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Communications

Trouver le chemin de la grâce : les villes rebelles et leurs stratégies pour rétablir le dialogue avec le souverain (royaume de France, seconde moitié du XVe siècle)

Adrien Carbonnet

Résumés

La répression des soulèvements urbains dans la seconde moitié du xve siècle a donné lieu à des négociations entre le roi et la ville. La recherche de l’accord est toutefois rarement mentionnée dans la documentation. En effet, dans les sources, domine un discours selon lequel la révolte est une offense faite au roi, et donc à Dieu. Dès lors, aucun accord n’est possible entre le souverain et ceux qui sont présentés comme des rebelles. La ville, pénitente, doit alors chercher alors la grâce du souverain. Toutefois, l’analyse des sources de la pratique laisse apparaître une part de négociations dans cette recherche du pardon royal. Les villes élaborent de complexes stratégies pour obtenir une sortie de crise, ce qui conduit à nuancer un récit officiel du pardon qui masque les marchandages, les intermédiaires et les pots-de-vin.

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Texte intégral

  • 1 Sur les grands procès : Philippe Contamine, « Inobédience, rébellion, trahison, lèse‑majesté : obse (...)

1Le royaume de France de la seconde moitié du xve siècle connaît une suite de grands procès et de châtiments urbains spectaculaires qui permettent au roi d’affirmer et de renforcer son autorité par la puissance de sa majesté en actes. Que ce soit dans le cas d’un procès politique à l’encontre d’un grand prince féodal ou dans le cas de la répression d’une révolte urbaine, le pouvoir royal accompagne la procédure d’un « discours dramatisé », pour reprendre l’expression d’Olivier Mattéoni, qui met en scène la majesté souveraine et la nécessaire obéissance qui lui est dévolue, ce qui exclut à première vue toute résolution du conflit par le dialogue et la négociation d’un accord1.

  • 2 Jacques Chiffoleau, « Le crime de majesté, la politique et l’extraordinaire : note sur les collecti (...)

2La recherche récente a bien montré qu’à partir du xive siècle la justice royale se fait plus répressive, plus « hégémonique ». La peine est nécessaire pour rétablir l’ordre public et ce d’autant plus quand le crime porte directement atteinte à l’autorité royale. À la fin du Moyen Âge, toutes les formes de contestation directe, toutes les résistances ouvertes au pouvoir souverain, se voient de plus en plus qualifiées de « rébellions et désobéissances » et sont ainsi associées au terrible crime de lèse‑majesté. Le roi, dont l’honneur est sali par la rébellion, est alors contraint de rétablir l’ordre, soit par un prompt châtiment, soit par un pardon qui découle de sa grâce2.

3Dans la documentation produite au moment de la répression, ou dans des lettres de pardon, le discours du roi exclut alors toute forme d’accord avec celui qui a offensé sa majesté ; la puissance souveraine ne peut s’abaisser à traiter avec le rebelle, c’est‑à‑dire avec celui qui a agi sous l’inspiration du Malin et a voulu remettre en cause un ordre social et politique voulu par Dieu.

  • 3 Bernard Chevalier, Les Bonnes Villes de France du xive au xvie siècle, Paris, Aubier‑Montaigne, 198 (...)

4Les sources, dans leur diversité, sont toutes dépositaires de ce même discours qui est celui du pouvoir qui réprime et pardonne. Le lexique de la trahison, de la rébellion, de la désobéissance, voire de la lèse‑majesté, y côtoie celui de la grâce, de la miséricorde et du pardon accordé souverainement. Il est particulièrement développé dans le cas des révoltes urbaines, qui, contrairement à ce qu’écrivait Bernard Chevalier, sont régulières dans le royaume de France, notamment sous le règne de Louis xi où nous avons pu recenser une cinquantaine de soulèvements urbains3. Il s’agit d’un discours qui se déploie évidemment dans les sources officielles et publiques émanant du pouvoir royal, mais aussi dans la documentation élaborée par les communautés urbaines elles-mêmes qui veulent ainsi conjurer le spectre de la rébellion en adoptant la rhétorique souveraine de condamnation sans faille de la désobéissance.

5Si ce discours royal évacue toute forme d’accord entre le roi et celui qui est désigné comme un rebelle, une analyse approfondie des documents de la pratique nous montre pourtant qu’une part de négociation existe entre les parties. Cette dernière est difficile à percevoir car elle fait intervenir un grand nombre d’acteurs, qui sont autant d’intermédiaires entre le roi et la communauté urbaine rebelle. Par ailleurs, une partie importante de cette négociation passe par l’oral. Entre le pouvoir royal et la communauté urbaine qui s’est révoltée, la résolution du conflit ne s’impose pas uniquement par le châtiment et le pardon souverains.

6L’étude des modalités de la résolution du conflit entre le roi et une ville révoltée permet de mettre en avant la particularité du lien politique qui les unit à la fin de l’époque médiévale. Un lien d’obéissance, vertical, entre les sujets et leur souverain, mais qui, sous bien des aspects, possède aussi des composantes contractuelles, en ce qu’il se fonde sur l’accord et la négociation nécessaires à la sortie de la crise. Afin de mettre en lumière les mécanismes subtils de la résolution d’un conflit entre le roi et une communauté urbaine qui a pris les armes, nous analyserons dans un premier temps le cas de la ville de Beaune, qui se révolte en 1478. Puis, dans un deuxième temps, nous verrons comment les villes rebelles, malgré une rhétorique de soumission totale à la majesté souveraine, mettent en œuvre des stratégies afin de parvenir à un accord avec le pouvoir royal.

En quête de la grâce : l’exemple de Beaune (1478)

La révolte de Beaune : entre résistance à l’occupation française et lutte de factions

7Beaune se révolte en avril 1478. Louis xi est alors maître de la ville depuis le mois de janvier 1477. À la nouvelle de la mort du duc de Bourgogne, Charles de Valois, le roi avait entrepris de conquérir les territoires de son ancien ennemi. Les villes du duché de Bourgogne, désemparées à la nouvelle du trépas de leur duc, s’étaient alors soumises au roi de France, quand celles de Franche‑Comté étaient entrées en résistance.

  • 4 Amable Sablon du Corail, « L’État princier à l’épreuve. Financer et conduire la guerre pendant la c (...)

