1Les anciens médias sont bridés par des institutions et souvent limités par leurs moyens techniques, en revanche, les nouvelles technologies viennent ajouter de nouvelles capacités. C’est avec raison que Frédéric Worms (2017 : 155) considère Internet comme un « outil massif de démocratisation ».

2Les nouveaux médias facilitent la lutte pour la justice avec leurs lanceurs d’alerte ainsi que l’organisation des manifestations et/ou la dénonciation des répressions. Michel Serres (2012) évoque le « connectif » qui vient au secours d’un collectif évanescent, apportant la solidarité et la protection à des sujets jadis fragilisés face aux institutions étatiques ou privées.

3A la différence des médias classiques qui ne peuvent donner accès qu’à un niveau d’interactivité très limité, les Plateformes Numériques, par leur immense aptitude d’interactivité contribuent à donner un pouvoir d’expression et de réunion accru aux citoyens et davantage d’opportunités de délibération collective. Ils exercent ce que l’on pourrait appeler « pouvoir d’interpellation » et « pouvoir de mise à l’agenda ».

4La propagande désigne ici toute « action entreprise délibérément avec pour seul objectif de faire penser, de faire croire ou de faire agir un individu ou un groupe d’individus dans un sens et avec une intention déterminés » (Balle, 2006 : 337). Aussi, faut-il préciser avec Ellul Jacques (1962 : 181) que bien plus que l’adhésion du citoyen à une opinion, « orthodoxie », il s’agit d’ « obtenir une orthopraxie », c’est-à-dire susciter ou déclencher l’action.

5Aujourd’hui, l’on observe que différentes conceptions du panafricanisme et/ou de la françafrique portées par des activistes irriguent davantage les débats dans l’espace public numérique. Pour Camara, s’il existe un concept galvaudé à bas frais actuellement dans les débats qui secouent le continent africain et particulièrement l’espace francophone, c’est bien celui du panafricanisme. Pour beaucoup, à le suivre, « il suffit d’être contre la France ou la politique menée par les autorités françaises en Afrique et ailleurs pour être panafricain. Pour d’autres, il suffit d’exprimer une prévention contre les liens de soumission entre un pays africain et une puissance impérialiste pour être panafricain » (Camara, 2022 : 1).

6S’inscrivant dans cette perspective, Abdoulahi Attayoub note que l’émergence d’un populisme radical au Sahel devient progressivement un nouveau facteur d’instabilité dans la sous-région ouest-africaine. Par des exhortations simplistes, « ce populisme radical cherche à instrumentaliser et à travestir la noble idée du panafricanisme dont les pères fondateurs ne pourraient se reconnaître dans les contre-valeurs mises en avant par certains activistes actuels » (Attayoub, 2022 : 1).

7Dans une autre démarche, moins enclins à jeter aux orties la notion de Françafrique, certains auteurs (Borrel, Deltombe, 2022) ont plutôt cherché à en étudier les origines. Envisagées dans le temps long, les relations néocoloniales entre la France et l’Afrique témoignent, selon la thèse défendue par ces chercheurs, d’une étonnante capacité à s’adapter pour perdurer, en dépit des proclamations de rupture ou des apparences de délitement.

8L’expansion des récits pro-Russes et anti-Occidentaux en Afrique francophone est bien réelle sur les Réseaux Sociaux Numériques. En revanche, il faut bien dire que cette propagande qui favorise de plus en plus l’influence de la Russie sur le continent africain peut être perçue comme une réponse visant à rattraper ou du moins à rétablir un certain équilibre au discours longtemps dominant dans l’agenda médiatique des propagandistes français et/ou occidentaux.

9Sur la plateforme Twitter devenue X, des cyberactivistes comme Kémi Séba, Nathalie Yamb ou des avatars comme Chris Yapi en Côte d’Ivoire qui se définit comme un enquêteur et un infiltré ouvertement hostile au pouvoir d’Abidjan affrontent régulièrement des trolls comme Gauthier Pasquet au Mali plutôt présenté comme un « suppôt » de la françafrique. Si l’on admet que les plateformes socionumériques favorisent la libre expression des idées, il est à regretter que la violence de certains contenus et commentaires, la haine en ligne et la désinformation relevées sur des comptes Twitter d’activistes africains constituent de réelles menaces sociopolitiques.

10Dans la recherche de la nécessaire conciliation entre la liberté d’expression et la responsabilité, au nom du respect de l’ordre social et des droits des personnes, il se pose la question de la régulation des contenus sur la plateforme numérique Twitter. La régulation trouve son fondement dans le fait qu’ « une société, pour survivre, a besoin de régler la liberté humaine : d’où la « morale » avec ses impératifs » (Worms, 2017 : 97). Aussi, des mécanismes institutionnels ou encore les plateformes numériques elles-mêmes ne devraient-ils pas exercer un contrôle voire une régulation plus accrue des contenus potentiellement dangereux ? Il nous semble que les réseaux sociaux comme Twitter contribuent à la démocratisation de nos sociétés africaines, toutefois, les graves dérives de certaines publications fragilisent le pluralisme de l’expression démocratique et mettent en péril la cohésion sociale. La présente contribution vise donc à relever la nécessité de renforcer le cadre juridique et les mécanismes de régulation des plateformes numériques comme Twitter.

