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2021

Carole Talon-Hugon, L’Artiste en habits de chercheur

Clémence Canet
L’Artiste en habits de chercheur
Carole Talon-Hugon, L’Artiste en habits de chercheur

Paris : PUF, 2021, 189p. 19 x 13cm

ISBN : 9782130824466. _ 14,00 €

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Texte intégral

1Le champ de l’art est aujourd’hui investi par des pratiques revendiquant une proximité (voire une imbrication) avec les sciences sociales : le document est un matériau privilégié d’œuvres qui aspirent à produire du savoir. Ce constat est le point de départ de L’Artiste en habits de chercheur de Carole Talon-Hugon. L’ouvrage se propose d’expliquer ce qui a permis l’avènement de ces pratiques artistiques hybrides et d’interroger les paradigmes de pensée dans lesquelles elles s’inscrivent. Aux quatre chapitres qui composent l’ouvrage correspondent quatre points : la présentation d’œuvres relevant de ce que l’autrice nomme « l’art documentaire », la mise en perspective historique de ces pratiques, une réflexion sur l’incapacité de ces œuvres à répondre aux objectifs de production de connaissance qu’elles se donnent, et un commentaire sur les phénomènes de « désartification de l’art » et de relativisme scientifique à l’origine, selon l’autrice, du développement de ces pratiques. Si l’art documentaire intéresse Carole Talon-Hugon, ce n’est pas parce qu’elle entend faire état de la création contemporaine, mais parce qu’elle voit dans cette pratique un risque pour les sciences sociales. A grand renfort de mots appartenant au champ lexical de la menace, l’autrice tente de montrer que leur investissement, par le domaine artistique, met en péril leur scientificité et le crédit qu’on peut leur accorder. La question se pose en effet de savoir dans quelle mesure les artistes sont à même de manier des méthodologies et des concepts qui n’appartiennent pas, a priori, à leur champ, pour produire des connaissances et une réflexion épistémologique. Il est cependant dommage que l’autrice ne réponde à cette interrogation qu’à partir de principes théoriques fondés sur l’idée que l’art relevant de la fiction, les sciences sociales de la vérité, il est contradictoire et délétère de les amalgamer. Il aurait été intéressant que le chapitre III consacré à « l’évaluation » de l’art documentaire s’appuie sur l’analyse concrète d’œuvres. Ce travail aurait permis de constater que, malgré la conception de l’art très partagée selon laquelle ce domaine est celui de l’invention, de nombreux·ses artistes produisent aujourd’hui des connaissances légitimes, élaborées à partir d’une méthodologie fiable (acquise pour certain·e·s d’entre elles·eux dans le cadre d’un doctorat en sciences humaines). Plutôt que d’essayer de prouver que l’art ne doit pas s’intéresser au savoir ni chercher à en produire, n’est-il pas précisément nécessaire de réfléchir à la façon dont ces pratiques bouleversent les paradigmes de pensée à partir desquels on les observe ?

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Pour citer cet article

Référence électronique

Clémence Canet, «  Carole Talon-Hugon, L’Artiste en habits de chercheur », Critique d’art [En ligne], Toutes les notes de lecture en ligne, mis en ligne le 04 juin 2022, consulté le 08 novembre 2025. URL : http://journals.openedition.org/critiquedart/77948 ; DOI : https://doi.org/10.4000/critiquedart.77948

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