Ainsi va Valle… Évaluation et préservation de l’œuvre de Gino Valle à La Défense
Résumés
L’article étudie le projet de l’architecte italien Gino Valle réalisé pour IBM à La Défense de 1984 à 1989. Il présente le développement du quartier Michelet au sein duquel ce projet s’implante ainsi que son évolution actuelle. La posture critique du projet vis-à-vis de l’environnement de La Défense est analysée selon les thèmes des principes d’implantation et de la tectonique. Le processus d’évaluation du bâtiment est présenté en relation avec les principes retenus pour sa préservation, principalement les façades intégralement revêtues de pierre.
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Introduction
- 1 Jean-Louis Violeau, Paris postmoderne. Architectures 1973-1993, Paris, Pavillon de l’Arsenal, 2023, (...)
- 2 Cur. Francesca Albani et Franz Graf (USI Mendrisio) en collaboration avec Archivio Studio Valle, Gi (...)
- 3 Barthélémy-Griño architectes, pour Unibail Rodamco Westfield. La livraison du bâtiment, renommé Lig (...)
1La circularité de la corrélation entre démolition et préservation se vérifie à chaque extension des artefacts considérés, l’architecture postmoderne n’y fait pas exception et, dans le cas qui nous intéresse ici, l’œuvre de l’architecte italien Gino Valle (1923-2003) à La Défense (fig. 1), celle-ci présente une singulière synchronie. Alors que cet ensemble est enfin documenté dans le guide Paris postmoderne, Architecture 1973-19931 paru en juillet 2023 et qu’une rétrospective de son œuvre s’ouvre à Udine pour le centenaire de sa naissance en décembre de cette même année2, l’un des deux bâtiments le constituant fait l’objet d’une restructuration lourde3 qui, en se soumettant à l’injonction de transparence, rompt la gémellité des deux blocs et dissout ainsi l’ambition urbaine de cet ensemble qui n’est plus alors perceptible comme un fragment urbain haussmannien critiquant explicitement le chaos de La Défense.
Figure 1. Vue depuis l’Esplanade de La Défense vers la Seine de l’ensemble conçu par Gino Valle (1984-1988)

Au premier plan le bâtiment Galilée, siège européen d’IBM à sa livraison, au second plan à gauche le bâtiment Acacia comprenant des bureaux, un hôtel, une résidence hôtelière et une rue commerçante intérieure.
@ Archivio Studio Valle Architetti Associati (ASVAA, Udine), Fernando Xavier Urquijo (photographe)
- 4 Au sein de l’agence Architecturestudio.
- 5 Aujourd’hui PIMCO Europe GmbH-France.
2Nous retracerons dans cette contribution le processus d’évaluation et de préservation de cette œuvre en tant qu’architecte chargé de la réhabilitation du second bloc de cet ensemble4, Acacia, peu remanié depuis sa livraison en 1988 et seul témoin subsistant de l’œuvre de Gino Valle à La Défense. Une consultation restreinte lancée par Allianz Real Estate5, propriétaire du bâtiment, en mai 2022 auprès des agences Architecturestudio, Manuelle Gautrand Architecture et Palissad Architectures est à l’origine de ce processus. Les réponses apportées témoignent à divers degrés du déficit d’appréciation de cette architecture ainsi que du rythme accéléré d’obsolescence propre à La Défense, la mise à jour de l’image des bâtiments, dans le cas de travaux de réhabilitation, y étant un prérequis de tout investissement immobilier (fig. 2).
Figure 2. Architecturestudio, vue du projet retenu à l’issue de la consultation de mai 2022 depuis l’esplanade de La Défense, du bassin de Takis vers la Grande Arche, mai 2022

@ Architecturestudio, Render 77 (perspectiviste)
La formation du quartier Michelet
- 6 « Quelque 210 000 mètres carrés vont être construits dans ce quartier Michelet dont 38 000 mètres c (...)
- 7 La codification des tours s’effectue comme suit : première lettre pour la commune (P pour Puteaux), (...)
- 8 Ce projet s’inscrit dans la continuité de sa première réalisation à La Défense : Henri La Fonta, Le (...)
- 9 IBM impose Gino Valle à La Défense immédiatement après la livraison de son centre de distribution d (...)
- 10 La déclaration d’ouverture de chantier du bâtiment PB 16 d’Henri La Fonta est datée du 29 juillet 1 (...)
3L’ensemble de Gino Valle se situe dans le quartier Michelet, sur la commune de Puteaux, dans le périmètre de l’établissement public Paris-La Défense (fig. 3). Initié en 1982 par la S.A.R.I. de Christian Pellerin associée à la Compagnie générale des eaux6, ce quartier achève l’aménagement des abords de l’Esplanade sur son quadrant sud-est et se caractérise par sa double déclivité – entre l’Esplanade et le cours Michelet, puis entre celui-ci et le boulevard circulaire sud à l’altimétrie du centre historique de Puteaux –, ainsi que par son caractère relativement enclavé, en contrebas de la dalle et en connexion avec la voie de desserte intérieure. La S.A.R.I. choisit comme architectes de cette opération Michel Andrault (1926-2020) et Pierre Parat (1928-2019), Henri La Fonta (1929-2010) et Jean Willerval (1924-1996) qui réaliseront ensemble la tour Total Michelet (PB 177) (1985) en limite ouest du quartier ; Andrault Parat se chargeant du front sud entre le cours et le boulevard circulaire avec deux bâtiments bas démultipliant les volumes cubiques en alternant leurs orientations et leurs façades : Le Michelet (PB 22-23-24) (1985-1986) et Coface (PB 18-19-20-21) (1986) ; Henri La Fonta du front nord entre l’Esplanade et le cours avec un bâtiment en « X8 » associant bureaux, résidence hôtelière et logements (PB 15A-15B-16 et PH 22A-22B-22C) et Jean Willerval de la tour Athéna à l’entrée est du site (PB 25) (1984) (fig. 4). Cependant, lorsque IBM décide en 1984 d’installer son siège européen dans le quartier Michelet à l’emplacement attribué à Henri La Fonta, il impose à sa place son architecte, Gino Valle9, alors même que les fondations du bâtiment sont déjà partiellement coulées10 (fig. 5)].
Figure 3. La formation du quartier Michelet (1982-1990)

Au centre du plan, bâtiments en rouge et espaces publics du cours Michelet en orange.
@ « Morphogenèse du territoire : 1982-1990 », in Pierre Chabard et Virginie Picon-Lefebvre (dir.), La Défense, t. 2. « Un atlas, histoire-territoire », Marseille, Parenthèses, 2012, p. A 130.
Figure 4. Plan du quartier Michelet

Permis de construire, La Défense, Quartier Michelet, PB 16, PC 0-2, Plan de masse 1/500. S.A.R.I. Maître d’ouvrage, H. La Fonta Maître d’œuvre, 25 novembre 1982. Archives municipales de Puteaux, cote 156W8.
@ Archives municipales de Puteaux
Figure 5. Photographie aérienne du quartier Michelet à La Défense, 17 juillet 1985

On constate qu’à cette date les tours Total Michelet (à gauche) et Athéna (à droite) sont achevées, la « chaîne » sud (en bas) est en cours de construction, les travaux des deux bâtiments de Gino Valle (en haut) ne sont pas encore commencés mais on distingue les tracés diagonaux du projet abandonné d’Henri La Fonta.
@IGN (IGNF_PVA_1-0_1985-07-17_C2314-0022_1985_FR3736_0043)
Le projet de Gino Valle
4Gino Valle décide, pour l’implantation du programme de la S.A.R.I. (bureaux, centre d’affaire, hôtel, résidence), de scinder le linéaire de 300 mètres sur l’Esplanade en deux bâtiments, puis de composer ceux-ci à partir de modules : des « maisons » de 18 mètres de largeur ainsi que de profondeur, pour une hauteur d’environ 28 mètres sur portique à rez-de-chaussée et R+1 (fig. 6).
Figure 6. Superposition du plan d’implantation du bâtiment en « X » d’Henri La Fonta (en jaune) avec celui de Gino Valle (en rouge).

On note la contrainte qu’a imposé à Gino Valle l’implantation des points d’appuis préexistants, ainsi que la disposition plus urbaine et « figurative » du plan de Valle. Les trois « maisons » du bâtiment Acacia (à gauche), en alignement sur l’Esplanade, seront réduites à deux dans le projet final à la suite de la modification du volume de l’hôtel et la « tête » triangulaire sera agrandie, à l’image de celle du bâtiment Galilée, avec pour conséquence la suppression de la « maison » attenante.
@ ASVAA, Udine / Pierre-Alain Croset, Luka Skansi, Gino Valle, Milan, Electa, 2010, p. 270.
5Ce principe de fractionnement d’un bâtiment linéaire en « maisons » est directement issu de la cité administrative de Pordenone livrée en 1982 :
- 11 Pierre-Alain Croset, « Una conversazione con Gino Valle » (30 octobre 1985), Casabella, vol. XLIX, (...)
Au départ, j’avais conçu l’ensemble du projet autour d’un seul module, à partir duquel cinq pièces ont été développées, mais je ne savais pas encore où j’aboutirais. Ensuite, en raison des exigences d’une structure antisismique, j’ai dû élargir les joints de dilatation et doubler les poteaux aux endroits correspondants, ce qui m’a finalement conduit à créer de véritables « maisons ». À Paris, j’ai choisi dès le départ d’utiliser ces « maisons » comme module architectural11.
6Les accès principaux se situent aux deux extrémités est et ouest du site au niveau des « têtes » diagonales et sont identifiés par un arc aplati de grande portée rendu nécessaire par la distance de 20 mètres entre les points d’appui préexistants, ainsi que par la convexité des façades en saillie qui les surplombent :
- 12 Pierre-Alain Croset, « Una conversazione con Gino Valle », op. cit., p. 17 (traduction Marta Gallo)
Ainsi sont nées ces allusions au bloc parisien, aux relations entre les habitations et les monuments, et lorsque j’ai dû créer l’entrée sur la tête diagonale en ouvrant un arc de 20 mètres est apparu le souvenir des ponts et des renflements de volumes présents sur les façades de Paris12.
7Un large passage ménagé entre les retours en « U » des bâtiments – l’un courbe et l’autre orthogonal – permet l’accès au cours Michelet en contrebas par des escaliers depuis le niveau de l’Esplanade. Le plan des espaces et cheminements publics à l’échelle du quartier Michelet (fig. 7), l’axonométrie générale du projet (fig. 8) ainsi que les plans et élévations de l’ensemble (fig. 9 et 10) sont particulièrement convaincants quant à la dimension urbaine des deux îlots ainsi créés sur la dalle de La Défense.
Figure 7. Plan du site représentant les espaces publics aux niveaux de l’esplanade et du cours Michelet en contrebas

On voit le soin apporté par Gino Valle à installer d’une part au niveau haut un alignement sur l’Esplanade avec des portiques continus et à fragmenter et ouvrir d’autre part les socles des bâtiments au niveau du cours Michelet pour minimiser leur hauteur perçue et multiplier les cheminements publics entre les deux niveaux.
@ ASVAA, Udine / Pierre-Alain Croset, « Gino Valle. Edifici per uffici alla Défense a Parigi », Casabella, vol. XLIX, n° 519, décembre 1985, p. 6, ill. 8.
Figure 8. Axonométrie générale des deux bâtiments de l’ensemble

