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Enquêter sur le genre en communication

Hybridation des méthodologies et éthique de la réflexivité pour une construction féministe des savoirs
Emmanuelle Bruneel, Aurélie Olivesi et Laura Verquere

Texte intégral

1Depuis le début des années 2000, l’enquête de terrain est portée par des travaux soucieux de cultiver la dimension interdisciplinaire des sciences de l’information et de la communication (SIC désormais) (Le Marec, 2002 ; Cordonnier, 2015), en puisant notamment dans des ressources méthodologiques ethnographiques : observation participante, entretiens, immersion, focus groups, enquête au moyen de la photographie, etc. Leur utilisation permet de mettre en relief la dimension vivante et sensible d’objets de recherche mouvants et contingents, inscrits dans des réalités infra-ordinaires (Perec, 1989). En partage dans différentes disciplines de sciences sociales, ces méthodes font de chaque terrain un espace d’actualisation non seulement des questions et des prises de décision, mais aussi des stratégies d’enquête et de la réflexivité (Céfaï, 2003, p. 524-527). Ainsi, les savoir-faire convoqués mêlent compétences sociales, considérations épistémologiques, questionnement critique et éthique ainsi que prises en compte des enjeux politiques et du caractère situé de la posture des différents protagonistes. Les travaux en SIC basés sur des enquêtes de terrain et mobilisant des ressources ethnographiques se sont attachés à créer des ponts avec les analyses sémiotiques (Souchier, Jeanneret et Le Marec, 2003) en vue d’interroger l’hétérogénéité des phénomènes communicationnels et de révéler leur dimension « composite ». De ce point de vue, l’étude du genre apparaît comme une approche privilégiée, dans la mesure où le genre constitue à la fois un objet d’étude, une méthodologie (Coulomb-Gully, 2014), un ancrage théorique et une expérience incarnée par toutes les personnes prenant part à l’enquête, dans une démarche de co-construction du savoir.

2Les études de genre (Bereni et al., 2012 ; Rennes, 2016) forment aujourd’hui une vaste constellation dans laquelle les propositions théoriques sont foisonnantes et permettent de renouveler tant les façons d’aborder les identités sociales que les façons de faire de la recherche en sciences humaines et sociales. Ce champ de recherche a non seulement mis au jour la dimension construite du « masculin » et du « féminin », dénaturalisant au passage ces attributs sociaux (Butler, 2005/1990, 2009/1993), mais a également permis de souligner la prégnance du genre dans l’organisation des rapports sociaux tout en contribuant à éclairer le caractère politique de l’intime (Dorlin, 2012). Si de nombreux travaux sur le genre en SIC portent sur les représentations et les pratiques médiatiques (Damian-Gaillard, Montañola et Olivesi (dir.) 2015 ; Bruneel, 2022), d’autres entrent dans un questionnement de genre par des voies différentes. Il s’agit dans le présent numéro de faire place à toute la complexité des démarches héritées des études de genre pour les replacer sur le terrain de l’enquête, notamment en donnant à lire des travaux dans lesquels les questions de genre sont concrètement incarnées. Le concept même de genre, si utile pour la recherche et si puissamment agissant dans le social, est ici remis en perspective de façon à s’assurer que, précisément, la recherche n’est ni surplombante ni coupée de la société.

3Si l’appréhension du genre par les outils de l’enquête est une pratique attestée dans la plupart des sciences sociales (voir Rault et Trachman (dir.) 2023, ainsi que l’atelier doctoral « Les Terrains du genre », organisé par le GEMASS à la Sorbonne)1, son déploiement en SIC entraîne des renouvellements disciplinaires non seulement sur le plan des méthodologies et des fondements épistémologiques, mais aussi sur le plan des postures scientifiques — sans cesse à réajuster dans l’expérience singulière que constitue toute recherche. Geste à la fois intellectuel et pratique, enquêter implique de sélectionner, choisir, circonscrire dans le social un pan du monde à explorer et surtout de s’y immerger de façon à en tirer des réponses ramifiées à des questionnements de recherche qui eux-mêmes s’affinent au contact du terrain. La démarche dite d’enquête est également mise en perspective dans ce numéro : il s’agit de faire valoir le fait que le geste si particulier que constitue le fait d’enquêter peut être lui-même interrogé à travers un travail réflexif portant sur la conduite même de la recherche sur le terrain (Le Marec et Faury, 2013).

