 J. Favre, « Épistocratie et droit global », in A. Viala (dir.), Demain, l’épistocratie ?, op. cit., p. 121.

50 L. Tuhiwai Smith, Decolonizing Methodologies : Research and Indigenous Peoples, Londres, Zed Books, 2012, p. 5.

51 L. Whitt, Science, Colonialism, and Indigenous Peoples : the cultural politics of law and knowledge, Cambridge, Cambridge University Press, 2009, p. 17.

52 Ibid., p. 17, p. 157.

53 C. Lawson, F. Humphries et M. Rourke, art. cité, p. 7 ; M. A. Bagley, art. cité, p. 29.

54 M.A. Bagley, art. cité, p. 27.

55 M. R. Bond et D. Scott, art. cité, p. 7.

56 M.-S. de Clippele, « Numériser les collections scientifiques naturelles : à qui les droits d’accès et de partage ?  », in A. Lachapelle (dir.), Numérique et développement durable : obstacles et opportunités pour le droit, Bruxelles, Larcier, 2023, p. 181.

57 W. Houssen, R. Sara et M. Jaspars, art. cité, p. 47 ; C. Oguamanam, « Indigenous peoples rights in equitable benefit-sharing over genetic resources : digital sequence information (DSI) and a new technological landscape », in Research Handbook on the International Law of Indigenous Rights, Cheltenham, Edward Elgar Publishing, 2022, p. 354‑375.

58 A. Alexis, art. cité, p. 58.

59 C. Lawson, F. Humphries et M. Rourke, Access and Benefit Sharing of Genetic Resources, Information and Traditional Knowledge, New York, Routledge, 2022, p. 11.

60 C. Oguamanam, art. cité, p. 355.

61 R. Ajates, « From land enclosures to lab enclosures : digital sequence information, cultivated biodiversity and the movement for open source seed systems », The Journal of Peasant Studies 2023, 50(3), p. 1056‑1084 ; A. Alexis, art. cité, p. 58.

62 C. Oguamanam, art. cité, p. 355.

63 A. Bendimred et C. Frison, art. cité, p. 408.

64 S. Aubry et al., art. cité, p. 1.

65 Ibid., p. 6.

66 CBD, « Compilation of views and information on digital sequence information on genetic resources submitted pursuant to paragraphs 9 and 10 of decision 14/20 », U.N. Doc. CBD/DSI/AHTEG/2020/1/INF, 2020. En ligne  : <https://www.cbd.int/doc/c/abcf/b9df/be9859f376997cf8cc00d175/dsi-ahteg-2020-01-inf-01-en.pdf> (consulté le 20 juillet 2023). V. égal. TIRPAA, « Compilation of information on “digital sequence information” with respect to plant genetic resources for food and agriculture », U.N. Doc. IT/GB-8/19/16.1/Inf.1., 2019. En ligne: <https://www.fao.org/3/na770en/na770en.pdf> (consulté le 20 juillet 2023) ; TIRPAA, « Consideration of Digital Sequence Information in Accordance with Resolution 13/2019 and the Multi-Year Programme of Work », U.N. Doc. IT/GB-9/22/17.2 Rev.1., 2022. En ligne : <https://www.fao.org/3/ni857en/ni857en.pdf> (consulté le 20 juillet 2023).

67 Corée du Sud ; Japon ; Union européenne et ses États membres (COP15).

68 R. Ajates, art. cité, p. 1060.

69 C. Lawson et M. Rourke, art. cité, p. 5.

70 M. Rourke et M. Eccleston-Turner, « The Pandemic Influenza Preparedness Framework as a ‘specialized international access and benefit-sharing instrument’ under the Nagoya Protocol », Northern Ireland Legal Quarterly 2021, 72(3), p. 440.

71 PIP, « Implementation of Decision WHA70(10) 8(b) - Compilation II. GSD Analysis », U.N. Doc. 2017. En ligne : <https://cdn.who.int/media/docs/default-source/pip-framework/governance/analysis-of-seasonal-influenza-gsd-under-the-pip-framework/related-documents/gsdcompilation.pdf?sfvrsn=6b4945bf_6> (consulté le 20 juillet 2023).

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Pour citer cet article

Référence papier

Pierre Walckiers, « Ignorance et argument scientifique »Cahiers Droit, Sciences & Technologies, 19 | 2025, 125-136.

Référence électronique

Pierre Walckiers, « Ignorance et argument scientifique »Cahiers Droit, Sciences & Technologies [En ligne], 19 | 2025, mis en ligne le 10 mai 2025, consulté le 23 juin 2025. URL : http://journals.openedition.org/cdst/11024 ; DOI : https://doi.org/10.4000/13wf0

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Auteur

Pierre Walckiers

Doctorant - aspirant FNRS au centre de philosophie du droit, UCLouvain (Belgique)

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