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La Création de réseaux dédiés à l’enseignement design‑build : mise en place, objectifs, enjeux depuis 2012

The Creation of Networks Dedicated to Design-build Education: Implementation, objectives and challenges from 2012 to today
Coline Madelaine

Résumés

Cet article s’intéresse au développement, au cours des années 2010, de réseaux internationaux d’enseignants proposant d’autres manières de se former à l’architecture à travers les pédagogies du design-build et du live project. Il présente les conditions d’émergence de ces réseaux, notamment le designbuildXchange et le Live Projects Network, et retrace leur chronologie. Il se penche ensuite sur les raisons de leur apparition ainsi que sur les enjeux auxquels ils sont actuellement confrontés, dans une approche à la fois critique et prospective. Il s’agit de chercher à comprendre leur positionnement vis-à-vis de l’enseignement de l’architecture, qu’ils proposent de renouveler.

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Texte intégral

Introduction

1En décembre 2012, un symposium consacré à l’enseignement design-build, sujet jusqu’alors méconnu en Europe, est organisé à l’Université technique de Berlin. Intitulé « DesignBuild-Studio: New Ways in Architectural Education », il rassemble des enseignants du monde entier venus présenter leur pédagogie. Tous proposent une forme d’enseignement du projet d’architecture dans lequel les étudiants sont amenés à concevoir (design) puis à construire eux-mêmes (build) un projet. Dans ce cadre, ils se chargent de l’ensemble de sa réalisation, depuis l’esquisse jusqu’à la livraison, et quittent les écoles d’architecture pour se former hors-les-murs, sur le chantier.

2Cet événement berlinois initie des dynamiques nouvelles autour de l’enseignement design-build. À petite échelle, il est à l’origine du travail de thèse dont est issu cet article, puisque l’auteure y découvre son futur sujet de recherche en contribuant à l’organisation de la conférence en tant qu’étudiante Erasmus. Surtout, il donne lieu au développement d’un réseau pédagogique, le designbuildXchange, rassemblant les participants au colloque. Sa création s’inscrit dans une dynamique plus large de structuration à l’échelle internationale. Entre 2012 et 2013, trois projets de mise en réseau pédagogique dédiés à l’enseignement design-build et expérientiel émergent concomitamment en Allemagne, au Royaume-Uni (où l’on parle de « live projects ») et aux États-Unis. Ils sont fondés par des enseignants en quête d’une définition de leurs démarches respectives, de reconnaissance et d’une méthodologie commune.

3C’est à la mise en place de ces réseaux pédagogiques que le présent article propose de s’intéresser. Leur apparition témoigne d’un besoin pour les enseignants de faire face à des difficultés structurelles mais porte également des objectifs plus ambitieux visant à faire évoluer les pratiques à l’œuvre dans les écoles d’architecture. À travers l’analyse des conditions d’émergence et des productions de ces réseaux, il s’agit de chercher à comprendre leur positionnement quant à de nouvelles manières d’enseigner l’architecture et, plus largement, de la pratiquer. Qu’est-ce que ces réseaux nous apprennent des pédagogies qu’ils rassemblent ? De quoi cette mise en réseau est-elle le signe ?

  • 1 Une dizaine de livres entièrement dédiés aux enseignements design-build et live project est parue d (...)
  • 2 Nina Maria Pawlicki, Agency in DesignBuild : die Handlungsfähigkeit von DesignBuild im Spannungsfel (...)
  • 3 Jane Anderson, « Devising an Inclusive and Flexible Taxonomy of International Live Projects », AREN (...)

4Cela fait une vingtaine d’années que les pédagogies design-build et live project font l’objet de publications et de travaux de recherche, avec une augmentation significative depuis 20101. La quasi-intégralité de la littérature est produite par des enseignants, à la fois acteurs et théoriciens de leur pédagogie. Sa provenance géographique met en évidence deux principaux lieux de développement : les pays anglo-saxons (États-Unis pour le design-build et Royaume-Uni pour les live projects) et un foyer européen moins important (Allemagne et Autriche essentiellement). Les pédagogies sont surtout abordées à travers des études de cas présentant un programme ou un projet en particulier, au détriment d’approches plus transversales, notamment historiques ou théoriques. Les réseaux qui nous intéressent ici sont encore moins documentés. Ils sont brièvement décrits par leurs fondateurs dans quelques articles présentant leur genèse, leurs objectifs et certaines des références théoriques mobilisées. Les données issues des réseaux sont également peu exploitées, à l’exception de la thèse de Nina Pawlicki2 et d’un article de Jane Anderson3 proposant une analyse typologique.

5Le présent article, comme le travail de thèse sur l’enseignement design-build dont il est issu, adopte une démarche exploratoire. Au vu du peu de documentation disponible aujourd’hui, il cherche à mieux caractériser les réseaux pédagogiques et à identifier les questionnements que leur développement soulève.

6Cette étude s’appuie sur des entretiens semi-directifs réalisés avec des enseignants (35 aux États-Unis, 14 en France, 4 en Allemagne et 3 au Royaume-Uni), dont certains sont également les fondateurs des réseaux, et plusieurs groupes d’étudiants américains. Il mobilise également des données issues d’un terrain de trois mois aux États-Unis, de plusieurs terrains français (Grands Ateliers Innovation Architecture, écoles d’architecture), et de l’implication de l’auteure dans certains de ces réseaux. Des sources virtuelles (plateformes en ligne des réseaux pédagogiques, sites internet et réseaux sociaux des design-build studios), jusqu’alors peu exploitées par la recherche, sont également utilisées.

7Le propos s’articule autour de trois parties. La première vise à qualifier les différents réseaux en retraçant leurs conditions d’émergence et les liens qui existent entre eux. Il s’agit d’analyser les définitions posées afin de mieux comprendre les singularités des pédagogies qu’ils incarnent. Les objectifs des réseaux sont décrits dans une deuxième partie, à travers leurs productions et activités. La question est de déterminer ce que cette mise en réseau nous dit des enjeux auxquels sont confrontés les enseignements qu’elle structure. La troisième partie porte un regard prospectif sur ces réseaux afin d’interroger les perspectives d’évolution qu’ils offrent, tant en leur sein que dans l’enseignement de l’architecture.

Mise en place de réseaux dédiés aux pédagogies design-build et live project

Le designbuildXchange, réseau européen

  • 4 Peter Fattinger, Design-Build-Studio. Rahmenbedigungen, Prozesse und Potentiale von Design-Build-Pr (...)
  • 5 Entretien avec Nina Pawlicki, 16 décembre 2020.
  • 6 Entretien avec Ursula Hartig et Nina Pawlicki, 3 décembre 2014.
  • 7 Steve Badanes (1943-) crée le Jersey Devil dans les années 1960 et le Neighborhood Design/Build Stu (...)
  • 8 Sergio Palleroni (1954-) fonde le programme « BaSiC Initiative » à l’université de l’Oregon en 1995 (...)

8Le symposium organisé à Berlin en 2012 constitue le point de départ du réseau européen. Il est initié par Ursula Hartig et Nina Pawlicki, impliquées dans des projets design-build en Allemagne (la première en tant qu’enseignante, la deuxième en tant qu’étudiante puis enseignante), notamment au sein du MexikoProjekt des étudiants berlinois construisent plusieurs projets dans des villages défavorisés de la province d’Oaxaca, au Mexique. En 2011, la thèse de Peter Fattinger, enseignant à l’école d’architecture de Vienne, met en évidence l’existence de nombreux design-build aux États-Unis4. À partir d’exemples américains et germaniques, Fattinger décrit les caractéristiques de cette pédagogie et en propose une approche historique, situant ses principales origines aux États-Unis. Il introduit également le terme de « design-build » en Europe5. Cette découverte incite Hartig et Pawlicki à organiser le symposium berlinois pour échanger avec leurs collègues à l’étranger6. Il rassemble une soixantaine d’intervenants, en majorité venus des États-Unis, d’Allemagne et d’Autriche mais aussi d’Amérique latine, d’Italie, du Royaume-Uni, d’Égypte et de Thaïlande. Deux pionniers de l’enseignement design-build américain, Steve Badanes7 et Sergio Palleroni8, sont présents. Les réflexions portent sur la recherche d’une définition commune, sur la notion de « learning by doing » et sur plusieurs points pratiques (freins juridiques, financements, calendrier académique, etc.). C’est la première conférence internationale consacrée à la fois à l’enseignement design-build et faisant le lien entre son berceau américain et ses prémices européennes.

  • 9 Entretien avec Nina Pawlicki, 16 décembre 2020.
  • 10 Keith Zawistowski et Marie Zawistowski, « Chronique d’une pédagogie venue des États-Unis et réinven (...)

