Navigation – Plan du site

AccueilNuméros45VariaLe neurone exposé : quatre exempl...

Varia

Le neurone exposé : quatre exemples contemporains de médiation muséale des sciences du cerveau

The exhibited neurone: four contemporary examples of museum mediation of brain sciences
La neurona expuesta: cuatro ejemplos contemporáneos de mediación museística de las ciencias del cerebro
Sébastien Lemerle
p. 155-177

Résumés

Le modèle traditionnel des musées et centres de science (MCS), fondé sur une représentation de la science comme distincte et autonome vis-à-vis du reste de la société, a connu ces dernières décennies des évolutions importantes, à la fois dans ses pratiques, avec la prise en compte de l’expérience des publics et la montée en puissance des expositions, et dans son orientation politique générale, marquée par une ouverture croissante aux questions culturelles, sociales et politiques. Cet article en propose une illustration à travers l’étude de quatre expositions récentes traitant du cerveau et de ses sciences, domaine faisant l’objet d’une attention croissante pour sa portée culturelle et politique. La comparaison de ces manifestations fait ressortir le recours systématique aux registres du ludique et du merveilleux scientifique au service d’objectifs didactiques classiques et de thématiques plus générales. Ce faisant, elle questionne une vision linéaire de la succession des modèles de MCS appréhendés comme des idéaux-types qui seraient caractéristiques d’époques données. Elle montre notamment la manière dont, au sein de ces expositions, s’hybrident conceptions traditionnelles relativement à la diffusion des connaissances scientifiques et dispositifs innovants, en matière notamment d’interactions avec les publics. Elle conduit aussi à réfléchir sur la possible différenciation des pratiques de médiation en fonction de la logique des institutions concernées, et invite ainsi à contextualiser davantage la vulgarisation muséale des sciences dans un espace socialement multidimensionnel.

Haut de page

Notes de la rédaction

Manuscrit reçu le 26 février 2024
Version révisée reçue le 30 août 2024
Article accepté pour publication le 6 décembre 2024

Texte intégral

1L’histoire des musées et centres de science (MCS) est celle de leur ouverture graduelle au monde social et aux questions politiques les plus générales. Placé initialement sous l’angle des lacunes à combler dans les connaissances du « grand public », selon la formule classique du deficit model, leur modèle traditionnel a d’abord posé la science comme distincte et autonome vis-à-vis du reste de la société (Hilgartner, 1990 ; Nieto-Galan, 2016 : 45-66 ; Schiele, 2017 : 48). Il demeure encore central de nos jours s’agissant des représentations relatives aux missions des musées de sciences : faire connaître au grand public les dernières découvertes et rendre hommage aux découvreurs et inventeurs ; montrer le lien entre sciences appliquées et recherche fondamentale ; faire naître des vocations de chercheur parmi les jeunes générations ; contribuer à la formation continue de la population ; développer le sens critique ; montrer que l’amélioration des conditions de vie passe toujours par les progrès de la science et de la technologie et œuvrer à l’évolution de la société sans mettre en péril l’avenir des générations futures (Schiele, 2014 : 41).