4Ce numéro thématique vise à offrir un espace à des recherches qui revisitent les façons de mener des enquêtes, en proposant au passage de nouveaux questionnements méthodologiques propres aux SIC. En effet, la pluralité des phénomènes observés implique un enrichissement continu des méthodologies traditionnellement mobilisées dans cette discipline. En particulier, la méthode dite de l’enquête par entretiens est souvent appréhendée en SIC comme un complément au travail sémiodiscursif effectué sur des corpus à partir de questions de recherche liant le discursif et le social, les signes et les idéologies, le langage et le politique. Dans les travaux présentés dans ce numéro, les entretiens ne sont pas seulement envisagés comme un mode de collecte de matériaux langagiers oraux transformés en textes pour en faire l’analyse discursive, mais entrent en jeu dans l’enquête par une hybridation avec des méthodologies de terrain issues d’autres disciplines, en particulier, l’observation participante, la recherche-action ou la recherche-création, ordinairement plus présentes dans les travaux ethnographiques, sociologiques ou anthropologiques. En observant comment, pour traiter de questions de genre, des méthodes ethnographiques peuvent être articulées aux approches sémiodiscursives (Paveau, 2018), il s’agira de mettre en évidence la façon dont ces démarches reconfigurent les possibilités d’appréhension du genre dans l’enquête. L’objectif de ce dossier est alors d’expliciter la façon dont ces méthodologies croisées permettent de renouveler les conceptions du terrain et de déplacer les regards sur les phénomènes communicationnels.

  • 2 Tels que les questions de médiation, de signification, de documentation ou encore de circulation de (...)

5S’il peut s’agir de terrains dans lesquels le chercheur ou la chercheuse se trouve en coprésence des personnes sur et avec lesquelles il ou elle enquête, l’hybridation des méthodologies s’applique également aux terrains numériques (Paveau, 2017 ; Develotte et Paveau, 2017 ; Jouët, 2022), par exemple par des travaux d’ethnographie en ligne (Kozinets, 2009). On peut ainsi se demander dans quelle mesure les pratiques issues d’autres champs disciplinaires permettent de répondre à des questionnements propres aux SIC2 lorsqu’elles sont appliquées aux terrains numériques. Cet entremêlement s’accompagne alors d’une adaptation constante des outils (observation, entretien, corpus, netnographie) garante d’un ancrage en SIC. Dans le cadre du présent dossier, il s’agira en particulier de montrer comment les théories féministes et les épistémologies des savoirs situés sont éprouvées et mises en jeu sur les terrains explorés par les auteur·rice·s. Les enquêtes sélectionnées s’appuient notamment sur des méthodes qualitatives et ethnographiques tout en mobilisant des épistémologies féministes (Haraway, 2007/1984) telles que la théorie du point de vue situé (standpoint theory) développée par Nancy Hartsock (1987, 1998), l’idée d’objectité forte (strong objectivity) conceptualisée par Sandra Harding (1986) ou encore la perspective intersectionnelle de Patricia Hill Collins (1997/1992, 2000). Convoquer ces épistémologies situées conduit à repenser les modalités de production du savoir tout en s’interrogeant sur les critères de scientificité impliqués (Puig de la Bellacasa, 2003), notamment en tenant compte des effets des dynamiques de domination (Dorlin, 2009).

6En effet, la posture du chercheur ou de la chercheuse face à son objet se trouve au cœur du processus d’élaboration des savoirs sur le genre par le terrain. On peut envisager cette posture comme composée de trois facettes : une dimension empirique liée aux aspérités des terrains, une dimension épistémologique associée aux effets de la réflexivité et une dimension éthique. Par « dimension éthique de la posture de recherche », nous désignons l’explicitation des questionnements à caractère éthique qui surviennent lors de l’implication de la chercheuse ou du chercheur au cours de son travail. Le point de vue situé ainsi que sa dimension sensible permettront de mettre en évidence la façon dont les auteurs et autrices analysent la façon dont leur posture genrée (parmi d’autres caractéristiques sociales) joue un rôle dans le rapport aux enquêté·e·s (empathie, complicité, mise à distance, conflictualité, etc.) ainsi que dans la production des résultats. Les contributeurs et contributrices explicitent dans ce dossier la façon dont ils ou elles ont négocié leur propre posture scientifique dans la conduite de leur enquête.

  • 3  Nous utilisons ici le féminin, car tous les articles ont été rédigés par au moins une autrice.

7Les travaux qui composent le présent dossier souscrivent à la démarche de réflexion que nous avons souhaité instaurer entre genre et enquête, au prisme des SIC. Ce numéro sur le genre et l’enquête en SIC se compose de deux parties articulées. Tout d’abord, il regroupe des recherches mobilisant des méthodologies variées pour susciter de nouveaux questionnements ayant trait au genre dans les recherches en SIC. Nous avons rassemblé dans une première partie des articles pour lesquels l’enquête permet de débusquer des rapports de pouvoir et de faire émerger des résistances par les marges. La seconde partie du dossier met quant à elle en avant des articles dans lesquels l’implication de la chercheuse3 va au-delà de la collecte de données, mais procède d’une démarche dans laquelle postures méthodologique, épistémologique et personnelle sont enchevêtrées. Cette approche peut être qualifiée de féministe dans la mesure où le féminisme est envisagé comme une démarche critique et un système de construction de la connaissance. Nous présentons dès lors ici des travaux de chercheur·euse·s qui enquêtent « en féministes ».