9Durant ces deux jours, les « participants […] sont surpris de découvrir qu’il existe d’autres projets comme les leurs ailleurs, qu’ils rencontrent tous les mêmes problèmes et mènent les mêmes luttes9 ». Les échanges mettent en évidence la difficulté de conduire ce type d’enseignement puisque « même aux États-Unis et malgré son plein essor, la pédagogie design build […] op[ère] à contre-courant des pratiques prédominantes dans les écoles, et [y est] fortement stigmatisée comme limitante et limitée10 ». Les participants expriment le besoin de rester connectés afin de surmonter les obstacles auxquels ils se trouvent unanimement confrontés.

10À la suite du symposium, Ursula Hartig et Nina Pawlicki obtiennent un financement du programme Erasmus Mundus de l’Union européenne pour créer l’European DesignBuild Knowledge Network (EDBKN), un projet de recherche sur trois ans. L’objectif est de permettre le développement, de faciliter la diffusion et de soutenir la pérennité des design-build studios à travers des conférences, des publications et, surtout, la création d’un réseau en ligne, le designbuildXchange.

Le Thinking While Doing, réseau nord-américain infructueux

  • 11 Patrick Harrop, Simon Doucet, et Stephen Verderber, « The Design/Build Exchange as Knowledge Transf (...)
  • 12 Association of Collegiate Schools of Architecture. En français, Association des écoles supérieures (...)

11Entre 2013 et 2019, une autre recherche sur le design-build, le programme Thinking While Doing, est développée en Amérique du Nord. L’objectif est de mettre en place une ressource en ligne visant à constituer une « ontologie11 » de la pédagogie design-build, en créant un vocabulaire commun capable de le décrire. Ted Cavanagh, enseignant à l’université de Dalhousie (Halifax, Canada), coordonne cette expérience tout en faisant partie du groupe de recherche européen. Les deux équipes échangent régulièrement et leurs réflexions nourrissent l’idée de développer deux réseaux ancrés géographiquement, l’un en Amérique du Nord, l’autre en Europe. Le projet américain n’aboutit pas et seul le site européen voit le jour, dont la première version est inaugurée en 2014, à Halifax, lors de la conférence de l’Association of Collegiate Schools of Architecture (ACSA12). Elle aborde cinq thématiques, publiées dans des actes : la pédagogie, la recherche, la logistique, la notion de conception d’intérêt public et la présentation de projets sous la forme de cas d’études. Ce partenariat témoigne du début d’un intérêt institutionnel aux États-Unis pour l’enseignement design-build.

Le Live Projects Network, réseau britannique

  • 13 Chad Kraus, Designbuild education, New York /Londres, Routledge, 2017, p. 2.

12Une dynamique similaire s’opère au Royaume-Uni dès 2012. Les enseignants de live projects, une pédagogie souvent considérée comme « parallèle et synonyme13 » au design-build, ressentent le même besoin de mise en réseau.

  • 14 Entretien avec Jane Anderson, 22 mars 2021.

13À l’université d’Oxford Brookes, Jane Anderson et Colin Priest proposent depuis 2008 à leurs étudiants de travailler pour des communautés locales (associations caritatives, éducatives, organisations sociales, etc.) afin de les soutenir dans l’amélioration de leur cadre de vie. Ils réalisent des études de faisabilité, constituent des dossiers de demandes de financement, organisent des ateliers participatifs et construisent parfois de petites structures. Pour répondre à certaines critiques qui leur sont faites, Anderson et Priest développent une définition de leur pédagogie en invitant d’autres enseignants à témoigner de leurs expériences14. Ils mettent en place le Live Projects Network, une plateforme en ligne destinée à mettre en réseau les acteurs des live projects, invités à présenter leurs travaux pour constituer une base de données typologique.

  • 15 Jean Lave et Étienne Wenger (eds.), Situated Learning. Legitimate Peripheral Participation, Cambrid (...)

14Le réseau est lancé en mai 2012 à l’occasion du symposium international intitulé « Architecture Live Projects Pedagogy », à l’école d’architecture d’Oxford Brookes. Il vise à donner de la visibilité aux pratiques périphériques souvent oubliées, à mettre en avant la diversité des live projects et à constituer une « communauté de pratiques15 » pour permettre le partage de connaissances, le soutien et l’apprentissage mutuel entre enseignants. Anderson et Priest définissent le réseau ainsi :

  • 16 Jane Anderson et Colin Priest, « Developing an Inclusive Definition, Typological Analysis and Onlin (...)

Une ressource en ligne d’études de cas pour connecter les participants et démontrer la diversité de la pratique des live projects. Il s’agit d’une source d’information pour les nouveaux arrivants qui montre des façons de travailler dans des contextes et des ressources similaires. Il relie les individus, les disciplines et les institutions, permettant de nouvelles collaborations et encourageant le discours et les bonnes pratiques16.

  • 17 Entretien avec Jane Anderson, 22 mars 2021.

15Les acteurs du Live Projects Network ne participent pas à la conférence à l’origine du designbuildXchange à Berlin, les deux milieux communiquant peu et n’ayant alors pas connaissance de leurs existences respectives. Leurs protagonistes se rencontrent cependant très rapidement, vraisemblablement en 201317. Dès lors, ils instaurent une relation pérenne et réfléchissent ensemble aux évolutions souhaitables de leurs plateformes respectives.

16Dix ans après leurs lancements, le designbuildXchange18 et le Live Projects Network19 recensent chacun près de 300 projets. Le premier compte plus de 200 membres et le deuxième près d’une centaine, essentiellement des enseignants mais aussi quelques étudiants, chercheurs et partenaires professionnels.

Design-build et live project, pédagogies similaires ou différentes ?

17La création de ces deux réseaux, l’un dédié aux design-build studios, l’autre aux live projects, invite à préciser les fondements des pédagogies qu’ils portent, jusqu’alors souvent confondues.

18Le site du designbuildXchange présente les design-build studios comme :

Des composantes de l’enseignement supérieur dans le domaine de l’environnement bâti qui permettent aux étudiants de participer physiquement à la matérialisation de leurs projets. [Ils] doivent : être basés dans l’enseignement supérieur ; avoir un cahier des charges, un budget et un calendrier ; avoir un client ; être construits ; avoir des étudiants impliqués dans la conception et la construction du projet ; présenter un intérêt architectural, social, culturel, scientifique, technique ou artistique20.

19La plateforme du Live Projects Network indique qu’un live project doit :

Comprend[re] la négociation d’un cahier des charges, d’un calendrier, d’un budget et d’un produit entre un organisme éducatif et un collaborateur externe pour leur bénéfice mutuel. Le projet doit être structuré de manière que les étudiants acquièrent des connaissances pertinentes pour leur apprentissage21.

20Deux différences essentielles sont à noter. Premièrement, contrairement aux design-build studios, la production des live projects n’est pas nécessairement un objet construit. Ce qui importe, c’est le caractère « vivant » du projet, amenant les étudiants à travailler pour des personnes réelles. L’apprentissage est différent :

  • 22 James Benedict Brown et Peter Russell, « When Design-Build Met the Live Project – or – What Is a Li (...)

Les projets design-build se caractérisent par un engagement important dans le travail manuel de la construction de projets d’architecture, alors que les live projects se caractérisent par une concentration sur les compétences non techniques de la conception : consultation, communication et négociation avec des clients réels sur des projets réels22.

  • 23 Burak Pak et Aurélie De Smet (eds.), Experiential Learning in Architectural Education, New York, Ro (...)

21Deuxièmement, les design-build relèvent d’une « tradition » américaine, bien qu’émergeant aujourd’hui à l’échelle mondiale (notamment en Europe), alors que les live projects sont de « tradition » britannique. Cet ancrage géographique et les enseignements différents qu’elles proposent amènent à les considérer comme deux « écoles de pensée 23 ».

  • 24 Chad Kraus, Designbuild education, op. cit., p. 2.
  • 25 James Benedict Brown et Peter Russell, « When Design-Build Met the Live Project… », op. cit., p. 21 (...)

22Malgré ces différences, elles ont en commun d’insister sur le caractère réel des projets, afin de lier enseignement et pratique. Les projets design-build, à la fois réels et construits, sont en ce sens considérés comme une sous-catégorie des live project, qui englobe l’ensemble des projets dits « réels » (construits ou non)24. Certains projets se trouvent ainsi publiés sur les deux plateformes, correspondant aux deux définitions (fig. 1). Surtout, les pédagogies design-build et live project sont toutes deux « intrinsèquement critiques à l’égard des environnements universitaires dans lesquels elles opèrent et des professions qu’elles servent25 ».

