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2021

Patricia Bickers, The Ends of Art Criticism

David Zerbib
The Ends of Art Criticism
Patricia Bickers, The Ends of Art Criticism

London : Lund Humphries, 2021, 144p. ill. 20 x 14cm, (New Directions in Contemporary Art), eng

Bibliogr. Index

ISBN : 978184224261

Préf. de Marcus Verhagen

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Texte intégral

1La critique d’art est-elle entrée en état de « crise mondiale » comme l’a proclamé l’historien de l’art James Elkins en 2003 dans What Happened to Art Criticism?, texte polémique dont le constat sans appel fut notamment répété lors d’une conférence annuelle de l’Association internationale des critiques d’art (AICA) à la Tate Britain en 2010 ? Editrice en chef de la revue britannique Art Monthly depuis trente ans, Patricia Bickers défend, à partir de son expérience, un tout autre diagnostic à propos de la critique d’art contemporaine. Dans The Ends of Art Criticism elle affirme en effet que la critique d’art est loin du statut de pratique moribonde qu’on lui confère si souvent. Paradoxalement, écrit-elle, c’est « lorsque la critique n’est pas perçue comme étant en crise » qu’il est « temps de s’inquiéter ». Qu’arrivait-il à la critique d’art lorsque semblait régner le consensus sur les normes du jugement esthétique et que le critique d’art s’érigeait en magistrat du bon goût, distribuant littéralement des points comme au temps de Roger de Piles ou de Jonathan Richardson, ou identifiant qui est légitime à exprimer l’essence de l’art, séparant la forme pure de l’impure, ou déclarant quelle culture est high et laquelle est low ? Il arrivait dans ces conditions que la critique d’art exerça un pouvoir discriminant – discrimination qui, étymologiquement, traverse toute critique comme toute crise – susceptible d’interdire une certaine vie de l’art et de compromettre l’émancipation de pensées et de formes marginales porteuses d’autres valeurs et d’autres expériences. C’est donc moins la critique d’art qui se meure, estime l’auteure, que la figure autoritaire du critique et son pouvoir discriminant, dont l’apogée correspond au règne du formalisme moderniste. Ses analyses dessinent au fond un paradigme opérant à grands traits de Giorgio Vasari à James Elkins en passant par John Ruskin, Roger Fry, Clive Bell, Clement Greenberg ou Michael Fried. Déterminé par tous les « C » de la critique – « criteria, critical consensus, the concept of critical distance and the canon » [critère, consensus critique, concept de distance critique et canon] – ce modèle a implosé. Diffractée par les nouveaux médias numériques de sa diffusion, pluralisée dans ses valeurs et ses voix, engagée dans des contextes sociaux, politiques et culturels spécifiques, située plus que distante, en particulier face à des œuvres liées directement aux nouvelles formes de revendications portant sur les questions de genre, de sexualité, ou de mouvements comme Black Lives Matter, la critique d’art, montre Bickers en s’appuyant sur de nombreuses œuvres contemporaines, se renouvelle. Elle doit désormais « articuler les différences », « décrire », « engager la conversation », en permettant l’émergence de voix minoritaires afin de produire notamment des « sites de résistance ». Désormais la critique d’art ne serait plus en mesure de construire une tour d’ivoire autonome aux vues supérieures. Elle fonctionnerait plutôt comme un glitch, capable d’interrompre par endroits les flux informationnels, culturels et économiques dans lesquels elle est immergée. De cette manière, elle rendrait possibles d’autres connexions de sens et d’autres capacités d’action, témoignant ainsi de sa vigueur politique.

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Pour citer cet article

Référence électronique

David Zerbib, «  Patricia Bickers, The Ends of Art Criticism », Critique d’art [En ligne], Toutes les notes de lecture en ligne, mis en ligne le 30 novembre 2022, consulté le 29 mars 2024. URL : http://journals.openedition.org/critiquedart/85889 ; DOI : https://doi.org/10.4000/critiquedart.85889

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