2Ce modèle, qui puise ses racines dans l’histoire des discours sur la science depuis le xviie siècle, commandait une conception de la diffusion scientifique comme « traduction », qui a été l’objet de nombreuses critiques dans le dernier demi-siècle, en pratique et en théorie, avec la reconnaissance des influences réciproques entre le champ scientifique et les autres champs sociaux, ainsi que, au sein de certains domaines scientifiques tels que la biomédecine, des réseaux et collaborations entre chercheurs et non-spécialistes (Macdonald, 1998a : 1 ; Bucchi, 2014 : 2). Les débats ont aussi porté sur les dispositifs à mettre en œuvre, les modes de médiation, les représentations de la science mobilisées, dans un contexte de contraintes multiples, sociales, culturelles, politiques, économiques. Depuis les années 1960, les sociétés européennes et nord-américaines ont par exemple connu une élévation majeure de leur niveau moyen de formation et de leurs conditions de vie générales, qui a radicalement changé le rapport des visiteurs aux musées de science. Les contraintes ont aussi relevé du champ des instances de conservation et de reproduction de la culture (Bourdieu, 1971 : 114), au sein duquel s’inscrivent les musées et où les musées de science ont « fréquemment été à l’origine des transformations de la pédagogie muséale », voire en ont été la matrice (Eidelman & Van Praët, 2000 : 4). Enfin, l’évolution de cette catégorie particulière de musée que sont les MCS a dépendu aussi de ses relations avec le champ scientifique, auquel elle n’appartient pas, mais dont elle contribue à favoriser, selon des logiques qui lui sont spécifiques, l’appropriation sociale des résultats, aux côtés d’autres champs et espaces comme ceux de la presse, de l’édition, des médias audiovisuels, des plateformes numériques en ligne, des associations, etc.

3Cet article se propose de contribuer aux débats sur les modèles sous-tendant les pratiques des MCS à partir de l’examen du traitement d’un domaine doté d’une haute portée symbolique dans les sociétés contemporaines, celui du cerveau et des sciences qui le prennent pour objet. Depuis plusieurs décennies, ce thème se situe en effet au carrefour d’idées à la signification politique et sociale majeure : l’individu, son identité, son autonomie (Lemerle, 2013 : 239-245 ; Ehrenberg, 2018 : 23-26). Les neurosciences cognitives semblent en particulier « devenues un des grands récits de l’individualisme contemporain en associant les idéaux de régularité à ceux de l’infinie possibilité à changer et à innover » (Ehrenberg, 2021 : 32). De façon significative, dans la dernière décennie, de nombreux MCS ont pris ce thème comme objet d’expositions d’ampleur, pour certaines permanentes.

4Notre enquête repose sur l’analyse de quatre expositions visitées en 2022-2023 en France, Grande-Bretagne et Italie. Elle montre, d’une part, la domination de dispositifs privilégiant certains registres (ludique, merveilleux, didactique/utilitaire) ainsi qu’une forte volonté d’ouverture en direction de thématiques culturelles ou sociales, voire politiques ; d’autre part, la permanence, sous des habillages parfois très modernes, de modes de transmission des connaissances traditionnels, c’est-à-dire verticaux et descendants ; enfin l’émergence d’autres institutions qui fait ressortir par contraste la place actuellement occupée par les MCS. Après un rappel sur l’évolution des modèles de musées scientifiques depuis le xxe siècle qui mettra en évidence l’importance récemment prise par les expositions et justifiera notre choix de terrains, puis une présentation de ces derniers, nous détaillerons les principaux registres auxquels recourent les quatre manifestations, avant de proposer un commentaire général comparant les résultats obtenus avec ceux d’une étude portant sur des expositions du même type organisées au tournant des années 1990-2000 (Molinatti & Girault, 2007).

Les musées scientifiques et techniques : du temple au forum ?

