Les Baumettes au musée : Graffitis et créations carcérales
Résumés
La destruction programmée en 2018 des bâtiments historiques de la prison des Baumettes initie pour le Musée des civilisations de l’Europe et de la Méditerranée (Mucem), début 2019, l’enquête « Graffitis et créations carcérales ». Reprenant la question de la prison et de l’enfermement, l’enquête se déploie en deux volets : d’une part, la constitution d’une documentation photographique en partenariat avec le service de l’Inventaire général du Patrimoine PACA qui prend pour objet la prison en tant que telle (ses bâtiments et son architecture, ses graffitis) et d’autre part, une collecte d’éléments affichés dans les cellules, d’objets créés ou détournés par les détenus et relatifs à leur vie quotidienne.
L’enquête se matérialise par plus de deux mille photographies réalisées par le service de l’Inventaire général du Patrimoine PACA, un versement aux archives de cent quarante documents collectés dans les cellules et les coursives, quarante-deux items inscrits à l’inventaire du musée et provenant soit des cellules laissées à l’abandon au moment du transfert des détenus vers le nouveau site Baumettes 2, soit de saisies de l’administration pénitentiaire.
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- 1 Zoé Carle, « Slogans et graffitis contestataires en Méditerranée : des voix aux murs », projet de r (...)
1La destruction programmée en 2018 des bâtiments historiques de la prison des Baumettes initie pour le Musée des civilisations de l’Europe et de la Méditerranée (Mucem), début 2019, l’enquête « Graffitis et créations carcérales » (2018-2020) proposée dans le cadre du post-doctorat de Zoé Carle au musée1. Reprenant la question de la prison et de l’enfermement, l’enquête se déploie en deux volets avec d’une part, la constitution d’une documentation photographique en partenariat avec le service de l’Inventaire général du Patrimoine PACA qui prend pour objet la prison en tant que telle – ses bâtiments et son architecture, ses graffitis – et d’autre part, une collecte d’éléments affichés dans les cellules, d’objets créés ou détournés par les détenus et relatifs à leur vie quotidienne.
- 2 Décret n° 2013-157 du 21 février 2013 portant création de l’établissement public du musée des civil (...)
2Le Mucem, inauguré à Marseille en 2013, est un établissement public national à caractère administratif (EPCA) placé sous la tutelle du ministère de la Culture. Il a notamment pour mission statutaire « de conserver et de présenter au public, en les situant dans leur perspective historique et anthropologique, des biens culturels représentatifs des arts et civilisations de l’Europe et de la Méditerranée »2. Le Mucem gère aujourd’hui une collection plurielle et originale dans le monde des musées regroupant des objets d’une grande diversité, pour une large part hérités du musée national des Arts et Traditions populaires (MNATP).
- 3 Centre pénitentiaire de Marseille - Les Baumettes 2 - Les opérations pénitentiaires - Apij (justice (...)
- 4 Centre pénitentiaire de Marseille - Les Baumettes 3 - Les opérations pénitentiaires - Apij (justice (...)
- 5 Sur le milieu marseillais voir Laurence Montel, Marseille capitale du crime. Histoire croisée de l’ (...)
- 6 Exposition sur la prison des Baumettes, Criminocorpus : https://criminocorpus.org/fr/ref/25/19137/
3Le centre pénitentiaire des Baumettes est une maison d'arrêt et un centre de semi-liberté. En décembre 2012, le rapport du Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL) scelle le destin des Baumettes : le centre pénitentiaire, vétuste, insalubre, doit être intégralement repensé. Les choix mis en œuvre sont radicaux : les Baumettes historiques sont fermées, progressivement remplacées par deux sites : Baumettes 2, construit entre 2012 et 20163, et Baumettes 3, encore en projet4 (2022-2025). Aujourd'hui détruites, les Baumettes dites « historiques » n'en restent pas moins un lieu incontournable dans l'histoire de l'enfermement, irrémédiablement associées à la ville de Marseille et au “milieu”5. Emblème des difficultés et des dérives de l'administration pénitentiaire, elles sont l'image d'une prison dégradée, où les droits fondamentaux des personnes privées de liberté ne sont plus respectés. Inscrite dans le temps long de l'histoire (les premiers plans de Gaston Castel datant de 1932), elle doit également sa célébrité aux personnes qui y sont enfermées, dont les chroniques viennent alimenter régulièrement la presse et l'opinion publique. Entre la disparition du lieu et la persistance du symbole, les Baumettes constituent un véritable marqueur de l'histoire judiciaire des XXe et XXIe siècles6.
- 7 Béatrice Fraenkel, Les écritures exposées, Linx, n°31, 1994, Écritures, p. 99-110.
4Dans la continuité de l’attention prêtée aux « écritures exposées »7, l’enquête s’est rapidement concentrée sur la présence massive des graffitis dans l’espace de la prison. Ceux-ci se retrouvent préférentiellement dans les cellules, espaces à la fois privatifs et collectifs, dans un contexte de surpopulation carcérale. L’enquête a donc cherché à documenter les pratiques d’aménagement de ces espaces de vie personnelle depuis les écritures exposées (inscriptions, dessins, graffitis, fresques) en passant par les pratiques d’affichage de documents (magazines, journaux, affiches, cartes, lettres, documents administratifs) jusqu’aux créations visant à améliorer l’ordinaire (chaufferettes, boîtes aux lettres, lampes de chevet), à prendre soin de soi (sport, cuisine), à passer le temps (plateaux de jeux, cartes à jouer), à pallier les carences matérielles d’un milieu carcéral dégradé (drapeaux pour interpeller les surveillants), à contourner ou à transgresser le système de surveillance et les interdictions (narguilés, rétroviseurs prévenant l’arrivée d’un surveillant, armes). Les différentes thématiques développées constituent à la fois les axes de l’enquête mais aussi ce qui va permettre d’appréhender les objets collectés pour les contextualiser.
5L’enquête se matérialise par plus de deux mille photographies réalisées par le service de l’Inventaire général du Patrimoine PACA, un versement aux archives du musée de cent quarante documents collectés dans les cellules et les coursives, quarante-deux items inscrits à l’inventaire du Mucem provenant soit des cellules laissées à l’abandon au moment du transfert des détenus vers le nouveau site Baumettes 2, soit de saisies de l’administration pénitentiaire.
Fig. 1, Les Baumettes, cour extérieure