On note la trame diagonale du cours Michelet à laquelle Gino Valle se soustrait pour son implantation. Le projet en cours de l’agence TVK pour celui-ci prévoit d’y implanter une géométrie orthogonale pour les cheminements principaux.
@ ASVAA, Udine
Figure 9. Élévation générale sur l’Esplanade et plans d’étage courant

Acacia à gauche et Galilée à droite.
@ ASVAA, Udine
Figure 10. Élévation générale sur le cours Michelet et plans au niveau d’accès Esplanade

Galilée à gauche et Acacia à droite.
@ ASVAA, Udine
La situation actuelle
8Aujourd’hui le quartier Michelet est en profonde mutation, celle-ci ayant commencé une trentaine d’années après sa livraison : rénovation de la tour Athéna (Allianz One) (agence Bridot Willerval, 2015) à l’est ; démolition progressive des bâtiments d’Audrault Parat au sud pour faire place au Carré Michelet (Cro & Co Architecture, 2016-2019) ainsi qu’à la double tour The Link en cours de construction (PCA-STREAM, 2019-2025) et transformation à venir des tours Total. Les espaces publics sont également concernés par cette mutation : la rénovation du cours Michelet a été confiée à l’agence TVK (2023-2026) et le parc urbain (Esplanade et axe de La Défense) à Michel Desvigne (2021-2026).
- 13 L’immeuble a été acquis par Unibail-Rodamco en 1999.
9C’est cependant la restructuration lourde, sur le linéaire ouest de l’Esplanade, du Galilée – renommé Lightwell (Barthélémy-Griño architectes, 2021-2024)13 – qui nous intéresse plus directement en tant que bâtiment emblématique du projet de Gino Valle pour La Défense. Celui-ci a été en effet profondément transformé : d’abord par le changement complet de principe constructif et de matérialité de ses façades – celles-ci, originellement percées de baies profondes, deviennent pelliculaires (isolation thermique extérieure, bardage et vitrage positionné au même nu que ce dernier) et la totalité du revêtement en pierre mince a été déposée pour être remplacée par des cassettes métalliques ; ensuite par la démolition de sa partie centrale afin de créer un atrium vitré sur six niveaux (fig. 11), typologie totalement exogène au bâtiment existant ; enfin par la surélévation d’un étage qui décorrèle son couronnement de celui du bâtiment Acacia immédiatement adjacent. On conçoit qu’au sein de ces nombreuses transformations du quartier Michelet, le bâtiment Acacia constitue le seul témoignage de la fabrication de ce quartier de La Défense par la S.A.R.I. au cours des années 1980 (fig. 12).
Figure 11. Le bâtiment Galilée en cours de démolition. Vue depuis l’Esplanade, 29 octobre 2022

La partie centrale du bâtiment, correspondant à l’emprise d’un peu plus d’une « maison », a été rasée afin de permettre la création d’un atrium entièrement vitré sur six niveaux. Au second plan les tours Total Michelet.
@ Grégory Azar
Figure 12. Vue des transformations en cours du quartier Michelet, 31 janvier 2024

Au premier plan au centre le bâtiment Lightwell (ex-Galilée) en fin de travaux, à sa gauche le bâtiment Acacia, peu modifié extérieurement depuis 1988, au second plan au centre la tour The Link en cours de chantier et immédiatement à sa droite le Carré Michelet. Les travaux sur l’Esplanade et le cours Michelet en contrebas n’ont pas encore commencé.
@ Grégory Azar
Une évaluation complexe
- 14 Pierre-Alain Croset, « Gino Valle. Edifici per uffici alla Défense a Parigi », Casabella, vol. XLIX (...)
- 15 Pierre-Alain Croset, « Una conversazione con Gino Valle », op. cit. ; Vittorio Magnago Lampugnani, (...)
- 16 Pierre-Alain Croset, Gino Valle. Progetti e architetture, Milan, Electa, 1989 ; Pierre-Alain Croset (...)
- 17 Gino Valle. Architetto 1950-1978, cur. Gino Valle, Milan, Padiglione d'Arte Contemporanea di Milano (...)
- 18 « Italie », Aujourd’hui. Art et Architecture, vol. VIII, n° 48, janvier 1965 ; Vittorio Gregotti, N (...)
- 19 Ces entretiens ont été réalisés à distance les 19 et 26 janvier 2024.
10La réponse à la consultation de mai 2022 consistant en une proposition de dépose de la façade en pierre agrafée existante et son réemploi in situ suivant une disposition cinétique (fig. 2) s’est rapidement révélée inappropriée au regard de la dimension patrimoniale du bâtiment Acacia. Cette conviction s’est forgée au cours d’une recherche des sources disponibles : articles consacrés au projet14 (fig. 13 et 14) ; entretiens avec Gino Valle réalisés dans les années 198015 ; monographies16 ; catalogues d’expositions17 ; ouvrages sur la scène italienne de cette période18 ; visite des réalisations de Gino Valle à Paris, Venise, Udine et New York ; entretiens avec les principaux protagonistes : Pietro Valle (1962), fils de Gino Valle, ayant repris l’agence et y conservant les archives, Giorgio Macola, associé de Gino Valle sur le projet de La Défense et directeur de l’agence parisienne des années 1985 à 2000, Pierre-Alain Croset (1957), professeur au Politecnico de Milan et rédacteur à la revue Casabella à partir de l’arrivée de Vittorio Gregotti (1927-2020) à sa direction en 1982 et auteur des monographies de 1989, 2010 et 2018, Luka Skansi (1973), maître de conférences également au Politecnico de Milan et co-auteur des deux dernières monographies19.
Figure 13. Page de couverture de la revue Casabella, vol. XLIX, n° 519, décembre 1985 (perspective de l’entrée du bâtiment Galilée).

@ Casabella
Figure 14. Page de couverture de la revue Lotus international, n° 69, 1989, 1 (vue de l’angle ouest du bâtiment Galilée)

@ Lotus international
- 20 Nous entendons ici versatilité au sens de faculté d’adaptation et non d’inconstance.
11Parallèlement à ces recherches ont été entreprises une observation plus fine du bâtiment existant, notamment de ses façades, ainsi que la localisation et l’analyse des dossiers des ouvrages exécutés (DOE) des différentes phases de travaux. Une conviction s’est alors formée : la dimension critique de l’ensemble de Gino Valle à La Défense constituait le fil conducteur de l’évaluation à entreprendre ; cette dimension critique opérant selon deux thèmes : les principes d’implantation et la tectonique ; enfin que cette évaluation, du fait de la versatilité projectuelle de Valle20, devait être interne au corpus de son œuvre bâtie de la première moitié des années 1980, moment d’évolution de sa pratique dont le projet de La Défense est le témoignage.
Le projet comme critique : les principes d’implantation
- 21 « Plus tard, de 1963 à 1975, ses projets dans le centre historique d'Udine sont intéressants précis (...)
12Nous analyserons, pour établir cette dimension critique de l’implantation, les projets à dimension urbaine de Gino Valle – les « pezzi de città » – précédant immédiatement son intervention à La Défense, à savoir le centre administratif de Pordenone (1972-1982), les logements sociaux de la Giudecca à Venise (1980-1986) et l’école élémentaire de Berlin réalisée dans le cadre de l’IBA (1983-1987). L’analyse de ces projets permettra d’appréhender les différentes manières qu’a Gino Valle d’établir une tension critique entre son œuvre bâtie et le contexte historique21. Cette tension critique est manifeste dans sa description du projet de La Défense en 1985 :
- 22 Pierre-Alain Croset, « Una conversazione con Gino Valle », op. cit., p. 16 (traduction Marta Gallo)
Le projet de La Défense représente avant tout un défi audacieux face à un environnement où il est difficile de trouver des repères d’échelle, précisément en raison de l’absence d’un schéma urbain. La Défense est un lieu chaotique […] Lorsqu’il a fallu construire à La Défense, ma première réaction a été de faire exactement le contraire, c’est-à-dire de construire un vrai morceau de ville, reconnaissable pour ceux qui se promènent dans ce lieu, conçu comme un système de bâtiments, pensé comme un système de « maisons » parisiennes à deux têtes […] Cette prise de position concernant La Défense était donc la seule possible, car on ne peut pas rivaliser avec une situation de monstres sans échelle. Je souhaite proposer une architecture qui soit urbaine tant sur le plan tactile que dans son usage réel, et je ne peux pas la concevoir comme un simple objet abstrait22.
Figure 15. Gino Valle, Centre administratif de Pordenone, 1972-1982. Plan de situation

@ ASVAA, Udine / Pierre-Alain Croset, Luka Skansi, Gino Valle, Milan, Electa, 2010, p. 171.
13Au centre administratif de Pordenone, dont le projet date de 1972 (fig. 15), c’est à partir de l’agencement de types modernes – bâtiments linéaires hauts, bâtiments proliférants bas et sol artificiel – que Gino Valle crée une place centrale triangulaire à l’intersection des principaux cheminements du site, reliant ainsi ce complexe aux différents contextes environnants : le centre historique à l’est, connecté au niveau de son ancien chemin de ronde ; un nouveau quartier en cours de construction au nord, auquel Valle oppose un front bâti linéaire ; la gare ferroviaire à l’ouest et des parcs au sud. Les relations entre les bâtiments de gabarits variables et les multiples cheminements tracés créent un analogue d’espace urbain :
Pordenone a été le premier projet de grande envergure où il a été nécessaire de déterminer une échelle de construction permettant de créer un environnement qui soit perçu comme un fragment de ville, plutôt que comme un simple objet .
14La précision de l’implantation ainsi que les interactions créées avec ces contextes hétérogènes, si elle n’est pas sans liens avec la publication par son ami Vittorio Gregotti d’Il territorio dell’architettura en 1966, témoigne de sa dextérité propre.
Figure 16. Gino Valle, Complexe de logements sociaux à la Giudecca, Venise, 1980-1986

Plans des niveaux rez-de-chaussée, premier et deuxième étage avec la trame générale de 1,65 mètre. L’entrée se fait à travers un jardin (en haut du plan), suivi des arcades, du campiello, de la calle axée sur celui-ci et la cheminée du Molino Stucky, puis du campezzo (en bas à gauche du plan).
@ ASVAA, Udine / Pierre-Alain Croset, « On Gino Valle’s project at the Giudecca », Lotus International, n° 51, 1986-3, p. 128.
- 23 Sur ce projet remarquable voir : Giacomo Polin, « Gino Valle. Nuove abitazioni popolari a Venezia » (...)
15Pour l’opération de 94 logements sociaux sur l’île de la Giudecca à Venise, Gino Valle implante un « tappeto residenziale » sur une parcelle industrielle au bord de la lagune23 (fig. 16). Il établit sur l’ensemble du site une grille orthogonale basée sur un module de 1,65 mètre – module lui permettant de former les deux superficies de pièces réglementaires de 9 mètres carrés (quatre modules) et 14 mètres carrés (six modules) – tout en développant sa nappe dans un épannelage décroissant vers la lagune et en dessinant les espaces publics sur le modèle du tissu urbain vénitien : calle, campiello et campazzo. Il critique ainsi d’une part les morphologies linéaires associées au logement social et construit d’autre part, via la référence au modèle urbain de la Sérénissime et à l’inscription visuelle des implantations industrielles jouxtant le site (les hautes cheminées en briques), une mémoire fictive du site.
Figure 17. Gino Valle, École primaire et école spéciale pour enfants présentant un trouble développemental du langage, Friedrichstrasse 13 et Lindenstrasse 98-106 (Block 606), Berlin, 1983-1987. Axonométrie

