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AccueilActes de colloques et de journées...17Complaintes ou chansons ?Pleurer les victimes du scandale ...

Résumés

Après avoir rappelé le contexte dans lequel se déploie la littérature du trottoir des années 1885-1900, la crise boulangiste, le scandale de Panama et l’affaire Dreyfus, cet article étudie plus spécifiquement les complaintes liées à l’écroulement de la Compagnie universelle du canal interocéanique. Si toutes les chansons produites en 1892-1893 ne se rattachent pas au genre de la complainte, beaucoup d’entre elles en font partie, les victimes étant soit les petits épargnants spoliés, soit le peuple, le véritable destinataire de cette forme de propagande particulièrement venimeuse. L’antisémitisme et l’antiparlementarisme en sont les deux ingrédients principaux, le but visé étant la subversion des institutions et le renversement du régime républicain.

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Texte intégral

Affiche portant sur le Scandale de Panama

Affiche portant sur le Scandale de Panama

Archives de la Préfecture de police de Paris (cote BA 190)

  • 1 Jacques Miquel et Aurélien Pierre (dir.), L’affaire Fualdès, le sang et la rumeur, Rodez, Éditions (...)

1Dans Le conte d’hiver, Shakespeare évoque un colporteur, Autolycus, qui profite des rassemblements de foule pour vendre ses ballades et se livrer à son activité préférée, celle de coupeur de bourses. On sait d’ailleurs que c’est à proximité du gibet de la tour de Londres que les imprimés à la gloire des voleurs de grand chemin se vendaient le mieux le jour des exécutions. Deux siècles plus tard, dans Le Dernier Jour d‘un condamné, Victor Hugo fait dire au héros malgré lui du drame en train de se jouer qu’il est persuadé que l’on vendra, le jour de son exécution, des canards vantant ses exploits. Ce parallèle est cependant trompeur car, depuis la mise en récit de l’assassinat du procureur Fualdès1, en 1818, la complainte a remplacé la ballade très prisée du temps de Rutebeuf et de François Villon, et c’est elle qui va dominer l’exploitation du scandale de Panama, en 1892-1893. Pour faire pleurer en entendant la complainte intitulée Malheureuse Victime de Panama, d’Alfred Le Petit, qui se récite ou se déclame sur l’air du Pendu, ce ne sont plus de simples colporteurs qui sont recrutés par les marchands de « papelards » du quartier du Croissant, mais une armée de camelots. Ils sont en effet plusieurs milliers qui parcourent les boulevards en cherchant à apitoyer les passants et à gagner la pièce de cent sous, cette « thune par jour », qui permet de vivre à peu près convenablement jusqu’au lendemain.

  • 2 Jean-Pierre Seguin, Nouvelles à sensation : canards du XIXe siècle, Paris, Armand Colin, 1959.
  • 3 Claude Bellanger et alii (dir.), Histoire générale de la presse française, 1969-1976, 5 vol., t. II (...)

2Bien présents à la fin de la Restauration à Paris et dans les grandes villes, le « canard » et sa compagne, la « canarde »2, ont été interdits de séjour au lendemain du vote des lois de septembre 1835 qui ont suivi l’attentat de Fieschi, et ils ne sont réapparus qu’à la fin du second Empire. On les retrouve en effet en province, à partir de 1863, autorisés à vendre les journaux dans la rue car la nouvelle presse populaire à un sou, symbolisée par Le Petit Journal, ne s’achète plus guère par abonnement. Six ans plus tard, ils obtiennent le même droit pour Paris et ils vont devenir les supports du nouvel âge d’or que connaît la presse, entre 1880 et 1910. Trois chiffres résument cette explosion qui fait entrer la France dans L’Âge du papier, pour parler comme Félix Vallotton en 1898 : on vendait un million de quotidiens en France en 1870, trois millions en 1880 et neuf millions cinq cent mille en 19103.

  • 4 Jean-Yves Mollier et Jocelyne George, La Plus Longue des Républiques. 1870-1940, Paris, Fayard, 199 (...)
  • 5 Jean-Yves Mollier, Le camelot et la rue. Politique et démocratie au tournant des XIXe et XXe siècle (...)
  • 6 Ibid.

3Trois temps forts vont scander l’existence des camelots de la Troisième République : la crise boulangiste, en 1887-1889, qui les verra se transformer en supplétifs du « Saint-Arnaud de café-concert », comme le surnommera Jules Ferry4, le scandale de Panama, en 1892-1893, et l’affaire Dreyfus, en 1897-1899. Sur les 5 552 notices conservées dans la série XIX/2 de la Bibliographie de la France qui concernent les « éditions populaires, chansons et livres de propagande », on en compte 792 dans le premier cas, publiées en 1887-1889 (244, 344 et 204), 648 dans le second, en 1891-1893 (205, 193 et 250), et 1 852 dans ce qui sera l’Affaire du siècle, en 1894-1899 (311, 346, 276, 291, 382 et 246)5. Si toutes ces « formes brèves » de l’imprimé ne sont pas affectées au même degré par l’invasion de l’actualité, la plupart s’en trouvent colorées et, souvent, saturées. D’ailleurs l’industrie qui fabrique la littérature du trottoir ne s’y est pas trompée, et, autour de Napoléon Hayard, l’empereur des camelots qui trône dans son magasin du Croissant, les chansonniers les plus connus, Jules Jouy, René Hesse, Thomas de Laborde, Thomas Delpy, Louis Gabillaud, Victor Capart, Ernest Gerny, Henri Dufour, Gonzalve Frémin, Léon Maillot et autres Jacques Fernay ou A. Poupay, ont profité de la demande du public pour placer leurs complaintes et chansons à la mode6.