© Région Provence-Alpes-Côte d’Azur - Inventaire général - Françoise Baussan, 2019
Documenter la prison par la photographie
La campagne photographique du service de l’Inventaire général du Patrimoine PACA
- 8 Voir l’exposition sur Criminocorpus, La mémoire des murs : https://criminocorpus.org/fr/ref/25/1762 (...)
- 9 Inventaire général du Patrimoine culturel, Patrimoine - Ma Région Sud (maregionsud.fr)
6L’idée de réaliser une campagne photographique est apparue dès le lancement du projet afin de garder une trace par l’image de la prison, de ses bâtiments, intérieurs et extérieurs, des graffitis présents, des cellules8. L’importance du site, 30 370 m2 et quatre bâtiments (A et B sur quatre niveaux, C sur un niveau, D sur 6 niveaux) nécessitait un travail de plusieurs séances étalées sur plusieurs semaines, voire sur plusieurs mois. Le service de l’Inventaire général du Patrimoine PACA, dont l’une des missions est d’effectuer un recensement et une étude systématique sur l’ensemble du patrimoine français, architectural et mobilier9, est contacté en janvier 2019. Le projet est validé en mars et le travail in situ commence dès le mois d’avril. Plusieurs séances avec deux équipes de photographes, l’une dédiée aux cellules par Frédéric Pauvarel, l’autre aux bâtiments (intérieurs : coursives / extérieurs : cours de promenade, miradors) par Françoise Baussan, furent nécessaires pour tenter de saisir une image de cette prison.
- 10 Grégoire Korganow, Prisons-67065, [neus], Paris, Les Belles Lettres, 2015 & Portfolio en ligne « Le (...)
- 11 Mathieu Pernot, La Santé, Éditions Xavier Barral, 2018.
7Le résultat, s’il n’échappe pas pour partie aux archétypes de l’imaginaire collectif : des cellules, des portes, des corridors, des grilles, des murs, des miradors, approche néanmoins, un réel brut, direct, parfois violent, assez proche des photographies réalisées par Grégoire Korganow10 dans le cadre de son travail auprès du CGLPL dans plusieurs prisons françaises dont celles des Baumettes ; ou de celles de Mathieu Pernot à la prison de La Santé en 201511 prises avant les travaux de réhabilitation. Mais l’image de la prison reste partielle.
8L’enquête et la campagne photographique sont menées dans des bâtiments désaffectés (Fig. 1). Les photographies montrent un temps suspendu, des lieux sans vie, tout le contraire de celles prises par Jacqueline Salmon à La Santé en 2009, dont une partie est conservée au musée Carnavalet, où l’on peut observer une prison en activité et où l’on aperçoit parfois quelques silhouettes de détenus ou de surveillants. Les images des Baumettes de Françoise Baussan et Fédéric Pauvarel sont bien plus différentes encore de celles prises par Aubert Olivier, toujours à La Santé mais en 1990, où, si l’on excepte son utilisation du noir et blanc comme élément évident de différenciation, on peut observer le détail des tâches et des activités, à travers de véritables portraits. La condition des détenus s’incarne dans l’image, et même si l’on peut voir une dimension esthétique (qui n’échappe en réalité à aucune image photographique) la prison vue par Jacqueline Salmon ou par Aubert Olivier montre l’humain, une présence, la vie.
- 12 “L'impossible photographie - Prisons parisiennes (1851-2010)”, Musée Carnavalet, exposition du 10 f (...)
9La dimension du “manque” de la photographie par rapport au réel et que l’on peut ressentir dans les images de cette campagne photographique se retrouve également dans les propos de Catherine Tambrun au moment de l’exposition intitulée « L’impossible photographie, prisons parisiennes (1851-2010) »12 :
- 13 Louis Mespla, « L'impossible photographie des prisons parisiennes », Le Nouvel Observateur / Rue 89(...)
« Au-delà des autorisations quasi impossibles à obtenir pour les photographes indépendants, qui peut photographier dans les prisons françaises souvent décriées ? Que peut-on photographier ? Il y a, en prison, des lieux que l’on peut voir et représenter et d’autres qui restent cachés. [...] La photographie en prison est impossible, à la fois au sens strict et au sens esthétique. La photographie échoue en partie à montrer ce qui relève d’une sensation, d’une pratique et d’une expérience de l’enfermement qui sont bien différentes d’une simple expérience visuelle. On ne photographie pas l’enfermement, les odeurs, les bruits13. »
10L’enquête à travers son volet photographique se concentre donc sur l’architecture et sur la présence massive des graffitis dans la prison (Fig. 2 ; Fig. 3 & Fig. 4) et sur tout ce qui va relever des écritures exposées avant de s’intéresser aux objets et aux documents abandonnés, laissés, par les détenus dans les cellules avant leur transfert.
Fig. 2, Les Baumettes, bâtiment A, cellule 2 087

© Région Provence-Alpes-Côte d’Azur - Inventaire général - Frédéric Pauvarel, 2019
Fig. 3, Les Baumettes, bâtiment A, cellule 2 008

© Région Provence-Alpes-Côte d’Azur - Inventaire général - Frédéric Pauvarel, 2019
Fig. 4, Les Baumettes, bâtiment A, cellule 2 008 (détail)

© Région Provence-Alpes-Côte d’Azur - Inventaire général - Frédéric Pauvarel, 2019
Les écritures exposées
11La question des écritures exposées est au cœur des préoccupations du musée depuis le début des années 2000, entre attention portée à un mouvement artistique multiforme avec les enquêtes conduites par Claire Calogirou sur le tag et le graff, ou à des pratiques d’inscriptions contestataires, frontalement politiques. Les écritures carcérales interviennent en contre-point de ces pratiques graphiques dans l’espace public : elles constituent d’une certaine manière un sous-genre du graffiti, largement documenté à la fois par des historiens (Philippe Artières, Emmanuel Fureix, Ariane Mak) pour qui elles constituent une source ou des anthropologues et ethnologues (Philippe Hameau, Anne Montjarret, Carine Trévisan).
12En suivant le constat de Béatrice Fraenkel qui explique que les écritures exposées ne sont pas nécessairement destinées à être lues et en interrogeant le paradoxe de la pratique d'exposition des écritures sur leur valeur informative, l’enquête a d’abord pris comme sujet le graffiti avant de s’intéresser à l’écriture elle-même à travers ce qui n’était pas forcément lisible ou destiné à l’être : l’affichage au sein de la cellule de documents détournés de leur fonction première comme des pages de journaux ou de magazines. Le choix semblant plus s’opérer sur l’image (football, voitures, paysages) que sur le texte, souvent plus proche du cartel ou de la légende, leur lecture n’en devenait pas obligatoire.
- 14 Béatrice Fraenkel, op. cit.
13Un autre aspect de l’enquête réside dans la transformation symbolique de ces écritures exposées, dans leur visibilité et leur lisibilité, mais également dans leur dimension mémorielle : « Visibles, plus ou moins lisibles, les écritures exposées constituent l'espace public en lieu de mémoire. »14 Les murs de la cellule chargés de graffitis (Fig. 2), de textes et d’images (Fig. 3 ; Fig. 4 & Fig. 5) deviennent lieu de mémoire.
Les pratiques d’exposition de documents. Personnaliser les cellules : décorer, afficher, peindre…
14L’enquête sur place a permis la collecte d’affiches, de cartes, de lettres, de documents administratifs, de magazines et pages de magazines… qui servaient à la décoration de la cellule, à marquer l’identité et à recréer un univers familier et familial dans un espace de privation de liberté. La campagne photographique documente également ces pratiques (Fig. 5). La collecte a donné lieu un versement aux archives de cent quarante artefacts classés par thèmes : graffiti, culture footballistique, voitures, paysages… La réalité de l’enfermement se traduit à la fois par l’usage de ces documents, leur état de conservation, mais aussi par la manière dont ils viennent exister à l’intérieur de la cellule, ils sont le plus souvent collés sur les portes ou sur les murs avec de la pâte dentifrice. Les photographies quant à elles permettent de se faire une idée des conditions d’accrochage de ces documents, de la manière dont ils s’affichent dans l’espace de la cellule aux côtés de graffitis, voire de peintures murales quasi all-over (Fig. 6). Parallèlement, un certain nombre d’éléments relatifs à la vie quotidienne dans la prison (règlements, circulaires, signalétiques) ainsi qu’aux systèmes de communication officiels et non-officiels entre l’administration et la population carcérale, entre les détenus, mais également entre les détenus et l’extérieur (lettres, messages) ont également été rassemblés pour être versés aux archives du musée.
Fig.5, Les Baumettes, bâtiment A, cellule 2 060

© Région Provence-Alpes-Côte d’Azur - Inventaire général - Frédéric Pauvarel, 2019
Fig.6, Les Baumettes, bâtiment A, cellule 2 050