Partie 1 : Débusquer des rapports de pouvoir et faire émerger des résistances par les marges

8Les apports des études de genre couplés avec ceux des cultural studies (Hall, 1980 ; Cervulle et Quemener, 2018) permettent d’entrer dans les objets de recherche en SIC à partir de réflexions renouvelées quant aux productions médiatiques et aux dispositifs numériques, en particulier en tenant compte des rapports de pouvoir qui s’y jouent, tant en ce qui concerne les processus de production que les artéfacts, les contenus et la réception. Adopter une perspective gramscienne sur les médias implique de considérer que les rapports de pouvoir ne sont pas figés, mais traversés par des dynamiques, des résistances et des reconfigurations, variant selon les contextes historiques et culturels dans lesquels les enquêtes sont menées. Selon une telle perspective, certains objets médiatiques peuvent être envisagés comme participant à la structuration des idéologies dominantes et à la sédimentation de normes hégémoniques. Les objets étudiés dans la première partie de ce numéro tels que les discours médiatiques mainstream, les médias informatisés comme Twitter, les discours institutionnels d’accompagnement (Krieg-Planque, 2017) du développement d’une technologie comme l’intelligence artificielle (IA), les sites de coparentalité ou encore les productions audiovisuelles transnationales (ici turques) relèvent de dispositifs hégémoniques qui peuvent être abordés d’un point de vue critique. Il s’agit d’abord de déconstruire les imaginaires et les représentations normatives ou réductrices qui peuvent irriguer de tels objets, notamment en relevant et en analysant les différentes médiations qui les rendent possibles et visibles. Par exemple : en soulignant la façon dont les images et les textes en circulation encapsulent des significations sociales genrées ; en notant comment certains discours peuvent favoriser et venir nourrir des argumentations à teneur polémique ; en mettant en avant le caractère à la fois idéologique, normatif et construit de discours relatifs à l’idée d’une IA « neutre » ; en mettant en relief les dynamiques de réintégration de normes cisgenres et hétérosexuelles à l’œuvre dans les représentations offertes par les sites de coparentalité ; ou encore en identifiant les mécanismes de réception oppositionnelle qui visent à déjouer les rapports aux identités genrées prescrites par les séries télévisées turques de la part des téléspectatrices grecques.

9L’élaboration de telles démarches critiques peut notamment prendre appui sur les théories et les méthodes issues des cultural studies qui, « à la suite de Stuart Hall, se donnent pour programme de recherche l’étude des rapports entre pouvoir et culture : la culture pensée comme une intrication de pouvoir et de sens » (Maigret, 2009, p. 96). Cette approche originellement anglo-saxonne permet d’appréhender, dans le cadre d’une démarche scientifique féministe, les dimensions sociopolitiques des objets et des pratiques en présence sur les terrains. En effet, les cultural studies insistent sur l’intérêt scientifique de prendre en compte les effets de la domination et de la culture populaire sur les pratiques sociales (Lauretis, 2007), tout en produisant des analyses sociosémiotiques de contenus éditoriaux et en étudiant les processus de production et de réception. En outre, la vivacité du dialogue entre SIC et cultural studies (Albertini et Pélissier, 2009) s’avère féconde pour mener des recherches qui intègrent notamment les effets du genre, de la race et de la classe dans les processus d’enquête visant à explorer divers artéfacts culturels, y compris ceux faisant l’objet de pratiques populaires, amateurs et vernaculaires ne relevant pas des formes supposées « légitimes » de la culture. La mise à plat des privilèges, tant symboliques qu’économiques, tient dès lors une place importante à l’arrière-plan d’enquêtes en SIC qui visent à déconstruire les mécanismes de domination, en particulier ceux qui se déroulent autour des identités de genre.

10Dans leur texte intitulé « Défaire le genre des représentations médiatiques et des dispositifs numériques. Réflexions méthodologiques sur l’analyse des images et des textes », Nelly Quemener et Virginie Julliard proposent de revenir sur plusieurs travaux ayant contribué à la mise en place d’un champ de recherche en SIC : l’étude de problématiques ayant trait au genre dans les médias, tant traditionnels qu’informatisés (Souchier, Jeanneret et Le Marec, op. cit.). Centré sur une réflexion méthodologique à la croisée des cultural studies et d’une sémiotique de la communication, l’article questionne les manières d’appréhender les façons dont les rapports de pouvoir de genre se matérialisent dans les discours publics, circulent, se reproduisent et parfois se défont. Elles adoptent une conception conflictuelle de l’espace public dans lequel elles traquent les rapports de force en train de se produire, notamment par les interactions numériques. Les autrices reviennent sur les points forts et les limites des méthodologies mises en œuvre jusqu’ici dans leurs différentes recherches et proposent de nouvelles perspectives. Elles indiquent par exemple que l’articulation entre sémiotique communicationnelle et études de genre permet d’envisager la façon dont les dispositifs d’écriture médiatique — notamment numérique — autorisent une certaine matérialisation du genre, ce qui permet aux rapports de pouvoir de se reproduire au travers de répertoires et d’articulation de signes dans différents registres sémiotiques (linguistique, iconique, sonore, etc.).