  • 7 Rappelons que l’origine allemande de la plupart des Juifs français de l’époque a joué un rôle consi (...)

4Quand on regarde attentivement ces textes nés de l’événement et de son exploitation immédiate, on peut dire que plus celui-ci se politise, plus l’air est chargé d’électricité, et plus les genres habituels, la gauloiserie, la farce, la facétie, l’humour bon enfant cèdent la place à la revendication, à la colère, voire, dans les circonstances les plus dramatiques, à l’appel au meurtre et à la subversion des institutions. Si l’on se moquait encore assez gentiment du président de la République, Jules Grévy, en chantant, en 1887, Ah ! Quel malheur d’avoir un gendre ou les Tribulations d’un beau-père, avec paroles d’Émile Carré, ou en évoquant malicieusement Un congé par huissier. Une famille sur l’pavé, le ton a changé en 1893 quand il s’agit de dénoncer les trois Juifs qui ont mis en coupe réglée la Compagnie universelle du canal interocéanique : le baron de Reinach, Cornélius Herz et Léopold Henri Aron dit Émile Arton. Épargnant volontairement les vrais coupables, Ferdinand de Lesseps, son fils Charles, et les autres administrateurs catholiques et protestants de la société, l’encre qui sort des ateliers de la rue Saint-Joseph oriente la fureur des petits épargnants trompés vers les boucs émissaires qui ne peuvent être, depuis la publication de La France juive de Drumont, en décembre 1885, que les Juifs venus d’Allemagne ou de l’Europe danubienne7.

Le contexte des affaires et du scandale de Panama

  • 8 Jean-Yves Mollier et Jocelyne George, La Plus Longue des Républiques…, op. cit.
  • 9 Claude Digeon, dans sa thèse sur La crise allemande de la pensée française (Paris, PUF, 1959) a nég (...)

5Depuis la défaite honteuse de la France à Sedan le 2 septembre 1870, la reddition de Bazaine et de son armée à Metz le 28 octobre, et la signature, en mai 1871, du traité de Francfort qui arrache à la France l’Alsace et la partie mosellane de la Lorraine, on a assisté à la naissance d’un antisémitisme qui dénonce une sorte de « cinquième colonne » avant la lettre et transforme tous les Juifs français en autant de sujets allemands infiltrés. L’onomastique populaire a vite fait de germaniser les noms de familles de ces ennemis de l’intérieur. Les Dreyfus deviennent des « Dreillfouss » et les Reinach des « Reillnar », la prononciation déformée servant à les désigner à la vindicte populaire. C’est sur ce fond de violente animosité signalée par les inspecteurs de police dans leurs rapports dès la fin de la guerre de 1870, qu’Édouard Drumont, un ancien indicateur de la préfecture de police de Paris doublé d’un journaliste famélique perpétuellement aux abois8, a bâti l’architecture de sa France juive publiée par Flammarion à la fin de l’année 1885. Sensible dès la crise boulangiste, mais moins que pendant l’acmé du Panama, au début de l’année 1893, cette haine de l’autre va se manifester avec éclat pendant l’affaire Dreyfus qui verra Zola incarner à la fois l’Italien, le Juif et le Prussien dans un amalgame auquel le dessinateur Caran d’Ache a prêté son talent9.

  • 10 Jean-Yves Mollier et Jocelyne George, La Plus Longue des Républiques…, op. cit., p. 135-139.
  • 11 Ibid.

6Le krach de l’Union Générale, en 1882, celui des cuivres en 1889 qui voit Eugène Denfert-Rochereau, directeur du Comptoir d’escompte de Paris, se suicider en accusant les Rothschild de l’avoir poussé à accomplir ce geste, ont persuadé une partie de l’opinion que les Juifs s’acharnent à piller la France au détriment de ses habitants. La popularité du vocable tiré du verbe allemand krachen, qui signifie littéralement « craquer », « éclater », « se briser en mille morceaux », renforce le sentiment confus que la Prusse honnie se cache derrière la plupart des accidents qui affectent l’économie nationale10. Dans la faillite de la grande banque fondée par Eugène Bontoux et bénie par le Pape Pie IX, une partie de la presse a voulu voir la main des Rothschild dont les intérêts en Autriche et dans les Balkans commençaient être attaqués par les investissements de la Banque de l’Union Générale. La Finance, Le Messager de Paris, Le Nouvelliste de Lyon, le Moniteur universel, Le Clairon, tous ces journaux subventionnés par Bontoux et regroupés sous la direction de Paul Dalloz, patron du Moniteur, et associé du directeur de l’Union Générale, reprirent l’antienne, oubliant que le financier catholique qui avait provoqué la faillite de sa banque était largement responsable de cette déconfiture11.

  • 12 Jean-Yves Mollier, Le scandale de Panama, Paris, Fayard, 1991, pour l’analyse de cette affaire à re (...)
  • 13 Tout ce matériel saisi par la police figure dans le dossier « affaires de Panama » de la Préfecture (...)
  • 14 Ibid.