8Le soulèvement de Beaune a des causes multiples qu’il faut ici rapidement évoquer pour comprendre les enjeux de la résolution du conflit. La révolte se fait officiellement au nom des droits de Marie de Bourgogne, fille unique du défunt duc, dont l’héritage a été spolié par le roi de France. Le mari de cette dernière, Maximilien d’Autriche, est parvenu à organiser la résistance bourguignonne et à mettre un frein à la conquête française dès la seconde moitié de l’année 14774. En 1478, l’armée française piétine : au nord, la dynamique de conquête est stoppée, à l’est, la Franche‑Comté résiste toujours à Louis xi, notamment la ville de Dole qui a réussi à mettre en échec l’armée royale. C’est dans ce contexte que Beaune se soulève.

  • 5 France, Dijon, Archives départementales de Côte d’Or, G 2483, art. 105-2, fol. 58 ; Claude Rossigno (...)
  • 6 Philippe de Commynes, Mémoires, éd. Joël Blanchard, Paris, Librairie Générale de France, coll. Lett (...)

9En janvier 1478, les élites dirigeantes et les chanoines choisissent de nommer Philippe de Chaumergis capitaine de la ville. Celui‑ci est un défenseur de la cause de Marie de Bourgogne5. En avril, il fait entrer des troupes bourguignonnes dans Beaune qui est ainsi soustraite à la mainmise française. Dans le sillon de la révolte, de nombreuses petites villes du duché se soulèvent, dans les environs de Beaune et dans l’Auxois6.

  • 7 Élodie Lecuppre‑Desjardin, Le Royaume inachevé des ducs de Bourgogne (xive-xve siècles), Paris, Bel (...)
  • 8 Ordonnances des rois de France de la troisième race, Paris, 1811‑1835 (désormais ORF), vol. 18, p.  (...)

10La « Foy de Bourgogne » n’est pas la seule clef permettant de comprendre la révolte de Beaune, elle n’en est d’ailleurs sûrement pas la cause essentielle7. À l’échelle de la province, il faut prendre en compte la concurrence entre les communautés urbaines pour obtenir institutions et privilèges. Charles le Téméraire avait créé en 1474 un Parlement qui siégeait à Beaune. Avec la conquête française, la ville doit partager l’insigne honneur d’accueillir une telle institution avec Dijon et Dole. Louis xi ordonnant une rotation de la cour souveraine entre ces trois municipalités, Beaune ne conserve à demeure que le greffier et le receveur des amendes de ladite cour8. Un retour dans le giron bourguignon permettrait ainsi à la ville de retrouver la pleine jouissance de ce privilège.

  • 9 Sur les rapports entre les élites dirigeantes des villes de Bourgogne et les ducs Valois, voir Céci (...)
  • 10 France, Beaune, Archives municipales, C 32, pièce 6, fol. 11.

11À l’échelle de la ville, les luttes de factions se disputant le pouvoir municipal permettent également de comprendre la révolte. En 1477, la conquête française a servi les intérêts d’un certain nombre de familles qui sont passées au service du roi, telle la famille Arbaleste dont nous reparlerons. Le soulèvement de 1478 peut se comprendre ainsi comme une prise de pouvoir de la faction « bourguignonne » sur la faction « française », la première espérant tirer des bénéfices d’un retour de la ville sous la domination bourguignonne9. L’existence de ces factions se disputant le pouvoir au sein de la communauté urbaine est importante et doit être soulignée, car les partisans du roi de France jouent un rôle essentiel dans le processus de retour à l’ordre et de résolution du conflit avec Louis xi. Enfin, toujours à l’échelle de la ville, la révolte a pu être causée par les conditions de l’occupation française. La désignation d’un des favoris de Louis xi comme maire de la ville, Raoulet de Castello, a ainsi suscité une vive résistance de la part des élites dirigeantes10.

Le pardon royal : lettre d’abolition et récit officiel de la désobéissance

  • 11 France, Beaune, Archives municipales, C 14, pièce 37, fol. 6 et 11.
  • 12 France, Beaune, Archives municipales, C 1, pièce 26 et France, Paris, Archives nationales de France (...)

12Rapidement, le pouvoir royal français qualifie la révolte de Beaune de « rébellion et désobéissance ». Le feu de l’insoumission est rapidement et violemment éteint : l’armée royale réduit au silence les petites villes du duché qui s’étaient soulevées ; Beaune, quant à elle, est assiégée et prise le 2 juillet 1478. La municipalité est punie et doit payer une forte amende au roi de France, 20 000 francs, sans compter les 15 000 francs qui doivent être versés aux hommes d’armes pour qu’ils ne mettent pas la ville à sac11. C’est au mois d’octobre que la municipalité se voit octroyer une lettre d’abolition12.

13L’analyse de ce document est essentielle pour comprendre la résolution du conflit. La lettre‑patente comporte plusieurs points : les Beaunois sont venus demander au roi la confirmation et le renouvellement des privilèges dont ils ont été privés en raison de la révolte ; le roi leur pardonne leur « rebellion et desobeissance » et réaffirme les anciens privilèges de la ville ; Louis xi décrète ensuite que les crimes de Beaune sont abolis et voués à l’oubli, en précisant toutefois que ceux qui tiennent encore le parti de Marie de Bourgogne sont exclus de ladite abolition.

  • 13 Claude Gauvard, « Le roi de France et le gouvernement par la grâce à la fin du Moyen Âge », in Hélè (...)
  • 14 En somme, le roi force ainsi les Beaunois à reconnaître leur crime tout en faisant preuve de larges (...)

14Officiellement, selon ce document, le pardon royal n’est pas à proprement parler le fruit d’un accord dans le sens où le texte ne laisse transparaître aucune négociation pour sortir de la situation de crise. La résolution du conflit est le fait du prince qui agit de manière hégémonique, le pardon étant la marque de sa domination souveraine. Les habitants supplient le roi, s’abaissent et s’humilient devant sa majesté : la lettre d’abolition est obtenue suite à une « umble supplicacion », les Beaunois, « supplians », « requerant humblement » qu’il « plaise » au roi de leur impartir sa grâce. Cette attitude contrite est celle du pénitent venu demander le pardon souverain, elle est commune aux lettres de pardon13. Par ailleurs, en accordant avec bienveillance sa grâce, Louis xi, comme représentant de Dieu dans le royaume de France en vertu de son sacre, pousse les Beaunois à reconnaître sa souveraineté sur le duché de Bourgogne, ce que les mutins ont précisément cherché à nier par leur révolte visant à remettre la ville à Marie de Bourgogne14.