11Leur propos soulève un questionnement fécond quant aux modes d’attention en recherche, c’est-à-dire quant à la façon dont les méthodes, les concepts, les objets de recherche et les questions scientifiques configurent des formes d’attention, et par conséquent des régimes de valorisation spécifiques (Verquere, 2023). En d’autres termes, il s’agit de se demander si l’attention portée exclusivement à des espaces hégémoniques ne participe pas à mettre l’accent sur des espaces et des acteurs déjà socialement valorisés. Ou encore si cela ne conduit pas indirectement à réifier, voire à essentialiser les rapports de pouvoir et les normes dénoncées dans nos écrits (Vassor et Verquere, 2022). Ces réflexions ouvrent sur les interrogations suivantes : comment porter attention à d’autres dynamiques médiatiques, comment éclairer d’autres objets moins visibles voire invisibles, comment expliciter l’implicite de genre par l’enquête ?

12L’invisibilisation peut également toucher les modalités de réception de certains contenus médiatiques sujets à controverse dans un contexte culturel. En cherchant à mettre en lumière ce qui se joue du point de vue des représentations de genre sur le plan de la réception, l’article de Laurence Larochelle s’intéresse à la circulation des feuilletons turcs en Grèce, dans un contexte géopolitique particulièrement conflictuel. Convoquant la théorie de l’hégémonie culturelle — dans le cadre de laquelle la culture est appréhendée comme un soft-power visant à mettre en avant les valeurs des pays producteurs de ces artéfacts —, la chercheuse observe comment cette hégémonie s’actualise ou non dans les pratiques concrètes de réception des publics grecs féminins, issus notamment des classes populaires. Dans cette enquête de terrain menée auprès des téléspectatrices grecques visionnant fréquemment des séries turques, ont été envisagés leurs pratiques de réception (ce qu’elles regardent, comment, dans quelles circonstances sociales, etc.), leurs interprétations des rapports sociaux de genre proposés dans ces contenus audiovisuels et leurs regards singuliers, parfois oppositionnels, parfois résistants, sur ces représentations. Loin d’adhérer à la vision patriarcale de la famille ou aux stéréotypes de genre représentés dans ces productions sérielles, la chercheuse montre comment ces téléspectatrices adoptent un regard sélectif, par exemple en désamorçant certains principes normatifs genrés présentés comme allant de soi dans les situations portées à l’écran et en faisant parfois une lecture contre-hégémonique. À rebours d’une supposée passivité des publics, de surcroît ici stigmatisés en tant que femmes issues de classes défavorisées, l’article interroge aussi des pratiques de résistance à bas bruit prenant place dans d’autres espaces, notamment par l’observation de communautés en ligne qui s’expriment sur ces contenus audiovisuels controversés. Ainsi la résistance à l’hégémonie passe-t-elle par une pluralité de façons de mettre en question les normes qui la régissent et la permettent. Ces pratiques résistantes soulignent que les représentations sont porteuses d’enjeux pour la mise en critique des rapports sociaux inégalitaires de genre en Grèce.

13De son côté, Julie Marques propose une réflexion sur les discours « éthiques » qui accompagnent le déploiement des technologies associées à l’IA au sein de l’entreprise des télécommunications Orange. Elle observe notamment les discours qui émanent des départements de « RSE » et « Diversité & inclusion » et développe un point de vue critique enrichi par une approche intersectionnelle. La chercheuse invite en effet à déconstruire l’idée d’une « neutralité intrinsèque à l’IA », idée pourtant fortement plébiscitée par les agents qui la conçoivent et fortement valorisée dans ce contexte professionnel. Elle montre comment, contrairement à ce que prétendent les discours institutionnels qui escortent le recours à ces technologies, l’IA contribue paradoxalement à reproduire des rapports de pouvoir de genre, de classe et de race, en particulier en reconduisant certains rapports de pouvoir et certains mécanismes d’oppression et de discriminations dont la technologie serait prétendument à même de se départir par effet de rationalisation. Marques observe également comment, en interne, a été tissé le récit d’une gouvernance dite éthique de l’IA : au carrefour de dispositifs souples d’autorégulation (soft law) et d’énonciation de recommandations d’usage, auxquels sont adossées des décisions politiques relatives à l’avenir des usages des technologies. Ici, le recours à l’enquête de terrain (observations participantes et entretiens compréhensifs) permet également de mettre en exergue des voix internes plus discrètes, voire dissonantes vis-à-vis de ces discours d’escorte. En outre, cela ouvre d’autres conceptions et d’autres questionnements éthiques quant aux effets de l’IA en matière de reconduction des discriminations systémiques. La chercheuse montre ainsi comment les différentes parties prenantes de l’entreprise n’adhèrent pas aveuglément aux promesses qui accompagnent la promotion du recours à l’IA. Au global, les analyses proposées dans cet article offrent des éclairages sur différentes façons d’appréhender, de concevoir et de dire l’« IA éthique ».