7Profitant du climat d’excitation qui accompagne les krachs et se renforce, en septembre 1892, quand La Libre Parole publie « Les dessous du Panama », des articles signés « Micros », un banquier très informé sur les méthodes des dirigeants de la Compagnie universelle du canal interocéanique12, les chansonniers et les dessinateurs vont s’acharner sur les coupables. Avec le sens de l’opportunité qui les caractérise, ils transforment le célèbre chapeau censé être l’attribut des « rastaquouères », un terme apparu au début des années 1880 pour stigmatiser les parvenus dont l’origine est douteuse, en un couvre-chef rempli des millions des épargnants. Sur l’affiche du lithographe Charles Lévy dont les employés de la maison Dufayel ont couvert les murs de la capitale, on distingue nettement des chèques de 20 000, 50 000 et 100 000 francs que tentent de saisir des mains avides13. Sur un placard de dimensions plus réduites, on voit un gendarme sortir du chapeau et montrer du doigt un chèque à l’ordre de « Monsieur Cachtou » invité à se rendre à la prison de Mazas pour y être incarcéré. Sur la « Question du Panama » sous-titrée : « Rendez l’argent ! », on voit un bourgeois ressemblant au baron de Reinach emporter un énorme sac dégorgeant de billets de banque tandis que des poings tendus symbolisent la colère des épargnants ruinés. Un autre document demande aux lecteurs où est la « clef » du Panama. Sa réponse est sans ambiguïtés et précise qu’elle est destinée à « ouvrir le coffret précieux dans lequel sont ensevelis les secrets du Panama ». Pour renforcer le désir de se procurer cette « clef », on lit cette invitation : « Mettez les noms » sur la liste laissée vierge14 !

  • 15 Béhanzin, roi du Dahomey, était alors en guerre contre la France. Georges de Montmartre est un ferv (...)

8Un peu plus épais, le dépliant rédigé par « Georges de Montmartre » et imprimé par Léon Hayard, s’intitule La Vérité sur le scandale de Panama/ Tristes révélations/ Cent cinquante millions de retrouvés/ Les noms et Prénoms des voleurs/ Les papiers retrouvés chez le baron de Reinach. En exergue des trois pages que contient le texte, on peut lire ce résumé de l’actualité : « La Société se divise en deux : les tondeurs et les tondus ». On voit que l’empereur des camelots n’a rien perdu de sa gouaille, même si, dans le cas d’espèce, ce document dénonce « la haute juiverie » dans un style qui est celui d’Alphonse Toussenel dans Les juifs rois de l’époque puisque sont confondus sous cette appellation « tout aussi bien les schismatiques [les protestants genevois], catholiques, boudhistes [sic], béhanzinguistes15, etc… tous les tripoteurs en un mot qui ont reçu des pots-de-chambre… des députés… et des pots-de-vin provenant en ligne directe du Mont d’Or ». La vignette qui orne la quatrième de couverture montre un pied levé qui vient de botter les fesses d’un bourgeois en chapeau haut de forme. Une brochure, vendue dix centimes, s’intitule Les Millions du Panama/ Histoire/ Scandales/ Révélations/ Procès. Sur le dessin qui orne la couverture, on voit une canalisation dont il ne sort que de l’eau car les millions injectés du côté de la pompe à finance ont été détournés par des aigrefins et par un personnage portant une tiare qui pourrait être le Pape, associé ici aux voleurs !

  • 16 Caran d’Ache, Carnet de chèques, Paris, Plon, 1892. Ce chéquier fort bien imité comprend vingt-quat (...)
  • 17 Le Pilori, 23 avril 1893 : une double page intérieure est consacrée à cet enterrement de première c (...)

9De même que Caran d’Ache s’est rendu célèbre pendant cette affaire en dessinant les fameux chèques censés avoir été touchés par les députés, sénateurs et ministres16, de même Napoléon Hayard a-t-il fait imprimer des chèques émis par la « Société spéciale des Valeurs à l’eau de Panama » dont le siège social était situé « rue Vide-Gousset » avec des succursales en « forêt de Bondy » et aux « carrières d’Amérique », deux lieux très mal famés des environs de la capitale. Sans prétendre vouloir exhumer la totalité du matériel hostile aux « panamistes » mis en circulation sur les boulevards, on terminera cette mise en contexte en évoquant la presse illustrée, le Pstt… ! de Forain et Caran d’Ache bien entendu, mais aussi L’Étrille, Le Grand Guignol, La France, La Patrie ou Le Pilori. C’est ce dernier titre qui publiera un pastiche de Courbet intitulé : « Enterrement de Panama par Vignola/ Funérailles de première classe aux frais de l’épargne nationale ». Ce tableau très réaliste met en scène « Monsieur Floquet et la joyeuse fanfare des Béni-Touch’toujours, « l’austère Brisson et la commission d’enquête », « un diabétique et son commandité » [Herz et Reinach], « le bouc-émissaire » [sans doute le ministre Baïhaut, le seul à avoir avoué], Eiffel portant sa tour dans sa brouette – il a été condamné puis libéré par la Cour de cassation – « quelques riches entrepreneurs », le « groupe des actionnaires et obligataires » et quelques autres personnages liés aux diverses péripéties de l’affaire17.