  • 15 Adrien Carbonnet, « La subversion à l’origine de la révolte : Louis xi face aux soulèvements urbain (...)

15Un récit officiel de la révolte, qui ne nie pas la « rebellion et desobeissance » de la ville tout en reconnaissant des circonstances atténuantes, est alors élaboré : il s’agit du récit de la subversion de Beaune15. En effet, selon Louis xi, la communauté des habitants serait entrée en rébellion « par la faulte et desloyaulté et trahison d’aulcuns particuliers d’icelle ville et leurs adherens, ladicte ville a esté subvertie et mise hors de nostre obeissance par aucun temps ». Cette version des faits est celle présentée par les Beaunois eux‑mêmes, pour qui « icelle rebellion n’est advenue seullement que par la faulte et coulpe et trahison d’aucuns particuliers d’icelle ville, dont les aucuns sont depuis morts et les autres absentez ». Il est intéressant de noter ici que le récit des Beaunois est celui qui est adopté par le pouvoir royal : la rébellion de la ville est reconnue, donc une forme de responsabilité de la communauté, mais pas une culpabilité collective puisque les coupables dans cette détestable affaire sont des individus qui sont soit morts, soit bannis. Ce récit, qui sauve les apparences pour les Beaunois tout en ne niant pas le bien-fondé de la punition royale, est probablement le fait d’une discussion avec le pouvoir royal, d’un accord : la ville adopte le lexique de la rébellion, qui est celui du roi, tout en apportant des gages de sa bonne foi, notamment en garantissant à Louis xi que les rebelles ne sont plus présents derrière les murs : dès lors, la voie du pardon est ouverte.

  • 16 Voir la correspondance de Dijon au roi : Joseph Garnier, Correspondance de la mairie de Dijon extra (...)
  • 17 France, Beaune, Archives municipales, C 14, pièce 38, fol. 44 et 47, C 61, pièce 17, fol. 10.
  • 18 France, Beaune, Archives municipales, C 14, pièce 37, fol. 1. Sur la composition comme accord finan (...)

16Les octrois qui accompagnent le pardon confirment qu’un accord a bel et bien été passé entre le roi et la ville rebelle. La lettre n’est pas un simple rétablissement de la situation antérieure. Tous les privilèges ne sont pas rétablis, le Parlement, notamment, n’est pas réinstallé à Beaune, et ce, notamment, en raison de l’opposition de Dijon16. Les octrois accordés par le roi servent également les intérêts de ce dernier, ce qu’ont pu mettre en avant les Beaunois dans les négociations : en effet, l’argent généré par ces taxes doit permettre de payer l’amende importante imposée par le roi et que la ville a beaucoup de mal à verser17. En d’autres termes, le pardon royal n’efface pas les mesures punitives, même si elles sont allégées : là est le cœur de l’accord passé entre le roi et Beaune. Par ailleurs, précisons que l’amende payée par Beaune résulte elle‑même d’une négociation puisque la peine pécuniaire est qualifiée de « composition » dans les sources, c’est‑à‑dire qu’elle est le fruit d’un accord entre les parties établi en échange de la reddition de la ville en juillet 147818.

La stratégie beaunoise pour retrouver la grâce royale

17Comment la ville est‑elle parvenue à un accord avec le roi ? Les archives municipales, les documents comptables notamment, sont riches en renseignements concernant les démarches entreprises par les Beaunois. La municipalité agit alors sur plusieurs fronts : en Bourgogne d’une part et à la cour du roi d’autre part.

  • 19 France, Beaune, Archives municipales, C 14, pièce 38, fol. 42 et pièce 37, fol. 9.
  • 20 Alain Derville, « Pots-de-vin, cadeaux, racket, patronage : essai sur les mécanismes de décision da (...)

18En Bourgogne, les autorités beaunoises versent d’importantes sommes pour obtenir la faveur des officiers royaux chargés d’administrer la nouvelle province et de percevoir l’énorme amende que doit verser la ville. Ainsi, 2 000 francs sont offerts à Philippe de Hochberg, maréchal de Bourgogne, 466 francs aux receveurs chargés de percevoir l’amende et, bien sûr, du vin est offert aux commissaires royaux chargés de vérifier le versement de la peine pécuniaire19. Selon une logique de don et de contre‑don, la ville tente d’obtenir services et recommandations de la part de ceux qui représentent localement le pouvoir royal20.

  • 21 France, Beaune, Archives municipales, C 14, pièce 37, fol. 11 et pièce 38, fol. 43.
  • 22 France, Dijon, Archives départementales de Côte d’Or, G 2483, article 105‑2, fol. 58.
  • 23 France, Beaune, Archives municipales, C 14, pièce 38, fol. 43.

19En direction de la cour, la ville dépêche une ambassade composée de trois membres éminents chargés de représenter l’ensemble de la communauté des habitants. Sont envoyés à Tours le maire de la ville, Pierre Clemence, un échevin, Jehan Lambert, et un chanoine, le doyen Jehan Bourgeois21. Le premier est un acteur de premier plan de la révolte, il est envoyé sur place pour conférer à l’ambassade toute sa crédibilité et sa légitimité22. Comme maire et comme artisan du soulèvement, il vient, dans une démarche de pénitence, supplier le souverain dans le but de susciter sa pitié. La démarche est courageuse et risquée, la possibilité de subir la colère royale est bien réelle. Toutefois, la présence du maire rebelle est tempérée par celle du doyen Jehan Bourgeois, qui, lui, est un fidèle de Louis xi dont il est conseiller et maître des requêtes23. La composition de cette ambassade est donc soigneusement équilibrée : entre contrition et prise de responsabilité, tout est fait pour susciter la miséricorde royale. Par ailleurs, l’ambassade est représentative des factions que divisent le corps municipal.

  • 24 France, Beaune, Archives municipales, C 61, pièce 16, fol. 18.
  • 25 Joseph Delissey, « Les maires de Beaune jusqu’en 1789 », Mémoires de la Société d’archéologie de Be (...)
  • 26 France, Angers, Bibliothèque Toussaint, ms. 759 (681), fol. 89 ; France, Beaune, Archives municipal (...)