@ ASVAA, Udine / Pierre-Alain Croset et Luka Skansi, Modern and Site Specific. The Architecture of Gino Valle, 1946-2003, Londres, Lund Humphries, 2018, p. 232.
- 24 Sur cette école double (Galilei et Liebmann), réalisée en association avec Mario Broggi et Michael (...)
- 25 La doctrine de la Kritische Rekonstruktion élaborée par Josef Paul Kleihues prône « le respect ou l (...)
16Enfin, dans le cadre de l’Internationale Bauausstellung à Berlin, Gino Valle réalise une école double, élémentaire et spécialisée, dans le secteur de Südliche Friedrichstadt, sur une parcelle traversante au sein d’un îlot bordant à l’Ouest la Friedrichstrasse et à l’Est la Lindenstrasse24 (fig. 17). Il implante à l’alignement, conformément aux préceptes urbains définis par Josef Paul Kleihues (1933-2004)25, le bâtiment d’entrée et dispose ensuite, au-delà des fonds de parcelles des immeubles prévus sur la Friedrichstrasse dans le cadre de l’IBA, la majorité du programme de l’école dont la typologie se réfère directement à celles de la période wilhelmienne, plus particulièrement à l’une des nombreuses réalisées par l’architecte Ludwig Hoffmann à Berlin – la Gemeindedoppelschule Rigaer Strasse – dont il reprend le plan en double diapason : deux corps de bâtiments en « U » abritant des salles de classe et disposés de part et d’autre d’une cour centrale (fig. 18). Parallèlement à ces dispositions urbaines traditionnelles, à la fois morphologiquement et typologiquement, Gino Valle ménage des cheminements et des vues au-delà des limites du site – par exemple l’allée plantée axée sur le bâtiment historique du Judisches Museum sur la Lindenstrasse. C’est cependant dans son choix de conserver as found le quart sud-est de la parcelle – une butte préexistante en friche – que se révèle sa posture critique vis-à-vis du principe urbain d’alignement et de complétude de l’îlot défendu par l’IBA.
Figure 18. Ludwig Hoffmann, Gemeindedoppelschule Rigaer Straße, Berlin, 1899-1902. Plan du niveau rez-de-chaussée

@ Dörte Döhl, Ludwig Hoffmann. Bauen für Berlin 1896-1924, Berlin, Ernst Wasmuth, 2004, p. 263.
17Mais qu’en est-il pour les principes d’implantation du projet de La Défense ? Comment se situe-t-il au regard de ces trois réalisations dont les chantiers lui sont contemporains ? Manfredo Tafuri (1935-1994), dans la seconde édition de sa Storia dell’architettura italiana, 1944-1985, discerne une « nouvelle manière » dont ferait preuve Gino Valle pour ses projets à grande échelle au cours des années 1980 :
- 26 Manfredo Tafuri, History of Italian Architecture, 1944-1985 [1982, 1986], op. cit, p. 172 (traducti (...)
[…] en concevant le projet pour les nouveaux logements sociaux derrière le Mulino Stucky à Venise, Valle a introduit dans son répertoire une flexibilité formelle directement liée au contexte de cette marge urbaine : la structure du projet est basée sur une analyse minutieuse abordant la flexibilité nécessaire pour affronter un tissu dense, et incorpore des échos d’un ancien bâtiment industriel. Il est cependant évident que dans l’immeuble de bureaux de New York, dans le quartier administratif de Pordenone et dans le projet pour les nouveaux bureaux d’Olivetti à Ivrea, et surtout dans les récents immeubles d’IBM à La Défense à Paris en cours de construction, Valle a fait preuve d’une nouvelle manière intéressante non seulement en elle-même, mais aussi d’un point de vue méthodologique, une manière qui s’intéresse à la planification à grande échelle, à l’urbanisme, à la réception des échos figuratifs du contexte et à un rapport équilibré entre la “grande forme” et les fragments.26
- 27 « […] la géométrie précise du plan correspond à la rigueur linguistique confiée à quelques éléments (...)
18Si l’émergence d’une « nouvelle manière » est débattue au sein des différentes études de l’œuvre de Gino Valle, Tafuri voit juste quant à l’élaboration d’une méthodologie de projet propre à la grande échelle dont témoignent, chronologiquement, les réalisations de Pordenone, La Défense et Ivrea (1985-1988), travaillant toutes à partir de modules assemblés au sein d’une « grande forme ». Quant aux « échos figuratifs du contexte », formule si pertinente pour les logements de la Giudecca et l’école de Berlin27, comment ceux-ci peuvent-ils opérer à La Défense alors que Gino Valle en critique explicitement l’environnement ?
19Celui-ci implante, entre l’Esplanade et le cours Michelet en contrebas, ce qui apparaît dans ses principales composantes comme la transposition critique à La Défense de deux îlots haussmannien restituant l’alignement et la morphologie d’un boulevard parisien : le rythme des mitoyennetés recréé par les « maisons », la tripartition des façades en socle, corps et couronnement, l’utilisation quasi-exclusive de la pierre calcaire, l’attique sombre évoquant les couvertures en ardoise, jusqu’à la rue commerçante intérieure du bâtiment Acacia qui fait écho aux passages parisiens avec sa grande verrière circulaire à l’articulation de plusieurs accès.
- 28 Vittorio Gregotti, L'architettura del realismo critico, Rome, Gius Laterza & Figli, 2004 (particul (...)
20Notons que cette critique de l’anonymité de La Défense par Gino Valle au moyen des principes d’implantation opère par l’architecture elle-même : sa matérialité et son usage. Celui-ci a toujours refusé d’être un théoricien, et si l’on peut être tenté de rattacher ses projets « urbains » de la première moitié des années 1980 au réalisme critique de Vittorio Gregotti28, à la reconstruction critique de Josef Paul Kleihues (cf. infra note 28) ou au régionalisme critique de Kenneth Frampton (cf. infra note 37), cela s’avère largement inopérant pour la compréhension des œuvres de cette période.
Le projet comme critique : une tectonique analogique ?
21La seconde dimension critique du projet de Gino Valle vis-à-vis de l’environnement de La Défense est son choix de revêtir de pierre l’ensemble des façades des deux bâtiments constituant son morceau de ville et de conférer à ce revêtement, au-delà de l’analogie au bâti haussmannien, une dimension proprement tectonique :
- 29 Pierre-Alain Croset, « Una conversazione con Gino Valle », op. cit., p. 16-17 (traduction Marta Gal (...)
J’ai immédiatement envisagé d’utiliser la pierre pour La Défense, en référence aux architectures parisiennes. À New York, il s’agissait de me relier directement au bâtiment existant, et en effet, lorsque vous voyez pour la première fois l’axonométrie ou les photographies, la réaction est de penser : mimétisme. Mais quand vous voyez le bâtiment, vous réalisez qu’il ne s’agit pas de mimétisme, mais d’une question plus complexe […]. En effet, j’ai souhaité exploiter dans cette façade [nda : celle de New York] l’incroyable capacité de la pierre à changer d’aspect en fonction de la lumière, notamment le granit noir brillant qui se transforme en miroir lorsqu’il est exposé au soleil […]. De la même manière, je joue avec les reflets de la façade de Paris, avec le couronnement en porphyre sombre qui reflète le ciel […]. En employant une pierre mince à Paris, j’ai abouti à une façade segmentée avec une composition très graphique, où les joints de trois centimètres créent des lignes définies. En revanche, à New York, je jouais davantage avec les surfaces sur le volume du bâtiment29.
- 30 Préalablement à ce projet, Gino Valle avait travaillé de 1977 à 1981 pour la Banca commerciale Ital (...)
- 31 « La composition est mise en valeur par le placage de pierre qui recouvre les élévations. Le revête (...)
22L’ensemble édifié à La Défense est donc directement lié, sur ces questions de matérialité et de tectonique, au projet du siège de la Banca Commerciale Italiana à New York (One William Street) qui le précède de quelques années seulement (1981-1986)30 (fig. 19). Gino Valle complète par spécularité le bâtiment existant de Francis M. Kimball (1907) en s’alignant aux limites de la parcelle existante et redouble cette opération, cette fois-ci matériellement, par la quasi-duplication de son appareil de pierre et de son principe constructif (revêtement de pierre épaisse fixé sur ossature métallique) (fig. 20). Mais comme il le souligne, il ne s’agit pas ici de mimesis mais d’un écart critique qui opère par dématérialisation sélective de l’appareil de façade au moyen de bandeaux de granit noir poli rythmant les étages31.
Figure 19. Gino Valle, Banca Commerciale Italiana, New York, 1981-1986

Vue d’ensemble avec à gauche le bâtiment existant de Francis Kimball (1907) et à droite l’extension de Gino Vle.
@ Grégory Azar
Figure 20. Gino Valle, Banca Commerciale Italiana, New York, 1981-1986

Détails de pose et de fixation des pierres (grès sablé et granit noir poli) d’une épaisseur de 10 cm (4”) sur l’ossature métallique. Coupe d’exécution à gauche et photographie de chantier à droite.
@ ASVAA, Udine / Kenneth Frampton, « Gino Valle. Edificio per uffizi, New York », Domus, n° 683, mai 1987, p. 34, 35.
- 32 Kenneth Frampton, « Gino Valle. Edificio per uffizi, New York », Domus, n° 683, mai 1987, p. 25-37.
- 33 « Prospects for a Critical Regionalism », Perspecta, vol. 20, 1983, p. 155-156 : « En Europe, l'œuv (...)
23Si Kenneth Frampton – qui publie en 1987 un long article sur cette réalisation32 – a pu analyser successivement l’œuvre de Gino Valle, dans le cadre du régionalisme critique au début des années 1980, puis dans celui de la culture tectonique au milieu des années 199033, le traitement des élévations du projet de La Défense par Valle est davantage plurivoque et ne s’inscrit que partiellement dans cette défense de la culture tectonique. Il utilise en revêtement de pierre mince agrafée (3 centimètres d’épaisseur) du porphyre poli du Val Camonica de teinte violet foncé pour le couronnement, du granit gris poli du Tarn pour le soubassement et du calcaire Repen du Carso Triestino pour le corps du bâtiment, sur lequel il trace graphiquement, à partir de deux épaisseurs de joints, 0,5 et 3 centimètres, des motifs tectoniques de pilastres et d’encadrement des baies (fig. 21 et 22). La profondeur de celles-ci (de 50 centimètres au niveau rez-de-dalle à 30 centimètres dans les étages hauts), le retrait de 2 centimètres au droit de leur encadrement, la mise en évidence de la clé de plate-bande ainsi que des oreilles de l’appui, produisent un subtil analogue tectonique aux façades haussmanniennes.
Figure 21. Vue de deux travées du bâtiment Acacia au niveau de la façade principale sur l’Esplanade

On note l’importance des joints de 3 centimètres pour la lecture tectonique de cette élévation : dessin des pilastres superposés, mise en évidence au droit de chaque baie de la plate-bande et de sa clef ainsi que des oreilles de part et d’autre de l’appui.
@ Grégory Azar
Figure 22. Planche de détail des niveaux supérieurs de la façade du bâtiment Galilée donnant sur l’Esplanade. Élévation, coupe et plan à l’échelle 1/25