11A partir d’approches essentiellement qualitatives et relativement diversifiées au regard des concepts analysés, notre démarche repose sur l’analyse des comptes Twitter des cyberactivistes et la recension d’ouvrages relatifs aux travaux qui appréhendent les discours sur le panafricanisme et la françafrique dans la formation des opinions en Afrique francophone et la régulation des contenus sur Twitter.

12Il existe des RSN dignes d’intérêt comme Facebook, renommé Meta, beaucoup plus populaire auprès d’une population diversifiée. Le choix de Twitter repose sur une motivation essentielle, « Twitter étant une plateforme de diffusion publique, les contributions des ses usagers participent à l’animation de l’espace public politique au même titre que les sites d’information ou les blogues » (Smyrnaios, Ratinaud, 2013 : 124). Et, l’utilisation de plus en plus intensive de Twitter par le personnel politique, les journalistes, les blogueurs, les militants politiques et les activistes en témoigne (Lotan et al., 2011).

13En effet, Twitter permet à des formes de mobilisation militante de faire émerger des idées ou une cause dans l’espace public numérique en dépit parfois de l’indifférence des médias dominants. Les échanges sur un sujet donné sur Twitter se structurent généralement autour de mots-clés appelés hashtags, précédés du symbole dièse (#panafricanisme, #panafricons) qui permettent de rechercher et de suivre des messages. Selon Segerberg et Bennett (2011), le hashtag permet de générer des streams, c’est-à-dire des flots de messages dont le fonctionnement est complexe. Ils peuvent servir à rallier une communauté, à créer un champ de débats pour des points de vue contradictoires, à attirer l’attention du public de manière ponctuelle ou à effectuer de la veille autour d’un thème et ceci dans la durée (Smyrnaios, Ratinaud, 2013 : 126).

14Les travaux de Bernhard Rieder (2012) proposent au chercheur qui s’intéresse à Twitter trois types de collecte de données : la collecte exhaustive de toute la production de messages diffusés sur Twitter ou d’un échantillon aléatoire statistiquement correct (via la Streaming API) ; la collecte de la production de messages d’un ensemble d’usagers sélectionnés en fonction de critères prédéfinis (langue, géolocalisation, graphe) et enfin, la collecte de messages comportant un mot-clé spécifique.

15La présente étude procède d’une analyse descriptive des contenus proposés par des activistes sur le réseau social Twitter avec les mots-clés ou les hashtags #Panafricanisme, #Panafricons, #Françafrique, #néocolonialisme. A partir d’un répertoire de l’ensemble des tweets produits par les activistes Kémi Seba, Nathalie Yamb, Chris Yapi et Gauthier Pasquet, notre démarche fait le choix de l’analyse de discours thématiques des fils de discussions comme technique d’analyse.

16Pour David Longtin (2022), l’analyse de discours est une méthodologie qui se distingue de l’analyse de contenu. Elle s’appuie sur des marques linguistiques pour établir son interprétation du sens. En outre, elle procède à une analyse des marques énonciatives attestant des actes de langage et de l’ancrage contextuel du discours. Nous faisons une analyse diachronique des tweets diffusés par ces activistes entre 2020 et 2023.

17Dans l’espace dédié à sa biographie sur Twitter, Kémi Seba se présente comme un idéologue panafricain au XXIe siècle et Président de l’ONG Urgences Panafricanistes. Très actif sur la blogosphère en Afrique francophone avec plus de 219 000 followers. Il a rejoint le réseau social numérique en aout 2011. Quant à Nathalie Yamb sur Twitter depuis juin 2012, elle se dit résolument engagée pour une Afrique affranchie des tutelles avec environ 351 000 followers. Chris Yapi, un avatar qui change très souvent de compte, réapparait sur Twitter en juillet 2020 dans un contexte de rupture entre le Président Ivoirien Alassane Ouattara et l’ancien Président de l’Assemblée Nationale, Guillaume Kigbafori Soro. Il compte plus de 26 000 abonnés. Enfin, Gauthier Pasquet, un autre avatar qui se dit « journaliste indépendant » et « lanceur d’alertes » est sur Twitter depuis aout 2021. Il est suivi par plus de 30 000 abonnés.