20Cette délégation ne semble toutefois pas rencontrer directement Louis xi, en tout cas pas officiellement. En effet, les ambassadeurs sont envoyés par « devers Pierre Arbaleste » dans le but de récupérer des lettres d’octroi d’une taxe sur le marc de vin et le sel, taxe qui sera celle mentionnée dans la lettre d’abolition24. Ce Pierre Arbaleste est un homme de l’entre-deux. Homme de la ville, il en a été le maire et c’est lui qui l’a livrée au roi de France en 147725. Il est donc aussi homme du roi. En 1478, il est à Tours auprès de Louis xi à qui il prête un serment de fidélité sur la croix de Saint‑Laud, il devient ensuite conseiller et maître d’hôtel du roi, puis maître à la Chambre des Comptes à Paris, où il réside, et touche une pension royale26. Entre service du roi et service de la ville, Pierre Arbaleste, par ses fonctions, a pu approcher Louis xi et défendre la cause de ses concitoyens, qui, naturellement, s’en sont remis à lui pour obtenir le pardon royal.

  • 27 France, Beaune, Archives municipales, C 30, pièces 62, 63, 64, 65, 66 et 67.
  • 28 France, Beaune, Archives municipales, C 14, pièce 38, fol. 48.

21Pierre Arbaleste n’est pas le seul appui trouvé par la ville à la cour et la frontière entre les actions menées en Bourgogne et celles menées en Touraine est poreuse. Ainsi, en août 1478, soit trois mois avant la lettre d’abolition, la ville obtient d’un certain François Mauroy, marchand et bourgeois de Troyes, le versement annuel de cent livres tournois en échange des revenus d’une taxe sur le sel dont la ville avait la jouissance avant sa révolte et que le roi ou le gouverneur de Bourgogne pourraient rétablir. Cette imposition est rétablie fin août par Charles d’Amboise, gouverneur de Bourgogne, décision entérinée par le roi en novembre27. Comment la ville a‑t‑elle obtenu le rétablissement aussi rapide de ce privilège ? Par l’intermédiaire d’un certain Jehan Mauroy, de la famille de François Mauroy, dont il se porte d’ailleurs caution dans le contrat établi avec la ville de Beaune. Ce Jehan Mauroy est conseiller et avocat du roi à Troyes. Un registre de comptes de la ville nous apprend que Jehan Mauroy réside aussi à Tours, auprès du roi et qu’il est reçu à Beaune trois jours au cours de l’année 147828. Nous faisons l’hypothèse que le contrat passé avec François Mauroy permit à la ville de se rapprocher de ce Jehan Mauroy, qui a ses entrées à Tours au moment où le roi y séjourne. Il put alors défendre la cause des Beaunois auprès de Louis xi. Pierre Arbaleste n’est pas le seul soutien trouvé par la ville qui accroit ainsi ses chances d’apaiser la colère du roi en multipliant ses appuis à la cour. On peut aussi supposer que le rapprochement avec Jehan Mauroy a pu faciliter la tâche de Pierre Arbaleste pour obtenir l’abolition.

  • 29 France, Beaune, Archives municipales, C 14, pièce 38, fol. 43-44.

22Pour résumer, la ville de Beaune, pour trouver la grâce du roi, a élaboré une stratégie complexe alliant cadeaux et pots‑de‑vin, en Bourgogne et à la cour, et ambassades. Ces dernières, outre leurs missions officielles, sont également chargées de trouver des soutiens, des intermédiaires de l’ombre, qui permettront d’accéder à la personne royale, comme Pierre Arbaleste ou Jehan Mauroy, ou qui permettront d’accélérer les procédures, comme le prouve le vin offert aux clercs royaux chargés de recopier et sceller les lettres d’abolition29.

23Le rétablissement des relations avec le roi prend des formes subtiles, il passe par des intermédiaires divers, du gouverneur de Bourgogne au secrétaire royal, en passant par le notaire curial ou l’homme d’affaires. Alors qu’avant la révolte Beaune écrivait au roi et recevait des lettres de ce dernier, après le soulèvement, elle évite d’entrer directement en contact avec le souverain. Les intermédiaires sont dès lors nécessaires, ce sont eux qui négocient l’accord entre le roi et sa ville. Par leur intervention, la peine est adoucie, le pardon obtenu, à cette occasion un récit de la rébellion est construit : celui d’une communauté politique subvertie et abusée par quelques individus, seuls coupables du crime de rébellion.

Entre art de la négociation et rhétorique de la soumission : les villes rebelles face au roi

De la nécessité des intermédiaires pour accéder au roi en colère

  • 30 Auguste Chassaing, Le Livre de Podio ou chronique d’Étienne Médicis, bourgeois du Puy, Le Puy‑en‑Ve (...)

24Ce processus de résolution du conflit s’observe pour d’autres villes punies pour le crime de rébellion et le cas de Beaune peut être mis en perspective : ainsi, à chaque fois, le roi, en colère, refuse tout contact direct avec la communauté des habitants et donc toute forme d’accord, au moins dans un premier temps. Les habitants du Puy en font les frais, quand, en 1477, le roi menace de jeter dans la rivière l’un des ambassadeurs envoyés par la ville qui cherche alors à se faire pardonner une révolte. Le malheureux est sauvé de l’ire royale au dernier moment par un des écuyers de Louis xi, qui se charge de tempérer la colère souveraine30.

  • 31 France, Dole, Archives municipales, n° 78/1, fol. 5, 12-14.
  • 32 Michel Bochaca et Pierre Prétou, « Entre châtiment et grâce royale : l’entrée de Bordeaux dans la m (...)
  • 33 Adrien Carbonnet, « La ville rêvée de Louis xi : l’éphémère existence de Franchise (1479‑1484) », A (...)

25De façon moins spectaculaire, les ambassades envoyées par la ville de Dole n’accèdent que difficilement au roi, l’une d’elles cherchant même à intercepter la cour royale qui se dirige vers Saint‑Claude, où Louis xi veut rendre ses dévotions. La ville, détruite en 1479, ne parvient à une levée partielle de la punition qu’à partir de 1482. Deux ambassades doloises envoyées en 1482 et en 1483, dans le but d’avoir l’autorisation de reconstruire la ville et d’obtenir le retour du Parlement et de l’Université, réussissent alors seulement à avoir l’autorisation de reconstruire certains bâtiments, comme les moulins sur le Doubs. La communauté urbaine doit en fait attendre la mort de Louis xi pour une véritable levée de la punition31. C’est le cas également de Bordeaux, punie par Charles vii, qui ne bénéficie du pardon royal qu’au début du règne de son fils32 ; c’est également le cas d’Arras, dépeuplée en 1479 et repeuplée par des colons jusqu’à ce que Charles viii mette fin à l’expérience et lève totalement le châtiment de la ville33. À l’inverse, Beaune, probablement en raison de ses appuis à la cour, n’attend que trois mois pour avoir une lettre d’abolition.