© Région Provence-Alpes-Côte d’Azur - Inventaire général - Frédéric Pauvarel, 2019
15Le contexte de ces créations et plus généralement celui des objets que nous verrons plus loin a été déterminant dans la manière d’appréhender et de justifier leur entrée au musée. La personnalisation des cellules est une pratique usitée plus ou moins tolérée et in fine bien différente de la réalité :
- 15 Observatoire international des prisons, Le Guide du prisonnier, op. cit., p. 126
« Dans les établissements pour peines (centres de détention et maisons centrales), chaque condamné est autorisé à aménager et décorer sa cellule de façon personnelle. Cependant, ces aménagements ne doivent pas entraîner la modification ou la dégradation des installations immobilières ou mobilières existantes. Ils ne doivent pas non plus constituer une entrave à l’exercice d’une fouille de cellule. Dans les maisons d’arrêt, la latitude laissée aux détenus pour l’aménagement intérieur de la cellule dépend du règlement intérieur. En règle générale, il est interdit d’apposer des objets ou des affiches en dehors d’un cadre prévu à cet effet, d’obstruer l’œilleton, d’étendre du linge ou de déposer des objets sur la fenêtre, d’allumer un feu ou de transformer les installations électriques15. »
16L’intérêt se portant dans la manière pour le détenu de contourner la règle et ainsi de personnaliser et de s’approprier un quotidien et un lieu par vocation impersonnel.
Faire entrer le quotidien du détenu au musée
- 16 Camille Lancelevée et David Sheer, La prison : réalités et paradoxes, Clermont-Ferrand, Presses uni (...)
« Dans leur cellule, les prisonniers ont également la possibilité de rester actifs : dans les établissements pour peine, les détenus aménagent et décorent généralement leur cellule, ils y lisent, y écrivent, y jouent aux cartes, y fument. Certains entreprennent des études à distance, d’autres rivalisent d’inventivité pour cuisiner avec les moyens du bord. En maison d’arrêt, ces occupations sont compromises par la fréquente sur-occupation des cellules. Il s’agit alors de protéger un espace d’intimité qui se résume au lit et de négocier avec les autres occupants de la cellule pour choisir le programme télévisé, ouvrir la fenêtre, etc. 16 »
17Le quotidien rapidement décrit ici par Camille Lancelevée et David Sheer dans l’ouvrage « La prison : réalités et paradoxes » résume parfaitement l’approche mise en œuvre dans l’enquête Baumettes. Mais cette quasi banalité du quotidien ne doit pas faire oublier la réalité :
- 17 Idem, p. 29
« Pour la plupart des prisonniers, l’incarcération constitue une rupture violente dans leur parcours de vie : elle s’accompagne d’une fragilisation des liens sociaux – perte d’emploi, rupture conjugale, etc. À l’exception des quelques-uns qui s’enrichissent sur le marché noir carcéral, la plupart des personnes détenues s’appauvrissent en raison de la difficulté à trouver un emploi pénitentiaire, des faibles rémunérations et des dépenses, nombreuses en milieu carcéral, pour compléter son alimentation, assurer son hygiène ou encore accéder à la télévision ou au téléphone17. »
18L’enquête approche donc la réalité de ce quotidien à travers la collecte d’objets pour l’essentiel réalisés par des détenus. Néanmoins, le contexte particulier de collecte – lieu désaffecté, absence des principaux acteurs, de contextes, de récits – a poussé à s’interroger sur la manière de rendre compte, par l’objet, du site et des conditions de vie des détenus en vue d’une inscription à l’inventaire. Il s’agit d’ailleurs d’un enjeu majeur pour le musée. Il est indispensable de constituer un dossier qui soit le plus complet possible comprenant l’intérêt de l'acquisition, le lien avec les collections et/ou le projet scientifique et culturel (PSC) du Mucem, la liste des biens, la source de l’acquisition, l’estimation ainsi que les anciennes appartenances. Il est également nécessaire de renseigner tout ce qui va concerner l'auteur/exécutant, la création de l’objet, la date et le lieu de création, le contexte, la technique de fabrication, l’utilisation, l’état, mais aussi, le cas échant, l’ensemble des inscriptions (tampon, signature, marque...) ainsi que leur transcription, traduction ou signification. Les références bibliographiques font également parties des éléments à renseigner dans le cadre d’un projet d’acquisition.
19La difficulté principale pour ces objets collectés dans un espace désaffecté aura été sinon de restituer leur histoire, de leur donner un sens, un contexte de production, d’usage et de création. Des publications sur les conditions de vie carcérale ainsi que plusieurs textes de témoignages d’anciens détenus, d’anciens directeurs d’établissement pénitentiaire ou d’anciens surveillants ont permis un éclairage complémentaire et a posteriori.
20La dimension sensorielle (bruits, odeurs) est absente de l’enquête, tout comme les témoignages ou entretiens avec d’anciens détenus ou d’anciens surveillants qui avaient été envisagés au moment du lancement de ce travail. La collecte réalisée, a posteriori, ne permettait que de donner une approche partielle du contexte. L’objectif n’a pas été alors de faire parler les objets ou de leur donner la parole, mais bien de retrouver leur contexte de création à travers d’autres sources, notamment issues de la littérature consacrée au sujet qui permettent de toucher au réel, à une réalité que l’on a du mal à penser de l’extérieur :
- 18 Michel Lairudelf, La vie en prison, Paris, Éd. des Écrivains, 2001, p. 35.
« La prison provoque un enfermement sensoriel, tous les sens des détenus sont limités. On constate que la vue baisse, qu’il y a une impossibilité progressive à savourer les aliments, que le toucher ne s’exerce plus parce qu’il n’y a plus d’objet qui attire. À l’inverse, plus on reste en détention, plus on est sensible au bruit : les pas dans le couloir, le passage des gamelles, le bruit des clés et des serrures. Il y a une sorte de désertification du goût, de l’odorat, du regard, pour l’isolement d’un seul sens, l’ouïe, qui permet le repérage18. »
21Le contexte a pu être en partie appréhendé en rattachant/associant chaque objet à quatre grandes thématiques : les créations visant à améliorer l’ordinaire, les techniques de soi, le temps, le contournement ou la transgression des systèmes de surveillance. Parallèlement à ces choix, un focus sur la cellule a été opéré comme dénominateur commun des différents aspects de l’enquête : la campagne photographique, le graffiti et les écritures exposées, la collecte d’objets réalisés par des détenus.
Les créations visant à améliorer l’ordinaire
22La principale source extérieure pour expliciter et documenter les objets a été le « Guide du prisonnier » qui retrace le parcours de la personne privée de liberté du premier au dernier jour de sa détention et qui aborde véritablement tous les aspects de la vie en prison. Il permettait de relier en quelque sorte les objets au réel par l’entremise de sous-thématiques en élargissant le propos ou en en donnant des éléments de contexte. Parmi les créations visant à améliorer l’ordinaire, on peut citer, par exemple, le courrier et les boîtes aux lettres, les chaufferettes ou les résistances pour chauffer l’eau, mais aussi les lampes. Des objets qui donnaient accès au quotidien intime du détenu mais qui ouvraient également à des considérations plus larges. Par ailleurs, certains objets collectés ont pu être photographiés en contexte, in situ dans la cellule, au moment des prises de vue, sans que la pratique ne soit systématique.
23L’importance du courrier a motivé l’entrée dans les collections de deux boîtes aux lettres. L’une (2021.27.20) réalisée à partir d’une simple boîte en carton indiquant au stylo à bille sur un bout de feuille « LA POSTE COURRIER SVP » et fixée avec du scotch sur la porte de la cellule (Fig. 7) ; l’autre (2021.27.19) réalisé avec soin à partir de chutes de bois, peinte et rehaussée d’une étiquette « KENZO X H&M » représentant des fleurs et fixée sur la porte par une vis (Fig. 8). Décrire ces deux objets c’est aborder de manière immédiate le contexte et les conditions carcérales :
- 19 Le Guide du prisonnier, op. cit., p. 210-211.
« Le droit de correspondre est un droit fondamental reconnu aux détenus. Même en cellule de discipline, le détenu peut écrire et recevoir des lettres, alors qu’il n’a plus droit aux parloirs. Cependant, la confidentialité de la correspondance est largement ignorée par les textes : les courriers échangés avec les proches peuvent être ouverts et lus par le personnel pénitentiaire par mesure de sécurité. Seuls les échanges épistolaires avec l’avocat, l’aumônier et certaines autorités administratives et judiciaires bénéficient du secret de la correspondance. […] Tous les détenus peuvent envoyer et recevoir des courriers, sans limitation tenant aux personnes, ni à la longueur ou à la fréquence des lettres. Pour les prévenus, le magistrat chargé de l’instruction peut cependant imposer des limites à la correspondance avec une personne particulière (par exemple, si elle est liée à l’affaire ou pour protéger un mineur). Le placement en cellule disciplinaire ne peut pas faire obstacle au droit de correspondre. La privation de correspondance ne peut pas non plus être prononcée par le chef d’établissement comme sanction disciplinaire, même dans le cas d’une faute du détenu en rapport avec la correspondance19. »
24De manière plus large encore, ces objets signifient et donnent sens à la réalité de l’incarcération :
- 20 Observatoire International des Prisons, Prisons : Un état des lieux, Paris, L’Esprit Frappeur, 2000 (...)
« Le courrier est le lien du détenu avec l’extérieur. […] La peine d’emprisonnement ne se limite pas à la privation de la liberté d’aller et venir. Elle entraîne la suppression du droit à un espace privé. L’intimité représente pourtant le cœur de l’identité personnelle et constitue le fondement de la relation à autrui. […] En prison, le moindre geste, la moindre rencontre, sont soumis au regard d’autrui, celui du surveillant ou du codétenu. Le détenu n’a plus d’espace personnel qui ne soit susceptible d’être visité à tout instant : fouille de sa cellule, interdiction de conserver un certain nombre d’objets personnels en cellule, lecture du courrier, écoute des conversations téléphoniques20… »
- 21 Pierre Pancrazi, 40 ans de prison : vécu d'un fonctionnaire de l'administration pénitentiaire, Sain (...)
25L’amélioration du quotidien passe aussi par le système D et des créations comme les chaufferettes (2021.27.16) et les résistances pour chauffer l’eau ou thermoplongeurs (2021.27.38). L’usage en semble répandu, tout comme l’imaginaire qui s’y rattache. Paradoxalement, cette pratique intrinsèquement liée à la vie en cellule apparaît peu documentée. Néanmoins, ce témoignage d’un fonctionnaire de l’administration pénitentiaire permet de l’appréhender avec une certaine ironie : « Les détenus s’amusaient à faire chauffer l’eau avec deux couvercles de pots de café, isolés entre eux par un peu de liège, branchés en direct sur le courant et jetés directement dans un seau d’eau. L’eau bouillonnait en quelques minutes et pour cause, les détenus sans le savoir réalisaient des électrolyses, produisant aussi sans le savoir du dihydrogène gazeux21. » Il ne s’agit pas de « s’amuser », mais de palier aux carences, d’améliorer avec les moyens du bord le quotidien.
- 22 Observatoire International des Prisons, Prisons : Un état des lieux, op. cit., p. 66.
26La lampe (2021.27.22) (Fig. 9) permet elle aussi d’appréhender les conditions de vie du détenu mais également d’aborder une critique du système : « La lumière tout comme l’aération et le chauffage des locaux de détention (cellule) doivent répondre à des exigences d’hygiène définies à l’article D.350 du CPP [Code de Procédure Pénal]. En pratique, dans nombre d’établissements, les cellules ne répondent pas aux normes requises en matière d’éclairage naturel ou d’aération. La lumière artificielle doit être suffisante pour permettre aux détenus de lire ou de travailler sans altérer leur vue (article D.350 du CPP)22. » La lecture, son accès par les livres, revues, magazines, journaux, par une bibliothèque représente pour certains détenus une véritable échappatoire au quotidien et à l’enfermement.
Les « techniques de soi » : le corps – sport, musculation et alimentation
- 23 Coline Zellal, Politique d’enrichissement des collections, Pôle « Corps, apparences, sexualités », (...)
27Donnée biologique et construction culturelle, entre l’enveloppe individuelle et le fait social, le corps, au cœur des constructions normatives élaborées par les sociétés, est un prisme essentiel pour l’étude de ces normes et des rapports que les individus entretiennent avec elles23. Le sujet du corps privé de liberté devait faire partie de l’enquête. En s’intéressant au sport, ce sont les rapports que les détenus entretiennent avec le corps qui pouvaient être abordés. En s’intéressant à l’alimentation, ce sont les questions de fonctionnement de la cantine, sorte de « magasin » au sein même des établissements pénitentiaires, qui pouvaient être interrogées.
- 24 Le Guide du prisonnier, op. cit., p. 146-148.
28Le « Guide du prisonnier » a une fois de plus été un outil précieux pour contextualiser les objets de la collecte relatifs au sport (Fig. 10 & Fig. 11) : un haltère (2021.27.1), un carnet répertoriant pompes, tractions, abdominaux (2021.27.11) mais aussi les livres et revues qui sont entrés dans les archives du musée. L’ouvrage permet d’en saisir les enjeux : « La peur de voir son corps dépérir, l’importance de la force physique dans les rapports avec les autres détenus, le besoin de remplir le temps et de dépenser une énergie inutilisée… tout concourt en prison à créer un fort besoin d’activité sportive. La plupart des établissements pénitentiaires en prévoient aujourd’hui la possibilité, mais parfois dans de mauvaises conditions24. » Il propose aussi des témoignages ou des analyses sur le sujet comme celle de Daniel Gonin que l’on peut immédiatement rattacher aux objets :
- 25 Daniel Gonin, « La santé incarcérée », in Le Guide du prisonnier, op. cit., p. 148.
« Le sport devenu en quelques années le plus populaire en détention est la musculation. Les prisonniers ont toujours tenu à entretenir leur forme physique et si possible à améliorer leur force corporelle. Le médecin a souvent dû faire face aux excès de toute nature de ce maintien en état du muscle. Les « pompes » à l’image de celles imposées en guise de punition dans les bataillons de l’armée, ont constitué les modèles de l’exercice viril en cellule. La musculation a trouvé un écho narcissique favorable chez un certain nombre de détenus. Tous s’accordent à dire qu’il vaut mieux montrer sa force que devoir s’en servir25. »
Fig. 10, Haltère, 2021.27.1 © Marianne Kuhn/Mucem & Fig. 11, Haltère in situ bâtiment B, cellule 2 088