Les concepts de panafricanisme et de la françafrique et la propagande politique en Afrique francophone

18La propagande est généralement perçue comme une action de diffuser, de faire connaître et surtout de faire admettre une doctrine, une idée ou encore une théorie politique. Sa finalité est de susciter une mobilisation et un ralliement des partisans en les influençant. Jean Paul Truxillo (1991) l’appréhende comme l’ensemble des actions de communication partisane destinée à influencer les personnes ou les groupes de sorte à faire adopter une idée, un système ou une personnalité politique. La propagande repose sur un message unique auquel le public n’a d’autres choix que l’adhésion.

19Les concepts du panafricanisme ou encore le néocolonialisme et la françafrique sont abondamment mobilisés par des activistes africains à des fins propagandistes dans le débat public en Afrique francophone. Les discussions et les empoignades autour de ces thématiques marquées parfois d’une rare violence se sont exacerbées depuis la crise en Centrafrique mais surtout avec la survenue des coups d’Etat militaires au Mali, en Guinée et au Burkina Faso.

20Le panafricanisme, à l’origine, selon Moritié Camara (2022), renvoyait à un mouvement politique et idéologique de l’intelligentsia afro-américaine qui a vu le jour dès le 18^ème siècle dans un contexte de lutte pour l’abolition de l’esclavage. Il y a donc, poursuit-il, une forte prise de conscience du sort identique à tous les Noirs et la nécessité de fédérer leurs forces pour s’affranchir de toute forme de domination. Le panafricanisme se présente ici donc comme une volonté de créer une solidarité agissante entre tous les Afro descendants.

21Or, depuis quelques années, l’on assiste à l’émergence d’un nouveau panafricanisme caractérisé par une « influence grandissante des franges les plus populistes et extrémistes de ses militants qui fondent leur idéologie sur des fantasmes identitaires étroits niant ainsi les réalités objectives du continent » (Attayoub, 2022 : 1). L’auteur en déduit que la virulence de leur discours contre la France et l’Occident cache mal une absence de projet politique inclusif susceptible de contribuer à sortir le continent de la marginalisation.

22Aussi, déplore-t-il, le fait que le nouveau discours panafricaniste développe une rhétorique étriquée fondée sur une conception par trop réductrice de l’africanité. De ce point de vue, il ne reprend que superficiellement et dénature l’héritage légué par les premiers théoriciens qui ont milité pour une réelle émancipation africaine tournée vers une unification du continent gage d’une participation effective dans le concert des Nations.

23Par ailleurs, après avoir découvert que le terme « Françafrique » était apparu sans doute pour la première fois en Une du journal L’Aurore dès le mois d’août 1945, et non dans les années 1950 ou dans les années 1960 comme beaucoup de gens ont pu le croire, Thomas Borrel et Thomas Deltombe décident donc de réinvestir cette notion et d’en proposer une définition. Ainsi, ce néologisme permet selon ces deux auteurs de désigner en même temps « les caractéristiques officielles (les mécanismes de coopération, l’aide au développement, les opérations militaires, la francophonie, le francs CFA, etc.) et les dimensions officieuses, voire crapuleuses de la relation franco-africaine (financements occultes de la vie politique française, réseaux financiers offshore, coups d’Etat, barbouzeries, etc.) (Borrel, Deltombe, 2022 : 2).

24A la différence de certains analystes qui dissocient ces deux facettes, ces auteurs tentent plutôt de comprendre comment elles interagissent l’une avec l’autre. La démarche qui consiste à montrer la complémentarité entre ces deux faces permet non seulement d’analyser le rapport très particulier que la France entretient avec l’Afrique, mais aussi de comprendre pourquoi le système néocolonial, qui s’est progressivement mis en place dès les années 1940-1950, a pu perdurer jusqu’à nos jours. Plus loin, ils notent qu’à bien y réfléchir, presque tous les termes qui servent à décrire les relations franco-africaines sont piégés ou, a minima, ambigus : « coopération », « partenariat », « développement », « aide », etc. Ce vocabulaire officiel, presque jamais questionné, jette un voile pudique sur une relation asymétrique, structurellement inégalitaire et toujours imprégnée par les imaginaires coloniaux, concluent-ils.

25Sur la question d’une éventuelle transition du néocolonialisme français vers de nouvelles formes d’impérialisme russes ou chinoises, les auteurs ouvrent le débat sur la tentation de certains leaders politiques africains ou des figures de la société civile jouant de la concurrence des impérialismes pour tenter de se défaire du néocolonialisme français. En effet, soutiennent-ils, « c’est un débat crucial en Afrique, car on voit bien, avec les exactions commises par les mercenaires russes du groupe Wagner, que le prix à payer pour la population peut être terrifiant ». Si l’analyse ici repose sur le fait que l’impérialisme est parvenu à faire croire aux peuples dominés qu’ils ne peuvent se passer d’une telle intervention externe, à l’opposé, « il y a des Africains qui ouvrent d’autres perspectives, c’est notamment le cas avec les mouvements de résistance panafricaine, qui ne tombent pas dans ce piège » (Bornell, Deltombe, 2022 : 9).