  • 34 Sur la colère royale : Gerd Althoff, « Ira Regis : Prolegomena to a History of Royal Anger », in Ba (...)

26La colère royale est une posture attendue qui est à la mesure de l’outrage qu’est la rébellion pour la majesté du roi. Cette colère est maîtrisée et légitime, elle peut être mise en scène par le souverain – même s’il ne s’agit pas, bien sûr, de nier ici son caractère spontané34. L’ampleur de la colère royale peut expliquer la difficulté pour certaines villes à susciter la pitié du prince. Plus la révolte est importante, plus grande sera l’ire du roi et plus lourd sera le châtiment auquel s’expose la communauté urbaine rebelle.

  • 35 Jean Rogier, Mémoires de Jean Rogier, prévôt de l’échevinage de Reims, Paris, 1876, p. 5-6.
  • 36 France, Paris, Bibliothèque nationale de France, ms. fr. 2911, fol. 25.
  • 37 Sur le rôle d’arbitre de l’évêque, Laurent Jégou, L’Évêque, juge de paix. L’autorité épiscopale et (...)

27Pour renouer le lien brisé avec le souverain, les communautés urbaines doivent dès lors ruser, établir de complexes stratégies en trouvant notamment des intermédiaires pour appuyer leurs demandes. Ces intermédiaires peuvent être des concitoyens bien placés à la cour, comme Pierre Arbaleste, ou, plus indirectement, des hommes ayant des contacts, tels François et Jehan Mauroy. Certaines villes préfèrent s’en remettre à des intercesseurs insignes pour accéder à l’oreille du roi et le supplier d’accorder son pardon. Ainsi, Reims, en 1461, s’en remet au duc de Bourgogne Philippe le Bon pour tempérer la colère du nouveau roi35 ; Arras, en 1483, passe par son évêque, Pierre de Ranchicourt36. Dans le cas de Reims, il s’agit d’inclure dans le processus de résolution du conflit un prince capable de traiter d’égal à égal avec le souverain – d’autant qu’en 1461, à l’aube du règne de Louis xi, le duc de Bourgogne apparaît comme celui qui a protégé le Dauphin Louis durant ses années d’exil. Dans le cas d’Arras, on fait intervenir un homme qui, par sa fonction épiscopale, exerce des fonctions d’apaiseur et d’arbitre, d’autant que Pierre de Ranchicourt apparaît comme un parfait médiateur car il a des intérêts dans une ville dont il tire ses revenus et bénéfices et qu’il est un fidèle de Louis xi 37.

Retrouver la grâce du roi, effacer la négociation

28C’est au cours de cette prise de contact indirecte, par un tiers, que la négociation de l’accord a lieu. Philippe le Bon écrit ainsi à Louis xi le 13 novembre 1461 que les Rémois lui ont envoyé des députés :

  • 38 Jean Rogier, Mémoires… op. cit., p. 5.

« et m’ont fait prier en grande humilité que je voulsisse être leur moyen entre vous, mon très redoubté et souverain seigneur, afin qu’ils peussent recouvrer vostre grâce et que vostre très noble plaisir fust de lui pardonner l’indignation en quoi ils peuvent estre encourus envers vostre Excellence à cause du fol et damnable gouvernement que aucuns pauvres malavisés de ladicte ville et cité ont eu naguère et dont partis jusqu’au nombre de 200 ont dejà reçus punition38 ».

  • 39 Ibid., p. 6.

29Le propos du duc est clair : il insiste sur l’humilité des Rémois qui veulent faire pénitence. Le duc en profite, comme dans le cas de Beaune, pour livrer un récit de la rébellion qui rejette la faute sur quelques individus – de pauvres gens mal conseillés – qui ont déjà été punis. Plus loin dans sa lettre, le duc de Bourgogne insiste sur la « clémence, pitié et miséricorde » qui sont des « vertus qui abondent et reluisent en [la] très noble personne » de Louis xi39. Après avoir livré un récit dédouanant les habitants de leur culpabilité et avoir rappelé que les coupables ont été châtiés, le duc tente de tempérer la colère du roi : il offre une sortie à la crise et joue à la perfection son rôle d’intercesseur.

  • 40 France, Paris, Archives nationales, JJ 198, n° 82, fol. 80, éd. dans ORF, vol. 15, p. 297.
  • 41 Sur la construction d’un récit du pardon, voir, pour les lettres de rémission, Quentin Verreycken, (...)

30Cette lettre du duc de Bourgogne ne fut pas sans effet. En décembre, le roi écrit une lettre aux Rémois pour leur offrir un pardon collectif en reprenant l’argumentation donnée par Philippe le Bon40. Notons toutefois que le roi ne mentionne à aucun moment l’intercession du duc, les Rémois ont tout simplement « très‑humblement fait supplier et requérir » le souverain d’accorder sa grâce. Là aussi un récit de la fin du conflit est construit, où les intercesseurs sont exclus, ce qui explique pourquoi il est difficile de les approcher dans les sources, y compris quand il s’agit de grands seigneurs comme le duc de Bourgogne, dont la lettre est rapportée par un chroniqueur rémois du xvie siècle ; de même, à Beaune, il a fallu dépouiller avec minutie les actes de la pratique pour repérer les hommes de l’ombre qui sont les acteurs de l’accord. Pourquoi cet effacement ? La disparition de l’intercesseur fait partie de la fiction du pardon : le lien entre le roi et la ville pardonnée doit être direct, tout comme le lien d’obéissance qui unit le souverain et ses sujets41.

  • 42 France, Dole, Archives municipales, n°1499 ; Henri Beaune et Jean d’Arbaumont, Les Universités de F (...)