5L’histoire des musées scientifiques est habituellement divisée en quatre phases reflétant la place grandissante occupée par les publics non spécialistes dans les dispositifs muséaux (Schiele, 2014 : 45-51 ; Nieto-Galan, 2016 : 202-226 ; Pedretti & Navas Iannini, 2023 : 7-15). Le thème de la place des publics est omniprésent dans les discussions sur le type de savoir à dispenser, sur la nature de l’accueil et des interactions à organiser, sur la conception de la science à promouvoir. Après la période inaugurale des cabinets de curiosités, la première phase est celle de l’histoire des sciences et techniques, dont les établissements emblématiques, le Conservatoire national des arts et métiers à Paris (1794) et le Science Museum à Londres (1857), mettent d’ailleurs davantage en valeur la technologie que la science et exposent des objets techniques, industriels et artistiques. La deuxième phase est celle de la promotion de la science contemporaine et des progrès de la connaissance, emblématisée par le Palais de la découverte à Paris (1937). L’objectif ici est pédagogique et conduit à divers dispositifs éducatifs (visites guidées, conférences sur site, etc.), qui ne répugnent pas au spectaculaire et au divertissement. La troisième phase commence à la fin des années 1960, avec l’ouverture de l’Exploratorium à San Francisco et de l’Ontario Science Centre à Toronto. Il s’agit désormais de rendre science et savoir accessibles au moyen de dispositifs interactifs, de montrer la « science en action ». La place du visiteur au sein du musée connaît une évolution décisive : c’est la réflexion sur l’expérience de ce dernier qui détermine désormais l’élaboration des expositions et sa participation est « une condition du succès de la visite » (Schiele, 2014 : 49). Par ailleurs, la présentation des objets et des collections est désormais moins centrale que les explications scientifiques apportées à divers types de sujets. Ce mouvement s’accompagne de la montée en puissance des centres scientifiques, appelés en France centres de culture scientifique, technique et industrielle (CCSTI), dont la Cité des sciences et de l’industrie (CSI, 1986) à Paris est l’établissement-phare. L’accent est aussi de plus en plus mis sur la proposition d’une expérience reposant sur la participation des visiteurs (Schiele, 2014 : 46), au moyen par exemple d’installations proposant manipulations, lectures, écoutes et visionnages, dans un cadre de plus en plus interactif et attrayant, qui trouvera une autre forme de concrétisation dans les décennies suivantes avec l’introduction de technologies comme la réalité augmentée. La quatrième phase, qui débute dans les années 1980, est celle de la mise en relation de la science avec les réalités sociales. L’évolution est ici moins institutionnelle que politique. Un nombre croissant de MCS abordent des sujets sensibles, voire controversés, dans le but déclaré d’aider les citoyens à se former une opinion éclairée sur les questions de plus en plus nombreuses posées par le recours aux sciences dans la société (Pedretti & Navas Ianinni, 2023). Des espaces de dialogue (débats, forums) sont ainsi ménagés pour permettre aux publics d’exposer leurs points de vue, leurs expériences, voire leurs expertises, amplifiant la notion d’interactivité au-delà de sa simple dimension technologique (Barry, 1998 : 85). Cette tendance a récemment connu une inflexion, après la crise économique de 2008 et les baisses de financement qui se sont ensuivies. Les musées ont dû chercher à attirer davantage de visiteurs et à contracter davantage de partenariats, particulièrement en Amérique du Nord, où l’aide publique aux MCS est plus limitée. Une culture managériale a étendu son emprise sur le champ de la culture, avec la formulation d’objectifs et de critères de performance, entrant souvent en contradiction avec l’ethos de ce milieu professionnel, ses valeurs et ses attentes (Schiele, 2017 : 51), accentuant une tendance déjà à l’œuvre depuis les années 1980 de marchandisation de la culture scientifique (Macdonald, 1998b). Un autre phénomène important a résidé dans la professionnalisation accrue du secteur, avec l’essor du métier de médiateur scientifique (Bergeron, 2016). En a résulté l’accroissement de la focalisation sur les visiteurs, moins dans l’optique de partage des connaissances et de participation héritée des années 1970 que dans celle d’une culture du résultat, avec ses effets sur la programmation et les activités proposées aux publics.

  • 1 En dépit de profondes différences entre les époques, la « première culture de la curiosité », avant (...)