© Région Provence-Alpes-Côte d’Azur - Inventaire général - Frédéric Pauvarel, 2019
- 26 Le Guide du prisonnier, op. cit., p. 146-148.
29L’ouvrage donne également le cadre des conditions d’exercice du sport en prison : « Le règlement intérieur de chaque établissement pénitentiaire doit réserver une partie de l’emploi du temps des détenus à la pratique d’exercices physiques et indiquer les conditions dans lesquelles sont assurées ces activités. En général, les personnes détenues ont accès aux installations sportives pour une pratique hebdomadaire de deux à trois heures. Le programme sportif d’un établissement pénitentiaire est élaboré par le service pénitentiaire d’insertion et de probation (SPIP) en liaison avec le chef d’établissement, les services compétents des ministères chargés de l’Éducation nationale et de la Jeunesse et des sports. Ce programme doit tendre au développement des « capacités physiques, motrices et relationnelles des détenus ». Il comprend en principe des sports collectifs et individuels, auxquels s’ajoutent parfois des pratiques corporelles telles que le yoga ou la relaxation. En pratique, les maisons d’arrêt proposent généralement très peu d’activités et d’équipements sportifs et les établissements pour peines sont inégalement dotés. Les activités sportives sont encadrées par des surveillants spécialisés (moniteurs de sport), ou des professeurs d’éducation physique qui peuvent se faire assister de vacataires26. » ainsi que les cas où la privation de sport peut être temporairement prononcée.
- 27 Laurent Gras, « Les carrières sportives en détention. Entre contraintes et possibles », in Georges (...)
- 28 Idem, p. 291-292.
30L’absence de témoignages directs sur les objets de la collecte a partiellement pu être comblée par d’autres sources. Deux témoignages rapportés dans l’étude de Laurent Gras sur les carrières sportives en détention renvoient directement aux items et à la manière dont le sport se pratique : « On faisait des pompes sur des boîtes de conserve pour avoir des appuis plus rigides et une meilleure tenue de dos ainsi que des appuis sur les barres de télévision, des biceps avec des bidons d’eau » [Youssef, détenu] et « J’avais une activité physique tous les jours : c’était pompes sur le tabouret, abdos entre le lavabo et le lit, tous les jours, tous les jours » [Paul, détenu]27 texte allant jusqu’à une analyse possible en ce qui concerne le carnet où sont indiqués pompes, tractions, abdominaux : « Ce suivi quantitatif des pratiques leur donne l’opportunité de maîtriser un temps sur lequel ils n’ont aucune prise par ailleurs (durée de la peine, permissions de sortir, horaires d’ouverture des cellules). Cette rationalisation du temps sportif s’apparente de fait à une conquête du temps d’où ressort une forte marque d’indépendance vis-à-vis de la prison. Tout se passe comme si le temps de la peine était suspendu, comme si le chrono sportif se substituait à l’horloge carcérale28. »
- 29 Daniel Lhuiller et Aldona Lemiszewska, « Vivre en prison », Paris, Bayard, cité dans La prison en c (...)
31Pour certains détenus, l’entretien du corps passe par différentes déclinaisons : « Investir les activités sportives, s’obliger à sortir pour marcher, s’imposer sa mise en mouvement par l’organisation d’une vie quotidienne strictement auto-réglée, accroître sa résistance par une mise à l’épreuve de soi-même par soi-même, verrouiller l’enveloppe pour barder ce corps29,… » (Fig. 12) mais cet entretien du corps ne va pas sans une alimentation appropriée.
Fig. 12, Les Baumettes, bâtiment B, cellule 2 109