31Ce récit du pardon, dans lequel le roi lève tout simplement le châtiment, ôte les pierres d’achoppement qui émaillent le chemin de la grâce. Le fait que l’accord entre le roi et sa ville soit le fait d’une négociation est effacé, la réalité devient lisse, sans accroc. Pourtant, ce chemin de la grâce peut comporter un certain nombre de difficultés. La quête du pardon royal peut ainsi être entravée par la concurrence d’autres villes, comme celle de Dijon pour Beaune, ou encore de Besançon et de Salins pour Dole, ces dernières, qui avaient pu recueillir l’Université et le Parlement de Franche‑Comté ne voyaient pas d’un bon œil le retour en grâce de Dole, qui, de fait, est tardif42.

32De même, dans le processus du retour en grâce, il faut envisager la portée que le roi veut donner au châtiment de la ville rebelle ; cette donnée est essentielle pour comprendre pourquoi l’accord est parfois difficile à trouver. Ainsi, les punitions d’Arras et de Dole, en 1479, occupent une place dans la stratégie royale d’accaparement des territoires bourguignons : à un moment où la conquête marque le pas et où la révolte gronde dans les villes conquises, le châtiment extrême et coordonné de ces deux villes – l’une dépeuplée, l’autre détruite – est un moyen de maintenir le calme par la terreur à l’intérieur des territoires conquis, au nord et à l’est. En d’autres termes, pour comprendre les négociations qui visent à retrouver la grâce, il faut prendre en compte la politique répressive du roi, ce qui explique que la capitale de l’Artois et celle de la Franche‑Comté doivent attendre la mort de Louis xi pour obtenir le pardon.

  • 43 Adrien Carbonnet, Louis xi et les villes… op. cit., p. 447-451.
  • 44 Pour Bourges : France, Paris, Bibliothèque nationale de France, ms. fr. 2906, fol. 6, éd. par J. Va (...)

33Au final, le pardon finit toujours par être accordé, même si les délais varient de quelques mois à plusieurs années43. L’ancienne ville rebelle s’engage alors à la fidélité en adoptant une rhétorique de la soumission que l’on a déjà pu observer dans les cas de Beaune et de Reims. Le discours rassérénant de la paix rétablie et de l’obéissance est alors adopté par les villes et le roi. Ce lien politique n’est toutefois pas à sens unique, le roi, de son côté s’engage à une meilleure écoute des doléances de ses sujets. Ainsi, dans plusieurs villes punies, les institutions municipales sont refondées, notamment pour conférer une meilleure représentation au corps municipal. C’est le cas à Sens et à Bourges, deux villes qui se sont soulevées en 1472 et 1474 et qui se voient octroyer un conseil municipal et un maire : ces villes sont dotées d’instances qui permettront au roi de communiquer avec elles, d’éviter ainsi une nouvelle révolte. À l’occasion de l’octroi de ses nouvelles institutions à Sens, le roi rappelle « la très‑grant, parfaite, vrayes et singulière loyaulté et obéissance » d’une ville dont la révolte survenue deux ans plus tôt est tue44. Le récit de la paix domine.

34Le chemin de la grâce est donc plus tortueux que ne le laisse penser le discours des sources qui livre le récit de la rébellion. Cette dernière serait l’œuvre de quelques individus ayant mené une communauté urbaine à sa perte, dont les habitants, fourvoyés, seraient contraints et contrits de supplier le roi pour qu’il refroidisse sa colère légitime et accorde sa grâce souveraine. Ce récit de la transmutation de la colère du roi en miséricorde, est celui d’un lien politique entre le souverain et son sujet renoué par la magie de la grâce, mais qui omet les stratégies complexes qui sont élaborées par les communautés urbaines et qui efface les intermédiaires, parfois nombreux, qui œuvrent dans l’ombre de la majesté.

35Pourtant, ce chemin de la grâce est avant tout fait de négociations avec le pouvoir souverain : négociations pour obtenir le pardon et la réintégration dans le giron royal, négociations pour obtenir une levée des mesures punitives, voire pour éviter la punition. L’efficacité de ces négociations pour trouver un accord dépend de trois facteurs : la stratégie mise en œuvre par la ville pour approcher le roi ; la concurrence potentielle d’autres communautés urbaines qui ralentiraient la quête du pardon car elles profiteraient de la disgrâce de leur voisine pour obtenir de nouveaux bénéfices ; la politique répressive du roi, la recherche d’un rapide pardon pouvant être entravée par l’exemplarité que le roi veut donner à la peine et ce à une plus large échelle que celle de la ville punie.

36Ces données prises en compte, il est apparu que l’accord passe par des intercesseurs qui fréquentent la cour et peuvent s’approcher du roi ou qui sont de grands personnages capables de conseiller le souverain. Ces intermédiaires transmettent au roi un récit permettant au pardon de se déployer : une communauté responsable de la rébellion – ce qui ne rendrait pas la punition royale injuste – mais non coupable – ce qui donne le champ libre à la grâce. Toute cette phase d’élaboration du récit officiel de la désobéissance et du rétablissement du lien politique est cachée et passe probablement par l’oral et avec discrétion : la grâce du roi, surtout quand il s’agit d’une rébellion, surtout quand elle prend la forme absolue de l’abolition, ne peut apparaître comme le fruit d’un marchandage.

37Le récit ainsi construit a le mérite de sauver les apparences, de permettre à toutes les parties de s’entendre autour d’une rhétorique de la paix et de la concorde. Surtout, ce récit de la révolte et de son pardon permet à toutes les parties d’y trouver son compte : le roi voit son honneur vengé et peut à nouveau compter sur la fidélité d’une ville qu’il n’a pas eu à détruire pour sa rébellion ; la ville, quant à elle, est lavée de la macule de la désobéissance ; enfin, les intermédiaires qui ont négocié l’accord voient leur position auprès du roi renforcée et ont pu, au passage, s’enrichir. Ce récit, qui efface les contestations, ne doit toutefois pas masquer les résistances au roi qui peuvent subsister. D’une manière générale il doit conduire le chercheur à se méfier des discours trop iréniques et rassérénants qui font partie du « discours dramatisé » transformant la désobéissance en obéissance par le mystère d’une majesté souveraine qui s’exprime à travers la grâce.