6L’une des principales traductions de ces évolutions est la domination du dispositif de l’exposition temporaire, une innovation des années 1980 qui peut être aussi considérée comme une forme de réactualisation de formes pré-muséales1, renforcée par tout l’arsenal des technologies de la communication, installable dans plusieurs établissements, le plus souvent louable ou vendable, et aux thèmes de plus en plus indépendants des collections des musées. Plus récemment, la tendance en matière de conception a en outre été de s’affranchir de la dépendance à un domaine scientifique strict et de procéder à des associations de disciplines, d’objets et d’approches dictées par le thème choisi (Schiele, 2014 : 51-52). La priorité plutôt accordée à l’aspect divertissant de ce qui est présenté a eu pour conséquence de rendre de moins en moins nécessaire la prise en compte du niveau de compétence scientifique supposé des visiteurs. On retrouve ce changement dans les interventions des scientifiques eux-mêmes, qui peuvent être amenés à parler non pas de leurs objets de recherche, mais de leur vie de chercheur, des coulisses de leur quotidien de laboratoire, etc. En revanche, l’exposition s’accompagne souvent d’événements (conférences-débats, visionnage de documentaires, ateliers, etc.) qui sollicitent davantage la réflexivité, la participation et éventuellement l’expertise des publics.

7Ainsi, l’évolution des MCS nous fait retrouver le vieux dilemme sur le fait de savoir si ceux-ci doivent être des temples du savoir ou des forums de discussion (Cameron, 1971), dans le contexte de l’influence accrue des considérations financières et commerciales. Les vingt dernières années ont vu aussi entrer de plus en plus en concurrence deux visions des MCS, l’une préoccupée par la diffusion de discours sur les résultats, les acquis, voire les vérités scientifiques, en d’autres termes la « science stabilisée », et l’autre attachée à montrer une recherche moins sûre d’elle-même, moins affirmative, du fait des risques entraînés par les technosciences et de la moindre légitimité de la notion de progrès dans les discussions publiques (Schiele, 2014 : 54). L’attention portée à la science « en train de se faire », aux controverses et conflits qui la traversent, a pour objectif d’inciter les publics à prendre davantage part aux discussions sur les sujets cruciaux de l’époque, du dérèglement climatique aux organismes génétiquement modifiés, en passant par l’énergie nucléaire. Du fait de leur promotion de la critique, de la responsabilité sociale et de l’action civique, « l’heure du changement » aurait même « sonné » pour certains MCS, qui se voudraient acteurs au sein d’un nombre croissant de débats (Pedretti & Navas Iannini, 2023).

  • 2 Une autre comparaison éclairante ici serait celle des évolutions respectives du musée du CNAM et du (...)

8Les discussions autour de l’action des MCS se réfèrent ainsi souvent au modèle qui les influencerait, au paradigme qui sous-tendrait celui-ci, au message que les MCS voudraient véhiculer. Une telle approche consiste essentiellement en une étude des évolutions de l’offre muséale et peut être articulée à celle des modèles de la médiation scientifique, qui vont d’un modèle classique de vulgarisation verticale et descendante, qui traverse les deux premières phases décrites précédemment, à l’« engagement » et l’appropriation de la science par les publics (public engagement in/with science), en passant par les études sur la réception et les usages de la science (public understanding of science) (Lemerle, 2021 : 130), ces deux derniers modèles étant davantage caractéristiques des phases postérieures aux années 1970. Cette approche a toutefois tendance à souffrir des défauts du raisonnement par idéaux-types, qui risque toujours d’occulter les variations inhérentes à l’histoire de chaque établissement et le caractère nécessairement mosaïque des politiques contemporaines. Les établissements créés sous l’égide d’un modèle donné peuvent en effet voir leurs principes directeurs varier selon les époques, comme le montre le cas de la CSI, qui s’inscrit de nos jours dans les quatre modèles historiques dégagés2. Cet exemple illustre aussi le fait que l’offre d’une institution résulte d’une hybridation plus ou moins importante des différents modèles, du plus classique et descendant au plus récent et socialement engagé. Pour autant, est-il possible de repérer des tendances communes ? C’est ce que cet article se propose de faire, à partir de l’exemple d’expositions sur le cerveau.

Présentation du terrain et des méthodes

9La recherche a porté sur quatre expositions, à Paris, Venise, Londres et Rennes, consacrées au cerveau et aux sciences qui le prennent pour objet.

  • 3 Voir la page consacrée à l’exposition, visitée en juin 2022, sur le site internet de la Cité des sc (...)