  • 18 Sylvie Brodziak et Samuel Tomei (dir.), Dictionnaire Clemenceau, Paris, Robert Laffont, coll. « Bou (...)
  • 19 Alain Pagès, L’Affaire Dreyfus. Vérités et légendes, Paris, Perrin, 2019.

10Ces quelques exemples, loin d’épuiser le sujet tant la littérature du trottoir se montra imaginative en 1892-1893, et tant la grande presse eut à cœur de relayer la petite, donnent cependant une idée du climat délétère qui s’empare de la France entre le suicide du baron de Reinach dans la nuit du 19 au 20 novembre 1892, et les élections législatives des 20 août et 3 septembre 1893, qui voient 190 députés – un tiers de la représentation nationale - quitter la Chambre des députés. C’est le plus important renouvellement de l’histoire de la Troisième République, et, parmi les « battus », le plus célèbre est Georges Clemenceau contre lequel Le Petit Journal s’est acharné en publiant un supplément illustré intitulé « Le pas du commandité » dans lequel on le voyait jongler avec des sacs d’or venus de l’ambassade britannique18. Les ligues, renforcées par le boulangisme, ont maintenu la pression dans la rue et le scandale de Panama reviendra dans l’actualité lorsque, au lendemain de la mort de Félix Faure, Émile Loubet lui succédera, le 16 février 1899. Aussitôt affublé du sobriquet de « Panama Ier », il traînera cette couronne d’épines jusqu’à la résorption de l’affaire Dreyfus, facilitée par la grâce accordée à l’innocent au lendemain du second Conseil de guerre tenu à Rennes en septembre 189919.

Les chansons et les brochures relatives aux « affaires » et au « scandale » de Panama

  • 20 Olivier Belin et Florence Ferran (dir.), Les éphémères et l’événement, Paris, Éditions de la Maison (...)
  • 21 Maxime Dury, La censure. La prédication silencieuse, Marseille, Publisud, 1995.

11Si l’on se fie aux données enregistrées dans série XIX/2 de la BnF, on voit qu’il existe quatre chansons publiées en 1892, treize en 1893, une en 1894, deux en 1895. Il va de soi que, compte tenu du mauvais état de conservation des éphémères en général20, et des chansons en particulier, ces chiffres ne sont fournis qu’à titre indicatif. Toutefois, on a là un total de vingt chansons, auxquelles il convient d’ajouter deux chansons imprimées à Bruxelles et une à Dijon. Sur cet ensemble de vingt-trois chansons, la base constituée dans « Criminocorpus » ne retient que huit complaintes proprement dites, mais sur ce chiffre, deux ont été imprimées à l’étranger, et n’ont aucune raison d’apparaître au Dépôt légal de la France, alors que deux autres ont échappé à la vigilance des rédacteurs de la Bibliographie de la France. Cette omission confirme la négligence de nombreux petits éditeurs de musique et d’imprimeurs de « musiques notées », pour leur donner le nom officiel. D’autres, tel Napoléon Hayard, pouvaient être tentés d’oublier le Dépôt légal quand l’imprimé concerné risquait d’être poursuivi en raison de son contenu. La loi du 29 juillet 1881 était certes très libérale en matière d’imprimerie et de librairie, mais tout ce qui concernait la question des mœurs faisait l’objet d’une censure renforcée en 1882 et 189821.

  • 22 La dernière chanson qui évoque « l’arrivée des barons crasseux » fait allusion à l’arrivée à Paris (...)

12Si l’on reprend la source dite « Éditions populaires, chansons, livres de propagande », on voit apparaître quatre imprimés en 1892 : trois chansons, En revenant du Panama ! sur l’air qui avait contribué à la légende du général Boulanger, En rev’nant d’la r’vue !, La chanson du Panama. Dernières et curieuses révélations, et Victime du Panama, à côté d’une brochure de Georges de Montmartre, La vérité sur le scandale de Panama, mise en vente dès le 26 novembre 1892, six jours après la découverte du suicide du baron de Reinach. Pour éclairer davantage encore cette littérature du trottoir qui émane de l’officine de Léon Hayard, on ajoutera les trois autres imprimés en rapport avec l’actualité : À bas les Juifs ! La parole aux Français ! La besogne aux youtres !, La complainte de Drumont ou Drumont crucifié par les Juifs, et Arrivée du choléra et des futurs barons crasseux à Paris. Nouvelle Complainte des Juifs. Manifestement, Drumont a fait école et, comme sa Libre Parole est imprimée depuis avril 1892 en plein cœur du quartier du Croissant, les occasions de le lire et de s’inspirer de sa prose nauséabonde se sont multipliées22.

Le dernier soupir de Panama

Le dernier soupir de Panama

coll. Jean-François “Maxou” Heintzen

13En 1893, le nombre d’imprimés en rapport avec la Compagnie universelle du canal interocéanique est multiplié par trois et on en compte treize. Dans l’canal de Panama ouvre l’année, suivie de la Complainte du Panama, toutes les deux signées Caïn, Panama. Procès (Panama ! À bas les masques ! chanson), Le dernier soupir de Panama devant les tribunaux. Dernières condamnations de Léon Hayard, en mars 1893, puis La Grande Complainte fin de chèque, le même mois, Les Étrangleurs du Panama. Les noms, les sommes, Les vols du Panama, chanson nouvelle en patois de Roubaix, En revenant du procès des corrupteurs (toujours Panama. Récit de deux témoins), signée Léon Hayard, Panama. Réponse de M. G à un député incohérent, Panama, une chanson imprimée en août, comme La comédie du Panama et Le Dernier Mot de l’affaire du Panama, qui précèdent Le socialisme et le Panama, dernier imprimé de cette année qui constitue le point culminant de la crise panamiste.