26Le numérique est porteur de nombreux espoirs, nous rappelle Anaïs Theviot, y compris en ce qui concerne le renouvellement des formes de participation et d’engagement politiques. Pour certains, écrit-il, « Internet pourrait donner les moyens à tous les citoyens de s’exprimer sans frontière temporelle ni spatiale, et tendrait à effacer la barrière classique entre gouvernants et gouvernés » (Theviot, 2018 : 24).

27La brulante actualité des débats sur le panafricanisme, le néocolonialisme ou encore la Françafrique portés par les cyberactivistes issus pour la plupart de l’Afrique francophone et aussi des pays occidentaux est entretenue et fortement relayée par les réseaux sociaux comme Twitter, un outil désormais au cœur des stratégies politiques et des « guerres d’influence sur les écrans ».

Les activistes africains dans la guerre d’influence (#panafricanistes vs #panafricons) sur la plateforme Twitter

28En marge du sommet de l’Organisation Internationale de la Francophonie (OIF), à Djerba (Tunisie), le 20 novembre 2022, le Président français Emmanuel Macron est revenu sur la propagande des « puissances » qui veulent abîmer l’image de la France en Afrique. Il dénonce les pays qui agacent Paris en se livrant à une guerre médiatique pour favoriser leurs intérêts et dénigrer les concurrents. (Essoungou, 2022).

29En face, la Russie renforce sa présence sur le continent via l’agence Tass et les radios et les télévisions RT et Sputnik. Déjà en 2019, lors du premier sommet Russie-Afrique à Sotchi auquel ont pris part quarante-trois chefs d’Etats du continent, la nécessité de combattre le discours occidental dominant dans les médias fut soulignée. A cette occasion, le directeur de l’agence Tass proposait notamment d’articuler « une autre vision du monde et des questions internationales » pour se distinguer de celle des « médias occidentaux ».

30D’un côté, la guerre d’influence sur les écrans africains ainsi déclenchée, c’est la Russie qui se montre plus active dans les médias sociaux en usant des techniques de manipulation comme les mensonges, les informations hors contexte, les sources douteuses et non vérifiées et les informations vraies mais manifestement mises en lumière pour nuire, et parfois pratiquées dans la publicité et rendues plus redoutables encore par les plateformes telles que Facebook et Twitter. Ainsi, Moscou réussit à peu de frais, à contester la domination longtemps sans partage des médias traditionnels français et partant, toute action de Paris est présentée au travers du prisme colonial et néocolonial (Graphika and Stanford Internet Observatory, 2020).

31D’un autre côté, Emmanuel Macron, très offensif dans son discours aux ambassadeurs français réunis le 2 septembre 2022 fait le constat que « le monde a changé et notre pays est souvent attaqué. Il est attaqué dans les opinions publiques par les réseaux sociaux et des manipulations. Le continent africain en est le meilleur laboratoire », ajoutant que les Français devraient se montrer « beaucoup plus agressifs, mobilisés sur ce sujet » (Essoungou, 2022 : 5).

32Autre constat, une guerre de propagande s’avive depuis le déclenchement de la guerre en Ukraine et, à coups de publications répétitives et insistantes, des comptes sur Facebook, Instagram et Twitter sont crées pour la diffusion orchestrée de discours antioccidentaux de la part des Russes. Parallèlement, des comptes actifs souvent fictifs, sur les mêmes plateformes s’évertuent à amplifier au détriment d’autres informations les critiques contre les autorités russes.

33C’est dans un tel environnement médiatique africain densifié par l’explosion des réseaux sociaux que des activistes comme Kémi Seba, Nathalie Yamb ou encore des bots et/ou des trolls comme Chris Yapi et Gauthier Pasquet mobilisent sur Twitter les arguments et les contre-arguments sur les concepts comme le #panafricanisme, le #néocolonianisme, la #françafrique. Un Bot est entendu comme un « logiciel autonome sur Internet qui interagit avec les utilisateurs et effectue des tâches prédéfinies ». Le Troll désigne une personne qui tente « délibérément de causer du tort ou d’attaquer directement des personnes en envoyant des remarques désobligeantes. Les fermes à trolls ou usines à trolls sont des groupes institutionnalisés de trolls sur l’internet dont le but est d’intervenir dans les opinions politiques et la prise de décision » (Commission européenne, 2022 : 12).