Figure 1. Neuman Forest Pavilions, à la fois design-build et live project

Figure 1. Neuman Forest Pavilions, à la fois design-build et live project

Pavillon réalisé par l’Idaho Design Build Studio en 2022 à Troy (Idaho, États-Unis), publié à la fois sur la plateforme du designbuildXchange et du Live Projects Network.

© Idaho Design Build Studio, Scott Lawrence.

Derrière la création de ces réseaux, un objectif double

  • 26 Vincent Canizaro, « Design-Build in Architectural Education: Motivations, Practices, Challenges, Su (...)

23À ces positionnements proches sur l’enseignement de l’architecture malgré des méthodes différentes, s’ajoutent des objectifs communs aux deux réseaux. D’abord, il s’agit de répondre aux besoins immédiats des pédagogies design-build et live project, qui font face à des « résistances » plurielles (institutionnelle, administrative, collégiale, matérielle, financière, etc26.). La mise en réseau vise à les consolider pour leur permettre de perdurer à moyen terme. Ensuite, les réseaux se veulent plus ambitieux dans une perspective de développement plus pérenne. Ils cherchent à promouvoir ces pédagogies et à encourager l’apparition de nouveaux programmes afin d’amener à les envisager comme une alternative valable et durable à l’enseignement actuel de l’architecture.

Un premier objectif de consolidation

  • 27 W. Geoff Gjertson, « House Divided: Challenges to Design/Build from Within », dans Local Identities (...)
  • 28 James Benedict Brown et Peter Russell, « When Design-Build Met the Live… », op. cit., p. 10. Versio (...)

24Dans sa communication « House divided », Geoff Gjertson, enseignant design-build en Louisiane et acteur du réseau nord-américain avorté, insiste sur la nécessité pour les design-build studios de s’unifier afin de faire face ensemble aux difficultés auxquelles ils sont confrontés. Selon lui, « seule une maison unie restera debout27. » C’est ce même positionnement que défendent les réseaux pédagogiques. En se regroupant, il s’agit de mettre en commun les réussites et les échecs pour lever les obstacles plus rapidement et d’apporter un soutien opérationnel de la part d’enseignants aguerris à d’autres plus en difficulté. À l’image des communautés de pratiques évoquées par Jane Anderson, les membres des réseaux partagent leur travail pour « inspirer d’autres enseignants et étudiants afin qu’ils apprennent de [leurs] erreurs et qu’ils façonnent mieux leurs initiatives28 ». En mutualisant les expériences, le but est de créer un réseau d’entraide visant à pallier la fragilité des programmes. Les échanges entre enseignants sont en revanche peu perceptibles, à l’exception des moments de rencontres réels organisés par les réseaux lors de conférences. Virtuellement, il leur est possible de visualiser les travaux de leurs collègues et de prendre contact via la plateforme en ligne. Toutefois, aucune étude n’a été menée à ce jour pour identifier la fréquence et la nature de leurs échanges et s’ils conduisent ou non à des évolutions pédagogiques (collaborations, création d’enseignements, etc.).

  • 29 Jane Anderson et Colin Priest, « Developing an Inclusive Definition, Typological Analysis and on Li (...)

25À travers la mise en place des plateformes internet des réseaux, il s’agit également de créer une base de données commune en amenant les enseignants qui se reconnaissent dans les définitions pédagogiques posées à publier leurs projets en ligne. Ils sont présentés au sein d’un catalogue, à partir de fiches composées de courtes descriptions, d’informations pratiques (budget, durée, acteurs, etc.) et de documents graphiques ; ils sont localisés sur une carte interactive et sont classés par thématiques. Ces dernières permettent d’identifier des typologies (ou une taxonomie29) de projets et d’enrichir la définition des pédagogies à partir d’exemples concrets et variés. Les plateformes, ressources fédératrices, fournissent des informations nouvelles et en quantité, qui peuvent être étudiées pour affiner le portrait des pédagogies design-build et live project.

  • 30 Ted Cavanagh, Arlene Oak et Stephen Verderber (eds.), Thinking While Doing. Explorations in Educati (...)

26La création des réseaux répond également à la « nécessité de faire progresser l’état de l’art afin de fournir une base scientifique plus solide aux enseignants qui cherchent à être titularisés dans leurs institutions30 ». En compilant les expériences pédagogiques sur leurs plateformes, il s’agit de développer un portfolio commun que les enseignants peuvent mobiliser pour appuyer leur candidature lorsqu’ils cherchent à accéder à des positions pérennes. Un enjeu de légitimation de ces pédagogies aux yeux de l’institution apparaît derrière cette démarche. Il est question de démontrer leur intérêt et de diminuer les critiques auxquelles elles sont souvent confrontées, afin de leur permettre de perdurer en soutenant les enseignants qui les portent.

Un deuxième objectif de développement

27Au-delà de ces besoins immédiats, des objectifs prospectifs motivent également l’apparition des réseaux. Le premier réside dans la volonté d’accroître la visibilité des pédagogies design-build et live project, afin de leur permettre de se développer. Les publics visés se trouvent à la fois dans le milieu académique (enseignants, étudiants, administratifs, etc.) et professionnel (praticiens, associations, mécènes, etc.). L’objectif est double : faciliter la réalisation de projets en sensibilisant d’éventuels partenaires et promouvoir le recours à ces pédagogies dans l’enseignement de l’architecture.

  • 31 Quatre conférences de l’ACSA sont particulièrement significatives pour le design-build : trois conf (...)
  • 32 Association of Architectural Educators. En français, Association des enseignants de l’architecture. (...)
  • 33 Christine Theodoropoulos, « The NAAB Live Project Paradigm », dans Harriet Harriss et Lynette Widde (...)
  • 34 Vincent Canizaro, « Design-Build In Architectural Education: Motivations, Practices, Challenges, Su (...)
  • 35 Deux expositions sur le design-build sont notamment organisées en Autriche et en Allemagne : « Thin (...)
  • 36 Vera Simone Bader et Andres Lepik (eds.), Experience in Action ! DesignBuild in Architecture, op. c (...)

28En ce sens, plusieurs actions de communication et de valorisation sont développées. De plus en plus de conférences abordent le sujet de l’enseignement design-build et live project, notamment à travers le rassemblement d’enseignants venus présenter leurs expériences pédagogiques. Elles sont directement organisées par les réseaux, souvent soutenues par des organisations institutionnelles investies dans l’enseignement de l’architecture qui les hébergent et publient leurs actes : l’ACSA31 aux États-Unis et l’Association of Architectural Educators (AAE32) au Royaume-Uni. À ces conférences s’ajoutent des prix décernés par les réseaux, mettant en avant les « best practices » (fig. 2). Dans la même dynamique, l’ACSA ajoute en 2012 aux récompenses qu’elle décerne une catégorie spécialement dédiée aux design-build studios, déjà régulièrement mentionnés dans celle des « collaborative practices33 ». Cela s’explique en partie par la place croissante des programmes design-build dans l’enseignement de l’architecture aux États-Unis, passés d’une soixantaine en 2005 à plus d’une centaine en 201234. Des expositions sont également organisées, surtout par le pan germanique des réseaux35, pour mettre en avant des projets tout en favorisant les rencontres. Les plus récentes se sont tenues à Munich en 2020 (« Experience in Action! », qui fait l’objet d’une publication36) et à Denver en 2022 (« Design for the Common Good »).

Figure 2. Projets récompensés par le designbuildXchange en 2024

Figure 2. Projets récompensés par le designbuildXchange en 2024

À gauche, centre de recherche au cap Shirreff, Antarctique, construit par le Colorado Building Workshop en 2023 (Colorado, États-Unis). À droite, la ferme pédagogique de Sugar Roots, réalisée par l’Albert and Tina Small Center for Collaborative Design, en 2022 (Louisiane, États-Unis).

À gauche: © Colorado Building Workshop.
À droite : © Coline Madelaine.

29L’ensemble de ces actions, dont la fréquence augmente nettement depuis la création des réseaux, vise à accroître la notoriété des pédagogies par le faire et expérientielles. En leur donnant de la visibilité, il s’agit de favoriser leur développement dans les écoles d’architecture, considérant qu’il s’agit d’une piste inspirante et pertinente de renouvellement.

  • 37 Hermie Elizabeth Delport, « Towards Design-Build Architectural Education and Practice… », op. cit., (...)
  • 38 Lisa M. Abendroth, Jane Anderson, Bryan Bell, Simon Colwill, Peter Fattinger, Ursula Hartig, Jeffre (...)
  • 39 Jane Anderson, « What Do We Learn when We Go Outside », Charrette, vol. 5, n° 2, automne 2019, p. 1 (...)

