« Femmes photographes »
Texte intégral
1Du 8 mars au 31 décembre 2022, le Musée de la Libération de Paris-Musée du Général Leclerc-Musée Jean Moulin offre au public une exposition intitulée « Femmes photographes de guerre ».
2Sylvie Zaidman, directrice du musée, prend, avec l’équipe de ses collaborateurs, le relais de cette exposition réalisée en 2018 pour le Kunstpalast de Dûsseldorf (Allemagne), puis au Fotomuseum de Winterthur (Suisse). Avec l’émotion suscitée par des images puissantes, l’exposition apporte les résultats d’une démarche savante clairement exposée dans le catalogue écrit par Anne-Marie Beckermann et Felicity Korn.
3Huit très jeunes femmes photojournalistes, Gerda Taro, Lee Miller, Catherine Leroy, Christine Spengler, Françoise Demulder, Susan Meiselas, Catherine Cole et Anja Niedringhaus, ont couvert les guerres et les conflits armés, de la guerre d’Espagne à celle d’Afghanistan, de 1936 à 2011, partout dans le monde, sauf en Algérie.
4Ces femmes, dans des conditions difficiles à l’égard des commandements militaires, éloignées des sources d’information, entravées quant à leur liberté de mouvement, peu reconnues par les organes de presse qui publieraient leurs clichés, ont élargi d’emblée le domaine qui leur était conventionnellement imparti : hôpitaux, entrée des troupes victorieuses dans les territoires conquis ou libérés, réactions enthousiastes des populations civiles… Un répertoire caritatif et pudiquement événementiel qui leur était traditionnellement dévolu.
5L’exposition, accompagnée de conférences et de débats, est une incitation à la réflexion et aux interrogations du public, mais aussi à celles des historiens, des anthropologues, des sociologues… Le catalogue, élégamment publié, complète la simple visite de l’exposition et conduit vers de nombreuses sources d’information. Tant de directions d’études sont implicitement indiquées, de l’histoire des représentations des guerres, du choix de leurs images pour la communication politique, pour la presse, réticente ou tolérante envers les représentations de l’adversaire, celles de l’environnement des combats et, pour chaque photojournaliste femme, l’analyse des prises de vue qu’elles ont privilégiées selon leur conception de leur mission. Ainsi Christine Spengler refuse les images de blessures, de sang, de cadavres, et lit la guerre dans les paysages et la vie des groupes de femmes et d’enfants. Carolyn Cole assume, elle, les clichés de jeunes blessés épouvantés et celles de cadavres de si jeunes hommes.
6On pourrait retenir comme cadre général du domaine de recherche ouvert par l’exposition cette phrase de conclusion du catalogue : « Soumises au rythme de la mécanique informative et aux conditions de guerre, ces femmes ont pris des clichés empreints de sensibilité, de force et d’humanité, dont la valeur va largement au-delà de l’accompagnement des informations. » (p. 21) .
7Quant à moi, je penserai longtemps à ce cliché d’Anja Niedringhaus où de jeunes marines, bardés de protections, effrayés de la situation et d’eux-mêmes, mettent en garde la famille du député irakien qu’ils viennent d’arrêter. De très jeunes enfants regardent la photographe, étonnés, sans frayeur, le bébé dans les bras de sa mère ne s’occupe que de sa sucette. Où est la fracture ? Que deviennent les sociétés ? Qu’est-ce qu’une guerre ?
8Liens :
9« Femmes photographes de guerre » :
10<https://www.museeliberation-leclerc-moulin.paris.fr/exhibitions/femmes-photographes-de-guerre>.
11Sur le site du musée de la Libération : « Femmes photographes de la libération de Paris » :
13Sur le site de l’Office de tourisme de la Ville de Paris, quelques exemples de photographies :
Table des illustrations
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URL | http://journals.openedition.org/chrhc/docannexe/image/20580/img-1.jpg |
Fichier | image/jpeg, 160k |
Pour citer cet article
Référence papier
Noëlle Gérôme, « « Femmes photographes » », Cahiers d’histoire. Revue d’histoire critique, 155 | 2022, 127-129.
Référence électronique
Noëlle Gérôme, « « Femmes photographes » », Cahiers d’histoire. Revue d’histoire critique [En ligne], 155 | 2022, mis en ligne le 01 mars 2023, consulté le 20 mars 2023. URL : http://journals.openedition.org/chrhc/20580 ; DOI : https://doi.org/10.4000/chrhc.20580
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