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Bibliographie

Bibliographie sélective

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Notes

1 Sur les grands procès : Philippe Contamine, « Inobédience, rébellion, trahison, lèse‑majesté : observations sur les procès politiques à la fin du Moyen Âge », in Yves‑Marie Bercé (dir), Les Procès politiques (xive-xviie siècle), Rome, École française de Rome, 2007, p. 63‑82 ; Joël Blanchard, Commynes et les procès politiques de Louis xi. Du nouveau sur la lèse‑majesté, Paris, Picard, 2008, 183 p. ; Olivier Mattéoni, Un prince face à Louis xi. Jean ii de Bourbon, une politique en procès, Paris, Presses Universitaires de France, 2012, 407 p., p. 284 pour la citation. Concernant les châtiments urbains : Adrien Carbonnet, Louis xi et les villes en révoltes (1461‑1483), Paris, Classiques Garnier, 2023, 674 p.

2 Jacques Chiffoleau, « Le crime de majesté, la politique et l’extraordinaire : note sur les collections érudites de procès de lèse‑majesté du xviie siècle français et sur leurs exemples médiévaux », in Yves‑Marie Bercé (dir), Les Procès politiques (xivexviie siècle), Rome, École française de Rome, 2007, p. 577‑662. Sur la justice hégémonique, mais dans le contexte urbain italien, Mario Sbriccoli, « Justice négociée, justice hégémonique. L’émergence du pénal public dans les villes italiennes des xiiie et xive siècles », in Jacques Chiffoleau, Claude Gauvard, Andrea Zorzi (dir.), Pratiques sociales et politiques judiciaires dans les villes de l’Occident à la fin du Moyen Âge, Rome, École française de Rome, 2008, p. 389-421.

3 Bernard Chevalier, Les Bonnes Villes de France du xive au xvie siècle, Paris, Aubier‑Montaigne, 1982, p. 299‑302 ; Adrien Carbonnet, Louis xi et les villes…, op. cit.

4 Amable Sablon du Corail, « L’État princier à l’épreuve. Financer et conduire la guerre pendant la crise de l’État bourguignon (1477‑1493) », Revue historique, 2016, n° 679, p. 549-576.

5 France, Dijon, Archives départementales de Côte d’Or, G 2483, art. 105-2, fol. 58 ; Claude Rossignol, Histoire de Beaune depuis les temps les plus reculés jusqu’à nos jours, Beaune, 1854, p. 337-346.

6 Philippe de Commynes, Mémoires, éd. Joël Blanchard, Paris, Librairie Générale de France, coll. Lettres Gothiques, 2001, p. 439‑440 ; Jean de Roye, Journal de Jean de Roye connu sous le nom de chronique scandaleuse, éd. Bernard de Mandrot, Paris, Renouard, 1894‑1896, vol. 2, p. 74‑75 ; Loys Gollut, Les Mémoires historiques de la République séquanoise et des princes de la Franche‑Comté de Bourgogne, Arbois, 1846 [1592], c. 1367. Voir également Jean Robert de Chevanne, « Les débuts de la campagne de 1478 en Bourgogne », Mémoires de la Société d’Archéologie de Beaune, n° 44, 1933, p. 289-306.

7 Élodie Lecuppre‑Desjardin, Le Royaume inachevé des ducs de Bourgogne (xive-xve siècles), Paris, Belin, 2016, p. 339-343.

8 Ordonnances des rois de France de la troisième race, Paris, 1811‑1835 (désormais ORF), vol. 18, p. 557‑560 ; France, Dijon, Archives départementales de Côte d’Or, B 11415. Guy Renaud, Histoire de Beaune, Châtillon‑sur‑Chalaronne, La Taillanderie, 2005, p. 46-47.

9 Sur les rapports entre les élites dirigeantes des villes de Bourgogne et les ducs Valois, voir Cécile Becchia, Les Bourgeois et le Prince. Dijonnais et Lillois auprès du pouvoir bourguignon (1419‑1477), Paris, Classiques Garnier, 2019, 548 p.

10 France, Beaune, Archives municipales, C 32, pièce 6, fol. 11.

11 France, Beaune, Archives municipales, C 14, pièce 37, fol. 6 et 11.

12 France, Beaune, Archives municipales, C 1, pièce 26 et France, Paris, Archives nationales de France, JJ 205, n° 23, fol. 11-12, éd. dans ORF, vol. 18, p. 430-431.

13 Claude Gauvard, « Le roi de France et le gouvernement par la grâce à la fin du Moyen Âge », in Hélène Millet (dir.), Suppliques et Requêtes. Le gouvernement par la grâce en Occident (xiiexve siècle), Rome, École française de Rome, 2003, p. 371‑404, p. 397 notamment. Sur le rapport entre le pardon et la supplication, Geoffrey Koziol, Begging Pardon and Favor. Ritual and Political Order in Early Medieval France, Ithaca et Londres, Cornell University Press, 1992, p. 181-213.

14 En somme, le roi force ainsi les Beaunois à reconnaître leur crime tout en faisant preuve de largesse et de clémence. Cette utilisation souveraine du pardon est similaire à celle étudiée par Emmanuel Gerardin, « La rémission des “Rustauds”. Restaurer l’obéissance paysanne par le pardon à l’époque de la Guerre des Paysans dans le duché de Lorraine et la Basse-Alsace », Histoire et Sociétés Rurales, n°46, 2016, p. 69-96.

15 Adrien Carbonnet, « La subversion à l’origine de la révolte : Louis xi face aux soulèvements urbains (1461‑1483) », Publications du Centre Européen d’Études Bourguignonnes, n° 60, 2020, p. 21-33.

16 Voir la correspondance de Dijon au roi : Joseph Garnier, Correspondance de la mairie de Dijon extraite des archives de cette ville, Dijon, 1868‑1870, vol. 1, p. 227-229 et 232-233.

17 France, Beaune, Archives municipales, C 14, pièce 38, fol. 44 et 47, C 61, pièce 17, fol. 10.

18 France, Beaune, Archives municipales, C 14, pièce 37, fol. 1. Sur la composition comme accord financier entre deux parties et son rapport au droit de grâce, Bernard Dauven, « Composition et rémission : deux modalités complémentaires du droit de grâce ? La place de la composition dans le paysage judiciaire bourguignon », in Marie‑Amélie Bourguignon, Bernard Dauven, Xavier Rousseaux (dir.), Amender, sanctionner et punir. Histoire de la peine du Moyen Âge au xxe siècle, Louvain‑la‑Neuve, Presses Universitaires de Louvain, 2012, p. 49-59.