30Le deuxième objectif de développement est lié à la recherche. Malgré des évolutions récentes, il persiste un réel manque de documentation sur les enseignements design-build et live project, encore peu étudiés alors qu’« il existe un besoin certain d’exploration théorique et critique37 » du sujet. Les réseaux souhaitent construire un socle de connaissances solides et instaurer des transferts de savoirs fertiles, afin de développer une réflexion théorique sur les pédagogies qu’ils représentent. Ils cherchent ainsi à se positionner comme des espaces d’« échange international de connaissances dans le domaine universitaire38 », de « cocréation de savoirs39 ».

31Plusieurs moyens, plus ou moins aboutis, leur permettent de tendre vers cet objectif : une bibliographie en ligne (encore peu élaborée), l’organisation de conférences et la publication d’actes (cependant non systématique), l’investissement, voire la création, de lieux de réflexion scientifique, notamment dans le champ de la recherche sur l’enseignement de l’architecture. Le journal Charrette, fondé en 2014 par l’AAE et en lien étroit avec le Live Projects Network puisqu’initié par plusieurs de ses fondateurs, en est l’exemple le plus récent. Revue scientifique à comité de lecture, elle s’intéresse à la pédagogie en architecture et à ses évolutions, parmi lesquelles figurent notamment les live projects et design-build studios, souvent mentionnés.

  • 40 Hyperville, « Note de l’éditeur », dans Mathias Rollot, L’Hypothèse collaborative : conversation av (...)
  • 41 Stan Allen, « 1990 - 2012: The Future That Is Now », dans Joan Ockman (ed.), Architecture school. T (...)

32Par ces biais, les réseaux espèrent développer les connaissances sur les pédagogies qu’ils structurent et construire un socle théorique plus solide pour leur permettre d’évoluer de façon pertinente grâce aux nouveaux apports de la recherche. Surtout, il est primordial de leur faire une place dans les questionnements en cours sur l’enseignement de l’architecture et, plus largement, sa pratique, en apportant des éléments probants. Après l’action, ils « s’attaque[nt] au volet de la production critique, à la part réflexive indispensable à toute transformation profonde ou génération de pratiques40 ». Pour ce faire, dans la lignée des réflexions sur les pratiques pragmatiques dont ces pédagogies se rapprochent, il s’agit de « fournir une base intellectuelle plus solide pour une architecture engagée dans et avec le monde41 ».

Des réseaux porteurs d’enjeux contemporains

  • 42 Marie-Hélène Contal (dir.), Ré-enchanter le monde : l’architecture et la ville face aux grandes tra (...)

33Cette forme d’engagement vis-à-vis de la réalité du monde qui les entoure est constitutive des pédagogies design-build et live project. Leur développement et la mise en place de réseaux les structurant répondent au besoin des architectes de faire face aux nouvelles réalités (crises plurielles, dérèglement climatique, progrès techniques, avancée du virtuel, etc.) qui caractérisent le début du XXIe siècle afin de rester pertinents42. Les pédagogies et leurs réseaux sont en prise avec ces enjeux contemporains, notamment la nécessité de former de futurs architectes capables d’affronter les crises actuelles, de relever les défis posés par le rapide développement du virtuel et de se rapprocher du champ de la recherche académique.

Vers davantage d’engagement social

34La création du réseau du Design for the Common Good43 en 2017 constitue la dernière évolution des réseaux pédagogiques consacrés aux design-build et live projects. Il rassemble le designbuildXchange et le Live Projects Network, ainsi que deux organisations plus anciennes, le Social Economic Environmental Design Network44 (2005) et le Pacific Rim Community Design Network45 (1998). Au cœur de leur positionnement commun se trouve la défense du « common good » :

  • 46 Lisa M. Abendroth, et al, « Expanding the Common Good », op. cit., p. 238. Version originale : « Th (...)

[L]eur mutualisation soutient l’avancement de meilleures pratiques en matière de conception pour le bien commun, [entendues] d’intérêt public, qui se caractérisent par des démarches inclusives, des approches éthiques et des méthodes durables46.

  • 47 Anthony Schuman, « Community Engagement », dans Joan Ockman (ed.), Architecture School. Three Centu (...)
  • 48 Lisa M. Abendroth, et al., « Expanding the Common Good », op. cit., p. 242. Version originale: « a (...)

35Au début du XXIe siècle, les nombreuses crises (économiques, environnementales, humanitaires, géopolitiques, sociales, etc.) provoquent « un appel à la conscience, incitant les personnes dans tous les domaines à réévaluer leurs priorités face à la souffrance humaine47 ». Dans le milieu de l’architecture, tant dans les écoles que dans la profession, de nouvelles pratiques émergent dans ce sens. Elles sont au cœur des expériences regroupées au sein du Design for the Common Good, qui se positionnent, ensemble, comme « une réponse aux principales opportunités et menaces mondiales liées à [ces] crise[s]48 ».

  • 49 Keith Zawistowski et Marie Zawistowski, « Chronique d’une pédagogie venue des États-Unis et réinven (...)

36Du côté de l’enseignement, les pédagogies live project et design-build cherchent à susciter une forme d’engagement chez leurs étudiants en leur faisant prendre conscience des problématiques qui les entourent et de leur capacité d’action sur celles-ci. Ces enseignements revêtent un engagement double. D’une part, à travers la réalisation de projets pour des populations défavorisées, ils cherchent à avoir un impact direct sur les inégalités et dysfonctionnements à l’œuvre dans nos sociétés contemporaines (fig. 3). D’autre part, en formant de futurs architectes plus sensibles à ces questions, en contact direct avec la réalité du terrain, ils espèrent parvenir à transformer le champ de la pratique dont ils réaffirment le caractère social, considérant que l’architecture doit jouer un « rôle catalyseur […] au service de l’intérêt général49 ».

Figure 3. Trois projets design-build réalisés par des programmes engagés socialement

Figure 3. Trois projets design-build réalisés par des programmes engagés socialement

À gauche, un logement construit en 2014 par le Yale Building Project à New Haven (Connecticut, États-Unis). Au centre, Badger Springs, habitation réalisée en 2015 par le DesignBuildBLUFF dans une réserve navajo (Utah, États-Unis). À droite, l’église baptiste d’Antioch, construite par le Rural Studio en 2002 (Alabama, États-Unis).

© Coline Madelaine, 2022.

37Du côté de la profession, les réseaux rassemblés au sein du Design for the Common Good soutiennent des pratiques participatives, en lien avec les communautés pour lesquelles ils s’investissent, où les architectes sont acteurs de transformations sociales.

  • 50 Marie-Hélène Contal (dir.), Ré-enchanter le monde : l’architecture et la ville face aux grandes tra (...)
  • 51 Programme de recherche répertoriant d’autres manières de pratiquer et d’enseigner l’architecture, d (...)
  • 52 Programme de recherche répertoriant des pédagogies radicales dans le champ de l’architecture. Pour (...)
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  • 55 Site internet du programme « Architecture et Précarités », op. cit.
  • 56 Lisa M. Abendroth, et al., « Expanding the common good », op. cit., p. 245-246. Version originale : (...)

38À travers la création de leurs réseaux, enseignants et praticiens cherchent à mettre en avant une nouvelle « scène » jusqu’alors « peu visible » et « peu reconnue car elle se tient à l’écart des circuits économiques dominants », des systèmes établis dans le milieu académique et professionnel ou des canaux de communication classiques50. Leur démarche se rapproche d’initiatives récentes valorisant des pratiques engagées, dont certaines sont en lien direct avec les réseaux : les programmes de recherche Spatial Agency51 et Radical Pedagogies52, le Global Award for Sustainable Architecture53 ou encore la plateforme française Architecture et Précarités54. Leur point commun se trouve dans leur « dimension politique55 », résumée dans le positionnement du Design for the Common Good, qui cherche à « renforcer la confluence des forces nécessaires à la création de projets véritablement sains, résilients et durables qui auront un impact positif sur les communautés du monde entier56 ».

Du local à l’international, du terrain au virtuel

  • 57 Entretiens avec Jane Anderson, 22 mars 2021 et Vera Simone Bader, 18 janvier 2021.