L’attention portée par Gino Valle au calepin des façades en pierre agrafée est ici manifeste. On note en particulier les retraits successifs des nus de la pierre (0 / - 3,5 / - 7 / - 10,5 cm) ainsi que la hiérarchie établie entre les différentes épaisseurs de joints (0,5 et 3 cm).
@ ASVAA, Udine / Pierluigi Nicolin, « The interplay of similarities. Gino Valle at the Défense », Lotus international, n° 69, 1989-1, p. 87.
- 34 « Je m'aperçois alors qu'avec l'expérience, cet intérêt sous-jacent pour l'expressionnisme figurati (...)
24Cette analogie est cependant traversée d’autres références, la plupart d’origine autobiographique, qui participent d’un « expressionisme figuratif34 » difficile à interpréter. Ainsi le complexe de La Défense témoigne d’un indéniable tropisme viennois – Udine a appartenu à l’empire d’Autriche jusqu’en 1866 – dont l’architecte Roberto Gabetti (1925-2000), proche ami de Gino Valle, a précisément identifié l’importance quant à son caractère monumental et civique :
- 35 Roberto Gabetti, « Gino Valle is at La Défense », op. cit., p. 91 (traduction de l’auteur).
Naturellement, pour celui qui a grandi dans une ancienne province de l’Empire, Otto Wagner est présent : et je le nommerais ici non seulement à cause de quelques signes évidents – les pignons noirs des bâtiments – mais pour cette vitalité et cette vivacité que ce grand vieux maître avait réussi à insuffler au thème du monumental ; là où bâtiment « moderne » signifiait édifice « organisé » dans ses espaces et ses fonctions, « ordonné » dans ses structures et ses façades ; là où bâtiment « public » indiquait puissance convaincue de l’administration. Ici, IBM semble avoir reçu de Valle ce signe supplémentaire, un signe que la compagnie ne possédait pas […] la force de persuasion de ces édifices de Valle exprime une qualité qui va au-delà de la simple efficacité et qui implique les valeurs inhérentes à la gestion, au fonctionnement et à la philosophie […] d’un grand complexe35.
- 36 L’importance de l’œuvre de Louis Sullivan pour Gino Valle naît lors de son séjour aux États-Unis, d (...)
- 37 Je remercie Luka Skansi pour cette indication (entretien du 19 janvier 2024). Gino Valle renouvelle (...)
25Le couronnement du bâtiment Acacia au niveau de son entrée sur l’angle est proche dans son articulation des Häuser Wienzeile (1898-1900) d’Otto Wagner (1841-1918), tout comme il réinterprète les oculi du Wainwright Building (1890-1891) à Saint Louis de Louis Sullivan (1856-1924), bâtiment dont le nombre de niveaux et la tripartition sont étonnamment similaires à ceux de La Défense36. Quant à la surface sombre de porphyre poli des couronnements réfléchissant le ciel, elle est directement issue de l’intérêt de Gino Valle pour l’architecte Giuseppe Vaccaro (1896-1970), notamment son traitement du socle du Palazzo delle Poste de Naples (1931-1936) revêtu de granit noir poli37.
- 38 « La préoccupation de Valle pour les valeurs représentatives de l'architecture l'a conduit à expéri (...)
26Gino Valle critique ainsi l’anonymat de La Défense, issu de la répétitivité et de l’homogénéité des murs-rideaux réfléchissants, par la création d’un analogue tectonique général du bâti haussmannien38 : tripartition de l’élévation sur rue, régularité de la fenestration, modénatures des baies, revêtement de pierre calcaire, tout en y incorporant des analogues tectoniques particuliers, plus autobiographiques, tels que les portiques continus à rez-de-chaussée (Udine, Turin), les pilastres superposés incisés sur le corps du bâtiment (Sullivan), le traitement du couronnement ouvert sur l’angle (Wagner) ainsi que sa dématérialisation (Vaccaro), et des motifs postmodernes tels que les grandes fenêtres thermales (façade du bâtiment Acacia sur le cours Michelet), les châssis vitrés de format carré, ou encore la citation du fronton des logements réalisés par Alvaro Siza (1933-) pour l’IBA à Berlin en 1984 sur le couronnement courbe de l’hôtel du bâtiment Acacia.
Une préservation sélective
- 39 Les certifications et labels liés au bâti visés dans le cadre du projet sont les suivants : certifi (...)
27Le projet en cours du bâtiment Acacia est une réhabilitation, c’est-à-dire une intervention visant, tout en conservant sa fonction actuelle, à l’adapter aux évolutions des espaces tertiaires, aux nouvelles mobilités, ainsi qu’aux performances énergétiques réglementaires ou liées à des labellisations39, ceci tout en densifiant les plateaux de bureaux (par création de nouvelles circulations verticales) et en proposant de nouveaux usages et services, dans notre cas un élargissement du hall principal et la création d’un « rooftop ».
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- 41 « Nous nous référons clairement au terme de “sauvegarde”, qui identifie une réflexion englobant la (...)
- 42 Plusieurs campagnes de travaux ont été réalisées sur le bâtiment Acacia après sa livraison en 1988 (...)
28Nous employons ici le terme de préservation en le situant à mi-chemin entre celui de « conservation-restauration », relatif aux interventions sur les monuments historiques40, et celui de « sauvegarde » employé par Franz Graf, relatif au patrimoine du XXe siècle41. Si nous lui accolons le qualificatif de sélective, c’est pour caractériser les différents niveaux d’intervention dans ce type de projet, particulièrement à La Défense. Les plateaux de bureaux et les espaces et services qui y sont associés, plusieurs fois remaniés dans le cas du bâtiment Acacia42 et soumis aux chartes d’aménagement des preneurs successifs, ne présentent aucun enjeu de préservation. Les ajouts programmatiques demandés, à savoir l’élargissement du hall principal et la création d’un rooftop, sont plus délicats car devant s’inscrire dans le bâtiment existant sans en modifier significativement son aspect. Dans ce contexte, le périmètre de la préservation proprement dite se rapporte principalement aux façades.
- 43 Cette mise en œuvre non-traditionnelle requiert d’une part un avis de chantier soumis à validation (...)
29L’enjeu principal de préservation est issu du processus d’évaluation, il concerne les principes d’implantation et la tectonique. Le plan-masse du bâtiment n’étant pas modifié, ce sont les façades qui portent la plus grande partie de cet enjeu. Cette conclusion ne va cependant pas de soi : d’une part la quasi-totalité des intervenants du projet, dont le maître d’ouvrage, considèrent ces façades comme dénuées de qualités, d’autre part la consultation a été remportée sur une proposition de façade « cinétique » dont l’image a été largement diffusée au sein des différentes entités d’Allianz. Le bien-fondé de la conservation en l’état de la totalité de l’enveloppe est dans cette situation difficilement défendable auprès des différents acteurs sur des critères d’intérêt architectural. Plusieurs facteurs vont cependant se conjuguer pour aboutir à une « conservation par défaut » : l’inévitable rupture de la continuité existante entre la façade des bureaux et celle de l’hôtel mitoyen qui résulterait de la mise en place de la façade « cinétique » (changement de perception du fait de la pose en écaille des pierres et décalage de nu du fait de l’isolation thermique extérieure de la façade des bureaux) ; la réduction significative du budget de l’opération (due à la dépréciation du bien longtemps inoccupé) ; les difficultés posées par le cahier des charges de Paris-La Défense pour le chantier (notamment l’impossibilité d’installations sur la dalle et la limitation du nombre de rotation de camions dans la voie de desserte intérieure du fait de la coactivité avec d’autres chantiers en cours) ; enfin la complexité de reprise et de mise en œuvre « en écaille » des pierres réemployées43. Il est donc finalement proposé un simple nettoyage de l’ensemble des pierres de façade.
- 44 Mise en place d’un complexe de doublage isolant biosourcé de 180 millimètres en remplacement du dou (...)
- 45 Notice de sécurité du 30 décembre 1986 et Permis de construire modificatif n° 092062 87 1 557 accor (...)
30Cette décision de conserver l’intégralité des façades avec leur revêtement en pierre mince existant entraîne cependant la révision de plusieurs paramètres de l’opération : le passage en isolation thermique intérieure (ITI), qui affecte nécessairement le bilan des surfaces de l’opération et est sensiblement moins performante44 ; la reconduction pour la sécurité incendie des principes d’accessibilité aux façades existants utilisant les trois failles vitrées tous niveaux entre « maisons » pour l’intervention des services de secours, ceci afin d’éviter la création de baies pompiers qui dénatureraient l’élévation principale sur l’Esplanade45 ; l’anticipation des installations de chantier afin de trouver une alternative à l’utilisation d’un lift extérieur qui impliquerait de découper les allèges sur l’ensemble d’une trame de façade ; enfin de définir une méthodologie d’intervention sur les menuiseries extérieures qui assure la conservation des nus respectifs de la façade et du vitrage (la profondeur des tableaux revêtus de pierre) qui constitue une caractéristique remarquable du bâtiment existant, la conservation en place des châssis permettant de plus de s’assurer de la pérennité de la jonction entre ceux-ci et le revêtement en pierre mince agrafée (fig. 23).
Figure 23. Bâtiment PB 26 (bureaux Acacia), phase exécution, lot menuiseries extérieures (entreprise S.N.E. SITRACO), châssis basculant courant, 25 novembre 1986