14D’autres types de questionnements sur les rapports de pouvoir de genre traversent le travail de Sarah Lécossais et Fred Pailler. En effet, leur article intitulé « Les sites de coparentalité, entre matching des gamètes et pluralité des projets parentaux » interroge les imaginaires et les constructions discursives en circulation autour de la (co)parentalité. Leur recherche s’intéresse à plusieurs sites de coparentalité destinés à des publics divers (homosexuel·le·s, hétérosexuel·le·s, célibataires ou en couple) et visant à permettre la rencontre coparentale. À partir d’une enquête sur ces sites (objets peu visibles sur la scène publique) que les deux auteur·rice·s conçoivent comme des plateformes visant le « matching de gamètes », Lécossais et Pailler analysent les rapports sociaux de genre et de sexualité en jeu. Adoptant une méthode tripartite — analyses technosémiotiques des sites, lexicographique (via Iramuteq) et entretiens —, les chercheur·euse·s mettent au jour l’écart entre les promesses de ces plateformes et les vécus des enquêté·e·s. Cette enquête montre en effet comment ces dispositifs censés proposer de « nouvelles » configurations familiales qui désarrimeraient la sexualité de la parentalité et la procréation de la relation amoureuse donnent finalement à lire et à voir un ordre de genre binaire et cisgenre. Néanmoins, les entretiens offrent « un contre-point pour interpréter les annonces des profils » révélant des rapports de genre plus complexes et parfois contradictoires. La parole des enquêté·e·s souligne les lacunes de ces sites : les obstacles aux divers projets parentaux, les incompréhensions mutuelles, les contraintes liées à leur réalisation pratique, intime et matérielle que les discours de ces plateformes passent sous silence, en particulier les aspects plus douloureux liés aux corps, les modalités primaires d’attachement à et de l’enfant et les modes de garde alternée, pourtant objets d’intenses débats dans les conversations entre membres. Dans cette enquête, les entretiens permettent d’éclairer les implicites sur lesquels se construisent les annonces publiques, présentant en apparence des projets clairs et rationalisés. Dans les coulisses des négociations pour accéder à la (co)parentalité, les rapports traditionnels de domination des hommes sur les femmes apparaissent beaucoup moins évidents. Il apparaît en effet que « ces négociations sont marquées par des rapports de force et des positions inégalitaires entre prétendants et prétendantes à la parentalité, en fonction de leur genre ». Ainsi, dans le cadre de la recherche coparentale, les rapports sociaux de genre se trouvent transformés, voire renversés, à l’avantage des femmes.

15Dès lors, dans l’ensemble des travaux regroupés dans la première partie de ce dossier, les rapports sociaux de domination ayant trait au genre sont pris en compte à des niveaux distincts, pendant différents moments de l’enquête et selon des perspectives critiques qui insistent sur les asymétries configurées tant par les normes de genre que par les pratiques sociales ordinaires. Les enquêtes menées donnent parfois à voir des résistances de faible intensité, situées le plus souvent dans les marges des terrains, et montrent comment s’opèrent certains déplacements de focale quant à des formes singulières de domination à l’œuvre dans les rapports sociaux de genre. Les articulations entre des approches quantitatives et qualitatives permettent de saisir à la fois le fonctionnement structurel des rapports de pouvoir de genre et la manière dont il s’actualise, à des échelles plus réduites, sur les terrains observés. Tous les articles cherchent à faire tenir ensemble ces deux aspects relatifs au genre. Dans la suite du dossier, les articles explorent d’autres terrains de recherche en adoptant encore d’autres formes d’attention et d’autres types de regards sur les objets et les situations d’enquête.

Partie 2 : Enquêter « en féministe »

