• 1 Expositions au FRAC Auvergne (29 juin-29 septembre 2019), au musée des Beaux-Arts de Rennes (26 oct (...)

1Le catalogue d’exposition Denis Laget offre au lecteur les dernières rétrospectives françaises consacrées au peintre figuratif contemporain en 2019 et 20201. L’objet fait surtout la part belle à la reproduction en couleur des toiles de l’artiste, pour que le lecteur puisse constater l’originalité de ses œuvres. A ces images, se superpose l’écrit de Karim Ghabbad, qui procède de manière programmatique et comparative, à l’analyse des symptômes de la singularité de la création de Denis Laget. Karim Ghabbad insiste d’abord sur sa prédilection pour les thèmes anodins issus des lieux communs de l’histoire de l’art – natures mortes, paysages, vanités, portraits – et leur affranchissement par rapport à l’idéal et l’évidence du réel, rendant ainsi la signification des toiles moins explicite. L’auteur s’intéresse pour cela aux paramètres généraux qui influent sur ce déséquilibre visuel : en particulier le processus aléatoire de création de la tâche qui définit le sujet, la matérialité agressive de sa peinture mais aussi la couleur utilisée de manière non conventionnelle qui induit chez le spectateur – comme chez le lecteur – une « sorte de claudication du regard » (p. 67). L’auteur insiste sur les effets que ses sujets et leur traitement provoquent : une sorte de « noyade » (p. 75), un mauvais rêve, une atmosphère de mort et en même temps, paradoxalement, une fascination envoûtante. L’originalité de ce catalogue tient également à la réflexion sur la place qu’occupe Denis Laget dans l’histoire de l’art et dans son époque, cette partie servant de point d’orgue à l’ensemble du propos. En optant de manière véhémente pour l’écart, voire le non-conformisme vis-à-vis de ses contemporains – notamment par choix des tableaux, des références et des thèmes –, Denis Laget prend position par rapport à son époque ; Karim Ghabbad convoque les propos du philosophe Giorgio Agamben pour décrire ce rapport : « seul peut se dire contemporain […] celui qui ne se laisse pas aveugler par les lumières du siècle et parvient à saisir en elles la part de l’ombre, leur sombre intimité » (p. 77).