10À Paris, Cerveau, l’expo neuroludique est une exposition permanente proposée depuis 2014 par la CSI. Elle a été conçue sous la direction de Stanislas Dehaene, professeur en psychologie cognitive expérimentale au Collège de France3. Organisée en trois parties (développement et fonctionnement du cerveau, apprentissage et mémoire, vie en société), elle entend faire découvrir la manière dont le cerveau humain fonctionne en proposant notamment au visiteur de tester ses capacités par le biais de jeux, d’épreuves et de diverses expériences.

11À Venise, l’exposition It Begins with an Idea de la Fondation Prada présente la particularité d’avoir été élaborée au sein d’une institution ne s’apparentant pas aux MCS. Elle s’est tenue dans le cadre du programme « Human Brains », organisé entre 2018 et 2023 à Milan, Venise et Shanghai par la Fondation Prada sur le thème des neurosciences et qui comprenait aussi des conférences et divers événements culturels4. Installée sur les trois niveaux de la Ca’ Corner della Regina, palais du xviiie siècle situé au bord du Grand Canal, cette manifestation a été organisée par le conservateur de musée Udo Kittelmann et pilotée par un comité scientifique présidé par Giancarlo Comi, professeur en neurologie à l’université de Milan, et composé de spécialistes en neurosciences, neurologie, psychologie, linguistique, philosophie et vulgarisation scientifique5.

  • 6 Exposition visitée en février 2023.

12À Londres, le Science Museum abrite depuis 2000 l’exposition permanente Who Am I?, actuellement présentée dans une version remise à jour en 2016 (Science Museum, 2016)6. Elle consiste principalement en dix-huit vitrines et, de chaque côté de ce dispositif central, cinq modules proposant des activités interactives aux visiteurs les plus jeunes (jeux, quiz, vidéos, expériences, etc.).

  • 7 Sur le lancement de l’exposition, visitée en mars 2023, voir Humbert, 2021.
  • 8 Voir le site de l’Espace des sciences : https://www.espace-sciences.org et celui des Champs libres  (...)

13À Rennes, l’exposition permanente Incroyable cerveau du CCSTI Espace des sciences a été ouverte en septembre 2021. Réalisée par une équipe de médiateurs scientifiques assistée de conseillers scientifiques travaillant en Bretagne (chercheurs de l’Inserm, psychologues, etc.)7, elle occupe une salle entière de ce CCSTI au sein des Champs libres, établissement culturel où se trouvent aussi la Bibliothèque de Rennes et le Musée de Bretagne8. Elle est structurée en plusieurs espaces où prédominent des installations ludiques et interactives.

14Chaque exposition a été étudiée sur le mode de l’observation participante. Chacune d’entre elles a fait l’objet d’une visite s’attachant essentiellement à ses dispositifs expographiques, qui a donné lieu à une analyse de type ethnographique : relevé topographique, prise de photographies, participation aux animations et ateliers. Cette analyse a été complétée par l’étude de documents disponibles en ligne et sur place : sites internet, plans et brochures de description des expositions, rapports d’activité des institutions, ainsi que, selon les cas, audioguide, catalogue, articles de presse.

  • 9 Dans le domaine francophone, voir, pour les expositions et les musées : Babou & Le Marec, 2003 ; Mo (...)
  • 10 Cette attention aux pratiques et aux dispositifs n’impliquait pas par ailleurs de solliciter des en (...)