31À la suite d’un test de dépose d’un châssis en février 2023, au cours duquel il a été constaté que l’ouvrant basculant pouvait être facilement déboîté de son pivot et que le dormant devait impérativement rester en place afin de ne pas modifier la lecture des façades et de limiter les risques de dégradation des pierres, plusieurs possibilités ont été successivement étudiées. D’abord une conservation en place des châssis existants en aluminium et de leur garde-corps intérieur intégré avec uniquement un remplacement des vitrages existants par d’autres plus performants. Cette solution a été abandonnée – malgré l’intérêt de ce mode opératoire pour le chantier (pas de dépose et d’évacuation des châssis, mise en œuvre sur site, continuité du clos-couvert) et pour le bilan carbone – du fait de la faible performance thermique obtenue (coefficient Uw de 2,6 W/m².K), de la présence de mastic de vitrage potentiellement amianté sur les cales de vitrages et du risque assurantiel lié au démontage de l’ouvrant et au changement des parcloses (ouvrants qui ne seraient plus couverts par les garanties courantes). Ensuite, la possibilité d’une pose en rénovation, c’est-à-dire la pose d’un ouvrant neuf sur le dormant existant préalablement déligné (sciage des ailes au niveau de la traverse basse), ce qui permet de conserver le dormant existant tout en garantissant de bonnes performances thermiques. Deux décisions du maître d’ouvrage vont cependant mettre un terme à ces études : la décision de désamianter intégralement le bâtiment, y compris la face intérieure du voile béton des façades où l’on suspecte la présence d’un enduit ciment amianté, ce qui implique la dépose complète des châssis sans possibilité de conserver en place ni leurs fixations par pattes de liaison ni leur calfeutrement périmétrique ; et la décision de remplacer les ouvrants basculants par des ouvrants à la française à un vantail, moins onéreux et plus performants thermiquement (coefficient Uw de 1,4 W/m².K), mais présentant le désavantage majeur de basculer le garde-corps sur la face extérieure du châssis ce qui modifie irrémédiablement la perception des façades telles que dessinées par Gino Valle.
Conclusion
- 46 Soit celle des années 1925-1935, dont les principaux protagonistes sont : Roberto Gabetti (1925-200 (...)
32Gino Valle, que Vittorio Gregotti considérait comme le meilleur architecte de sa génération46, a édifié à La Défense une œuvre critique qui inscrit sur cette infrastructure abstraite un fragment de mémoire urbaine :
- 47 « Intervista - dialogo Valle - Petranzan. L’opera “in memoria” », Anfione Zeto, n° 6-7 (Gino Valle. (...)
En ce qui concerne ce rapport au temps et au lieu, je me souviens du problème que j’ai rencontré avec le site lorsque j’ai dû concevoir le bâtiment de La Défense à Paris. Le sol et le bâti étaient complètement artificiels, c’est-à-dire qu’ils n’étaient pas reconnaissables. J’ai dû intervenir dans un espace résultant, avec de grandes contraintes. J’ai conçu mon bâtiment avec l’idée de reconstituer une partie de la ville, à tel point qu’une fois qu’il a été construit, quelqu’un a dit que c’était comme s’il avait été là avant qu’on ne construise toute La Défense, qui semble avoir été construite autour de lui. J’ai donc fait cette sorte de récit de Paris, dans ce lieu qui n’est plus Paris. C’est pour cela que ça fonctionne, parce que je pense qu’on retrouve dans ce bâtiment des choses qu’on a déjà à l’intérieur : dans un endroit sans identité (comme toute périphérie urbaine), et complètement artificiel, on a cette représentation de notre « mémoire » de la ville à laquelle l’endroit lui-même appartenait47.
33Aujourd’hui, l’ensemble urbain conçu par celui-ci n’est plus. La récente « dé-figuration » du bâtiment Galilée a rompu la gémellité des deux blocs et avec elle leur capacité à former un front bâti continu à l’alignement de ce boulevard fictif qu’était pour Valle l’Esplanade de La Défense. Le second bloc, Acacia, apparaît dès lors comme un bâtiment-îlot anachronique et délaissé. Cependant, le parti pris urbain de Gino Valle génère en journée, grâce à son implantation et aux différentes entités programmatiques le constituant – bureaux, hôtel, résidence et commerces – une réelle animation urbaine, tant dans son « passage couvert » intérieur que sur les terrasses étagées des restaurants implantés sur le cours Michelet.
- 48 Sur ce projet voir Roberto Gabetti, « Nuove uffici Olivetti a Ivrea e alti progetti di Gino Valle » (...)
- 49 À La Défense, Gino Valle a dû composer avec de nombreuses contraintes : pour le plan général de son (...)
- 50 Gino Valle retrouve en cela la pratique de son père, Provino Valle (1887-1955), architecte et fonda (...)
34Le projet de La Défense est paradoxal à plusieurs titres. Il est une œuvre de transition qui établit une méthodologie de projet pour ses futures réalisations à grande échelle – dont le résultat le plus abouti est le bâtiment des bureaux de direction d’Olivetti à Ivrea48 – tout en étant lui-même un « essai inachevée49 ». Il est encore aujourd’hui largement ignoré, anonyme dans le chaos de La Défense, alors que sa fortune critique est remarquable avec des analyses de Manfredo Tafuri, Pierre-Alain Croset, Pierluigi Nicolin (1941) ou encore Roberto Gabetti. Il est le premier bâtiment de Gino Valle entièrement revêtu de pierre50 et le seul avec le siège de la Banca commerciale italiana à New York à adopter un langage qui puisse être qualifié de postmoderne, ceci alors que Valle s’est toujours refusé à employer ce terme.
- 51 Entretien avec Pietro Valle du 26 janvier 2024.
35La préservation de l’œuvre de Gino Valle, qui dépasse la centaine de bâtiments, est portée par le Studio Valle Architetti Associati, dirigé par Pietro Valle51. Le travail mené par Franz Graf et Francesca Albani sur ce corpus (analyse de 13 projets datant de 1953 à 1986) à l’école de Mendrisio de 2016 à 2022 puis exposé à Udine en 2024 participe de cette entreprise de sauvegarde. La « granulométrie » de l’intervention actuelle sur le bâtiment Acacia – préservation en place de l’ensemble des façades et de leur calepin « tectonique » – est bien inférieure à celle des interventions à venir sur les projets des années 1960 et 1970 de Gino Valle, caractérisés par la diversité des procédés constructifs et l’habileté de leur mise en œuvre, nécessitant de ce fait des interventions spécifiques. Cette « granulométrie » est intrinsèquement liée aux paramètres du projet de réhabilitation du bâtiment Acacia : un procédé constructif standard (dalles, voiles et poteaux en béton armé) imposé à l’époque par la S.A.R.I., un aménagement intérieur modifié par les preneurs successifs (ce qui n’était pas le cas du bâtiment Galilée dont l’ergonomie des postes de travail avait été soigneusement étudiée par Valle) et un mode de dévolution du marché (contrat de promotion immobilière et entreprise générale désignée à l’issue de la phase APD) qui ne laisse que peu de marges de manœuvre en cours de chantier. L’objectif de cette préservation sélective est donc double : modérer autant que possible l’impératif immobilier de renouvellement d’image propre à La Défense, préserver, avec un minimum d’interventions, la matérialité et la subtilité du dessin de ces façades, rare témoignage d’une architecture postmoderne à la fois critique et grave.
Notes
1 Jean-Louis Violeau, Paris postmoderne. Architectures 1973-1993, Paris, Pavillon de l’Arsenal, 2023, notice n° 336.
2 Cur. Francesca Albani et Franz Graf (USI Mendrisio) en collaboration avec Archivio Studio Valle, Gino Valle. La professione come sperimentazione continua, Casa Cavazzini Museo d’Arte Moderna, 7 décembre 2023-28 avril 2024.
3 Barthélémy-Griño architectes, pour Unibail Rodamco Westfield. La livraison du bâtiment, renommé Lightwell, est prévue pour la fin de l’année 2024.
4 Au sein de l’agence Architecturestudio.
5 Aujourd’hui PIMCO Europe GmbH-France.
6 « Quelque 210 000 mètres carrés vont être construits dans ce quartier Michelet dont 38 000 mètres carrés de logements. Un immeuble en triangle, dû à l'architecte Jean Willerval […] sera édifié à l'entrée du quartier côté Seine. Un bâtiment en « X » prolongé par deux barres longera l'esplanade ; il abritera un hôtel-résidence pouvant accueillir ingénieurs et hommes d'affaires pour des séjours prolongés […] des logements et des bureaux. Une petite tour de 30 000 mètres carrés et trois immeubles en patios termineront le quartier sur le boulevard circulaire. M. Pellerin espère avoir terminé l'ensemble dans trois ou quatre ans […]. C'est ainsi un chantier de 3 à 4 milliards de francs qui va s'ouvrir dans les tout prochains jours. » (« Un marché de 4 milliards pour construire le dernier quartier de la Défense », Le Monde, 24 juin 1982). Voir également : « Pellerin (Christian)/Sari-Seeri », in Pierre Chabard et Virginie Picon-Lefebvre (dir.), La Défense, t. 1. « Un dictionnaire, architecture-politique », Marseille, Parenthèses, 2012, p. 336-337.
7 La codification des tours s’effectue comme suit : première lettre pour la commune (P pour Puteaux), deuxième lettre pour la destination (B pour bureau, H pour habitation), puis numéro de parcelle.
8 Ce projet s’inscrit dans la continuité de sa première réalisation à La Défense : Henri La Fonta, Les Miroirs (CB 20), 1981 (siège de Saint-Gobain), quartier Alsace. Il s’agit du premier immeuble de troisième génération à La Défense, type privilégié par la S.A.R.I. (immeubles relativement bas aux plans plus découpés pour un meilleur éclairage en premier jour des bureaux). Sur ces questions voir : Simon Texier, Les Architectes de La Défense, Paris, Dominique Carré, 2011.
9 IBM impose Gino Valle à La Défense immédiatement après la livraison de son centre de distribution de Basiano près de Milan (1980-1983) : Pierre-Alain Croset et Giacomo Polin, « Gino Valle. IBM Distribution Center a Basiano », Casabella, vol. XLVIII, n° 500, mars 1984, p. 52-63. Il réalisera peu de temps après le projet de Michelet le siège italien d’IBM à Rome dans le quartier de l’EUR (1985-1994) en métamorphosant radicalement l’ancienne tour Alitalia (1967) : Pierre-Alain Croset, « Gino Valle. Trasformazione della torre Ibm a Roma », Casabella, vol. LIX, n° 622, avril 1995, p. 58-66 ; « Gino Valle. Trasformazione della Torre Alitalia a Roma Eur, 1993-1996 », Anfione e Zeto, n° 12, 1999. Sur la politique immobilière d’IBM dans les années 1980, voir Thomas Fisher et James Murphy, « Big Blue Designs », Progressive Architecture, vol. LXIX, n° 6, juin 1988, p. 100-105 ; « IBM als Bauherr », Baumeister, vol. LXXXV, n° 12, décembre 1988, p. 13-37 (les deux articles mentionnent les projets de Gino Valle).
10 La déclaration d’ouverture de chantier du bâtiment PB 16 d’Henri La Fonta est datée du 29 juillet 1983 (archives municipales de Puteaux, cote 156W8).
11 Pierre-Alain Croset, « Una conversazione con Gino Valle » (30 octobre 1985), Casabella, vol. XLIX, n° 519, décembre 1985, p. 16 (traduction Marta Gallo). Pour le projet de La Défense, leur largeur ainsi que leur profondeur sont définies à partir d’un module de bureaux de trois mètres de largeur par 5 mètres de profondeur : 6 bureaux en largeur, 2 bureaux en profondeur avec 2 circulations de 1,50 mètre de part et d’autre d’un noyau central de 5 mètres.