16Depuis quelques d’années, les travaux sur les savoirs situés (Haraway, op. cit.) circulent dans le champ des études de genre en SIC. Ils ont d’abord été mobilisés par les chercheur·seuse·s pour circonscrire leur position dans les rapports sociaux de race, de classe et de genre tel un exercice préambulaire consistant à faire état de son identité sociale. Ces recherches donnent désormais lieu à des questionnements d’ordre théorique, méthodologique, épistémologique et éthique relevant de la production des savoirs. Dans les articles de la seconde partie de ce dossier, les autrices, s’appuyant sur les méthodologies ethnographiques, placent au cœur de leur enquête une réflexion sur leur propre position dans le but d’expérimenter ce que pourrait vouloir dire incarner une « objectivité forte » (Harding, op. cit.), tout en souscrivant à une rigueur scientifique de type « féministe ». Cette démarche est discutée au sein même des textes présentés. Donna Haraway préfère d’ailleurs la notion de diffraction à celle de réflexivité qui induit, selon elle, l’idée d’un retour sur soi autocentré, là où la démarche invite plutôt à une mise en connexion de points de vue situés et partiels de manière à interroger les impensés et les implicites. La question du positionnement, telle qu’elle est traitée dans les contributions de cette deuxième partie, est riche précisément parce qu’elle n’est pas stabilisée : elle renvoie à une position ouverte qui tâtonne et s’adapte aux situations traversées dans l’enquête, en assumant les contradictions et les aspérités qui la parcourent. Elle fait émerger des interrogations plus qu’elle n’en referme et promeut l’instabilité contre une fixité qui pourrait conduire à des formes de figements catégoriels. En outre, en plaçant le genre au cœur de leur réflexion sur l’enquête, ces autrices cherchent à penser les rapports de domination sur le terrain. Cela témoigne de mises en application concrètes de principes issus de théories féministes mobilisées dans leurs modes d’être et de faire scientifique. Par exemple, l’invitation des féministes, sur le plan théorique, à décloisonner les frontières entre ce qui relèverait du public et ce qui relèverait du privé travaille directement ces chercheuses. Elles prennent également en considération leurs affects dans l’analyse et interrogent comment leur propre intimité — identité de genre et de classe, trajectoire personnelle, expériences vécues du sujet de recherche — irrigue l’enquête. Ainsi un certain effet de cohérence caractérise l’ensemble de ces propositions, marquant un renouveau notable dans les travaux menés sur le genre en SIC. Cet effet de cohérence se note également dans la continuité qui se dessine entre les théories et les méthodes employées, les postures adoptées, les objets de recherche sélectionnés, les savoirs produits et même les formes d’écriture scientifique choisies. De façon plus large, les chercheuses prennent à bras-le-corps la question de la responsabilité du chercheur ou de la chercheuse dans le monde social et la dimension potentiellement transformative des savoirs scientifiques (Da Lage et Gellereau, 2014 ; Lalande et Le Marec, 2022).

17C’est dans cette perspective que Mélanie Millette propose, à travers un regard rétrospectif sur ses propres travaux, le déploiement d’une méthodologie féministe en contexte numérique. En plaçant le genre au cœur de ses dispositifs d’enquête, comme concept épistémologique et politique, elle interroge les conséquences d’un tel parti pris sur tous les plans de l’activité scientifique, en prenant des exemples issus de ses différents terrains d’exploration. Dans ses recherches, elle enquête notamment sur les usages et les pratiques numériques des personnes minorisées. Il s’agit par là pour la chercheuse de prendre « en considération l’injustice sociale dès la constitution de la problématique et [d’en faire] le point focal de la démarche ». Une telle approche évite, selon elle, l’écueil colonial qui consiste à fournir des analyses souvent essentialistes, exotisantes, voire romantiques et misérabilistes de nos sujets de recherche. Il s’agit plutôt de les penser dans toute leur agentivité et de déployer une véritable critique sociopolitique par l’action et l’implication. Dès lors, Millette se présente explicitement comme « une alliée en recherche » vis-à-vis de ses enquêté·e·s. C’est précisément dans cette posture éthique que se loge la rigueur scientifique d’un propos qui place le genre au cœur de ses dispositifs d’enquête, tant comme concept épistémologique que comme notion politique. Ces interrogations méthodologiques consistent à se demander en quoi consiste le fait d’enquêter en féministe.

18Irène Despontin Lefèvre, dans son enquête (n)ethnographique (en ligne et hors ligne), réalisée au sein de l’association féministe NousToutes, aborde la manière dont elle a négocié sa posture de recherche, impliquant différentes modalités de présentation de soi durant le temps long de l’enquête et les grands moments qui la ponctuent (phase exploratoire, entrée sur le terrain, sortie, etc.). Elle montre comment ces réglages interpersonnels, entre observation à découvert et incognito, sont jalonnés par des conflits et des controverses clivants au sein des mouvements féministes contemporains comme les sujets de l’intersectionnalité ou de la prostitution. On suit ainsi comment la question de la posture de l’enquêtrice affecte divers aspects de l’activité scientifique elle-même : la construction de l’objet de recherche, les relations aux enquêté·e·s ou encore la production des savoirs, ici en particulier l’écriture de l’histoire féministe. On note aussi comment elle s’inscrit dans un questionnement ouvert qui pose des problèmes plus qu’il n’en résout. Dans le sillage des travaux d’Emmanuel Beaubatie (2017), elle se demande par exemple si l’incitation à se positionner par rapport à son objet de recherche dans les études de genre ne correspond pas à une contrainte supplémentaire qui pèserait uniquement sur un type de chercheur·euse et de travaux déjà minorisés dans le champ scientifique et social.

