1Enjeu très sensible à la Réunion, la connivence entre paysage et patrimoine guide la présentation de l’ouvrage Patrimoine paysage sous le vent, rassemblant les actes des séminaires sur le paysage du Laboratoire APILaB de l’Ecole Supérieure d’Art (ESA). Ses différentes contributions nous transportent à travers les époques modernes et contemporaines ayant façonné les paysages de cette île, baptisée « la perle de l’Océan indien ». Ce titre disputé avec l’île de Ceylan, trouve sa pleine justification grâce à sa propension à rassembler en un lieu restreint une grande variété de paysages. Le patrimoine défensif des communes de la Possession, du Port et de Saint-Paul est présenté comme un élément constitutif des paysages littoraux de la côte ouest du XVIIIe siècle à la première moitié du XXe siècle. Dans une approche alliant nature et culture, nous percevons également comment des populations originaires d’espaces civilisationnels aussi divers et variés que Madagascar, la Chine, l’Europe ou l’Afrique de l’Est ont absorbé la variété des différentes composantes de l’île (p. 14). Cet ouvrage lève aussi le voile sur un domaine quasiment inexploré jusqu’à présent : la savane. Longtemps restée en marge, celle-ci apparaît au départ comme un paysage de moindre substance même si, dès la fin du XVIIIe siècle, des projets de reconquête voient le jour (p. 40). Dans ce paysage sous le vent, la savane renferme une multitude de vestiges dont l’étude scientifique est nécessaire à la compréhension d’un passé mal connu (p. 76). D’autres aspects de la transformation du paysage sont mis en exergue comme l’évolution de la côte Ouest sur la grande planèze le long de la partie construite entre 1950 et nos jours (p. 51). Sur une étroite bande côtière sableuse, avec ses routes disposées en étage (p. 53), cette partie de l’île s’est développée à la faveur de l’essor de la culture de canne à sucre et de géranium (p. 52). Le bas de l’Ouest, qui concentre les activités les plus anciennes, révèle une grande richesse du patrimoine enfoui. Aussi la dernière décennie a-t-elle vu le développement de nouvelles fouilles archéologiques dans le pays sous le vent. Dès lors, la place des activités humaines peut être mieux appréhendée dans un environnement en marge de la colonisation. Le portrait de cette île aux multiples facettes, esquissé à travers les communications de cet ouvrage, nous invite à nous plonger dans l’étude de l’évolution du patrimoine matériel et immatériel de ce paysage sous le vent.