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- 30 Observatoire International des Prisons, Prisons : Un état des lieux, op. cit., p. 72.
32Les détenus doivent en principe recevoir « une alimentation variée, bien préparée et présentée, répondant tant en ce qui concerne la qualité et la quantité aux règles de la diététique et de l’hygiène, compte tenu de leur âge, de leur état de santé, de la nature de leur travail et, dans toute la mesure du possible, de leurs convictions philosophiques ou religieuses » (article D.354 du CPP). En réalité, tant quantitativement que qualitativement, les repas s’avèrent souvent insuffisants et sont parfois servis froids. Les détenus qui le peuvent complètent leur alimentation par des achats en cantine. Les repas sont pris en cellule dans la plupart des établissements pénitentiaires30.
- 31 Le Guide du prisonnier, op. cit., p. 136-139.
33L’alimentation en prison est indissociable de la cantine. Le mode de fonctionnement de la cantine est lui indissociable des revenus financiers du détenu, car il faut de l’argent pour se nourrir correctement. Des bons de cantines sont distribués à chaque détenu. Plusieurs de ces coupons ont été collectés dans différentes cellules au cours de l’enquête pour être ensuite versés aux archives. « Boutique » ou « magasin » de l’établissement, le détenu peut y acheter divers objets ou denrées dans la limite de ses moyens financiers ou « part disponible » de son compte nominatif. La cantine est un secteur assez opaque de la vie en détention. Gérée par l’administration pénitentiaire, justifiant des prix souvent élevés par les frais de fonctionnement engendrés par ce moyen de distribution unique en son genre, la cantine ne fait l’objet ni de concurrence, ni de contrôle31.
34Mais son fonctionnement n’en est pas moins encadré :
- 32 Le Guide du prisonnier, op. cit., p. 138-139.
« La possibilité de “cantiner” s’exerce sous le contrôle du chef d’établissement et dans les conditions prévues par le règlement intérieur qui fixe les jours, heures, modalités des commandes et des livraisons. La possibilité de cantiner peut éventuellement être limitée par le directeur de l’établissement « en cas d’abus ». S’il commet une faute disciplinaire, tout détenu peut être sanctionné par la privation pendant une durée maximale de deux mois de tout achat en cantine autre que des produits d’hygiène, de correspondance et de tabac. Le placement en cellule de discipline ou de confinement entraîne la même restriction pendant toute la durée de la sanction. […] Périodiquement (en général, une fois par semaine) des bons de cantine sont distribués aux détenus ainsi que la liste des produits disponibles. Les détenus cochent ce qu’ils veulent commander et indiquent leur nom, prénom, numéro de cellule, date et signature. Les produits leurs sont remis ultérieurement. […] Les produits vendus à la cantine comprennent les denrées d’usage courant qui peuvent être consommées sans préparation. On peut également acheter tout le nécessaire pour correspondre (stylos, papier à lettres, enveloppes, timbres), des produits d’hygiène, des journaux et magazines, du tabac… La vente de certains objets et produits est interdite : les médicaments (ils ne peuvent être délivrés que sur prescription médicale), les boissons alcoolisées, les briquets à molette de type Bic, etc. 32 »
35La diversité des objets collectés à l’intérieur de la prison est le reflet de la diversité de la vie à l’extérieur. Ils donnent accès au quotidien intime du détenu mais ouvrent à chaque fois ou presque à un contexte plus large.
Appréhender l’espace de la cellule
- 33 Claude Veil et Dominique Lhuilier (dir.), La prison en changement, op. cit., p. 169-170.
36La cellule a constitué le prisme de l’enquête, de la campagne photographique en passant par le graffiti et les écritures exposées jusqu’à la collecte d’objets. Enjeu central pour la compréhension de la vie carcérale, la cellule a fait l’objet d’une attention particulière : « Elle est le lieu où le détenu passe la majeure partie de son temps, celui qui concrétise le mieux la punition d’enfermement. Elle était au début surveillée par un judas, de la même manière que les anciens cachots. Il n’y avait pas sur ce point d’évolution dans la technologie du pouvoir dont parle Foucault. L’œilleton, plus moderne, rappelle l’un des caractères du panoptique de Bentham : voir sans être vu33. » Des éléments matériels de la cellule, une partie de son mobilier comme par exemple une porte, un lit superposé à trois places ou un meuble-étagères, mais aussi des artefacts spécifiques tel que l’œilleton sont entrés dans les collections du Mucem.
La cellule
- 34 Observatoire International des Prisons, Prisons : Un état des lieux, op. cit., p. 208.
37Le plus souvent de 9 m2, la cellule est l’espace dans lequel le détenu passe l’essentiel de son temps sous un contrôle permanent dont l’œilleton (2021.27.15) (Fig. 13 & Fig. 14) en est le symbole : « De la mission de garde et d’entretien des personnes qui lui sont confiées par l’autorité judiciaire (article D.188), il résulte, dans le fonctionnement « courant » de l’institution carcérale, une crainte permanente de l’incident, du trouble à l’ordre interne. Aussi, l’administration estime-t-elle nécessaire de se tenir en permanence informée des agissements de chacun des détenus, sans envisager des moyens de contrôle respectant l’intégrité de la personne. […] Pour se faire, elle use d’un certain nombre de dispositifs de contrôle. Quel que soit le procédé utilisé, il est souvent vécu comme une intrusion dans l’intimité et une humiliation supplémentaire. Il n’est nulle part fait mention de l’œilleton dans le code de procédure pénale. Il est simplement stipulé que la présence de chaque détenu doit être contrôlée au moment du lever et du coucher ainsi que deux fois par jour au moins, à des heures variables (art. D.271). […] La raison d’être de l’œilleton est de s’assurer de la présence des détenus en cellule, de détecter les évasions, les suicides et les tentatives de suicide34. »
Fig. 13, Œilleton, 2021.27.15 © Marianne Kuhn/Mucem & Fig. 14, Œilleton, bâtiment A, cellule 3 026 ext.

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38Il existe également une organisation à l’intérieur de la cellule et des règles, notamment pour ce qui relève de l’entretien, faire son lit et maintenir sa cellule ou la place qui lui a été attribuée dans un état constant de propreté. La cellule en tant qu’espace devait donc pouvoir être restituée dans le cadre de la collecte. Le choix s’est porté sur le prélèvement du mobilier d’une cellule Corse : porte, lit et meuble-étagères. Les portes sont un support majeur d’inscription et d’affichage, un lieu d’expression contraint, dérobé aux yeux des surveillants mais intégrés au système de surveillance par l’intermédiaire de l’œilleton. Les inscriptions, graffitis, gravures, affichettes sont ainsi préférentiellement exposées sur des portes. Les lits superposés et les étagères, de leur côté, font partie du mobilier standardisé des cellules au sein desquelles ils ménagent des espaces plus ou moins privés : les montants des lits, les sommiers des lits supérieurs sont également des supports privilégiés d’expression et de création.
39Le choix et la forme de ce focus sur la cellule est également à rapprocher en partie des unités écologiques conservées au Mucem. L’unité écologique est un ensemble présentant tous les objets d’un lieu particulier tels qu’ils étaient dans leur contexte naturel. Elle se traduit dans sa forme muséographique par une vitrine présentant les objets tels qu’ils étaient le plus souvent lors de leur collecte sur le terrain. Initiée par George Henri Rivière, fondateur du MNATP, lors d’expositions temporaires puis de manière pérenne à partir de 1975 dans la Galerie culturelle du musée, l’unité écologique est un véritable marqueur dans l’appréhension de la constitution des collections du MNATP/Mucem. Elle a également servi de base de réflexion dans la manière de concevoir le focus sur la cellule :
- 35 Jean Cuisenier et Marie-Chantal de Tricornot, Guide du musée national des Arts et Traditions popula (...)
- 36 Bénédicte Rolland-Villemot, op. cit., p. 5.
« Inspirée des travaux de Leroi-Gourhan sur le site de Pincevent (Seine-et-Marne). Ses méthodes de fouilles consistaient à prélever un ensemble d’éléments le plus complet possible afin d’en donner une restitution. L’objet est alors considéré comme le témoin d’une activité passée, il est sémiophore, et sa mise en relation avec d’autres objets provenant d’un même ensemble tend à enrichir leur sens. Ces objets collectés et présentés dans leur ensemble sont appelés par Georges Henri Rivière “les choses réelles intégrées” et définies comme “les objets ayant participé d’un même milieu, acquises dans leur intégrité ou regroupés par le musée, qu’on peut dire unités écologiques35.” Ils témoignent de l’environnement avec plus d’intensité que ne le font les choses réelles isolées36. »
Le temps
Fig. 15, Calendrier mural, bâtiment A, cellule 3 020