12 Pierre-Alain Croset, « Una conversazione con Gino Valle », op. cit., p. 17 (traduction Marta Gallo).
13 L’immeuble a été acquis par Unibail-Rodamco en 1999.
14 Pierre-Alain Croset, « Gino Valle. Edifici per uffici alla Défense a Parigi », Casabella, vol. XLIX, n° 519, décembre 1985, p. 4-15 ; Marie-Hélène Contal, « Haussmann pour IBM à la Défense. Architectes Gino Valle et Fernando Urquijo », Architecture Intérieure Crée, n° 217, avril-mai 1987, p. 94-99 ; « Quartier Michelet, Paris-La Défense. Gino Valle avec F. Urquijo et G. Macola », Techniques & Architecture, n° 379, août-septembre 1988, p. 72-79 ; Pierre-Alain Croset, « Ultimato il progetto di Gino Valle alla Défense », Casabella, vol. LII, n° 549, septembre 1988, p. 30-31 ; Pierluigi Nicolin, « The interplay of similarities. Gino Valle at the Défense », Lotus International, n° 69, 1989, 1, p. 63-91 ; Roberto Gabetti, « Gino Valle is at La Défense », Anfione Zeto, n° 6-7, 1990-1991, p. 89-91.
15 Pierre-Alain Croset, « Una conversazione con Gino Valle », op. cit. ; Vittorio Magnago Lampugnani, « Gino Valle. Dal luogo alla casa » (18 décembre 1987), Domus, n° 692, mars 1988, p. 17-24 ; « Gino Valle. 29 marzo 1988 », dans Franca Bizzotto et Michela Agazzi, Colore Segno Progetto Spazio. Giuseppe Mazzariol e gli « Incontri con gli artisti », Padoue, Il Poligrafo, 2009, p. 135-157 ; « Dialogue-Interview. Valle-Petranzan. The work in memory », (n.d.), Anfione Zeto, n° 6-7, 1990-1991, p. 45-52 ; Giovanni Vragnaz, « Interview Gino Valle » (n.d.), Piranesi, vol. I, n° 1, été 1992, p. 26-47 ; Sandro Marpillero, « Interview with Gino Valle » (New York, n.d.), Lotus Navigator, n° 1, Milan, Electa, 2000, p. 136-141.
16 Pierre-Alain Croset, Gino Valle. Progetti e architetture, Milan, Electa, 1989 ; Pierre-Alain Croset et Luka Skansi, Gino Valle, Milan, Electa, 2010 ; Pierre-Alain Croset et Luka Skansi, Modern and Site Specific. The Architecture of Gino Valle, 1946-2003, Londres, Lund Humphries, 2018 (traduction abrégée de la monographie italienne de 2010).
17 Gino Valle. Architetto 1950-1978, cur. Gino Valle, Milan, Padiglione d'Arte Contemporanea di Milano-Idea, 1979 ; Giovanni Corbellini, Alessandro Rocca, Architecture in the Mountains. Gino Valle in Carnia, Trieste, Elena Carlini/Navado Press, 2005 ; Pierre-Alain Croset, Gino Valle a Udine, Milan, Mazotta, 2007 ; Franz Graf et Francesca Albani (ed.), Gino Valle. La professione come sperimentazione continua,, Milan, Mendrisio Academy Press/Silvana Editoriale, 2024.
18 « Italie », Aujourd’hui. Art et Architecture, vol. VIII, n° 48, janvier 1965 ; Vittorio Gregotti, New Directions in Italian Architecture, New York, George Braziller, 1968 (« Les nouvelles tendances de l’architecture italienne », L’architecture d’Aujourd'hui, n° 139, septembre 1968, p. 8-12) ; « Italie 75 », L'Architecture d'Aujourd'hui, n° 181, septembre-octobre 1975 ; Manfredo Tafuri, History of Italian Architecture, 1944-1985, Cambridge, MIT Press, 1989 [1982].
19 Ces entretiens ont été réalisés à distance les 19 et 26 janvier 2024.
20 Nous entendons ici versatilité au sens de faculté d’adaptation et non d’inconstance.
21 « Plus tard, de 1963 à 1975, ses projets dans le centre historique d'Udine sont intéressants précisément parce qu'ils présentent différentes manières d'établir une tension critique significative entre la nouvelle architecture et le contexte historique. Ce regain d'intérêt pour la dimension urbaine de l'architecture est apparu dans les années 1980 – dans la construction d'œuvres individuelles comme l'ajout au siège de la Comit [nda : Banca Commerciale Italiana] à New York ou l'école à Berlin, mais aussi dans la conception de véritables “morceaux de ville” comme les logements à la Giudecca ou le complexe de bureaux à la Défense. » (Modern and Site Specific, op. cit. p. 36) (traduction de l’auteur).
22 Pierre-Alain Croset, « Una conversazione con Gino Valle », op. cit., p. 16 (traduction Marta Gallo).
23 Sur ce projet remarquable voir : Giacomo Polin, « Gino Valle. Nuove abitazioni popolari a Venezia », Casabella, vol. XLVI, n° 478, mars 1982, p. 50-61 ; Pierre-Alain Croset, « 94 case di Gino Valle alla Giudecca », Casabella, vol. L, n° 528, octobre 1986, p. 34-35 ; Pierre-Alain Croset, « On Gino Valle's project at the Giudecca », Lotus International, n° 51, 1986-3, p. 108-125 ; « Gino Valle. 29 marzo 1988 », in Franca Bizzotto et Michela Agazzi (ed.), Colore Segno Progetto Spazio. Giuseppe Mazzariol e gli “Incontri con gli artisti”, Padoue, Il Poligrafo, 2009, p. 135-157.
24 Sur cette école double (Galilei et Liebmann), réalisée en association avec Mario Broggi et Michael Burckhard, voir « Scuola a Berlino di Gino Valle, Mario Broggi & Michael Burckhard », Casabella, vol. LVI, n° 588, mars 1992, p. 33 ; Rita Capezzuto, « La ricostruzione urbana come scuola. Valle, Broggi, Burckhardt. Intervento in Friedrichstrasse a Berlino », Lotus International, n° 74, 1992, p. 36-47. Pour une étude plus générale sur les écoles réalisées par Gino Valle, notamment les écoles préfabriquées Valdadige (1974-1984), voir Paola Virgioli, Gino Valle e le scuole (Quaderni di Scuola, n° 2), Syracuse, PROSA-Lettere Ventidue, 2022.
25 La doctrine de la Kritische Rekonstruktion élaborée par Josef Paul Kleihues prône « le respect ou la reconstruction du plan urbain historique de la ville et, en relation avec celui-ci, des alignements historiques des rues et des places ». Ses principaux jalons sont : le « Block 270 » réalisé par Kleihues à Berlin-Wedding de 1971 à 1977, premier bâtiment-îlot résidentiel à cour centrale réalisé à Berlin depuis les années 1930 ; la parution de la traduction allemande de L’architettura della città (1966) d’Aldo Rossi en 1973 : Die Architektur der Stadt. Skizze zu einer grundlegenden Theorie der Urbanen, trad. Adrianna Giachi, Düsseldorf, Bertelsmann, 1973 ; le Berlin-Atlas zu Stadtbild und Stadtraum de Kleihues dont les deux volumes, Charlottenburg et Kreuzberg, sont publiés en 1973 (Berlin, Senator für Bau- und Wohnungswesen) ; la publication par Kleihues et Wolf Jobst Siedler (1926-2013) en 1977 d’un article polémique dans le Berliner Morgenpost demandant « une exposition […] qui devrait se pencher sur le plan urbain existant afin de le restaurer, de le réparer et de le compléter » (« 30 Jahre Bauen seit dem Kriege: Vorschlag fur ein Reparaturprogramm », Berliner Morgenpost, 18 janvier 1977, p. IV). Je remercie Florian Hertweck pour ces indications (entretien du 20 janvier 2024).
26 Manfredo Tafuri, History of Italian Architecture, 1944-1985 [1982, 1986], op. cit, p. 172 (traduction de l’auteur).
27 « […] la géométrie précise du plan correspond à la rigueur linguistique confiée à quelques éléments dans lesquels on peut entendre l'écho de l'architecture berlinoise des années 1920 et 1930. Les façades plates et linéaires, les fenêtres carrées au rythme régulier, les toits à une seule pente, l'enduit traditionnel étendu à tous les murs extérieurs […] » (Rita Capezzuto, « La ricostruzione urbana come scuola. Valle, Broggi, Burckhardt. Intervento in Friedrichstrasse a Berlino », op. cit., p. 38) (traduction de l’auteur).
28 Vittorio Gregotti, L'architettura del realismo critico, Rome, Gius Laterza & Figli, 2004 (particulièrement le chapitre « Realismo e contesto », p. 47-79). Sur cette question voir Pierre-Alain Croset et Michele Bonino, « Casabella 1982-1996. Autour de Vittorio Gregotti et du “réalisme critique” en architecture », Les Cahiers de la recherche architecturale et urbaine, n° 24-25, décembre 2009, p. 72-97.
29 Pierre-Alain Croset, « Una conversazione con Gino Valle », op. cit., p. 16-17 (traduction Marta Gallo).
30 Préalablement à ce projet, Gino Valle avait travaillé de 1977 à 1981 pour la Banca commerciale Italiana sur le siège de Milan (restauration du Palazzo Besana sur la Piazzetta Belgioioso) ainsi que sur les agences de Padoue et Venise (campo San Bartolomeo). Sur ce projet voir MGJ, « Gino Valle's New York Bank », Skyline, novembre 1982, p. 26 ; Sandro Marpillero, « Grattaciela a metà. Gino Valle. Uffici della Banca Commerciale Italiana a Manhattan », Lotus international, n° 37, 1983-1, p. 96-119 ; Pierre-Alain Croset, « Ultimato l'edificio di Gino Valle a New York. Continuità e distanza critica », Casabella, vol. LI, n° 535, mai 1987, p. 38-39 ; « Gino Valle. New Quarters of Banca Commerciale Italiana, New York », dans Vincenzo Pavan (éd.), Il linguaggio della pietra (Premio Internazionale Architetture di Pietra), Venise, Arsenale Éditrice, 1991, p. 38-55 ; Luigi Spinelli, « Gino Valle. One William Street », Domus, n° 932, janvier 2010, p. 114-120.
31 « La composition est mise en valeur par le placage de pierre qui recouvre les élévations. Le revêtement n'est évidemment pas structurel, mais il possède néanmoins une qualité tectonique qui confère à la solution la qualité d'un bâtiment authentique. Cela est dû à l'épaisseur des dalles, aux renfoncements des fenêtres, à l'ouvrage en tant que tel, et surtout à l'utilisation de différentes couleurs et textures dans le placage lui-même. » (Christian Norberg-Schulz, « Presentation », dans Il linguaggio della pietra, op. cit., p. 41) (traduction de l’auteur).
32 Kenneth Frampton, « Gino Valle. Edificio per uffizi, New York », Domus, n° 683, mai 1987, p. 25-37.
33 « Prospects for a Critical Regionalism », Perspecta, vol. 20, 1983, p. 155-156 : « En Europe, l'œuvre de l'architecte italien Gino Valle peut également être qualifiée de critique et de régionaliste dans la mesure où toute sa carrière est centrée sur la ville d'Udine, en Italie [...]. Le régionalisme, comme nous l'avons vu, n'est souvent pas tant un effort collectif que le résultat d'un individu talentueux travaillant avec engagement à une certaine forme d'expression enracinée. » ; John Cava (éd.), Studies in Tectonic Culture. The Poetics of Construction in Nineteenth and Twentieth Century Architecture, Cambridge, MIT Press, 1995, p. 364-365 : « Gino et Nani Valle poursuivront des thèmes tout aussi tectoniques, mais avec une inflexion plus manifestement régionale. Ceci est particulièrement visible dans leurs premiers travaux, dans leur banque de Latisana de 1956 et dans leur Casa Quaglia construite à Sutrio, près d'Udine, en 1953-1954 [...]. Dans les deux cas, l'expression principale provient d'un jeu entre charge et support, et ceci persistera comme un thème dans presque tous les travaux de Valle. » ; « Modern and Site Specific. The Architecture of Gino Valle 1945-2003 », The Plan Journal, vol. IV, n° 1, 2019, p. 226 : « De plus, les rares fois où le contexte urbain préexistant amène Valle à établir un rapport à l'environnement par le modelage [modelling] de la façade, il s'agit d'un travail exceptionnel, comme dans le Paris haussmannien, avec le grand îlot de l'avenue Victor Hugo qu'il conçoit pour la Société Générale. » (traductions de l’auteur). Signalons que la traduction italienne de « Towards a Critical Regionalism » (1983) est publiée dans Casabella en mars 1984, au début des études de l’ensemble de La Défense et dans un numéro présentant le centre de distribution IBM de Basiano de Gino Valle : Kenneth Frampton, « Anti-tabula rasa. Verso un Regionalismo critico », Casabella, vol. XLVIII, n° 500, mars 1984, p. 22-25. Sur la notion de critique chez Kenneth Frampton voir Mary McLeod, « Kenneth Frampton’s Idea of the Critical », dans Karla Cavarra Britton et Robert McCarter (éd.), Modern Architecture and the Lifeworld. Essays in Honor of Kenneth Frampton, Londres, Thames & Hudson, 2020, p. 20-42.