15Le domaine choisi pour cette enquête, le cerveau et ses sciences, a fait l’objet depuis plus de vingt ans de nombreuses études, dans différents contextes9. Ces dernières ont souvent porté sur les partis pris épistémologiques, les biais idéologiques et les systèmes de valeurs sous-tendant les discours de vulgarisation neuroscientifique : « représentations de la rationalité » (Babou, 2004 : 94 et suiv.), « persistance du dualisme corps/esprit » (Molinatti & Girault, 2007 : 106), « biologisme libéral » (Lemerle, 2013 : 239-245), etc. Cette enquête comparative, visant à discuter des modèles sous-tendant l’action des MCS, s’est plutôt intéressée à la façon dont les discours sur le cerveau sont donnés à voir et à entendre. Elle a ainsi porté sur les modalités par lesquelles les discours sur le cerveau sont proposés aux visiteurs, des registres employés aux aspects matériels par lesquels ceux-ci sont exprimés. Autrement dit, elle s’est davantage attachée aux pratiques de médiation, entendue comme « un ensemble de formes de facilitation d’accès et de traduction d’une offre culturelle » (Bordeaux, 2008 : 61), au sein d’un lieu (l’exposition) spécialement conçu pour établir une relation entre le monde scientifique et le « public » selon des modalités en principe éloignées du modèle scolaire (Bergeron, 2016)10.

Trois modalités du discours muséal sur le cerveau et ses sciences

  • 11 L’expression « merveilleux scientifique » est à prendre ici au sens défini par Jacques Le Goff (198 (...)

16Les dispositifs mis en œuvre par les quatre expositions présentent de nettes différences, mais aussi de nombreux points communs. Leur comparaison fait essentiellement ressortir une visée didactique partagée et un recours général à des dispositifs interactifs, majoritairement ludiques, ainsi que, sur le plan scénographique, à diverses formes de « merveilleux scientifique11 ».

Une visée didactique

  • 12 « Cerveau, l’expo neuroludique ». Cité des sciences et de l’industrie, en ligne : https://www.cite- (...)

17Un point commun entre les quatre manifestations est que chacune cherche à remplir une fonction de diffusion d’informations visant à instruire les visiteurs sur la structure et le fonctionnement du cerveau, voire à montrer la portée des recherches neuroscientifiques et leurs diverses applications. L’une des plus avancées en la matière est Cerveau, l’expo neuroludique, qui débute par une section consacrée au développement du cerveau, à ses composantes (le neurone et sa structure, les cellules gliales) et la manière dont l’information y circule, tout en accordant aussi une large place aux techniques d’imagerie cérébrale et à leur histoire (électro-encéphalographie, imagerie par résonance magnétique, etc.). Cette visée didactique se voit aussi au volumineux catalogue de l’exposition et à la page web la plus riche entre les quatre expositions, proposant des liens vers diverses versions de l’audioguide (pour public adulte et enfant), des ressources documentaires (rubriques consacrées aux principales notions, ressources en ligne, bibliographie d’ouvrages disponibles à la médiathèque de la CSI, etc.)12.

18On retrouve la même préoccupation dans Incroyable cerveau, dont tous les dispositifs, y compris les plus ludiques, débouchent sur un exposé sur le thème traité, dans lequel tous les termes techniques (système limbique, sérotonine, thalamus, etc.) sont expliqués. Des ateliers autour de certaines notions sont également proposés. L’exposition comporte aussi, un peu à l’écart des installations principales, un espace « Neuroactus », constitué d’un écran interactif sur lequel le visiteur doit trouver des réponses à quelques questions préalablement formulées ainsi qu’un mur où sont affichées des « Neuroinfos ».

  • 13 Ma traduction, ainsi que pour toutes les citations suivantes.
  • 14 Siècle des Lumières.

19Un propos d’apparence didactique peut aussi tendre à une plus grande complexité. Dans l’exposition vénitienne It Begins with an Idea, on commence par suivre, au rez-de-chaussée du palazzo, sur des gradins faisant référence à la configuration traditionnelle des amphithéâtres des leçons médicales, des vidéos sur les découvertes en neurosciences. Dans deux espaces adjacents à cette installation principale, conçus sur le même modèle, sont diffusées de courtes conférences enregistrées sur les thèmes du mouvement, de la perception, du langage, de la mémoire ou de l’émotion. Puis l’exposition aux étages supérieurs suit une orientation plus historique. S’y trouvent des vitrines exposant des ouvrages et objets anciens (instruments chirurgicaux, amulettes, etc.), des revues, des peintures, des gravures, des dessins, témoignant « de siècles de tentatives », parfois erronées, voire délirantes, « pour comprendre le cerveau humain » (Fondazione Prada, 2022a : 8)13. Se présentant comme une « tentative multidisciplinaire de comprendre le cerveau humain », affirmant la « complexité intrinsèque » et l’« irréductible singularité de chaque individu » (ibid. : 3), l’exposition se révèle être un hommage à la science, visant à établir la portée culturelle et humaniste des recherches sur le cerveau, sans en dissimuler les contradictions ni certaines impasses, au moyen d’un grand récit téléologique, marqué du sceau de l’Aufklärung14, qui semble l’emporter sur le propos purement didactique de la manifestation.