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Fig. 16, Calendrier mural, bâtiment A, cellule 2 055

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40Le temps est un sujet essentiel, si ce n’est le véritable sujet de l’enfermement. Le temps mesuré, calculé, compté, décompté, (Fig. 15 & Fig. 16) un temps qu’il est pratiquement impossible à se figurer depuis l’extérieur. La campagne photographique par les nombreuses images de calendriers (Fig. 17) vont permettre d’appréhender partiellement le sujet avec la collecte d’un calendrier mural en toile cirée (2021.27.42) où sont consignés entre autres : une partie des mois de l’année, des horaires de programmes tv, date et horaire de parloir, des indications administratives de documents à fournir, des références à des exercices sportifs, à la cantine, et une date de libération. Les témoignages vont là aussi manquer :
- 37 Christian Molinier, Carnet de prison, Rambouillet, L'Anabase, 2017, p. 63-65.
« Tout semble aller au ralenti dans un espace de détention. Gardiens, détenus ont une démarche lente, des mouvements lents, et même la parole semble placée sous le signe d’une étrange disponibilité temporelle. […] Le temps carcéral est un temps de routine, de répétition, de retour du même. Répétition des gestes au cours de la journée, de la semaine, du mois, de l’année, des années qui se suivent. Répétition des paroles. Le détenu vit selon un temps cyclique qui ne va vers aucun but et tourne sur lui-même. Le temps du surveillant aboutit aux vacances, puis à la retraite. Le temps du détenu, placé sous le sceau de l’incertitude avant le jugement, est défini par la peine quand celle-ci est fixée. Ce sera dans cinq ans, dans dix ans, dans vingt ans que prendra fin le tourbillon du temps. Mais telle qu’elle est vécue au quotidien, cette échéance ne présente aucune consistance. Elle paraît irréelle. Dans son contenu de chaque jour, le temps n’aboutit nulle part et donne le sentiment d’être enfermé pour l’éternité. Ces barreaux rouillés, ces murs étroits, cette grosse porte, ce lit en fer, c’est le réel concret. Et ce bout d’immeuble, de boulevard, de vie libre, que l’on peut parfois apercevoir en montant à la fenêtre, c’est le monde de la liberté perdue. Le temps extérieur est un temps de projets, de libre exercice des aptitudes. Il est tendu vers différents buts, organisé autour d’une profession, d’une vie de famille, d’activités diverses. C’est un temps où l’on avance. Dans le temps répétitif de la détention, l’individu, dépossédé de lui-même et de tout ce qui faisait sa vie, est enfermé dans les limites invisibles d’un temps circulaire. Mais ce cycle a une vertu. Il rend la durée moins douloureuse. L’esprit se fixe sur le quotidien, qu’il s’agit de vivre le moins mal possible, même si la répétition des jours tourne comme un manège et finit par rendre fou37. »
Fig. 17, Calendrier mural en toile cirée, bâtiment B, cellule 1 105

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- 38 Sur les jeux de hasard et d’argent : Valérie Beauregard, Des jeux de hasard et d’argent en détentio (...)
41Il y a peu d’études sur le jeu en prison38, sur la manière d’occuper son temps. Les mots-clés liés aux loisirs en milieu carcéral relèvent plutôt du sport, très peu des jeux de société. Néanmoins, le jeu semble omniprésent dans la cellule : jeux de carte, jeux de plateaux dont deux ont pu être collecté (2021.27.2) et (2021.27.3).
Les fouilles et la violence
- 39 Production et régulation de la violence en prison : avancées et contradictions : rapport final / [r (...)
« Il existe une violence de la prison en tant que telle : l’enfermement est une violence et tout le monde en convient, détenus comme surveillants. Elle est symbolique, physique, psychologique : la contrainte des corps, celle de la liberté d’aller et venir, la perte de la proximité physique des proches… sont autant de souffrances qui, parce qu’elles viennent s’imposer sur l’organisation courante de la vie et sur l’incorporation de la liberté dans les gestes de la vie quotidienne (ouvrir ou ne pas ouvrir une porte…) font violence. La souffrance imposée est violence par nature39. »
- 40 Observatoire International des Prisons, Prisons : Un état des lieux, op. cit., p. 74.
42La prison est souvent synonyme de violences : violences de détenus envers d’autres détenus, violences de personnels pénitentiaires à l’égard de détenus ou de celles de détenus envers les personnels ou violence retournée contre soi que représentent les automutilations, les grèves de la faim et les suicides. La violence en prison, individuelle ou collective, est exacerbée par une approche exclusivement disciplinaire des personnes détenues et se trouve amplifiée par l’absence d’un véritable droit d’expression reconnu aux personnes privés de liberté. Il semble difficile d’ignorer les responsabilités : « La responsabilité de l’institution carcérale dans ce qui préside à l’émergence de cette violence multiforme et omniprésente : défaut d’écoute des situations de détresse et d’angoisse, rupture des liens familiaux, conditions d’existence indignes et dépersonnalisantes, aide à la réinsertion défaillante40… »
43L’enquête aborde le sujet de la violence en prison par la collecte d’armes de toutes sortes et d’objets susceptibles d’être utilisés comme une arme : couteaux (2021.27.5) (Fig. 18) et (2021.27.6), poinçon (2021.27.7) (Fig. 19), poing américain (2021.27.25), maillet (2021.27.24) représentant l’interdit mais aussi permettant de revenir à la cellule et au quotidien du détenu par les fouilles. Une partie de ces objets ne proviennent d’ailleurs pas de la collecte sur le site mais de saisies de l’administration pénitentiaire.
44Le « Guide du prisonnier » précise l’objet et le contexte de ces fouilles :
- 41 Le Guide du prisonnier, op. cit., p. 336-338.
« Les surveillants procèdent en l’absence des détenus (lors des parloirs ou des promenades notamment), à l’inspection des cellules. La périodicité de cette opération est décidée discrétionnairement par le chef d’établissement. L’objectif de ces fouilles est de déceler les risques d’évasion, les trafics et les entorses aux “règlements”. Les gardiens sont tenus de vérifier que les barreaux ne sont ni sciés ni descellés et que les systèmes de fermeture fonctionnent correctement. Ils sont également habilités à rechercher la présence d’objet ou de substance “non autorisés” ; stupéfiants, moyens de communication illicites, armes et tout objet susceptible d’être utilisé comme une arme… Cette disposition règlementaire est souvent interprétée comme accordant un pouvoir d’investigation large, privant le détenu de toute vie privée. En effet, la cellule n’est juridiquement pas considérée comme le domicile du détenu. Dans les maisons centrales, les directeurs sont incités à procéder à des “fouilles approfondies”, réalisées par le personnel de l’établissement et organisées de façon plus espacées que les fouilles de cellules “simples”. Il s’agit de fouilles complètes, lors desquelles le mobilier et les sanitaires peuvent être démontés afin de vérifier l’absence d’objets illicites. Lors de ces fouilles, les détenus sont également fouillés à corps. Le chef d’établissement doit conserver une trace écrite de ces contrôles approfondis. Enfin, des “fouilles des locaux en commun” (cour de promenade, salle de sport, chapelle, douces, ateliers, etc.) sont réalisées par les personnels de l’établissement41. »
45Les armes saisies symbolisent une volonté de contournement et de transgression du système de surveillance carcérale, mais d’autres objets plus insolites témoignent de ce contournement des règles : la chaussure (2021.27.29) (Fig. 20) modifiée au niveau de la semelle et permettant l’introduction de petits objets comme une carte SIM ou la boîte de conserve de tomates entières pelées au jus (2021.27.28.1-7) (Fig. 21) contenant support métallique et gobelet plastique hermétique mais dont le poids total a été respecté ainsi que l’effet de contenu lorsque la boîte est secouée.
46Le travail de contextualisation des objets et des thématiques de l’enquête, les recherches documentaires effectuées pour l’inscription à l’inventaire où sont ici livrés plusieurs extraits d’ouvrages devaient permettre une meilleure appréhension et compréhension du monde de la prison et de ses enjeux. Idéalement, des entretiens ou témoignages directs concernant la prison des Baumettes auraient sans doute permis une meilleure contextualisation, plus précise concernant l’utilisation de ces objets ou le fonctionnement de la prison.
Fig. 22, Les Baumettes, bâtiment D, cellule 2 S 33 & Fig. 23, Les Baumettes, bâtiment A, cellule 4 007

