Ce sont d’abord « les révoltes de prisonniers dans de nombreux pénitenciers français, à Aix, à Clairvaux, aux Baumettes, à Poissy, à Lyon et à Toul, qui ont attiré l’attention de l’opinion publique sur ce qui se passe derrière les grilles et les murs de béton ». C’était en France, dans les années 1970, les années du Groupe d’information sur les prisons (GIP). Les années de Foucault, Vidal- Naquet, Domenach. Les pénitenciers étaient alors secoués par des actions politiques prisonnières auxquelles le groupe d’intellectuels ajoutait sa voix. En 1975, Michel Foucault publiait Surveiller et punir. À sa suite, les historiens et historiennes investissaient les geôles du passé – surtout du siècle précédent – pour mieux comprendre leur présent. Pourtant, ils n’ont pas répercuté ce nouvel intérêt sur les périodes plus anciennes, ni sur les prisonniers, leurs actions, leurs résistances : inspirés par la révolte carcérale, ils se sont plutôt intéressés au pénitencier lui-même, à l’institution. ...
Quand la prison s’embrase : révoltes et révoltés carcéraux (Paris, XVIIIe siècle)
Résumés
L’article aborde les révoltes carcérales trouvées dans les archives du Parlement de Paris et dans les archives de police entre 1700 et 1790. Il a pour objectif, d’abord, de brosser un premier portrait socioéconomique des détenus qui entrent en émeute et, ensuite, de mieux comprendre comment et, surtout, pourquoi les prisonniers des geôles du XVIIIe siècle se révoltaient. Il s’inscrit ainsi dans le développement de l’historiographie récente qui s’intéresse moins aux institutions d’enfermement elles-mêmes, qu’aux prisonniers qui les subissent, à leur capacité d’action et aux possibilités de résistance qu’ils y développent. À cette fin, le texte porte une attention particulière aux enjeux de la nourriture carcérale, point névralgique de la contestation prisonnière, mais aussi à ceux de la délation et des mouchards, autre cause récurrente de protestation. L’article permet ainsi de mieux comprendre les dynamiques internes des prisons d’Ancien Régime tout en redonnant aux détenus une part d’agentivité au sein même de leur enfermement. En conclusion, le texte fait état de la synchronicité entre certaines grandes émeutes carcérales et des révoltes de rue parisiennes. La prison s’embrase en effet alors même que Paris est secoué par l’affaire des enlèvements d’enfants, ou encore lors de la libéralisation des grains de Turgot. Cette première insertion dans le détail de l’action prisonnière nous invite donc à ne pas penser les révoltes populaires et carcérales en vase clos : peut-être faudrait-il plutôt envisager la prison comme le potentiel prolongement de la rue.
Extrait du texte
Ce document sera publié en ligne en texte intégral en février 2025.
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Pour citer cet article
Référence papier
Sophie Abdela, « Quand la prison s’embrase : révoltes et révoltés carcéraux (Paris, XVIIIe siècle) », Crime, Histoire & Sociétés / Crime, History & Societies, vol. 26, n°2 | 2022, 25-50.
Référence électronique
Sophie Abdela, « Quand la prison s’embrase : révoltes et révoltés carcéraux (Paris, XVIIIe siècle) », Crime, Histoire & Sociétés / Crime, History & Societies [En ligne], vol. 26, n°2 | 2022, mis en ligne le 15 février 2025, consulté le 08 septembre 2024. URL : http://journals.openedition.org/chs/3359 ; DOI : https://doi.org/10.4000/chs.3359
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