39Ces dernières années sont également marquées par une explosion de la place du virtuel et de l’utilisation d’internet, facilitant les échanges à l’international. La création de réseaux pédagogiques s’inscrit dans cette dynamique mais des limites apparaissent rapidement. Leurs utilisateurs comprennent qu’il n’est pas possible de se détacher de l’échelle locale et du contact avec le terrain. Afin de convaincre de nouveaux membres de les rejoindre, ils doivent maintenir des liens directs en s’appuyant sur le bouche-à-oreille, des relations de proximité et des actions locales. En apparence dématérialisés, les réseaux sont fortement ancrés géographiquement et peu représentés dans certains pays et continents. La France, par exemple, constitue jusqu’alors une « poche de résistance », partageant peu d’informations au sein des réseaux européens57. Ces derniers soulignent la nécessité de développer une approche hybride, entre ancrage local et échanges mondiaux.

  • 58 Nishat Awan, Tatjana Schneider et Jeremy Till, Spatial Agency: Other Ways of Doing Architecture, op (...)

40Surtout, les réseaux mettent en avant le besoin d’un renouvellement des représentations pour décrire les travaux de leurs membres. Dans le milieu architectural, les aspects visuels et techniques des « objets » sont davantage documentés, avec une « prédominance de l’esthétique, du style [et] de la forme » au détriment des dimensions « plus volatiles des bâtiments : les processus de leur production, leur occupation, leur temporalité et leurs relations avec la société et la nature58 ». Sur les plateformes des réseaux, ce sont ainsi des photos de bâtiments, des documents graphiques travaillés et des informations factuelles sur les projets qui priment. De fait,

  • 59 Jane Anderson, « Devising an Inclusive and Flexible Taxonomy of International Live Projects », op.  (...)

un site web est par nature très visuel, reproduisant le statu quo au sein de la discipline architecturale qui consiste à mettre l’accent sur l’apparence des conceptions plutôt que sur la qualité de leur processus ou de leurs stratégies59 .

41Les temps de chantier, les étudiants à l’œuvre, les expérimentations et les échecs, les projets inachevés, l’occupation ou encore le vieillissement des bâtiments apparaissent peu et sont moins valorisés que le projet achevé (fig. 4). Ils ont pourtant autant, si ce n’est plus, importants que ce dernier puisqu’ils en documentent le processus, au cœur de la démarche pédagogique.

Figure 4. Représentation du projet achevé privilégiée à celle du chantier

Figure 4. Représentation du projet achevé privilégiée à celle du chantier

À gauche, Indiana Street House, achevée en mai 2022 par le Studio 804 (Kansas, États-Unis), présentée sur le site du designbuildXchange. À droite, son chantier en avril 2022, non visible sur le site.

À gauche : © Corey Gaffer, Studio 804. À droite : © Coline Madelaine.

  • 60 Ibid., p. 4.

42De même, en classant le répertoire de projets à partir de filtres (échelle, budget, calendrier, matériaux utilisés, etc.), il est nécessaire de définir une « terminologie » spécifique qui met de côté des informations et des pratiques « non classées et non standard60 », pourtant tout aussi importantes. Dans un souci d’efficacité, ce sont des éléments factuels, quantifiables et facilement transmissibles qui sont privilégiés, au détriment de restitutions plus sensibles, de détails ou d’anecdotes, spécifiques à chaque processus de projet.

43S’ils n’ont pas encore trouvé de solution pour dépasser ces limites, les réseaux appellent à des évolutions pour se saisir de toute la complexité des projets qu’ils répertorient.

Une invitation à la recherche

44Les pédagogies design-build et live projects sont, à ce jour, peu investies par la recherche. Les réseaux cherchent à pallier ce manque et proposent des solutions pour tisser davantage de liens entre les enseignements qu’ils portent et la recherche en architecture, entre leur dimension pratique et une approche théorique encore fragile. Pour y parvenir, il s’agit de donner plus de visibilité aux design-build studios et aux live projects afin d’inciter les chercheurs à s’en emparer, d’apporter des données récentes et en quantité qu’ils puissent exploiter et de proposer le développement de nouveaux outils scientifiques.

  • 61 Pour plus d’informations, consulter le site internet du programme : [en ligne] [https://architectur (...)
  • 62 Pour plus d’informations, consulter l’atlas en ligne du programme : [en ligne] [https://www.archive (...)
  • 63 Site internet du programme « Architecture et Précarités », op. cit.
  • 64 Nishat Awan, Tatjana Schneider et Jeremy Till, Spatial Agency: Other Ways of Doing Architecture, op (...)
  • 65 Site internet du programme « Architecture et Précarités », op. cit.

45À travers la création de leurs plateformes en ligne, les réseaux visent avant tout à mettre en lumière les enseignements design-build et live projects, qu’ils jugent encore trop peu connus et documentés. La forme que prennent les sites internet des réseaux se rapproche d’une méthode de valorisation et de capitalisation d’information de plus en plus mobilisée par les chercheurs aujourd’hui (comme chez Spatial Agency, Architecture et Précarités ou Architecture is Climate61 et l’Atlas des Régions naturelles62). Dématérialisé et accessible à tous, le contenu y est organisé à travers des catalogues, atlas ou constellations. Il est parfois alimenté collaborativement, chacun pouvant « recenser de nouvelles expériences pour les diffuser et enrichir le répertoire » afin de « rendre visibles [d]es connaissances qui s’accumulent, mais restent […] rarement publiées63 ». Ces plateformes proposent une « compréhension différente de la production et de la diffusion du savoir », où « la connaissance n’est pas une représentation d’une vérité scientifique supposée unifiée, mais […] une manifestation d’une multiplicité de voix64 ». Dans ces nouveaux espaces de diffusion, qui permettent à la fois d’archiver, de transmettre et de discuter les connaissances65,

  • 66 Ibid., p. 63-64. Version originale : « The sum of all these projects provide a repository of constr (...)

la somme de tous [l]es projets fournit un référentiel de moyens et de mécanismes constructifs sur la manière dont l’architecture peut aborder la production spatiale avec pertinence, donnant des indications sur la façon de répondre au besoin immédiat de solutions sociales et environnementales intelligentes à une crise climatique imminente et à des inégalités sociales croissantes dans le monde66.

  • 67 Nina Maria Pawlicki, Agency in DesignBuild…, op. cit.

46Ensuite, l’apparition des réseaux tend à valoriser le recours aux sources virtuelles, encore peu exploitées bien qu’offrant une grande quantité d’informations : plateformes en ligne, blogs et vidéos d’étudiants, sites internet des programmes, chaînes YouTube, réseaux sociaux, albums photos Flickr, etc. Ces sources, récentes et foisonnantes, pourraient constituer de nouveaux corpus de recherche, dont l’étude permettrait de mieux comprendre les enseignements qu’elles documentent, et, plus largement, les pédagogies design-build et live project dans leur ensemble. C’est par exemple la démarche adoptée par Nina Pawlicki dans sa thèse67, où elle utilise les données issues de la plateforme du designbuildXchange pour identifier un certain nombre de caractéristiques de l’enseignement design-build (répartition mondiale des programmes, acteurs impliqués, types de projets entrepris, contextes de réalisation, matériaux utilisés, compétences mobilisées, etc.).

47Les « stories » Instagram, réalisées par les enseignants et étudiants de certains programmes, constituent un autre exemple de corpus exploitable. Elles permettent un suivi quasi quotidien des projets grâce à la fréquence des publications, leur proximité avec le terrain et leur caractère presque intime (fig. 5). Mouvantes et éphémères, ces sources nécessitent une veille et un archivage méthodiques, obligeant à adapter les outils de recherche.

Figure 5. « Stories » Instagram du DesignBuildBLUFF

Figure 5. « Stories » Instagram du DesignBuildBLUFF

Compilation de « stories » réalisées par le DesignBuildBLUFF en 2022, documentant la construction d’une habitation dans la réserve navajo au sud de Bluff (Utah, États-Unis).

Source : Compte Instagram du DesignBuildBLUFF [en ligne] [https://www.instagram.com/​designbuildbluff/​?igsh=MWw2bnhxcHRnZm4yeA%3D%3D], consulté le 01/06/2024.

48En ce sens, les porteurs des réseaux proposent de développer d’autres méthodes de recherche capables de s’approprier ces nouvelles sources et de transcrire la nature collaborative et vivante des projets. Pour ce faire, l’idée est évoquée de trouver des médias plus narratifs (récits, films, workshops, etc.) et de se rapprocher d’autres disciplines (sociologie, anthropologie, ethnologie, etc.) dont les outils scientifiques semblent pertinents pour décrire les processus de réalisation des projets et les méthodes pédagogiques développées. Les réseaux invitent également à transformer le système d’évaluation par les pairs, afin de permettre à des « non-chercheurs » d’y participer (notamment aux étudiants, au cœur des projets) et de le rendre accessible à un public plus large.

Conclusion

49Le développement récent de réseaux pédagogiques autour des enseignements par le faire et expérientiel semble être le reflet de plusieurs dynamiques actuellement à l’œuvre dans les écoles d’architecture et, plus largement, dans la profession.