20Dans l’exposition Who Am I?, le registre didactique ne concerne pas principalement les sciences du cerveau, ces dernières étant plus mobilisées à titre de discours auxiliaire et de justification scientifique pour un propos plus général. L’exposition porte en effet sur le thème de l’identité individuelle, abordée à l’aide de l’éclairage de la génétique et des sciences du cerveau (neurosciences, psychologie cognitive). Le propos s’articule autour de deux leitmotivs faisant l’objet d’une affiche à l’entrée de l’exposition : s’appuyer sur les sciences pour s’interroger « sur ce qui fait de nous des êtres humains et sur ce qui rend chacun d’entre nous unique ». L’idée générale est que nous sommes ce que la biologie fait de nous, mais sous l’influence de l’environnement. Cette orientation rattache clairement l’exposition au tournant progressiste des MCS, dont il a été question précédemment, en direction des « questions de société ». Les cartouches, très imagés, comportent nombre de témoignages et d’exemples pris dans la vie quotidienne. L’exposition est divisée en cinq sections, trois s’appuyant essentiellement sur la génétique (sur l’apparence physique, l’ADN, etc.) et deux sur les sciences du cerveau. Ces dernières sont convoquées pour fonder l’existence de capacités conditionnant l’acquisition de compétences et l’adaptabilité de l’individu. La plasticité cérébrale, lit-on ainsi dans un cartouche, « détermine la façon dont tu apprends et dont tu t’adaptes à ton environnement tout au long de ta vie ».

  • 15 On retrouve ces deux citations sur la page consacrée à l’exposition (déjà citée).

21Ces préoccupations « sociales » faisant l’objet d’exposés didactiques affleurent aussi dans les cas français. À Rennes, une section intitulée « Neuromytho », située au centre de l’exposition Incroyable cerveau, entend déconstruire les idées reçues sur le cerveau, notamment concernant les aptitudes aux sciences selon le genre. À la CSI, la dernière section de Cerveau, l’expo neuroludique consiste en un film montrant en quoi, dès la naissance, le cerveau « est pré-organisé pour la vie en société et apprend à penser les autres », du fait de l’activation de circuits neuronaux spécifiques, c’est-à-dire à reconnaître des visages, à interpréter les intentions d’autrui, à coopérer, et comment ces capacités relationnelles évoluent tout au long de la vie. Cette partie évoque aussi dans ce cadre le rôle de certaines molécules comme l’ocytocine, « qui traite l’information sociale et agit sur le désir d’aller vers nos semblables »15. Autant d’éléments en faveur d’un discours sur la sociabilité « innée » de l’être humain.

Un recours majoritaire aux dispositifs ludiques

22Sur le plan des dispositifs, les expositions misent non seulement sur l’interactivité, démarche désormais courante, mais aussi, dans leur majorité, sur une offre d’activités ludiques. Cette pratique n’est pas contradictoire avec la perspective didactique. Les multiples jeux proposés suivent en effet souvent un schéma de progression (jeu, verdict/diagnostic, bilan, explication) tout à fait compatible avec elle.