34 « Je m'aperçois alors qu'avec l'expérience, cet intérêt sous-jacent pour l'expressionnisme figuratif, qui avait été ma composante initiale, tant en tant que peintre que dans mes premiers projets architecturaux, s'accroît. » (Pierre-Alain Croset, « Una conversazione con Gino Valle », op. cit., p. 17) (traduction de l’auteur).
35 Roberto Gabetti, « Gino Valle is at La Défense », op. cit., p. 91 (traduction de l’auteur).
36 L’importance de l’œuvre de Louis Sullivan pour Gino Valle naît lors de son séjour aux États-Unis, de l’automne 1951 à l’été 1952, l’obtention d’une bourse Fullbright lui ayant permis de suivre l’enseignement de Walter Gropius à la Harvard Graduate School of Design et d’y obtenir un Bachelor of City and Regional Planning : « Sullivan a toujours été un architecte important pour moi : je l'ai toujours observé, étudiant en particulier son extraordinaire sens des matériaux, sa capacité à exprimer les relations entre la structure et l'ornement, entre la façade et la fenêtre, entre la corniche et le ciel. Ces questions m'ont toujours intéressé et c'est pourquoi, lorsque je voyage, j'emporte Sullivan dans mes bagages, sans penser que c'est de la nostalgie. » (Pierre-Alain Croset, « Una conversazione con Gino Valle », op. cit., p. 17) (traduction de l’auteur). Gino Valle parle dans ce même entretien du « discours de la représentation de la structure que Sullivan fait dans ses bâtiments commerciaux et auquel je me réfère dans le projet de Paris » (p. 16). Une référence pourrait être le Gage Brothers and Company Building (1898-1900) à Chicago par William Holabird (1854-1923) et Martin Roche (1855-1927) dont Sullivan a dessiné la façade. On se réfèrera sur cette question à David Van Zanten, Sullivan's City. The Meaning of Ornament for Louis Sullivan, New York, W.W. Norton & Company, 2000.
37 Je remercie Luka Skansi pour cette indication (entretien du 19 janvier 2024). Gino Valle renouvellera cet effet pour le socle du siège italien de la Deutsche Bank à Milan-Bicocca (1997-2005).
38 « La préoccupation de Valle pour les valeurs représentatives de l'architecture l'a conduit à expérimenter intensément des approches linguistiques extrêmement diversifiées, faisant appel aux outils de l'allusion, de la mémoire et de l'analogie pour enrichir le dialogue avec les conditions urbaines existantes. Parallèlement au développement des projets pour Venise et New York, Valle a eu deux autres occasions prestigieuses de démontrer sa volonté féconde d'absorber dans son architecture les échos figuratifs et structurels de contextes urbains complexes : pour une école à Berlin et pour un grand complexe de bureaux à Paris, dans le quartier de la Défense. » (Modern and Site Specific, op. cit. p. 231).
39 Les certifications et labels liés au bâti visés dans le cadre du projet sont les suivants : certification BREEAM Refurbishment and Fit Out 2015 (niveau Excellent), label BBCA rénovation V1.0 (niveau Performant), CRREM trajectoire carbone – Standing point de neutralité carbone 2044 et Décret Tertiaire 2050.
40 Termes relatifs aux interventions sur les monuments historiques. Glossaire, Ministère de la Culture, Direction générale des Patrimoines, 4e trimestre 2020, p. 17 : « Réhabilitation : Interventions sur un bien immobilier afin de lui restituer une fonctionnalité antérieure présumée, de l’adapter à une fonction différente ou à des normes de confort, de sécurité et d’accès […]. Il convient de fonder la réhabilitation sur des preuves évaluées, en prenant en compte l’intérêt patrimonial […] en général, la réhabilitation n’est pas une activité de conservation- restauration, mais peut impliquer des actions de conservation-restauration ».
41 « Nous nous référons clairement au terme de “sauvegarde”, qui identifie une réflexion englobant la théorie et la pratique cultivée et responsable du travail dans l’existant, telle qu’elle s’est constituée au début du XXIe siècle » (Cahiers du TSAM, 3 « Enseigner la sauvegarde », dir. Franz Graf, PPUR-EPFL PRESS, 2022, p. 401). Franz Graf a travaillé en binôme avec Francesca Albani pendant cinq années académiques, de 2016 à 2022, avec les étudiantes et étudiants de quatrième année de l’école de Mendrisio sur l’analyse de treize projets de Gino Valle réalisés entre 1953 et 1986 : Gino Valle. La professione come sperimentazione continua, op. cit.
42 Plusieurs campagnes de travaux ont été réalisées sur le bâtiment Acacia après sa livraison en 1988 : en 1998 pour Cegetel (activités de télécommunications de la Compagnie générale des eaux) avec Ythier Architectes maîtrise d’œuvre, la maîtrise d’ouvrage étant la SNC Anjou patrimoine ; en 2008 avec Palissad Architectures maîtrise d’œuvre pour des travaux portant principalement sur l’aménagement intérieur, la mise à niveau des installations techniques et l’ajout d’ascenseurs, la maîtrise d’ouvrage étant la SC Tour Michelet et la maîtrise d’ouvrage déléguée Nexity.
43 Cette mise en œuvre non-traditionnelle requiert d’une part un avis de chantier soumis à validation du bureau de contrôle et nécessite d’autre part de redécouper l’ensemble des pierres afin de créer de nouveaux percements qui ne soient pas dans l’environnement immédiat des fixations existantes. La création sur site d’un atelier de refaçonnage des pierres étant impossible, le pourcentage de pertes lors de la dépose difficile à évaluer, le délai incompatible avec le planning prévisionnel et le bilan carbone du transport des pierres non justifiable, la pose « en écaille » est finalement abandonnée. Un relevé par drone des 15 844 pierres sur l’ensemble des façades avait été préalablement effectué, permettant de les photographier, de les numéroter et de connaître leurs dimensions ainsi que leur état physique et sanitaire. Au total, moins de 5 % des pierres existantes sont endommagées, ce qui conforte la décision de les conserver en place.
44 Mise en place d’un complexe de doublage isolant biosourcé de 180 millimètres en remplacement du doublage intérieur existant de 65 millimètres. Les ponts thermiques linéiques en nez de plancher sont partiellement atténués par un isolant thermique extérieur existant de 30 millimètres au droit des dalles à chaque niveau ainsi que par la pose d’un complément d’isolation en sous-face de celles-ci sur une profondeur d’un mètre.
45 Notice de sécurité du 30 décembre 1986 et Permis de construire modificatif n° 092062 87 1 557 accordé le 22 avril 1987 par la préfecture des Hauts-de-Seine pour les immeubles PB 26 et PH 22 (incluant les prescriptions de la sous-commission d’instruction de la commission départementale de sécurité du 9 mars 1987) (Archives municipales de Puteaux, cote 156W24).
46 Soit celle des années 1925-1935, dont les principaux protagonistes sont : Roberto Gabetti (1925-2000), Carlo Aymonino (1926-2010), Vittorio Gregotti (1927-2020), Aldo Rossi (1931-1997), Paolo Portoghesi (1931-2023).
47 « Intervista - dialogo Valle - Petranzan. L’opera “in memoria” », Anfione Zeto, n° 6-7 (Gino Valle. Casse rurali e artigiane), 1990-1991, p. 49 (traduction de l’auteur). Nous rapprocherons cette citation du travail de reconstruction réalisé par Gino Valle dans la commune de Gemona del Friouli, détruite par un séisme le 6 mai 1976 : « La clé d'interprétation de ces projets urbains de G. Valle se trouve peut-être dans la reconstruction de certains îlots du centre historique de Gemona (1980-1986), qui l'a obligé à utiliser la mémoire comme outil de conception. À Gemona, en effet, il a dû procéder à des interventions de véritable "reconstruction à l'identique" ou de “reconstruction allusive” […] elle suggère [nda : cette intervention], dans les projets ultérieurs, une comparaison avec l'idée de ville qui sera d'abord formalisée à la Défense, comme un montage d'éléments individuels recomposés, et seulement partiellement, dans la planification de l'image pour devenir ensuite l'un des matériaux de la composition. En effet, c'est une idée de complexité urbaine qui est à nouveau proposée, réinterprétée notamment par la décomposition de l'unité de construction en un système de bâtiments distincts. » (Francesco Moschini, « Gino Valle. L’avventura del collezionista », Anfione Zeto, n° 6-7, op. cit., p. 79-80) (traduction de l’auteur).
48 Sur ce projet voir Roberto Gabetti, « Nuove uffici Olivetti a Ivrea e alti progetti di Gino Valle », Casabella, vol. LIII, n° 563, décembre 1989, p. 4-22.
49 À La Défense, Gino Valle a dû composer avec de nombreuses contraintes : pour le plan général de son ensemble, s’implanter sur les fondations préexistantes du projet d’Henri La Fonta ; pour la coupe, intégrer les infrastructures de la dalle en opérant un impressionnant transfert de charges afin de franchir la voie de desserte souterraine ; pour l’élévation, adopter la hauteur d’étage – basse pour des bureaux – de 2,89 mètres imposée par la S.A.R.I.
50 Gino Valle retrouve en cela la pratique de son père, Provino Valle (1887-1955), architecte et fondateur du Studio Valle dans les années 1920. Voir à ce sujet : « Le solide basi del fare architettura. Provino Valle (1887-1955) », in Gino Valle. La professione come sperimentazione continua, op. cit., p. 84-96.
51 Entretien avec Pietro Valle du 26 janvier 2024.
Haut de pageTable des illustrations
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Titre | Figure 1. Vue depuis l’Esplanade de La Défense vers la Seine de l’ensemble conçu par Gino Valle (1984-1988) |
Légende | Au premier plan le bâtiment Galilée, siège européen d’IBM à sa livraison, au second plan à gauche le bâtiment Acacia comprenant des bureaux, un hôtel, une résidence hôtelière et une rue commerçante intérieure. |
Crédits | @ Archivio Studio Valle Architetti Associati (ASVAA, Udine), Fernando Xavier Urquijo (photographe) |
URL | http://journals.openedition.org/craup/docannexe/image/15574/img-1.jpg |
Fichier | image/jpeg, 97k |
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Titre | Figure 2. Architecturestudio, vue du projet retenu à l’issue de la consultation de mai 2022 depuis l’esplanade de La Défense, du bassin de Takis vers la Grande Arche, mai 2022 |
Crédits | @ Architecturestudio, Render 77 (perspectiviste) |
URL | http://journals.openedition.org/craup/docannexe/image/15574/img-2.jpg |
Fichier | image/jpeg, 441k |
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Titre | Figure 3. La formation du quartier Michelet (1982-1990) |
Légende | Au centre du plan, bâtiments en rouge et espaces publics du cours Michelet en orange. |