50Premièrement, la quantité de programmes design-build et live project présentés sur les plateformes en ligne et leur structuration en réseau indique qu’une forme de mouvement pédagogique autour du « faire » est en train de se mettre en place à l’échelle internationale. Partout dans le monde, des enseignants aux pratiques similaires se rassemblent pour tenter de mettre en commun leurs expériences et de favoriser l’ancrage et le développement de leur pédagogie. Cette dernière, encore jeune et en construction, s’inscrit dans une forte dynamique de croissance, en connexion avec les évolutions de nos sociétés en profonde mutation.

  • 68 Anthony Schuman, « Community Engagement », op. cit., p. 259. Version originale: « there now exists (...)

51Deuxièmement, les réseaux défendent un positionnement commun, celui d’affirmer que le rôle de l’architecte, et donc des écoles formant les futurs praticiens, est d’être capable de répondre aux crises contemporaines. Ils revendiquent la nécessité d’une évolution des pratiques, tant dans l’enseignement que dans la profession, afin de rester actuelles. En ce sens, « il existe [déjà] aujourd’hui un grand réservoir d’expériences dans lequel les écoles peuvent puiser pour développer des approches de la vocation sociale de l’architecture68 ». C’est le rôle de ces réseaux émergents que de s’appuyer sur leur richesse et leur expertise pour proposer des pistes de renouvellement, de nouvelles donnes pour l’enseignement de l’architecture, plus aptes à répondre aux enjeux actuels.

52Troisièmement, la mise en place des réseaux et les limites auxquelles ils se trouvent rapidement confrontés (tant dans leur portée que dans leur forme) amènent à interroger la manière de documenter leurs pratiques. Si les projets sont présentés en détail, leurs processus de réalisation, les étudiants à l’œuvre, les méthodes pédagogiques, etc., sont encore peu visibles. Les réseaux soulignent la nécessité de développer de nouvelles manières de les documenter, invitant le champ de la recherche académique à se saisir du sujet et des pistes de renouvellement qu’il offre.

  • 69 Pour plus d’informations, consulter le site internet de la plateforme contributive : [en ligne] [ht (...)

53En France, ces questionnements sont tout autant d’actualité et entrent en résonance avec les perspectives apportées par ces initiatives étrangères. Des réseaux, chaires et projets de recherche s’inscrivent déjà dans cette dynamique, comme les réseaux ENSA ECO et Papier, les chaires EFF&T (ENSA Paris-La-Villette), AE&CC (ENSA Grenoble) et Habitat du futur (ENSA Clermont-Ferrand), ou encore le projet « L’École du terrain » porté par le collectif La preuve par 769.

  • 70 Pour plus d’informations, consulter le site internet dédié à la conférence : [en ligne] [https://ex (...)

54Une conférence fondatrice, à l’image de celle qui s’est déroulée à Berlin en 2012, s’est tenue à Lyon en 2016. Intitulée « Explearn. L’apprentissage expérientiel pour l’enseignement de l’architecture et de la conception des espaces habités », elle est notamment issue d’une collaboration entre les Grands Ateliers, les équipes de recherche des écoles d’architecture de Lyon et de Grenoble ainsi que Keith et Marie Zawistowski, enseignants design-build franco-américains arrivés en France au même moment. Elle rassemble pour la première fois des acteurs français et étrangers de l’apprentissage par le faire, constituant les prémices d’un nouveau réseau international d’origine française. Ce dernier, intitulé « EXPLEARN », est en cours de développement, soutenu par un financement du ministère de la Culture. Il sera lancé officiellement à l’occasion d’une deuxième conférence aux Grands Ateliers en mars 202570. Cette dernière propose en particulier de s’intéresser aux « coulisses de l’apprentissage expérientiel », témoignant d’une volonté actuelle de documenter davantage la question des processus.

55À travers ces évolutions récentes et rapides, les enseignements design-build, du faire et de l’expérientiel, en France et ailleurs, sont peut-être en train de créer une dynamique de définition de ce nouveau mouvement pédagogique, en quête de renouvellement des pratiques actuelles.

Site internet du futur réseau EXPLEARN et de la conférence dédiée : [en ligne] [https://explearn.sciencesconf.org/​], consulté le 10/10/2024.

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Bibliographie

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Site internet du Pacific Rim Community Design Network : [en ligne] [https://prcdnet.org], consulté le 31/05/2024.

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Notes

1 Une dizaine de livres entièrement dédiés aux enseignements design-build et live project est parue depuis 2010, soit la grande majorité de la littérature consacrée au sujet : William Carpenter (2010), Melanie Dodd, Fiona Harrisson et Esther Ruth Charlesworth (2012), Harriet Harriss et Lynnette Widder (2014), Chad Kraus (2017), Tolya Storonov (2018), Ted Cavanagh, Arlene Oak et Stephen Verderber (2019), Vera Simone Bader et Andres Lepik (2020), Anne-Monique Bardagot (2020), Burak Pak et Aurelie De Smet (2023). Entre 2011 et 2020, cinq thèses sur les design-build studios et deux sur les live projects sont également soutenues : Peter Fattinger (2011, Autriche), James Benedict Brown (2012, Royaume-Uni), Zunaibi Abdullah (2014, États-Unis), Anna Goodman (2015, États-Unis), Harriet Harriss (2015, Royaume-Uni), Hermie Delport (2016, Australie) et Nina Maria Pawlicki (2020, Allemagne).

2 Nina Maria Pawlicki, Agency in DesignBuild : die Handlungsfähigkeit von DesignBuild im Spannungsfeld von Architekturausbildung, -praxis und Gesellschaft, thèse de doctorat, Technische Universität Berlin, 2020.

3 Jane Anderson, « Devising an Inclusive and Flexible Taxonomy of International Live Projects », ARENA Journal of Architectural Research, vol. 2, n° 1, 01/11/2017, p. 3, [en ligne] [https://doi.org/10.5334/ajar.5], consulté le 29/05/2024.

4 Peter Fattinger, Design-Build-Studio. Rahmenbedigungen, Prozesse und Potentiale von Design-Build-Projekten in der Architekturausbildung, thèse de doctorat, Vienne, Technische Universität Wien, 2011.

5 Entretien avec Nina Pawlicki, 16 décembre 2020.

6 Entretien avec Ursula Hartig et Nina Pawlicki, 3 décembre 2014.

7 Steve Badanes (1943-) crée le Jersey Devil dans les années 1960 et le Neighborhood Design/Build Studio à l’université de Washington, à la fin des années 1980, où il enseigne encore aujourd’hui.

8 Sergio Palleroni (1954-) fonde le programme « BaSiC Initiative » à l’université de l’Oregon en 1995. Il dirige aujourd’hui le Centre for Public Interest Design à Portland.

9 Entretien avec Nina Pawlicki, 16 décembre 2020.

10 Keith Zawistowski et Marie Zawistowski, « Chronique d’une pédagogie venue des États-Unis et réinventée en France », dans Stéphanie Dadour et Sybille Le Vot (dir.), Enseigner l’architecture à Grenoble. Une histoire, des acteurs, une formation, Paris, Recherches, 2022, p. 309.

11 Patrick Harrop, Simon Doucet, et Stephen Verderber, « The Design/Build Exchange as Knowledge Transference », dans Ted Cavanagh, Arlene Oak et Stephen Verderber (eds.), Thinking While Doing. Explorations in Educational Design/Build, Basel, Birkhäuser, 2019, p. 251.

12 Association of Collegiate Schools of Architecture. En français, Association des écoles supérieures d’architecture. Fondée en 1912, elle est en charge du développement de l’enseignement de l’architecture aux États-Unis. Traduction de l’auteure.

13 Chad Kraus, Designbuild education, New York /Londres, Routledge, 2017, p. 2.

14 Entretien avec Jane Anderson, 22 mars 2021.

15 Jean Lave et Étienne Wenger (eds.), Situated Learning. Legitimate Peripheral Participation, Cambridge, Cambridge University Press, 1991.

16 Jane Anderson et Colin Priest, « Developing an Inclusive Definition, Typological Analysis and Online Resource for Live Projects », dans Harriet Harriss et Lynette Widder (eds.), Architecture Live Projects: Pedagogy Into Practice, New York, Routledge, 2014, p. 17. Version originale : « An on line resource of case studies to connect participants and demonstrate the diversity of Live Project practice. It is a source of information for newcomers that demonstrates ways to work within similar contexts and resources. It connects individuals, disciplines, and institutions, enabling new collaborations and stimulating discourse and best practice. » Traduction de l’auteure.