34Sur Twitter, au cœur des débats sur les ingérences internationales en Afrique, Kémi Seba, activiste anticolonialiste, multiplie les déclarations contre ceux qu’il qualifie de « marionnettes dévouées de la Françafrique ». Si Kémi Seba ne s’appelle pas ainsi à l’état civil mais plutôt Stellio Gilles Robert Capo Chichi, néanmoins, il milite à visage découvert. Lors, d’un récent thread, il affirmait que : « Le CEDEAO des peuples verra le jour dans un futur pas si lointain, composée de pays qui se seront débarrassés du néocolonialisme français, et plus globalement de la tutelle occidentale. Souvenez-vous de cette annonce. ». Ce tweet intervient suite aux sanctions annoncées par l’organisation sous régionale contre le pouvoir militaire au Niger.

35Dans un autre tweet, il a écrit : « Pour les dirigeants africains qui asphyxient leurs peuples et se soumettent au néocolonialisme français, la météo politique annonce l’orage… ». Il estime que le peuple pour son salut doit se lever pour clamer le départ des dirigeants à la solde de la France, « Françafrique, bientôt ta fin. En l’honneur de nos aînés morts en se battant contre votre système cancérigène ». En plus de son activisme sur Twitter, Kémi Seba organise des rencontres et participe à des meetings politiques où il tente d’exercer une influence ouvertement anti-occidentale et anti-française sur les opinions de jeunes africains francophones.

361. Capture d’écran du compte Twitter de Kémi Seba

37Tout comme Kémi Seba, un de ses proches, Nathalie Yamb est sur Twitter à visage découvert. Se définissant elle-même comme la « dame de Sotchi » depuis sa participation au Sommet Russie-Afrique à Sotchi en octobre 2019, Nathalie Yamb, de nationalité Suissesse d’origine camerounaise, est l’une des détractrices de la France et de ses alliés sur le continent. Dans un tweet qui date du 23 aout dernier, elle estimait que : « les soldats français doivent dégager. Le franc CFA doit disparaître. Le français comme langue officielle doit être supprimé. L’aide publique au développement doit être interdite. Le rôle de porte-plume au Conseil de Sécurité doit être aboli. Si vous considérez cela comme étant “anti-français” ou “pro-russe”, cela signifie que vous êtes des néo-colons nostalgiques et racistes, et que vous n’avez pas fini de pleurer».

38Ses prises de position sur la toile à l’encontre de la Françafrique sont fortement appréciées par ces « followers » qui les partagent abondamment, « Au 21e siècle, il y a encore des gens qui croient que leurs colons ont amené la civilisation en Afrique? A part votre bestialité, vos viols, vos vols, vos coups de fouet, votre travail forcé, vos chaînes et votre bouquin de religion penchée, vous avez apporté quoi? ». Les Présidents Alassane Ouattara de Côte d’Ivoire, Macky Sall du Sénégal ou en encore de Patrice Talon du Bénin font partie de ses cibles préférées, « N’oubliez jamais que ce qui maintient Macky Sall en place et lui donne l’assurance de l’impunité, c’est un système qui s’appelle Françafrique dirigé depuis l’Élysée par Emmanuel Macron. Pour faire main basse sur le pétrole et gaz vaut tous les morts africains ».

392. Capture d’écran du compte Twitter de Nathalie Yamb

40Sous le pseudonyme Gauthier Pasquet, cet activiste se présent comme un « journaliste indépendant », et « lanceur d’alerte ». Sa photo de profil est une usurpation, C’est celle d’un journaliste turc, Can Dundar, qui lui a demandé de ne plus l’utiliser, en vain. Le troll a ses cibles privilégiées que sont la junte malienne et les activistes Kémi Seba, Nathalie Yamb qu’il qualifie de « Panafricons ». Selon Le Mondafrique, Gauthier Pasquet est un « troll français, né au moment où Emmanuel Macron annonçait que la France était en guerre informationnelle et qu’il fallait riposter aux attaques des activistes et aux fausses informations divulguées par les pro-russes » (Le Mondafrique, 2022 : 1). Dans un tweet qui date du 28 janvier 2023, il manifestait son soutien à l’activiste et membre de la société civile malienne Aminata Dicko, « Soutien total à la vaillante à la vaillante @Dicko Amy. Pourquoi ils sont tous agités, ils ont des choses à se reprocher ». En réaction à un tweet du journal Jeune Afrique le 21 janvier 2023 sur une manifestation de personnes rassemblées devant l’ambassade de France à Ouagadougou pour réclamer le départ de l’ambassadeur Luc Hallade, « Ils n'ont rien dans la tête, ils veulent à tout prix remplacer la France par la Russie en Afrique, ils pensent que ces barbares de wagners sont mieux ? ». Nous notons que le compte s’est tu depuis le 16 juin 2023. Une date qui coïncide avec l’arrestation par les autorités ivoiriennes d’un individu soupçonnée d’être la personne qui se cache derrière ce compte.