Panama ou le meilleur papier

Panama ou le meilleur papier

coll. Jean-François “Maxou” Heintzen

14Une seule chanson sera enregistrée officiellement en 1894, Le Panama raconté par mon concierge, et deux en 1895 : La Polka des chéquards et Les chéquards, deux chansons de Thomas de Laborde qui viennent confirmer qu’il existe encore des répliques tectoniques au scandale au moment où on note l’exploitation par les camelots d’une Marseillaise antisémite suscitée par la condamnation au bagne d’Alfred Dreyfus. Après le silence des années 1896 et 1897, un seul imprimé est enregistré en 1898, Le chapelier d’Arton, chanson d’actualité. Comme on l’a dit, il manque à cette première recension Le Panama à Panama de René Esse, Le Panama ou le meilleur papier de Poupay, publié fin 1892, Le retour du Président, ou Panama ! Panama ! de Numa Blès, un habitué du « Chat noir », Arton dans le ventre de la baleine, de Jacques Fernay, On vient d’coffrer Arton avec la Prière des Cent Quatre, parue à Bruxelles comme Le carnet d’Arton, toutes les deux publiées en 1895, et enfin, insérée dans le Progrès de la Côte d’Or, à Dijon, le 12 janvier 1896, Arton, tontaine et tonton. Si on néglige les deux chansons imprimées en Belgique, on a donc un corpus de trente chansons relatives au scandale lié à l’écroulement de la grande compagnie créée par Ferdinand de Lesseps pour percer l’isthme reliant l’océan atlantique à l’océan pacifique. L’émoi suscité par l’effondrement d’une entreprise qui avait obtenu le vote d’un emprunt à lots de la part du Parlement en 1888 et qui avait drainé l’épargne de près de cinq cent mille Français était compréhensible et la colère populaire à la mesure des espoirs qui avaient été placés dans cette entreprise que l’on avait présentée aux Français comme la sœur de celle qui avait réussi le percement du canal de Suez.

Pleurer les misères du temps ou la mise en complainte des victimes du Panama

15C’est sans doute la complainte intitulée Victime de Panama, avec paroles, musique et dessin d’Alfred Le Petit, qui symbolise le mieux les frustrations qu’engendra ce scandale. Boulangiste, antidreyfusard et antisémite, le peintre, dessinateur de presse et caricaturiste Alfred Le Petit n’était pas sans talent comme le prouve son dessin qui illustre cette musique notée. Au centre du tableau, le pauvre hère en haillons qui tend un chapeau tout déformé est évidemment une de ces victimes à qui on a volé leurs économies. Le texte de la complainte, chantée sur l’air du Pendu invite d’ailleurs, au dernier couplet, à « flanquer une danse » à Panama, le coquin qu’il conviendrait de pendre pour lui faire rendre gorge. Tout aussi vindicative la chanson de Caïn, intitulée Complainte du Panama, à chanter également sur l’air du Pendu, demande le vote d’une loi qui enverra « à la Nouvelle », c’est-à-dire en Nouvelle-Calédonie, au bagne le plus éloigné du territoire français, « les trafiquants de Panama ».

Victime de Panama

Victime de Panama

AD Cher, 2F 622

  • 23 Baptisé Napoléon Hayard à l’état-civil, il signe plus communément « Léon Hayard » la plupart de ses (...)

16La Grande Complainte Fin-de-chèque sur le Panama, à chanter sur l’air de Fualdès, commence classiquement comme n’importe quelle complainte criminelle : « Écoutez, gogos de France/Et même d’autres pays/Le récit du grand gâchis/ D’une histoire de finance/Que longtemps on acclama/Et qui s’appelait Panama ». Les criminels sont nommément désignés : ce sont « les gros barons de la banque », aidés par les députés et sénateurs qui « réclamaient des chèques », de même que les victimes, mortes et enterrées à Panama, à savoir les ouvriers emportés par le typhus et le choléra. Non signée, cette « grande complainte » imprimée par le marchand de musique Fortin, est assez proche de celle qui s’intitule Le dernier soupir de Panama devant les tribunaux. Dernières condamnations, et qui est signée Léon Hayard. Chantée, elle aussi, sur l’air de Fualdès, composée au lendemain de la condamnation et de l’incarcération de Charles de Lesseps et de Gustave Eiffel, en mars 1893, elle désigne bien les coupables mais ne présente pas, de façon évidente, les victimes du crime commis par les corrompus. En revanche, le Panama ou le meilleur papier, une « chansonnette comique » créée par Melle Valti à la Scala, et écrite par Poupay sur une musique de Charles Spencer, présente tous les traits d’une complainte criminelle puisque la victime nommément désignée est le Panama en tant que valeur assassinée par les administrateurs de la compagnie et par les intermédiaires financiers qui l’ont ruinée. De ce fait, peut-être conviendrait-il d’accepter comme complainte La chanson qu’attaque l’isthme du Panama, sous-titrée « Dernières curieuses et tristes révélations ». Sortie elle aussi de l’atelier de Napoléon Hayard23, elle met au centre de son attaque la victime de papier, la malheureuse obligation qui avait pris l’eau et avait sombré corps et biens.

