En mars 1783, un jeune homme se présente à Weida, une petite ville dans le sud-ouest de la principauté électorale de Saxe, pour régler une affaire au siège du bailli local du prince-électeur. Il dit s’appeler Johann Thomas Wieduwilt et séjourner depuis un certain temps à Förthen, un village qui fait lui aussi partie du bailliage mais est séparé de sa partie principale et forme donc une exclave entourée des possessions d’un autre prince, le comte Reuss de la branche de Schleiz (carte 1). Au cours de la discussion, il s’avère que l’impétrant avait été banni de ce même comté en 1780, pour un adultère commis à Göschitz, un village se situant juste de l’autre côté de la frontière. Le bailli le fait alors arrêter et interroger, car, selon un traité conclu en 1665 entre la Saxe et les Reuss, chaque bannissement de l’un des deux territoires vaut automatiquement aussi pour l’autre. Selon lui, Wieduwilt est donc en rupture de ban, ce que ce dernier nie pourtant, en disant qu’il ne sait rien d...
Les limites de l’exclusion
Résumés
Le bannissement est souvent considéré comme une sanction sévère qui équivalait à une exclusion totale. À l’exemple du Saint-Empire romain germanique à l’époque moderne, l’article tente de montrer qu’une telle appréciation est trop globale. Il faut au contraire examiner de près le contexte de l’application de la peine afin d’en déterminer les conséquences concrètes. En font partie, dans l’Empire, un ensemble de conditions constitutionnelles et de structures spatiales singulières ainsi qu’une construction plurielle de l’appartenance. De surcroît, cette sanction restait liée aux ressources d’une société qui s’organisait essentiellement autour de communautés localement situées. Par conséquent, un bannissement ne signifiait pas la mort sociale ; il fragilisait toutefois la vie des condamnés. Il ne dépossédait pas les bannis de leurs droits fondamentaux, mais il limitait de manière souvent drastique l’accès à ces droits, en les privant d’une appartenance locale qui constituait une condition nécessaire pour en jouir.
Extrait du texte
Ce document sera publié en ligne en texte intégral en septembre 2026.
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Pour citer cet article
Référence papier
Falk Bretschneider, « Les limites de l’exclusion », Crime, Histoire & Sociétés / Crime, History & Societies, vol. 28, n°1 | 2024, 31-58.
Référence électronique
Falk Bretschneider, « Les limites de l’exclusion », Crime, Histoire & Sociétés / Crime, History & Societies [En ligne], vol. 28, n°1 | 2024, mis en ligne le 09 septembre 2026, consulté le 07 octobre 2024. URL : http://journals.openedition.org/chs/3539
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