413. Capture d’Ecran du compte Twitter de Gauthier Pasquet

42Quant à Chris Yapi, cet avatar aime se présenter comme un « journaliste d’investigation », un « infiltré et enquêteur », un opposant au régime d’Abidjan qui dévoile des informations prenant souvent la forme de « prophéties » dans le champ politique ivoirien. Son identité est inconnue encore moins la source de ses informations qui alternent entre fake news et scoops. Le 21 juin 2023, il publie : « Mais ne vous inquiétez pas je vais continuer de faire ce que je sais faire le mieux c’est à dire vous donnez des scoops et quand leurs vrais visages seront démasqués peut-être je vais me montrer ».

43Estimant être combattu par le pouvoir ivoirien qui, selon lui, veut le faire taire à jamais, il manifeste une sympathie pour Guillaume Soro, ancien Président de l’Assemblée Nationale, dont les partisans sont des relais très actifs de ces tweets. Ce dernier dans un thread lui apporte son soutien, « Soutien mon frère ils ne t’auront jamais. Le combat n’est pas encore terminé ».

44Si pour certains Chris Yapi est un Nudge, c’est-à-dire un vrai outil de manipulation, pour d’autres, son modus operandi laisse penser qu’il s’agit d’une technique de manipulation des foules, à scruter la nature des informations dévoilées qui portent gravement atteinte à la vie privée et à la dignité humaine et très souvent sont des incitations à la haine et à la révolte, par exemple, « grogne dans l’armée », convoyage d’armes », « tel a été empoisonné », « tel est l’empoisonneur », etc.

455. Capture d’écran d’une Fake news publiée par Chris Yapi

46Aujourd’hui, sur le champ de bataille idéologique africain, à l’ère des trolls réciproques, l’on retrouve ces auteurs numériques de controverses parfois artificielles mais pourvoyeuses de buzz monétisables. Par ailleurs, les plateformes numériques sont devenues des champs de bataille où la propagande politique y a trouvé un terreau fertile. Et il n’est pas rare de voir que « les armes n’y sont pas des missiles ou des chars, mais des fake news » (Libération et AFP, 14 février 2023).

47En effet, pour mener des campagnes de propagande visant à dénigrer la présence française en Afrique, le fondateur de la société de sécurité privée Wagner a crée l’Internet Research Agency de Saint-Pétersbourg, une officine surnommée la « ferme à trolls ». Selon lui, elle a été créée « pour protéger l’espace informationnel russe de la propagande grossière et agressive des thèses antirusses de l’Occident » (Libération et AFP, 14 février 2023).

48Selon Jeune Afrique, avec l’Association pour la recherche libre et la coopération internationale, l’Afric, le Kremlin, dans sa propagande anti-impérialiste a trouvé en Afrique des relais médiatiques comme le camerounais Banda Kani, Président du parti Nouveau Mouvement Populaire qui défend ouvertement de virulentes positions pro-Kremlin dans le conflit ukrainien. Au Mali, l’on retrouve une figure de proue de la présence de Moscou, Adama Diarra dit « Ben le cerveau », porte-parole du mouvement Yerewolo-Debout sur les remparts, une association malienne pro-russe, et en Centrafrique, Fred Krock, directeur de la radio Lengo Songo (Jeuneafrique.com, 6 avril 2022).

496. Capture d’écran d’un tweet et les commentaires sur le panafricanisme

50Face à l’émergence d’une culture de l’insulte facile, de l’intolérance, des discours de haine, des incitations à la violence et à la révolte ou encore des atteintes à la vie privée, il est urgent d’assainir et pacifier les plateformes numériques comme Twitter. Notre posture est, que l’on soit militant du panafricanisme ou défenseur de la Françafrique, la démocratie, entendue comme la cohabitation pacifique de points de vue souvent contradictoires doit contribuer à la qualité du débat public.

517. Capture d’écran d’un tweet portant sur les propos injurieux et dégradants

52C’est pourquoi, si l’on admet que la « production de l’information est un enjeu de lutte » (Cardon, Granjon, 2013 : 7), certaines aptitudes s’imposent comme l’habileté numérique qui requiert une « capacité d’accéder à l’information, de la gérer, de la comprendre, de l’intégrer, de la communiquer et de l’évaluer ainsi que de créer et de diffuser des informations, en toute sécurité et de manière appropriée à l’aide des technologies numériques » (Commission européenne, 2022 : 11).

53Le contenu de certaines publications et parfois des commentaires sur Twitter s’accompagne d’abus. Le fait d’être sur les réseaux sociaux renforce un sentiment d’impunité dû à l’anonymat ou au pseudonymat.

De la régulation des plateformes numériques

54Si l’on admet que les médias en général contribuent à la démocratisation de nos sociétés, il faudrait en revanche bien reconnaître que la démocratie se trouve elle-même menacée par eux surtout les nouveaux médias. C’est pourquoi Frédéric Worms nous rappelle à raison un principe, « comme toute invention technique, les réseaux sont à double tranchant, ils permettent un accès encyclopédique et de nouvelles Lumières, et la résistance démocratique à la tyrannie, tout autant que la diffusion nouvelle du mensonge et surtout du soupçon, et du cynisme généralisé » (Worms, 2017 : 158).