  • 24 Jean-Yves Mollier, Le scandale de Panama, op. cit., p. 522-524 pour la reproduction des listes publ (...)
  • 25 Ce sont les députés boulangistes, et notamment Jules Delahaye, qui ont avancé cette estimation haut (...)
  • 26 Pierre Birnbaum, Le moment antisémite. Un tour de la France en 1898, Paris, Fayard, 1998.

17Comme on a pu le vérifier à travers ces quelques évocations de la prose commercialisée par les agitateurs de rues que sont les camelots au moment du scandale de Panama, une partie des auteurs de ces textes visait clairement la subversion des institutions républicaines. En insistant sur les turpitudes de la représentation nationale, sur les crimes de Charles Baïhaut et de François dit Paul Barbe, les deux ministres, l’un vivant, l’autre mort, convaincus de prévarication, et sur le nombre de parlementaires ayant « touché » – cent-quatre selon la France des 28, 29 et 30 décembre 189524, ou cent-cinquante selon d’autres affirmations25 – la littérature du trottoir révélait sa face la plus sinistre. Mise au service de la pire des causes, essayant de faire croire à la population que seul le grand coup de balai promis par le général Boulanger quelques années auparavant résoudrait les problèmes du moment, elle servait la cause des démagogues façon Déroulède et, pire, celle des populistes du type de Drumont qui sera responsable de la mort de citoyens français juifs dans les départements d’Algérie en 1902. Quatre ans plus tôt, plus de deux-cents villes françaises avaient connu des troubles et des bris de vitrines, avec début de lynchage de commerçants juifs26. Si la cause immédiate avait été la publication du « J’accuse… ! » d’Émile Zola, le 13 janvier 1898, il ne fait aucun doute que les chansons antisémites, les dessins, les objets à tirettes et à roues, les prospectus, les papillons collés un peu partout, avaient préparé les esprits à recevoir comme une vérité d’évidence la collusion des Juifs entre eux et leur volonté de détruire la France de l’intérieur.

  • 27 John Grand-Carteret, L’Affaire Dreyfus et l’image, Paris, Flammarion, 1898.

18Même s’il est impossible d’évaluer la capacité d’une complainte à émouvoir l’opinion et à la mobiliser, celles qui faisaient référence au scandale de Panama avaient toute chance d’atteindre leur but parce qu’il existait bien des centaines de milliers d’épargnants qui avaient perdu leurs économies et qui, pour certains, avaient été conduits à mettre fin à leurs jours. Dans la mesure également où on voit les affaires de Panama récupérées par les polémistes du Croissant au moment de l’arrestation et du procès d’Émile Arton, en 1896, ce qui déclenchera la désignation d’une deuxième commission parlementaire sur ces affaires, en juin 1897, le scandale de Panama vient contaminer l’affaire Dreyfus qui ne fait qu’à peine commencer en 1896, et qui éclate véritablement en 1897 pour culminer l’année suivante. Les camelots ont saisi l’occasion de gagner confortablement leur vie en publiant cette littérature du trottoir qui leur rapporte jusqu’à vingt francs par jour en période de vives émotions selon John Grand-Carteret27. Au-delà de ces supplétifs de la contestation de rue, ceux qui avaient armé leur bras savaient pertinemment quels étaient les risques d’embrasement d’une population parisienne peinant à gagner sa vie et revendiquant alors « la thune par jour », soit quatre fois moins que le salaire des « marchands de papelard » qui inondaient le boulevard.

La panne à Panama, scie du jour

La panne à Panama, scie du jour

coll. Jean-François “Maxou” Heintzen

  • 28 Jean-Yves Mollier, « Pierre-Victor Stock et la passion du jeu », à paraître in Histoires littéraire (...)

19Ils démontraient par là leur compréhension intime des mutations que la France avait connues ces deux dernières décennies. Entrée de plain-pied dans l’ère médiatique, elle avait tendance à privilégier les formes brèves de l’écrit, bien avant que l’on invente les tweets, et à délaisser les livres savants que publiaient les défenseurs du capitaine Dreyfus. Les Preuves de Jean Jaurès, les dizaines de gros volumes publiés par l’éditeur Pierre-Victor Stock furent sans doute utiles au dévoilement de la vérité28, mais, en choisissant le journal L’Aurore plutôt que la brochure ou le livre, Émile Zola s’était adapté à la modernité et avait montré la direction que devraient prendre les intellectuels pour lutter à armes égales avec leurs adversaires. Quelques années plus tôt, en pleine fièvre antipanamiste, Georges Clemenceau avait été incapable de trouver la réponse adaptée aux calomnies de ses adversaires et il avait payé le prix fort. D’autres parlementaires intègres avaient sans doute été, comme lui, victimes d’un amalgame qui tendait à rendre tous les députés solidaires des corrompus. Dans la mesure où des listes de 104 puis 150 élus de la République avaient circulé dans la presse, il était impossible de faire le tri entre ceux qui avaient bénéficié réellement des largesses de la Compagnie universelle du canal interocéanique et les autres. Tel était le but visé par ceux qui détestaient le régime républicain et par ceux qui, sans souhaiter le retour de la monarchie ou de l’Empire, jouaient avec le feu par détestation des Juifs.