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Fig. 24, Les Baumettes, bâtiment C

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Fig. 25, Les Baumettes, bâtiment A, coursive

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Conclusion
47Les objets collectés lors de cette enquête sur le centre pénitentiaire des Baumettes permettent de documenter une partie de la vie quotidienne des détenus dans l’espace carcéral et plus particulièrement dans l’espace de la cellule. Ils constituent un ensemble donnant à voir une appréhension impressionniste de l’univers carcéral. Bien que certains de ces objets existent dans les collections de l’École nationale d’administration pénitentiaire (ÉNAP) à Agen, la cohérence et la perspective qui ont conduit cette collecte, de même que la destination des objets, diffèrent considérablement, car si la plupart de ces éléments sont communs au milieu carcéral français et à la privation de liberté en général, l’enquête a aussi cherché à ménager une place à la spécificité de la prison des Baumettes. Les références à L’Olympique de Marseille sont multiples et se déclinent à travers le graffiti ou les pratiques d’affichage dans les cellules. Elles se retrouvent à la fois du côté des détenus (cellules, Fig. 22 & Fig. 23) et du côté des surveillants (salle de repos, Fig. 24) mais sont également « partagées » lorsqu’il s’agit des coursives (Fig. 25). L’Olympique de Marseille constitue dedans/dehors l’une des identités de Marseille relevant autant de l’imaginaire collectif que de la réalité.
48L’enquête « Graffitis et créations carcérales » entre également en résonance avec un certain nombre d’items rassemblés au cours d’acquisitions ou d’enquêtes-collectes antérieures au Mucem ainsi qu’avec les nombreuses représentations ayant trait à la prison et à l’incarcération (cartes postales, dessins, caricatures…). pour s’inscrire dans cette continuité. Il ne s’agissait pas pour le musée de patrimonialiser la prison mais de conserver une trace subjective de celle-ci. Il faut imaginer…, mais on ne saisira jamais ce qui se passe réellement derrière les murs d’une prison, on ne saisira jamais véritablement le quotidien de ces détenus dont ces quelques objets témoignent. Du centre pénitentiaire des Baumettes, l’ensemble des bâtiments historiques a été détruit entre janvier et juillet 2022, seuls les murs d’enceinte, classés, sont restés.
Notes
1 Zoé Carle, « Slogans et graffitis contestataires en Méditerranée : des voix aux murs », projet de recherche postdoctoral LabexMed-Mucem, 2019-2020.
2 Décret n° 2013-157 du 21 février 2013 portant création de l’établissement public du musée des civilisations de l’Europe et de la Méditerranée (Mucem).
3 Centre pénitentiaire de Marseille - Les Baumettes 2 - Les opérations pénitentiaires - Apij (justice.fr)
4 Centre pénitentiaire de Marseille - Les Baumettes 3 - Les opérations pénitentiaires - Apij (justice.fr)
5 Sur le milieu marseillais voir Laurence Montel, Marseille capitale du crime. Histoire croisée de l’imaginaire de Marseille et de la criminalité organisée (1820-1940), thèse de doctorat, Université de Paris X Nanterre, 2008, dact., 2 vol., 990 f°.
6 Exposition sur la prison des Baumettes, Criminocorpus : https://criminocorpus.org/fr/ref/25/19137/
7 Béatrice Fraenkel, Les écritures exposées, Linx, n°31, 1994, Écritures, p. 99-110.
8 Voir l’exposition sur Criminocorpus, La mémoire des murs : https://criminocorpus.org/fr/ref/25/17627/
9 Inventaire général du Patrimoine culturel, Patrimoine - Ma Région Sud (maregionsud.fr)
10 Grégoire Korganow, Prisons-67065, [neus], Paris, Les Belles Lettres, 2015 & Portfolio en ligne « Les Baumettes, l’effroyable prison », Le Monde, 6 décembre 2012, Les Baumettes, l’effroyable prison (lemonde.fr)
Pauline Le Monnier de Gouville, « Grégoire Korganow - Prisons 67065 », Les Cahiers de la Justice, 2015/3 (n° 3), p. 465-469. DOI : 10.3917/cdlj.1503.0465. URL : https://www.cairn.info/revue-les-cahiers-de-la-justice-2015-3-page-465.htm
11 Mathieu Pernot, La Santé, Éditions Xavier Barral, 2018.
12 “L'impossible photographie - Prisons parisiennes (1851-2010)”, Musée Carnavalet, exposition du 10 février au 4 juillet 2010
13 Louis Mespla, « L'impossible photographie des prisons parisiennes », Le Nouvel Observateur / Rue 89, 24 mars 2011,
14 Béatrice Fraenkel, op. cit.
15 Observatoire international des prisons, Le Guide du prisonnier, op. cit., p. 126
16 Camille Lancelevée et David Sheer, La prison : réalités et paradoxes, Clermont-Ferrand, Presses universitaires Blaise Pascal, 2019, pp. 17-18
17 Idem, p. 29
18 Michel Lairudelf, La vie en prison, Paris, Éd. des Écrivains, 2001, p. 35.
19 Le Guide du prisonnier, op. cit., p. 210-211.
20 Observatoire International des Prisons, Prisons : Un état des lieux, Paris, L’Esprit Frappeur, 2000, p. 201-202.
21 Pierre Pancrazi, 40 ans de prison : vécu d'un fonctionnaire de l'administration pénitentiaire, Saint-Denis, Édilivre, 2017, p. 23.
22 Observatoire International des Prisons, Prisons : Un état des lieux, op. cit., p. 66.
23 Coline Zellal, Politique d’enrichissement des collections, Pôle « Corps, apparences, sexualités », Mucem, 2019.
24 Le Guide du prisonnier, op. cit., p. 146-148.
25 Daniel Gonin, « La santé incarcérée », in Le Guide du prisonnier, op. cit., p. 148.
26 Le Guide du prisonnier, op. cit., p. 146-148.
27 Laurent Gras, « Les carrières sportives en détention. Entre contraintes et possibles », in Georges Benguigui, Fabrice Guilbaud, Guillaume Malochet (dir.), Prisons sous tensions, Nîmes, Champ social éd., 2011, p. 287-288.
28 Idem, p. 291-292.
29 Daniel Lhuiller et Aldona Lemiszewska, « Vivre en prison », Paris, Bayard, cité dans La prison en changement, sous la dir. de Claude Veil et Dominique Lhuilier, Ramonville-Saint-Agne, Érès, 2000, p. 213.
30 Observatoire International des Prisons, Prisons : Un état des lieux, op. cit., p. 72.
31 Le Guide du prisonnier, op. cit., p. 136-139.
32 Le Guide du prisonnier, op. cit., p. 138-139.
33 Claude Veil et Dominique Lhuilier (dir.), La prison en changement, op. cit., p. 169-170.
34 Observatoire International des Prisons, Prisons : Un état des lieux, op. cit., p. 208.
35 Jean Cuisenier et Marie-Chantal de Tricornot, Guide du musée national des Arts et Traditions populaires, Paris, RMN, 1987, p. 33-38 in Bénédicte Rolland-Villemot, « Unités écologiques, “period rooms” : des ensembles d’objets mobiliers, de la collecte à la valorisation muséographique », In Situ, 29, 2016, mis en ligne le 13 juillet 2016, consulté le 03 mai 2019, http://journals.openedition.org/insitu/13373
36 Bénédicte Rolland-Villemot, op. cit., p. 5.
37 Christian Molinier, Carnet de prison, Rambouillet, L'Anabase, 2017, p. 63-65.
38 Sur les jeux de hasard et d’argent : Valérie Beauregard, Des jeux de hasard et d’argent en détention ? L’état de la situation dans les pénitenciers fédéraux du Québec, thèse, université de Montréal, 2012.
39 Production et régulation de la violence en prison : avancées et contradictions : rapport final / [recherche effectuée pour la] Mission de recherche Droit et justice [par la] FORS ; [réd. par] Lucie Melas, François Ménard, Paris, Mission de recherche Droit et justice, 2001, p. 20.