19Coline Reille travaille quant à elle sur les relations humains-animaux dits de compagnie en contexte professionnel (associations, vétérinaire, élevages d’animaux). Dans son texte intitulé « Introduire l’éthique du care dans l’enquête de terrain. Le cas d’une enquête de terrain en professions animalières », elle propose une réflexion sur l’introduction de l’éthique du care (Gilligan, 1982) dans des modes d’enquête. Pour ce faire, elle décide de décloisonner vie personnelle et vie scientifique en interrogeant un milieu associatif animalier dans lequel elle était déjà engagée en tant que bénévole, mais aussi bénéficiaire puisqu’elle y a personnellement déjà adopté un chat. Tentant de gommer certaines frontières relationnelles avec ses enquêté·e·s, l’enquêtrice décide également de leur faire part de certains de ses questionnements de recherche et de les soumettre à la discussion. Elle évoque aussi des situations où, à l’inverse, elle subit des rapports de pouvoir sur le terrain, ce qui trouble la distribution asymétrique inhérente à la relation d’enquête entre le chercheur ou la chercheuse et les enquêté·e·s. Elle souligne centralement l’impossibilité d’enquêter sur les activités de care, effectuées dans la discrétion, en se maintenant à l’écart de celles-ci. En effet, le travail du care, « les enquêté·e·s ne le racontent pas, c’est la démarche ethnographique qui le révèle ». À ce titre, elle propose une écriture sous forme de portraits des pourvoyeuses de soin aux animaux afin de rendre visible ce travail, caractérisé par la dévalorisation et l’invisibilisation sociale (Molinier, 2010 et 2018).

20Dans sa recherche-action, qui pose au premier plan la question de l’engagement politique de la chercheuse dans l’espace public, Giuseppina Sapio affiche clairement sa volonté de « transformer les milieux dans lesquels on agit et on est agi » (Le Marec et Sandri, 2022). Ici, par une participation à la création et à la diffusion d’un outil singulier développé avec la fédération France Victimes, la chercheuse s’implique en devenant pleinement partie prenante du terrain de recherche qu’elle interroge. Cet outil est le dispositif Mémo de Vie4, une application numérique destinée à accompagner des femmes en situation de violences conjugales et visant à leur permettre de s’extraire de celle-ci, notamment par la réflexivité. À travers cette recherche-action, il s’agit pour la chercheuse d’éclairer la manière dont la promesse de care (Laugier, Molinier et Paperman, 2021) de Mémo de Vie peut être mise en perspective dans sa rencontre avec des actrices qui en prescrivent l’usage à des femmes violentées. Dans le cadre de cette enquête au sein de cette association qui réunit des professionnels bénévoles issus de plusieurs domaines (droit, psychologie, etc.) et des « victimes » de violences conjugales, Sapio refuse la dénomination d’« enquêté·e·s ». Considérant que l’emploi du terme induit une asymétrie dans les relations d’enquête, elle propose de convoquer d’autres vocables tels que « collaboratrices », « actrices de terrain » ou encore « professionnelles ». Ainsi mobilise-t-elle tout au long de son enquête une posture d’objectivité forte quant à ce qui est en jeu dans la prise en charge des violences sexistes et sexuelles. Au passage, elle estime que le manque d’objectivité se trouverait du côté des recherches qui résistent à la contingence du terrain : « […] nous considérons désormais qu’une recherche qui ne se laisse pas mettre en danger par le terrain sera toujours partielle et partiale. »

21Enfin, dans un texte de recherche intitulé « Enquêter pour exposer : une recherche-création pédagogique autour des 50 ans du procès de Bobigny », Lucie Alexis et Claire Blandin relatent une expérimentation pédagogique pluridisciplinaire menée au cours d’une recherche-création au sein de l’Université Panthéon Assas. Elles restituent l’enquête archivistique, médiatique et sémiologique menée par les étudiant·e·s de master et analysent le cadre pédagogique mis en place à l’occasion de la célébration des 50 ans d’un événement historique majeur dans l’histoire des luttes féministes : le « procès de Bobigny » de novembre 1972. Ce procès met en jeu des protagonistes qui ont marqué les esprits et la mémoire : Marie-Claire Chevalier, âgée de 16 ans, avait avorté après un viol et avait été jugée pour cela. Dans ce contexte, l’avocate de la défense Gisèle Halimi va utiliser le second procès pour mettre en exergue l’impartialité de la loi et plaider en faveur de la légalisation, en France, de l’interruption volontaire de grossesse. Ce procès est devenu un événement médiatique féministe majeur de l’histoire contemporaine, et a suscité la production de nombreux artéfacts médiatiques qui ont, depuis, assuré la postérité de ce procès et permettent de le (re)documenter. Les travaux menés par ce duo de chercheuses ont été conçus de façon multi-facette : ils ont réuni des acteur·rice·s universitaires, militants et professionnels (du monde culturel) autour d’une réflexion collective sur l’écriture de l’histoire féministe et de sa médiation au sein de la société. Le montage d’un collectif enquêteur qui se coconstruit dans l’enquête elle-même donne à voir un dispositif scientifique et pédagogique singulier de recherche-création autour de la vitalité des mémoires féministes. Dans un tel contexte, les autrices montrent les renouvellements des regards sur le passé permis par l’articulation entre la réflexion scientifique, le faire et le développement d’une pensée autour de ce faire.