Crédits | @ « Morphogenèse du territoire : 1982-1990 », in Pierre Chabard et Virginie Picon-Lefebvre (dir.), La Défense, t. 2. « Un atlas, histoire-territoire », Marseille, Parenthèses, 2012, p. A 130. |
URL | http://journals.openedition.org/craup/docannexe/image/15574/img-3.png |
Fichier | image/png, 244k |
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Titre | Figure 4. Plan du quartier Michelet |
Légende | Permis de construire, La Défense, Quartier Michelet, PB 16, PC 0-2, Plan de masse 1/500. S.A.R.I. Maître d’ouvrage, H. La Fonta Maître d’œuvre, 25 novembre 1982. Archives municipales de Puteaux, cote 156W8. |
Crédits | @ Archives municipales de Puteaux |
URL | http://journals.openedition.org/craup/docannexe/image/15574/img-4.jpg |
Fichier | image/jpeg, 142k |
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Titre | Figure 5. Photographie aérienne du quartier Michelet à La Défense, 17 juillet 1985 |
Légende | On constate qu’à cette date les tours Total Michelet (à gauche) et Athéna (à droite) sont achevées, la « chaîne » sud (en bas) est en cours de construction, les travaux des deux bâtiments de Gino Valle (en haut) ne sont pas encore commencés mais on distingue les tracés diagonaux du projet abandonné d’Henri La Fonta. |
Crédits | @IGN (IGNF_PVA_1-0_1985-07-17_C2314-0022_1985_FR3736_0043) |
URL | http://journals.openedition.org/craup/docannexe/image/15574/img-5.jpg |
Fichier | image/jpeg, 630k |
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Titre | Figure 6. Superposition du plan d’implantation du bâtiment en « X » d’Henri La Fonta (en jaune) avec celui de Gino Valle (en rouge). |
Légende | On note la contrainte qu’a imposé à Gino Valle l’implantation des points d’appuis préexistants, ainsi que la disposition plus urbaine et « figurative » du plan de Valle. Les trois « maisons » du bâtiment Acacia (à gauche), en alignement sur l’Esplanade, seront réduites à deux dans le projet final à la suite de la modification du volume de l’hôtel et la « tête » triangulaire sera agrandie, à l’image de celle du bâtiment Galilée, avec pour conséquence la suppression de la « maison » attenante. |
Crédits | @ ASVAA, Udine / Pierre-Alain Croset, Luka Skansi, Gino Valle, Milan, Electa, 2010, p. 270. |
URL | http://journals.openedition.org/craup/docannexe/image/15574/img-6.jpg |
Fichier | image/jpeg, 42k |
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Titre | Figure 7. Plan du site représentant les espaces publics aux niveaux de l’esplanade et du cours Michelet en contrebas |
Légende | On voit le soin apporté par Gino Valle à installer d’une part au niveau haut un alignement sur l’Esplanade avec des portiques continus et à fragmenter et ouvrir d’autre part les socles des bâtiments au niveau du cours Michelet pour minimiser leur hauteur perçue et multiplier les cheminements publics entre les deux niveaux. |
Crédits | @ ASVAA, Udine / Pierre-Alain Croset, « Gino Valle. Edifici per uffici alla Défense a Parigi », Casabella, vol. XLIX, n° 519, décembre 1985, p. 6, ill. 8. |
URL | http://journals.openedition.org/craup/docannexe/image/15574/img-7.jpg |
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Titre | Figure 8. Axonométrie générale des deux bâtiments de l’ensemble |
Légende | On note la trame diagonale du cours Michelet à laquelle Gino Valle se soustrait pour son implantation. Le projet en cours de l’agence TVK pour celui-ci prévoit d’y implanter une géométrie orthogonale pour les cheminements principaux. |
Crédits | @ ASVAA, Udine |
URL | http://journals.openedition.org/craup/docannexe/image/15574/img-8.jpg |
Fichier | image/jpeg, 82k |
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Titre | Figure 9. Élévation générale sur l’Esplanade et plans d’étage courant |
Légende | Acacia à gauche et Galilée à droite. |
Crédits | @ ASVAA, Udine |
URL | http://journals.openedition.org/craup/docannexe/image/15574/img-9.jpg |
Fichier | image/jpeg, 273k |
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Titre | Figure 10. Élévation générale sur le cours Michelet et plans au niveau d’accès Esplanade |
Légende | Galilée à gauche et Acacia à droite. |
Crédits | @ ASVAA, Udine |
URL | http://journals.openedition.org/craup/docannexe/image/15574/img-10.jpg |
Fichier | image/jpeg, 321k |
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Titre | Figure 11. Le bâtiment Galilée en cours de démolition. Vue depuis l’Esplanade, 29 octobre 2022 |
Légende | La partie centrale du bâtiment, correspondant à l’emprise d’un peu plus d’une « maison », a été rasée afin de permettre la création d’un atrium entièrement vitré sur six niveaux. Au second plan les tours Total Michelet. |
Crédits | @ Grégory Azar |
URL | http://journals.openedition.org/craup/docannexe/image/15574/img-11.jpg |
Fichier | image/jpeg, 1,0M |
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Titre | Figure 12. Vue des transformations en cours du quartier Michelet, 31 janvier 2024 |
Légende | Au premier plan au centre le bâtiment Lightwell (ex-Galilée) en fin de travaux, à sa gauche le bâtiment Acacia, peu modifié extérieurement depuis 1988, au second plan au centre la tour The Link en cours de chantier et immédiatement à sa droite le Carré Michelet. Les travaux sur l’Esplanade et le cours Michelet en contrebas n’ont pas encore commencé. |
Crédits | @ Grégory Azar |
URL | http://journals.openedition.org/craup/docannexe/image/15574/img-12.jpg |
Fichier | image/jpeg, 480k |
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Titre | Figure 13. Page de couverture de la revue Casabella, vol. XLIX, n° 519, décembre 1985 (perspective de l’entrée du bâtiment Galilée). |
Crédits | @ Casabella |
URL | http://journals.openedition.org/craup/docannexe/image/15574/img-13.jpg |
Fichier | image/jpeg, 1,2M |
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Titre | Figure 14. Page de couverture de la revue Lotus international, n° 69, 1989, 1 (vue de l’angle ouest du bâtiment Galilée) |
Crédits | @ Lotus international |
URL | http://journals.openedition.org/craup/docannexe/image/15574/img-14.jpg |
Fichier | image/jpeg, 227k |
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Titre | Figure 15. Gino Valle, Centre administratif de Pordenone, 1972-1982. Plan de situation |
Crédits | @ ASVAA, Udine / Pierre-Alain Croset, Luka Skansi, Gino Valle, Milan, Electa, 2010, p. 171. |
URL | http://journals.openedition.org/craup/docannexe/image/15574/img-15.jpg |
Fichier | image/jpeg, 200k |
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Titre | Figure 16. Gino Valle, Complexe de logements sociaux à la Giudecca, Venise, 1980-1986 |
Légende | Plans des niveaux rez-de-chaussée, premier et deuxième étage avec la trame générale de 1,65 mètre. L’entrée se fait à travers un jardin (en haut du plan), suivi des arcades, du campiello, de la calle axée sur celui-ci et la cheminée du Molino Stucky, puis du campezzo (en bas à gauche du plan). |
URL | http://journals.openedition.org/craup/docannexe/image/15574/img-16.jpg |
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Titre | Figure 17. Gino Valle, École primaire et école spéciale pour enfants présentant un trouble développemental du langage, Friedrichstrasse 13 et Lindenstrasse 98-106 (Block 606), Berlin, 1983-1987. Axonométrie |
Crédits | @ ASVAA, Udine / Pierre-Alain Croset et Luka Skansi, Modern and Site Specific. The Architecture of Gino Valle, 1946-2003, Londres, Lund Humphries, 2018, p. 232. |
URL | http://journals.openedition.org/craup/docannexe/image/15574/img-17.jpg |
Fichier | image/jpeg, 654k |
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Titre | Figure 18. Ludwig Hoffmann, Gemeindedoppelschule Rigaer Straße, Berlin, 1899-1902. Plan du niveau rez-de-chaussée |
Crédits | @ Dörte Döhl, Ludwig Hoffmann. Bauen für Berlin 1896-1924, Berlin, Ernst Wasmuth, 2004, p. 263. |
URL | http://journals.openedition.org/craup/docannexe/image/15574/img-18.jpg |
Fichier | image/jpeg, 235k |
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Titre | Figure 19. Gino Valle, Banca Commerciale Italiana, New York, 1981-1986 |
Légende | Vue d’ensemble avec à gauche le bâtiment existant de Francis Kimball (1907) et à droite l’extension de Gino Vle. |
Crédits | @ Grégory Azar |
URL | http://journals.openedition.org/craup/docannexe/image/15574/img-19.jpg |
Fichier | image/jpeg, 1,2M |
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Titre | Figure 20. Gino Valle, Banca Commerciale Italiana, New York, 1981-1986 |
Légende | Détails de pose et de fixation des pierres (grès sablé et granit noir poli) d’une épaisseur de 10 cm (4”) sur l’ossature métallique. Coupe d’exécution à gauche et photographie de chantier à droite. |
Crédits | @ ASVAA, Udine / Kenneth Frampton, « Gino Valle. Edificio per uffizi, New York », Domus, n° 683, mai 1987, p. 34, 35. |
URL | http://journals.openedition.org/craup/docannexe/image/15574/img-20.png |
Fichier | image/png, 285k |
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Titre | Figure 21. Vue de deux travées du bâtiment Acacia au niveau de la façade principale sur l’Esplanade |
Légende | On note l’importance des joints de 3 centimètres pour la lecture tectonique de cette élévation : dessin des pilastres superposés, mise en évidence au droit de chaque baie de la plate-bande et de sa clef ainsi que des oreilles de part et d’autre de l’appui. |
Crédits | @ Grégory Azar |
URL | http://journals.openedition.org/craup/docannexe/image/15574/img-21.jpg |
Fichier | image/jpeg, 158k |
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Titre | Figure 22. Planche de détail des niveaux supérieurs de la façade du bâtiment Galilée donnant sur l’Esplanade. Élévation, coupe et plan à l’échelle 1/25 |
Légende | L’attention portée par Gino Valle au calepin des façades en pierre agrafée est ici manifeste. On note en particulier les retraits successifs des nus de la pierre (0 / - 3,5 / - 7 / - 10,5 cm) ainsi que la hiérarchie établie entre les différentes épaisseurs de joints (0,5 et 3 cm). |
Crédits | @ ASVAA, Udine / Pierluigi Nicolin, « The interplay of similarities. Gino Valle at the Défense », Lotus international, n° 69, 1989-1, p. 87. |
URL | http://journals.openedition.org/craup/docannexe/image/15574/img-22.jpg |
Fichier | image/jpeg, 201k |
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Titre | Figure 23. Bâtiment PB 26 (bureaux Acacia), phase exécution, lot menuiseries extérieures (entreprise S.N.E. SITRACO), châssis basculant courant, 25 novembre 1986 |
URL | http://journals.openedition.org/craup/docannexe/image/15574/img-23.jpg |
Fichier | image/jpeg, 496k |
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Crédits | @ ASVAA, Udine |
URL | http://journals.openedition.org/craup/docannexe/image/15574/img-24.jpg |
Fichier | image/jpeg, 404k |
Pour citer cet article
Référence électronique
Grégory Azar, « Ainsi va Valle… Évaluation et préservation de l’œuvre de Gino Valle à La Défense », Les Cahiers de la recherche architecturale urbaine et paysagère [En ligne], 21 | 2024, mis en ligne le 30 novembre 2024, consulté le 18 mars 2025. URL : http://journals.openedition.org/craup/15574 ; DOI : https://doi.org/10.4000/12x4z
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