40 Observatoire International des Prisons, Prisons : Un état des lieux, op. cit., p. 74.
41 Le Guide du prisonnier, op. cit., p. 336-338.
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Titre | Fig. 1, Les Baumettes, cour extérieure |
Crédits | © Région Provence-Alpes-Côte d’Azur - Inventaire général - Françoise Baussan, 2019 |
URL | http://journals.openedition.org/criminocorpus/docannexe/image/14388/img-1.jpg |
Fichier | image/jpeg, 116k |
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Titre | Fig. 2, Les Baumettes, bâtiment A, cellule 2 087 |
Crédits | © Région Provence-Alpes-Côte d’Azur - Inventaire général - Frédéric Pauvarel, 2019 |
URL | http://journals.openedition.org/criminocorpus/docannexe/image/14388/img-2.jpg |
Fichier | image/jpeg, 198k |
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Titre | Fig. 3, Les Baumettes, bâtiment A, cellule 2 008 |
Crédits | © Région Provence-Alpes-Côte d’Azur - Inventaire général - Frédéric Pauvarel, 2019 |
URL | http://journals.openedition.org/criminocorpus/docannexe/image/14388/img-3.jpg |
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Titre | Fig. 4, Les Baumettes, bâtiment A, cellule 2 008 (détail) |
Crédits | © Région Provence-Alpes-Côte d’Azur - Inventaire général - Frédéric Pauvarel, 2019 |
URL | http://journals.openedition.org/criminocorpus/docannexe/image/14388/img-4.jpg |
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Titre | Fig.5, Les Baumettes, bâtiment A, cellule 2 060 |
Crédits | © Région Provence-Alpes-Côte d’Azur - Inventaire général - Frédéric Pauvarel, 2019 |
URL | http://journals.openedition.org/criminocorpus/docannexe/image/14388/img-5.jpg |
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Titre | Fig.6, Les Baumettes, bâtiment A, cellule 2 050 |
Crédits | © Région Provence-Alpes-Côte d’Azur - Inventaire général - Frédéric Pauvarel, 2019 |
URL | http://journals.openedition.org/criminocorpus/docannexe/image/14388/img-6.jpg |
Fichier | image/jpeg, 196k |
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Titre | Fig. 7 & Fig. 8, Boîtes aux lettres, 2021.27.20 & 2021.27.19 |
Crédits | © Marianne Kuhn/Mucem |
URL | http://journals.openedition.org/criminocorpus/docannexe/image/14388/img-7.jpg |
Fichier | image/jpeg, 82k |
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Titre | Fig. 9, Lampe, 2021.27.22 |
Crédits | © Marianne Kuhn/Mucem |
URL | http://journals.openedition.org/criminocorpus/docannexe/image/14388/img-8.jpg |
Fichier | image/jpeg, 89k |
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Titre | Fig. 10, Haltère, 2021.27.1 © Marianne Kuhn/Mucem & Fig. 11, Haltère in situ bâtiment B, cellule 2 088 |
Crédits | © Région Provence-Alpes-Côte d’Azur - Inventaire général - Frédéric Pauvarel, 2019 |
URL | http://journals.openedition.org/criminocorpus/docannexe/image/14388/img-9.jpg |
Fichier | image/jpeg, 183k |
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Titre | Fig. 12, Les Baumettes, bâtiment B, cellule 2 109 |
Crédits | © Région Provence-Alpes-Côte d’Azur - Inventaire général - Frédéric Pauvarel, 2019. |
URL | http://journals.openedition.org/criminocorpus/docannexe/image/14388/img-10.jpg |
Fichier | image/jpeg, 193k |
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Titre | Fig. 13, Œilleton, 2021.27.15 © Marianne Kuhn/Mucem & Fig. 14, Œilleton, bâtiment A, cellule 3 026 ext. |
Crédits | © Région Provence-Alpes-Côte d’Azur - Inventaire général - Frédéric Pauvarel, 2019 |
URL | http://journals.openedition.org/criminocorpus/docannexe/image/14388/img-11.jpg |
Fichier | image/jpeg, 191k |
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Titre | Fig. 15, Calendrier mural, bâtiment A, cellule 3 020 |
Crédits | © Région Provence-Alpes-Côte d’Azur - Inventaire général - Frédéric Pauvarel, 2019 |
URL | http://journals.openedition.org/criminocorpus/docannexe/image/14388/img-12.jpg |
Fichier | image/jpeg, 225k |
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Titre | Fig. 16, Calendrier mural, bâtiment A, cellule 2 055 |
Crédits | © Région Provence-Alpes-Côte d’Azur - Inventaire général - Frédéric Pauvarel, 2019 |
URL | http://journals.openedition.org/criminocorpus/docannexe/image/14388/img-13.jpg |
Fichier | image/jpeg, 157k |
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Titre | Fig. 17, Calendrier mural en toile cirée, bâtiment B, cellule 1 105 |
Crédits | © Région Provence-Alpes-Côte d’Azur - Inventaire général - Frédéric Pauvarel, 2019 |
URL | http://journals.openedition.org/criminocorpus/docannexe/image/14388/img-14.jpg |
Fichier | image/jpeg, 109k |
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Titre | Fig. 18, Couteau, 2021.27.6 & Fig. 19, Poinçon, 2021.27.7 |
Crédits | © Marianne Kuhn/Mucem |
URL | http://journals.openedition.org/criminocorpus/docannexe/image/14388/img-15.jpg |
Fichier | image/jpeg, 63k |
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Titre | Fig. 20, Chaussure, 2021.27.29 & Fig. 21, Boîte de conserve, 2021.27.28.1-7 |
Crédits | © Marianne Kuhn/Mucem |
URL | http://journals.openedition.org/criminocorpus/docannexe/image/14388/img-16.jpg |
Fichier | image/jpeg, 88k |
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Titre | Fig. 22, Les Baumettes, bâtiment D, cellule 2 S 33 & Fig. 23, Les Baumettes, bâtiment A, cellule 4 007 |
Crédits | © Région Provence-Alpes-Côte d’Azur - Inventaire général - Frédéric Pauvarel, 2019 |
URL | http://journals.openedition.org/criminocorpus/docannexe/image/14388/img-17.jpg |
Fichier | image/jpeg, 181k |
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Titre | Fig. 24, Les Baumettes, bâtiment C |
Crédits | © Région Provence-Alpes-Côte d’Azur - Inventaire général - Frédéric Pauvarel, 2019 |
URL | http://journals.openedition.org/criminocorpus/docannexe/image/14388/img-18.jpg |
Fichier | image/jpeg, 151k |
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Titre | Fig. 25, Les Baumettes, bâtiment A, coursive |
Crédits | © Région Provence-Alpes-Côte d’Azur - Inventaire général - Frédéric Pauvarel, 2019 |
URL | http://journals.openedition.org/criminocorpus/docannexe/image/14388/img-19.jpg |
Fichier | image/jpeg, 280k |
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Titre | Fig. 26, Les Baumettes, mur d’enceinte, vue extérieure |
Crédits | © Région Provence-Alpes-Côte d’Azur - Inventaire général – Françoise Baussan, 2019 |
URL | http://journals.openedition.org/criminocorpus/docannexe/image/14388/img-20.jpg |
Fichier | image/jpeg, 272k |
Pour citer cet article
Référence électronique
Jean-Fabien Philippy, « Les Baumettes au musée : Graffitis et créations carcérales », Criminocorpus [En ligne], Sombre patrimoine, patrimoine sombre. Mémoires et histoires de justice, mis en ligne le 31 janvier 2024, consulté le 07 février 2025. URL : http://journals.openedition.org/criminocorpus/14388 ; DOI : https://doi.org/10.4000/criminocorpus.14388
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