55Avec les nouvelles technologies, Sery Bailly relève que les médias sont plus pressés que jamais et la célérité qui veut faire le « buzz » n’a pas le temps d’analyser froidement les évènements et en profondeur. Le « culte de l’instant » n’encourage pas à intégrer la durée. Or, conclut-il, « toute négociation est une épreuve de patience » (Sery, 2017 : 9).

56Plus spécifiquement, l’utilisation de Twitter, comme de tout autre moyen de communication ou de publication doit bénéficier du principe fondamental de liberté d’expression. A celui-ci, nous précise Emmanuel Derieux, s’imposent cependant théoriquement des limites, au nom du respect de l’ordre social et notamment des droits des personnes qui seraient ainsi abusivement ou inexactement mises en cause. Sans que l’on puisse raisonnablement admettre que ce soit, à cet égard, « revendiqué, comme le font pourtant certains, un régime de liberté absolue, les obstacles, tant techniques que juridiques, à l’application de ces restrictions peuvent paraître constituer, en réalité, la principale sinon la meilleure garantie de ladite liberté et même de certains de ses excès » (Derieux, 2012 : 4).

57Les théoriciens de la régulation sociale la voient avant tout comme une science des règles, de la manière dont les règles peuvent permettre à un groupe de structurer et de mettre en œuvre une action collective. C’est ainsi qu’ils distinguent deux étapes dans l’adoption de ces règles : la négociation et la légitimation. A ces deux niveaux, les médias anciens comme nouveaux jouent un rôle important, en tant que moyen de construction de consensus ou de dé-légitimation (Sery, 2017).

58Or, l’on assiste depuis plusieurs années à une hystérisation des débats et une prolifération de la désinformation sur les plateformes numériques comme Twitter. La désinformation désigne des informations erronées, crées et diffusées délibérément dans le but de nuire et c’est justement cette intention de tromper qui la distingue de la mésinformation (Commission européenne, 2022). Elle regroupe entre autres les « Fake news », les faits « alternatifs » et les théories du complot qui se multiplient sur les Réseaux Sociaux Numériques dans notre ère de la post-vérité inondée d’informations (France culture, 2018).

59Aussi, lutter contre la désinformation, les injures et la haine en ligne est devenu un enjeu inévitable pour de nombreux pays et passe nécessairement par la légifération. Plusieurs problématiques se posent dès lors que l’on aborde la lutte contre les désinformations. D’une part, il s’agit de définir où s’arrête la modération des propos en ligne, et donc par extension de définir où s’arrête la liberté d’expression. D’autre part, il faut avoir des ressources techniques et humaines afin de détecter, analyser et effacer les désinformations (AP, 14 mai 2021).

60A ce propos, un bulletin de veille du Comité National Pilote d’Ethique du Numérique (CNPEN) nous indique que les plateformes doivent envisager trois angles d’attaque pour lutter efficacement contre la désinformation : les algorithmes, la viralité et la légitimité (Abiteboul & al., 2020).

61D’abord, les algorithmes sont les principaux mécanismes qui permettent de repérer la désinformation. Ils doivent être entraînés et supervisés par des modérateurs humains qui sont capables de détecter des erreurs ou des biais algorithmiques. Cette supervision représente un coût économique et humain important pour les entreprises. De plus, les plateformes évoquent le secret des affaires pour justifier l’absence de transparence (et donc des critères de modération) des algorithmes.

62Ensuite, le modèle économique de la viralité, notamment à travers les clics, est également responsable de la diffusion de la désinformation. Une recherche du Massachusetts Institute of Technology (MIT) a d’ailleurs démontré que les fausses informations se diffusent six fois plus vite que les vraies sur Twitter du fait des comportements des utilisateurs (MIT News, 2018). Ces derniers partagent ces contenus soit délibérément soit par négligence. Les plateformes doivent par conséquent mettre à disposition des outils afin d’informer l’utilisateur sur la nécessité de rester vigilant lorsqu’une information est particulièrement virale et suspecte.

63Enfin, les réseaux sociaux sont devenus des superpuissances au point où ils sont capables de bannir un président de la République de leur plateforme dans la plus grande autonomie (AFP, 2021). Ils ne font appel à aucune autorité indépendante pour prendre leurs décisions et n’ont de ce fait aucune qualité ni compétence pour juger le vrai du faux. Les critères de modération sont donc arbitraires car ils ne reposent pas sur « des principes explicites régulant les relations entre les plateformes et les gouvernements » (Abiteboul & al., 2020). Ce qui pose un réel problème de légitimité.