17 Entretien avec Jane Anderson, 22 mars 2021.

18 Voir le site internet du designbuildXchange : [en ligne] [https://www.dbxchange.eu/], consulté le 29/05/2024.

19 Voir le site internet du Live Projects Network : [en ligne] [https://liveprojectsnetwork.org/] consulté le 29/05/2024.

20 Dans la rubrique « À propos » du designbuildXchange : [en ligne] [https://www.dbxchange.eu/page/about], consulté le 31/05/2024. Version originale : « DesignBuild Projects are components of higher education in the field of built environment that allow students to be physically involved in the materialisation of their designs. DesignBuild Projects must: be based in higher education; have a brief, budget and timeframe; have a client; be built; have students involved in the design AND construction of the project; be of architectural, social, cultural, scientific, technical or artistic relevance. » Traduction de l’auteure.

21 Dans la rubrique « À propos » du Live Projects Network : [en ligne] [https://liveprojectsnetwork.org/about/] consulté le 31/05/2024. Version originale : « comprises the negotiation of a brief, timescale, budget and product between an educational organisation and an external collaborator for their mutual benefit. The project must be structured to ensure that students gain learning that is relevant to their educational development. » Traduction de l’auteure.

22 James Benedict Brown et Peter Russell, « When Design-Build Met the Live Project – or – What Is a Live-Build Project Anyway? », dans Burak Pak et Aurélie De Smet (eds.), Experiential Learning in Architectural Education, New York, Routledge, 2023, p. 12-13. Version originale : « Design-build projects are characterised by a rich engagement in the manual labour of architectural construction, whereas live projects are characterised by a focus on the soft skills of architectural design: consultation, communication, and negotiation with real clients about real projects. » Traduction de l’auteure.

23 Burak Pak et Aurélie De Smet (eds.), Experiential Learning in Architectural Education, New York, Routledge, 2023, p. 2.

24 Chad Kraus, Designbuild education, op. cit., p. 2.

25 James Benedict Brown et Peter Russell, « When Design-Build Met the Live Project… », op. cit., p. 21. Version originale: « inherently critical of the academic environments in which they operate and the professions which they serve. » Traduction de l’auteure.

26 Vincent Canizaro, « Design-Build in Architectural Education: Motivations, Practices, Challenges, Successes and Failures », International Journal of Architectural Research, vol. 6 n° 3, 2012, p. 31.

27 W. Geoff Gjertson, « House Divided: Challenges to Design/Build from Within », dans Local Identities Global Challenges, actes du colloque 2011 « ACSA Fall Conference », ACSA Press, 2011, p. 28. Version originale: « Only a house united will stand. » Traduction de l’auteure.

28 James Benedict Brown et Peter Russell, « When Design-Build Met the Live… », op. cit., p. 10. Version originale: « to inspire other teachers and students to learn from our mistakes and better shape their initiatives. » Traduction de l’auteure.

29 Jane Anderson et Colin Priest, « Developing an Inclusive Definition, Typological Analysis and on Line Resource for Live Projects », op. cit., p. 9.

30 Ted Cavanagh, Arlene Oak et Stephen Verderber (eds.), Thinking While Doing. Explorations in Educational Design/Build, op. cit., p. 334. Version originale: « The need to advance the state of art from the standpoint of providing more solid scholarly footing for faculty members coming up for tenure at their institutions. » Traduction de l’auteure.

31 Quatre conférences de l’ACSA sont particulièrement significatives pour le design-build : trois conférences annuelles, « Rebuilding » en 2010, « Globalizing Architecture / Flows and Disruption » en 2014 et « The Ethical Imperative » en 2018, ainsi que la conférence d’automne, « Working Out. Thinking While Building », qui s’est tenue à l’université de Dalhousie à Halifax en 2014 et durant laquelle le designbuildXchange est lancé.

32 Association of Architectural Educators. En français, Association des enseignants de l’architecture. Elle est fondée en 2013 au Royaume-Uni et certains de ses membres fondateurs sont liés au Live Projects Network. Il existe un lien fort entre les deux, à travers leurs membres respectifs et l’organisation de conférences. Pour plus d’informations, voir le site de l’AAE : [en ligne] [https://architecturaleducators.org], consulté le 31/05/2024.

33 Christine Theodoropoulos, « The NAAB Live Project Paradigm », dans Harriet Harriss et Lynette Widder (eds.), Architecture Live Projects: Pedagogy Into Practice, New York, Routledge, 2014, p. 58.

34 Vincent Canizaro, « Design-Build In Architectural Education: Motivations, Practices, Challenges, Successes And Failures », op. cit., p. 22.

35 Deux expositions sur le design-build sont notamment organisées en Autriche et en Allemagne : « Think global, build social ! » à Vienne en 2014 et « Experience in Action ! » à Munich en 2020.

36 Vera Simone Bader et Andres Lepik (eds.), Experience in Action ! DesignBuild in Architecture, op. cit.

37 Hermie Elizabeth Delport, « Towards Design-Build Architectural Education and Practice… », op. cit., p. 8. Version originale: « There is a definite need for more theoretical and critical exploration. » Traduction de l’auteure.

38 Lisa M. Abendroth, Jane Anderson, Bryan Bell, Simon Colwill, Peter Fattinger, Ursula Hartig, Jeffrey Hou, Sergio Palleroni, Nina Pawlicki et Colin Priest, « Expanding the Common Good », dans Massimo Botta et Sabine Junginger (eds.), Design as Common Good, actes du colloque « Swiss Design Network Symposium 2021 », 2021, p. 237, [en ligne] [https://www.researchgate.net/publication/350458287_Expanding_the_Common_Good/link/6061883e458515e8347c2659/download ?_tp =eyJjb250ZXh0Ijp7ImZpcnN0UGFnZSI6InB1YmxpY2F0aW9uIiwicGFnZSI6InB1YmxpY2F0aW9uIn19], consulté le 31/05/2024. Version originale: « International exchange of knowledge in academic design-build. » Traduction de l’auteure.

39 Jane Anderson, « What Do We Learn when We Go Outside », Charrette, vol. 5, n° 2, automne 2019, p. 1. Version originale : « co-creation of knowledge. » Traduction de l’auteure.

40 Hyperville, « Note de l’éditeur », dans Mathias Rollot, L’Hypothèse collaborative : conversation avec les collectifs d’architectes français, Marseille, Hyperville, 2018, p. 283.

41 Stan Allen, « 1990 - 2012: The Future That Is Now », dans Joan Ockman (ed.), Architecture school. Three Centuries of Educating Architects in North America, Cambridge/Washington, The MIT Press / Association of Collegiate Schools of Architecture, 2012, p. 220. Version originale : « provide a more robust intellectual basis for an architecture engaged in and with the world. » Traduction de l’auteure.

42 Marie-Hélène Contal (dir.), Ré-enchanter le monde : l’architecture et la ville face aux grandes transitions, Paris, Gallimard / Alternatives, 2014, p. 10.

43 Voir le site internet du Design for The Common Good : [en ligne] [https://www.designforthecommongood.net/], consulté le 29/05/2024.

44 Voir le site internet du Social Economic Environmental Design Network : [en ligne] [https://seednetwork.org], consulté le 31/05/2024.

45 Voir le site internet du Pacific Rim Community Design Network : [en ligne] [https://prcdnet.org/], consulté le 31/05/2024.

46 Lisa M. Abendroth, et al, « Expanding the Common Good », op. cit., p. 238. Version originale : « Their mutuality supports the advancement of best practice in design for the common good, here understood to be practices such as public interest design that are characterized by inclusive practices, ethical approaches, and sustainable methods. » Traduction de l’auteure.

47 Anthony Schuman, « Community Engagement », dans Joan Ockman (ed.), Architecture School. Three Centuries of Educating Architects in North America, Cambridge/ Washington, The MIT Press / Association of Collegiate Schools of Architecture, 2012, p. 256. Version originale: « constituted a call to conscience, prompting people in all fields to reevaluate their priorities in the face of human suffering. » Traduction de l’auteure.

48 Lisa M. Abendroth, et al., « Expanding the Common Good », op. cit., p. 242. Version originale: « a response to the key global opportunities and threats relating to [those] crisis. » Traduction de l’auteure.

49 Keith Zawistowski et Marie Zawistowski, « Chronique d’une pédagogie venue des États-Unis et réinventée en France », op. cit., p. 307.

50 Marie-Hélène Contal (dir.), Ré-enchanter le monde : l’architecture et la ville face aux grandes transitions, op. cit., p. 9.