  • 29 Sophie-Anne Leterrier, Béranger. Des chansons pour un peuple citoyen, avec un CD audio de 18 chanso (...)
  • 30 Zeev Sternhell, Ni droite, ni gauche, l’idéologue fasciste en France, rééd. Paris, Gallimard, coll. (...)

20Étudier la littérature du trottoir, relire et réentendre, quand on le peut, les complaintes criminelles, comme il est également loisible de le faire pour les chansons de Pierre-Jean de Béranger récemment enregistrées par une chanteuse29, permet de plonger dans une époque disparue et de l’approcher au plus près dans ses ambiguïtés et ses contradictions. Par certains côtés, le fait d’utiliser comme timbres l’air de Fualdès ou celui du Pendu, pourrait conduire à conclure à l’archaïsme de ces contestations du politique. Ce serait ne pas voir la modernité de certaines formes d’action dans lesquelles Zeev Sternhell aperçoit les prémices d’un pré-fascisme à la française terriblement inquiétant30. Sans trancher dans ce débat qui demeure vif, on conclura que tout ce qui circule à même la rue, le tag comme le street art aujourd’hui, dit quelque chose de la société qui l’entoure et que les complaintes criminelles, qui peuvent apparaître comme des formes très anciennes et très codifiées d’expression de la lamentation, faisaient partie, à la veille de la Grande Guerre, d’un arsenal qui permettait à la culture de masse de se mouvoir dans l’espace de la ville. Rassurante en ce qu’elle n’abandonnait pas l’ancien au profit du nouveau, cette nouvelle forme de culture allait bientôt s’imposer un peu partout et faire craindre le pire aux sociologues de l’École de Francfort. Mais eux vivaient à l’intérieur d’un fascisme en train de prendre le pouvoir et la Grande Guerre avait achevé de faire disparaître l’ancien monde, les chanteurs de rues de l’entre-deux-guerres étant désormais vus avec nostalgie parce qu’ils étaient en train de disparaître et rappelaient un univers qui s’éloignait à grands pas.

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Bibliographie

Belin Olivier et Ferran Florence (dir.), Les éphémères et l’événement, Paris, Éditions de la MSH, 2018.

Grand-Carteret John, L’affaire Dreyfus et l’image, Paris, Flammarion, 1898.

Leterrier Sophie-Anne, Béranger. Des chansons pour un peuple citoyen, Rennes, PUR, 2013.

Mollier Jean-Yves, Le camelot et la rue. Politique et démocratie au tournant des XIXe et XXe siècles, Paris, Fayard, 2004.

Mollier Jean-Yves, Le scandale de Panama, Paris, Fayard, 1991.

Oriol Philippe, Histoire de l’affaire Dreyfus de 1894 à nos jours, Paris, Les Belles Lettres, 2014, 2 vol.

Pagès Alain, L’affaire Dreyfus. Vérités et légendes, Paris, Perrin, 2019.

Seguin Jean-Pierre, Nouvelles à sensation : canards du XIXe siècle, Paris, Armand Colin, 1959.

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Notes

1 Jacques Miquel et Aurélien Pierre (dir.), L’affaire Fualdès, le sang et la rumeur, Rodez, Éditions du Rouergue, 2017.

2 Jean-Pierre Seguin, Nouvelles à sensation : canards du XIXe siècle, Paris, Armand Colin, 1959.

3 Claude Bellanger et alii (dir.), Histoire générale de la presse française, 1969-1976, 5 vol., t. III : 1870-1940, Paris, PUF, 1972.

4 Jean-Yves Mollier et Jocelyne George, La Plus Longue des Républiques. 1870-1940, Paris, Fayard, 1994, pour le cadre général.

5 Jean-Yves Mollier, Le camelot et la rue. Politique et démocratie au tournant des XIXe et XXe siècles, Paris, Fayard, 2004, p. 59-60.

6 Ibid.

7 Rappelons que l’origine allemande de la plupart des Juifs français de l’époque a joué un rôle considérable, dès 1870, dans la montée d’un antisémitisme qui traduit la haine du Prussien vainqueur de la guerre de 1870. Voir Gérard Noiriel, Immigration, antisémitisme et racisme en France (XIXe-XXe siècle). Discours publics, humiliations privées), Paris, Fayard, 2007, p. 214-215, et Jean-Yves Mollier, Le camelot et la rue…, op. cit., p. 206.

8 Jean-Yves Mollier et Jocelyne George, La Plus Longue des Républiques…, op. cit.

9 Claude Digeon, dans sa thèse sur La crise allemande de la pensée française (Paris, PUF, 1959) a négligé cet aspect du rejet de l’Allemagne à cette époque. Or les caricatures qui montrent Zola en faux nez du Juif ajouteront que le Juif cache un officier prussien, comme on le voit dans le dessin de Caran d’Ache publié dans le numéro 1 de son journal, le Pstt… ! publié en page 2, le 5 février 1898 (cf. Jean-Yves Mollier, « Zola et la rue », Les Cahiers naturalistes, n° 72/1998, p. 75-91).

10 Jean-Yves Mollier et Jocelyne George, La Plus Longue des Républiques…, op. cit., p. 135-139.

11 Ibid.

12 Jean-Yves Mollier, Le scandale de Panama, Paris, Fayard, 1991, pour l’analyse de cette affaire à rebondissements multiples de septembre 1891 à la fin de l’année 1897, et qui a pesé sur tout le déroulement de l’affaire Dreyfus.