64Sur la question de la modération des réseaux sociaux qui apparaît comme une chimère aujourd’hui, Asma Mhalla fait remarquer que dans leur forme actuelle, les réseaux « plutôt que d’horizontaliser équitablement la parole de tous, ont été nervurés de failles systémiques qui fragilisent l’exercice démocratique » (Mhalla, 2023 : 1). Aussi, relève-t-elle, des failles de modération, fussent-elles involontaires ou non, des ingérences et surtout la désinformation à échelle industrielle, la polarisation et la brutalisation du débat public et « le doute philosophique et juridique sur ce que doit désormais être la liberté d’expression, son cadre, ses limites ». S’il est vrai que la modération à elle seule ne suffit pour assurer la qualité des débats sur les Réseaux sociaux Numériques, il ne faut sans doute pas perdre de vue les enjeux des modèles économique, technologique et idéologique des plateformes numériques.

65En France par exemple, la loi de 2008 relative à la manipulation de l’information a renforcé la transparence, en donnant plus de pouvoir au régulateur des médias, le Conseil Supérieur de l’Audiovisuel (CSA), pour surveiller les plateformes de réseaux sociaux et les mesures qu’elles mettent en œuvre pour lutter contre la désinformation. Les organisations supranationales comme l’Union Européenne posent la question de la régulation de l’économie numérique face à la « puissance exorbitante des acteurs oligopolistiques de l’Internet et une exigence sociale de plus en plus forte pour qu’ils rendent compte » (Smyrnaios, 2021 : 6).

66La législation sur les services numériques, le Digital Services Act (DSA) impose, entre autres, une série d’exigences que les intermédiaires en ligne sont tenus de respecter pour bénéficier du régime de responsabilité limitée mis en avant dans la directive européenne sur le commerce électronique de 2000. Ce qui signifie que si les intermédiaires en ligne ne veulent pas être tenus responsables des contenus générés par les utilisateurs sur leurs plateformes, ils devront renforcer leur réponse à l’impact nuisible de leurs différents services. Théophile Lenoir note que le débat outre-Atlantique sur la réglementation des réseaux sociaux semble s’être concentré sur l’amendement de la section 230, une partie du Communications Decency Act de 1996 qui crée une distinction entre les plateformes internet et les producteurs de contenu. (Lenoir, 2021).

67Plus près de nous, en Côte d’Ivoire, « est considérée comme activiste, une personne qui s’attache à une cause politique, économique, environnementale ou sociale et qui milite intensément pour la défendre à travers la publication sur les réseaux sociaux ». Et aux termes de la loi du 20 décembre 2022 portant régime juridique de la Communication audiovisuelle, « la diffusion du contenu audiovisuel de tout site de blogueur, d’activiste ou influenceur disposant de 25 000 abonnés en ligne n’a pas le caractère de correspondance privée ».

68Dans une approche plus radicale, Jacques Attali propose notamment des pistes possibles pour réduire le pouvoir des plateformes numériques à travers le retrait aux GAFA de l’appropriation des données personnelles et le dévoilement de leurs algorithmes. Par ailleurs, il préconise d’ « affaiblir le pouvoir monopolistique des GAFA (Google, Amazone, Facebook et Apple) et leurs homologues chinois, les BATX (Baidu, Alibaba, Tencent et Xiaomi) et même leur démantèlement » (Attali, 2021 : 415).

69Les technologies numériques modifient les façons de s’informer, de se mobiliser et de co-construire du collectif. Elles reproduisent les inégalités sociales et n’amènent pas de véritable révolution citoyenne et politique.

70C’est pourquoi, il faut bien le dire, tant qu’une réelle éducation au numérique n’est pas engagée pour tous les citoyens, il serait illusoire et chimérique de faire croire que les technologies numériques feront basculer les barrières classiques. Il faut dès à présent « apprendre à croiser les sources d’information, à ne pas croire que le nombre de partages d’un post sur un réseau social le légitime, à dépasser les bulles informationnelles, à s’autoriser à s’exprimer en ligne et à ne surtout pas envisager la Toile comme un défouloir » (Theviot, 2017 : 32).

71La confrontation des idées, fussent-elles les plus contradictoires sur Twitter, selon que l’ont soit panafricaniste ou défenseur de la françafrique ne doit pas se nourrir d’insultes faciles, de propos violents encore moins d’incitation à la haine et d’atteinte à la vie privée et à la dignité humaine.

72Les Réseaux sociaux numériques bruissent de rumeurs sur les uns et les autres et les colportent avec rapidité sans bien souvent prendre le temps nécessaire de la vérification. Et pourtant, « le propre de la démocratie est justement de construire une société sans humiliation » (Worms, 2017 : 31). Dans les sociétés anciennes, en Afrique subsaharien, pour avoir une idée de la gravité de l’humiliation, la Charte du Mandé (ou encore le Kurukan Fuga) dit en son article 41 : « On peut tuer l’ennemi, mais pas l’humilier ».