22Ainsi les travaux sélectionnés dans cette seconde partie rendent-ils compte d’enquêtes situées, participantes et impliquées à des degrés pluriels et dans des terrains multiples : militants, bénévoles et universitaires. La diversité des relations de proximité avec les enquêté·e·s et leurs implications sont interrogées dans ces articles à travers le renversement du paradigme de la distanciation objective : la proximité physique et affective avec les enquêté·e·s devient un mode d’accès privilégié, voire indispensable à la production de certains savoirs. Le genre, compris comme une première façon de signifier les rapports de pouvoir (Scott et Varikas, 1988), prend place au sein de ces questionnements. Inspirées communément par les travaux d’Isabelle Clair (2016), les contributrices témoignent du souci partagé de penser les rapports de pouvoir qui se jouent sur le terrain entre enquêtrices et enquêté·e·s, humain·e·s et non-humain·e·s. Ce déséquilibre en faveur de l’enquêtrice, du fait du savoir détenu par celle-ci et de son rôle d’orchestre du bon déroulé de l’enquête, est posé par les autrices comme un postulat. Néanmoins, dans ces récits, le lectorat peut suivre combien ces dernières demeurent soucieuses de ne pas reproduire des rapports de pouvoir. Elles cherchent à créer les conditions d’enquête les plus horizontales possibles au moyen de divers procédés, à commencer par le décloisonnement des savoirs et la reconnaissance de leur complémentarité. Dans leurs écrits, on peut noter combien elles prennent au sérieux les savoirs non académiques, notamment militants et bénévoles, et valorisent les savoirs d’expérience dans la lignée des travaux féministes. Ces entrelacements témoignent de la convergence d’intérêts entre enquêtrices et enquêté·e·s et de préoccupations partagées qui se traduisent non seulement dans les questionnements de recherche posés, mais également dans la participation et l’improvisation (Rancière, 1987) qui font vaciller la dichotomie sujet/objet de recherche et les rapports entre sachant et apprenant. Dès lors, de nouveaux savoirs ayant trait au genre s’élaborent par le biais de l’enrichissement des méthodologies propres aux SIC.

23Dans ce dossier, il s’agit finalement d’identifier dans quelle mesure la présence du chercheur ou de la chercheuse transforme le terrain autant que le terrain, en retour, les transforme durant tout le temps de l’enquête et bien au-delà, dans un parcours de recherche au long cours. C’est ainsi que le geste scientifique de l’enquête exige de la part des chercheurs et des chercheuses non seulement une réflexion méthodologique radicale, mais également une remise en cause radicale de leur propre posture scientifique. Cette réflexion sur la place du chercheur ou de la chercheuse comme maillon parmi d’autres dans les processus d’élaboration des savoirs marque un apport notable des travaux menés sur le genre en SIC.

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Notes

1 https://philomel.hypotheses.org/9009.

2 Tels que les questions de médiation, de signification, de documentation ou encore de circulation des signes, du sens, des informations, des savoirs et des idéologies.

3  Nous utilisons ici le féminin, car tous les articles ont été rédigés par au moins une autrice.

4 Lien vers la plateforme : https://memo-de-vie.org.

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Pour citer cet article

Référence électronique

Emmanuelle Bruneel, Aurélie Olivesi et Laura Verquere, « Enquêter sur le genre en communication »Communication [En ligne], vol. 40/2 | 2023, mis en ligne le 14 décembre 2023, consulté le 21 mai 2025. URL : http://journals.openedition.org/communication/17698 ; DOI : https://doi.org/10.4000/communication.17698

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Auteurs

Emmanuelle Bruneel

Emmanuelle Bruneel est doctorante en Sciences de l’Information et de la Communication au laboratoire GRIPIC (UR 1498) et professeure-documentaliste certifiée. Courriel : bruneelemmanuelle@gmail.com

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Aurélie Olivesi

Aurélie Olivesi est Maîtresse de Conférences HDR en Sciences de l’Information et de la Communication à l’Université Claude Bernard Lyon 1 et membre du laboratoire ELICO (UR 4147). Courriel : aurelie.olivesi@univ-lyon1.fr

Laura Verquere

Laura Verquere est docteure en Sciences de l’Information et de la Communication, attachée temporaire d’enseignement et de recherche au Celsa-Sorbonne Université et membre du laboratoire GRIPIC (UR 1498). Courriel : laura.verquere@gmail.com

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