13 Tout ce matériel saisi par la police figure dans le dossier « affaires de Panama » de la Préfecture de police de Paris sous la cote Ba/188 à 191 et « Cornélius Herz », Ba/192 à 194.

14 Ibid.

15 Béhanzin, roi du Dahomey, était alors en guerre contre la France. Georges de Montmartre est un fervent lecteur de la presse qu’il utilise avec un bonheur plus ou moins grand dans ses écrits chansonniers.

16 Caran d’Ache, Carnet de chèques, Paris, Plon, 1892. Ce chéquier fort bien imité comprend vingt-quatre pages et il servit d’argument pour convaincre les Français que de nombreux parlementaires, les « chéquards », avaient « touché » …

17 Le Pilori, 23 avril 1893 : une double page intérieure est consacrée à cet enterrement de première classe.

18 Sylvie Brodziak et Samuel Tomei (dir.), Dictionnaire Clemenceau, Paris, Robert Laffont, coll. « Bouquins », 2017, p. 530-533.

19 Alain Pagès, L’Affaire Dreyfus. Vérités et légendes, Paris, Perrin, 2019.

20 Olivier Belin et Florence Ferran (dir.), Les éphémères et l’événement, Paris, Éditions de la Maison des Sciences de l’Homme, 2018.

21 Maxime Dury, La censure. La prédication silencieuse, Marseille, Publisud, 1995.

22 La dernière chanson qui évoque « l’arrivée des barons crasseux » fait allusion à l’arrivée à Paris de nombreux Juifs fuyant les pogroms de Russie et obligés de dormir dans le hall de la gare de Lyon début 1893. La presse avait dénoncé ce scandale tout en s’étonnant de la relative indifférence de la communauté juive de la capitale.

23 Baptisé Napoléon Hayard à l’état-civil, il signe plus communément « Léon Hayard » la plupart de ses chansons.

24 Jean-Yves Mollier, Le scandale de Panama, op. cit., p. 522-524 pour la reproduction des listes publiées dans La France des 28, 29 et 30 décembre 1895, et « Retour sur le scandale de Panama », Entreprises et Histoire, n° 101, décembre 2020, p. 14-26.

25 Ce sont les députés boulangistes, et notamment Jules Delahaye, qui ont avancé cette estimation haute à la Chambre des députés au lendemain du décès du baron de Reinach, le 21 novembre 1892.

26 Pierre Birnbaum, Le moment antisémite. Un tour de la France en 1898, Paris, Fayard, 1998.

27 John Grand-Carteret, L’Affaire Dreyfus et l’image, Paris, Flammarion, 1898.

28 Jean-Yves Mollier, « Pierre-Victor Stock et la passion du jeu », à paraître in Histoires littéraires, Janvier-Février-Mars 2020, vol. XXI, n° 81.

29 Sophie-Anne Leterrier, Béranger. Des chansons pour un peuple citoyen, avec un CD audio de 18 chansons, Rennes, PUR, 2013.

30 Zeev Sternhell, Ni droite, ni gauche, l’idéologue fasciste en France, rééd. Paris, Gallimard, coll. « Folio Histoire », 2013.

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Table des illustrations

Titre Affiche portant sur le Scandale de Panama
Crédits Archives de la Préfecture de police de Paris (cote BA 190)
URL http://journals.openedition.org/criminocorpus/docannexe/image/8310/img-1.jpg
Fichier image/jpeg, 12M
Titre Le dernier soupir de Panama
Crédits coll. Jean-François “Maxou” Heintzen
URL http://journals.openedition.org/criminocorpus/docannexe/image/8310/img-2.jpg
Fichier image/jpeg, 1,6M
Titre Panama ou le meilleur papier
Crédits coll. Jean-François “Maxou” Heintzen
URL http://journals.openedition.org/criminocorpus/docannexe/image/8310/img-3.jpg
Fichier image/jpeg, 1,7M
Titre Victime de Panama
Crédits AD Cher, 2F 622
URL http://journals.openedition.org/criminocorpus/docannexe/image/8310/img-4.jpg
Fichier image/jpeg, 3,4M
Titre La panne à Panama, scie du jour
Crédits coll. Jean-François “Maxou” Heintzen
URL http://journals.openedition.org/criminocorpus/docannexe/image/8310/img-5.jpg
Fichier image/jpeg, 2,1M
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Pour citer cet article

Référence électronique

Jean-Yves Mollier, « Pleurer les victimes du scandale de Panama ou subvertir les institutions ? »Criminocorpus [En ligne], 17 | 2021, mis en ligne le 01 mars 2021, consulté le 23 mai 2025. URL : http://journals.openedition.org/criminocorpus/8310 ; DOI : https://doi.org/10.4000/criminocorpus.8310

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Auteur

Jean-Yves Mollier

Jean-Yves Mollier est professeur émérite d’histoire contemporaine à l’université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines. Cofondateur et ancien directeur du Centre d’histoire culturelle des sociétés contemporaines, il a récemment publié Une autre histoire de l’édition contemporaine (Paris, La Fabrique, 2015, 2018 et 2019), L’Âge d’or de la corruption parlementaire. 1930-1980 (Paris, Perrin, 2018) et Interdiction de publier. La censure d’hier à aujourd’hui (Double Ponctuation, 2020).

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