51 Programme de recherche répertoriant d’autres manières de pratiquer et d’enseigner l’architecture, dont plusieurs design-build et live projects. Pour plus d’informations, voir la publication du même nom : Nishat Awan, Tatjana Schneider et Jeremy Till, Spatial Agency: Other Ways of Doing Architecture, Abingdon, Routledge, 2011. Le site internet : [en ligne] [https://www.spatialagency.net/], consulté le 31/05/2024.

52 Programme de recherche répertoriant des pédagogies radicales dans le champ de l’architecture. Pour plus d’informations, voir la publication du même nom : Beatriz Colomina, Ignacio G. Galán, Evangelos Kotsioris et Anna-Maria Meister (eds.), Radical pedagogies, Cambridge, Massachusetts, The MIT Press, 2022.

53 Créé en 2006 par Jana Revedin, il récompense chaque année cinq architectes engagés dans des démarches durables, rassemblés ensuite au sein d’un collectif. L’objectif est d’« oser, transmettre, fédérer ». Plusieurs architectes et initiatives liés au design-build ont été récompensés : Andrew Freear du Rural Studio (2008), Anna Heringer (2011), Christopher Alexander (2014), l’école d’architecture de Talca au Chili (2015), Patrice Doat (2016), Bryan MacKay-Lyons (2017), Werner Sobek (2019). Voir les publications consacrées au prix ou le site internet pour plus d’informations : [en ligne] [https://globalawardforsustainablearchitecture.com], consulté le 31/05/2024.

54 La plateforme est issue d’un programme de recherche de l’Ipraus, UMR AUSser 3329, dirigée par Stéphanie Dadour, Elisabeth Essaïan et Laetitia Overney. Elle présente notamment le Rural Studio. Voir le site internet pour plus d’informations : [en ligne] [https://architecture-precarites.fr], consulté le 31/05/2024.

55 Site internet du programme « Architecture et Précarités », op. cit.

56 Lisa M. Abendroth, et al., « Expanding the common good », op. cit., p. 245-246. Version originale : « To strengthen the confluence of forces required to create truly healthy, resilient, and sustainable design that will positively impact communities globally. » Traduction de l’auteure.

57 Entretiens avec Jane Anderson, 22 mars 2021 et Vera Simone Bader, 18 janvier 2021.

58 Nishat Awan, Tatjana Schneider et Jeremy Till, Spatial Agency: Other Ways of Doing Architecture, op. cit., p. 67. Version originale : « The dominance to aesthetics, style, form »; « more volatile aspects of buildings: the processes of their production, their occupation, their temporality, and their relations to society and nature. » Traduction de l’auteure.

59 Jane Anderson, « Devising an Inclusive and Flexible Taxonomy of International Live Projects », op. cit., p. 4. Version originale : « A website is by nature very visual, reproducing the status quo within the architectural discipline of emphasizing the appearance of designs rather than the quality of their process or strategies. » Traduction de l’auteure.

60 Ibid., p. 4.

61 Pour plus d’informations, consulter le site internet du programme : [en ligne] [https://architectureisclimate.net], consulté le 31/05/2024.

62 Pour plus d’informations, consulter l’atlas en ligne du programme : [en ligne] [https://www.archive-arn.fr/], consulté le 31/05/2024.

63 Site internet du programme « Architecture et Précarités », op. cit.

64 Nishat Awan, Tatjana Schneider et Jeremy Till, Spatial Agency: Other Ways of Doing Architecture, op. cit., p. 63. Version originale : « A different understanding of the production and dissemination of knowledge. […] Knowledge [is] not as a representation of supposedly unified scientific truth but […] a manifestation of a multiplicity of voices. » Traduction de l’auteure.

65 Site internet du programme « Architecture et Précarités », op. cit.

66 Ibid., p. 63-64. Version originale : « The sum of all these projects provide a repository of constructive means and mechanisms of how architecture can address the spatial production in a meaningful way, giving pointers as to how to address the immediate need for intelligent social and environmental solutions to a looming climate crisis and to increasing social inequalities in the world. » Traduction de l’auteure.

67 Nina Maria Pawlicki, Agency in DesignBuild…, op. cit.

68 Anthony Schuman, « Community Engagement », op. cit., p. 259. Version originale: « there now exists a great reservoir of experience for schools to draw on in developing approaches to architecture’s social vocation. » Traduction de l’auteure.

69 Pour plus d’informations, consulter le site internet de la plateforme contributive : [en ligne] [https://lecoleduterrain.fr/a-propos/], consulté le 10/10/2024.

70 Pour plus d’informations, consulter le site internet dédié à la conférence : [en ligne] [https://explearn.sciencesconf.org/], consulté le 10/10/2024.

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Table des illustrations

Titre Figure 1. Neuman Forest Pavilions, à la fois design-build et live project
Légende Pavillon réalisé par l’Idaho Design Build Studio en 2022 à Troy (Idaho, États-Unis), publié à la fois sur la plateforme du designbuildXchange et du Live Projects Network.
Crédits © Idaho Design Build Studio, Scott Lawrence.
URL http://journals.openedition.org/craup/docannexe/image/15898/img-1.jpg
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Titre Figure 2. Projets récompensés par le designbuildXchange en 2024
Légende À gauche, centre de recherche au cap Shirreff, Antarctique, construit par le Colorado Building Workshop en 2023 (Colorado, États-Unis). À droite, la ferme pédagogique de Sugar Roots, réalisée par l’Albert and Tina Small Center for Collaborative Design, en 2022 (Louisiane, États-Unis).
Crédits À gauche: © Colorado Building Workshop. À droite : © Coline Madelaine.
URL http://journals.openedition.org/craup/docannexe/image/15898/img-2.jpg
Fichier image/jpeg, 588k
Titre Figure 3. Trois projets design-build réalisés par des programmes engagés socialement
Légende À gauche, un logement construit en 2014 par le Yale Building Project à New Haven (Connecticut, États-Unis). Au centre, Badger Springs, habitation réalisée en 2015 par le DesignBuildBLUFF dans une réserve navajo (Utah, États-Unis). À droite, l’église baptiste d’Antioch, construite par le Rural Studio en 2002 (Alabama, États-Unis).
Crédits © Coline Madelaine, 2022.
URL http://journals.openedition.org/craup/docannexe/image/15898/img-3.jpg
Fichier image/jpeg, 383k
Titre Figure 4. Représentation du projet achevé privilégiée à celle du chantier
Légende À gauche, Indiana Street House, achevée en mai 2022 par le Studio 804 (Kansas, États-Unis), présentée sur le site du designbuildXchange. À droite, son chantier en avril 2022, non visible sur le site.
Crédits À gauche : © Corey Gaffer, Studio 804. À droite : © Coline Madelaine.
URL http://journals.openedition.org/craup/docannexe/image/15898/img-4.jpg
Fichier image/jpeg, 541k
Titre Figure 5. « Stories » Instagram du DesignBuildBLUFF
Légende Compilation de « stories » réalisées par le DesignBuildBLUFF en 2022, documentant la construction d’une habitation dans la réserve navajo au sud de Bluff (Utah, États-Unis).
Crédits Source : Compte Instagram du DesignBuildBLUFF [en ligne] [https://www.instagram.com/​designbuildbluff/​?igsh=MWw2bnhxcHRnZm4yeA%3D%3D], consulté le 01/06/2024.
URL http://journals.openedition.org/craup/docannexe/image/15898/img-5.jpg
Fichier image/jpeg, 709k
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Pour citer cet article

Référence électronique

Coline Madelaine, « La Création de réseaux dédiés à l’enseignement design‑build : mise en place, objectifs, enjeux depuis 2012 »Les Cahiers de la recherche architecturale urbaine et paysagère [En ligne], 22 | 2024, mis en ligne le 26 décembre 2024, consulté le 14 novembre 2025. URL : http://journals.openedition.org/craup/15898 ; DOI : https://doi.org/10.4000/1334z

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Auteur

Coline Madelaine

Coline Madelaine est architecte DE HMONP. Après plusieurs années d’exercice en agence, elle débute une thèse en 2020 à l’IPRAUS, laboratoire de l’ENSA Paris-Belleville, sous la direction de Virginie Picon-Lefebvre. Son travail, intitulé « Enseignement design-build : naissance, développement, perspectives. Des origines américaines aux prémices françaises », porte sur la pédagogie en architecture et plus particulièrement les design-build studios, une méthode d’enseignement par le faire. Sa thèse s’intéresse au développement de ces pratiques pédagogiques en France et aux États-Unis notamment. Elle enseigne en parallèle à l’ENSAPB en licence et en master dans le cadre d’intensifs et de studios de projet.
coline.madelaine@gmail.com

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Droits d’auteur

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