19 France, Beaune, Archives municipales, C 14, pièce 38, fol. 42 et pièce 37, fol. 9.

20 Alain Derville, « Pots-de-vin, cadeaux, racket, patronage : essai sur les mécanismes de décision dans l’État bourguignon », Revue du Nord, n° 56, 1974, p. 341-364 ; Marc Boone, « Dons et pots-de-vin, aspects de la sociabilité urbaine au bas Moyen Âge. Le cas gantois pendant la période bourguignonne », Revue du Nord, n° 70, 1988, p. 471-487.

21 France, Beaune, Archives municipales, C 14, pièce 37, fol. 11 et pièce 38, fol. 43.

22 France, Dijon, Archives départementales de Côte d’Or, G 2483, article 105‑2, fol. 58.

23 France, Beaune, Archives municipales, C 14, pièce 38, fol. 43.

24 France, Beaune, Archives municipales, C 61, pièce 16, fol. 18.

25 Joseph Delissey, « Les maires de Beaune jusqu’en 1789 », Mémoires de la Société d’archéologie de Beaune, n° 46, 1935‑1936, p. 189.

26 France, Angers, Bibliothèque Toussaint, ms. 759 (681), fol. 89 ; France, Beaune, Archives municipales, C 3, pièce 6, n° 6 ; Henri Jassemin, La Chambre des Comptes de Paris au xve siècle, Paris, 1933, p. 32 ; Joseph Vaesen et Étienne Charavay, Lettres de Louis xi, roi de France, Paris, Renouard, 1883‑1909, vol. 9, p. 261-262 ; Léonard Dauphant, « Les 700 pensionnaires de Louis xi, étude et édition d’un rôle de 1481 », Annuaire‑Bulletin de la Société de l’histoire de France, 2011, p. 71.

27 France, Beaune, Archives municipales, C 30, pièces 62, 63, 64, 65, 66 et 67.

28 France, Beaune, Archives municipales, C 14, pièce 38, fol. 48.

29 France, Beaune, Archives municipales, C 14, pièce 38, fol. 43-44.

30 Auguste Chassaing, Le Livre de Podio ou chronique d’Étienne Médicis, bourgeois du Puy, Le Puy‑en‑Velay, 1869‑1874, vol. 2, p. 281-282.

31 France, Dole, Archives municipales, n° 78/1, fol. 5, 12-14.

32 Michel Bochaca et Pierre Prétou, « Entre châtiment et grâce royale : l’entrée de Bordeaux dans la mouvance française (1453‑1463) », in Patrick Gilli et Jean‑Pierre Guilhembet (dir), Le Châtiment des villes dans les espaces méditerranéens, Turnhout, Brepols, 2012, p. 87-114.

33 Adrien Carbonnet, « La ville rêvée de Louis xi : l’éphémère existence de Franchise (1479‑1484) », Annuaire‑Bulletin de la Société de l’Histoire de France, 2019, p. 129-152.

34 Sur la colère royale : Gerd Althoff, « Ira Regis : Prolegomena to a History of Royal Anger », in Barbara H. Rosenwein (dir.), Anger’s Past. The Social Uses of an Emotion in the Middle Ages, Ithaca et Londres, Cornell University Press, 1998, p. 59-74 ; Damien Boquet et Piroska Nagy (dir.), Politiques des émotions au Moyen Âge, Florence, Sismel‑Edizioni del Galluzzo, 2010, p. 240‑248 ; Laurent Smagghe, Les Émotions du prince. Émotions et discours politique dans l’espace bourguignon, Paris, Classiques Garnier, 2012, p. 167-258.

35 Jean Rogier, Mémoires de Jean Rogier, prévôt de l’échevinage de Reims, Paris, 1876, p. 5-6.

36 France, Paris, Bibliothèque nationale de France, ms. fr. 2911, fol. 25.

37 Sur le rôle d’arbitre de l’évêque, Laurent Jégou, L’Évêque, juge de paix. L’autorité épiscopale et le règlement des conflits entre Loire et Elbe (milieu viiie‑milieu xie siècle), Turnhout, Brepols, 2011, 574 p.

38 Jean Rogier, Mémoires… op. cit., p. 5.

39 Ibid., p. 6.

40 France, Paris, Archives nationales, JJ 198, n° 82, fol. 80, éd. dans ORF, vol. 15, p. 297.

41 Sur la construction d’un récit du pardon, voir, pour les lettres de rémission, Quentin Verreycken, « “En nous humblement requerant”: crime narrations and rhetorical strategies in late medieval pardon letters », Open Library of Humanities, vol. 5, n° 1, 2019, p. 1-31.

42 France, Dole, Archives municipales, n°1499 ; Henri Beaune et Jean d’Arbaumont, Les Universités de Franche‑Comté, Gray, Dole, Besançon, Dijon, 1870, p. 28-33. L’Université est ensuite transférée à Poligny.

43 Adrien Carbonnet, Louis xi et les villes… op. cit., p. 447-451.

44 Pour Bourges : France, Paris, Bibliothèque nationale de France, ms. fr. 2906, fol. 6, éd. par J. Vaesen et É. Charavay, Lettres… op. cit., vol. 5, p. 255. Pour Sens, ORF, vol. 18, p. 16-20, p. 17 pour la citation.

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Pour citer cet article

Référence électronique

Adrien Carbonnet, « Trouver le chemin de la grâce : les villes rebelles et leurs stratégies pour rétablir le dialogue avec le souverain (royaume de France, seconde moitié du XVe siècle) »Criminocorpus [En ligne], 26 | 2024, mis en ligne le 28 juin 2024, consulté le 20 mars 2025. URL : http://journals.openedition.org/criminocorpus/15437 ; DOI : https://doi.org/10.4000/11wcs

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Auteur

Adrien Carbonnet

Adrien Carbonnet est maître de conférences en histoire médiévale à Sorbonne Université, membre du Centre Roland Mousnier (UMR 8596). Ses travaux portent sur les relations entre le roi de France et les villes à la fin du Moyen Âge, sur le lien politique entre le souverain et ses sujets, sur les contestations du pouvoir et leur répression. Il est l’auteur d’« À nous rebelles et désobéissantes ». Louis xi et les villes en révolte (1461‑1483), à paraître chez Classiques Garnier.

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