23C’est même la caractéristique centrale d’Incroyable cerveau. Au centre de la salle, la section « Neuromytho » déjà évoquée comprend des bornes proposant des quiz auxquels répondre en appuyant sur des buzzers et portant sur différents thèmes repris dans les autres espaces (la biologie du cerveau, les compétences, la perception, les émotions, etc.). Proche de l’entrée, la section « Biologie » propose des vidéos à choisir sur un écran tactile traitant de l’organisation du cerveau, du fonctionnement des émotions, de la lecture, et plusieurs dispositifs ludiques, par exemple une poupée dont il faut positionner les bras sur un lobe du cerveau pour lire le texte associé sur un écran vidéo (fig. 1), un cerveau à construire avec ses principaux éléments anatomiques, etc.

24Plus loin, la section « Voir son cerveau » permet de visualiser le fonctionnement de son propre cerveau en temps réel par électro-encéphalogramme, puis une autre section, plus imposante, intitulée « Attention », propose plusieurs jeux reposant sur des principes différents (multitâche, eye-tracking, etc.). La section « Perception » comprend quant à elle plusieurs dispositifs, dont l’un d’entre eux, immersif, illustre la question des illusions sensorielles. La section « Émotions » permet de jouer, entre autres, à un jeu vidéo sur le circuit de la récompense. La section voisine, « Compétences », est essentiellement constituée de jeux analogiques (labyrinthe coopératif, « chemins stratégiques », puzzle en trois dimensions, etc.). Enfin, la très riche section « Apprentissage » propose elle aussi un imposant dispositif vidéoludique, « À chaque âge son cerveau », ainsi que plusieurs jeux vidéo sur l’apprentissage et la mémoire.

Fig. 1. Vue de l’exposition Incroyable cerveau, section « Biologie », poupée articulée aux bras repositionnables.

Fig. 1. Vue de l’exposition Incroyable cerveau, section « Biologie », poupée articulée aux bras repositionnables.

Photo S. Lemerle © Espace des sciences, Rennes.

25Who Am I? présente aussi de nombreuses installations ludiques, dans les modules latéraux occupant la moitié de l’espace d’exposition. Deux d’entre eux entretiennent des rapports avec les sciences du cerveau. Le premier, intitulé « My brain », propose, entre autres, des jeux sur les mécanismes de la mémoire et des perceptions et un quiz sur la conscience. Un deuxième module, centré sur la personnalité (« About me »), relève plus de la psychologie sociale avec un jeu sur des « dilemmes moraux ». À la fin d’une partie, les interactions du visiteur avec la machine (choix de jouer ou non) et les décisions prises sont comparées à celles des autres visiteurs, et un écran indique quelle partie du cerveau est intervenue lors des prises de décision. Ce module propose aussi un jeu sur la confiance, soulignant les préjugés, les biais, les représentations qui guident les décisions et les choix, ainsi qu’un quiz intitulé « Traits de personnalité », ressemblant à un test de magazine, dont la compilation des réponses donne un portrait de la personnalité supposée du joueur. Les autres modules de l’exposition consistent aussi en des jeux, des animations sur l’ADN, les expressions faciales, la santé, etc.

  • 16 Citations extraites de la page consacrée à l’exposition (déjà citée).

26Même si ces deux expositions présentent la plus grande proportion de dispositifs ludiques, on retrouve aussi cette tendance dans l’exposition de la CSI, jusque dans son titre (Cerveau, l’expo neuroludique). Celle-ci entend faire découvrir la manière dont le cerveau humain fonctionne en proposant au visiteur de tester ses capacités par le biais de jeux et d’épreuves diverses. Sa deuxième section présente ainsi le cerveau sous l’angle de ses capacités au moyen de jeux inspirés par des expériences de laboratoire, traitant des thèmes de l’apprentissage et de la mémoire, de la plasticité cérébrale « qui permet de s’adapter à des situations changeantes », des « mécanismes cérébraux mis en place au cours de la lecture », de la vision et de la manière dont le cerveau interprète les informations, de la décision et de la place des émotions dans la prise de décision, des fluctuations de la concentration et de l’aptitude à mener plusieurs tâches en même temps, etc.16

27Seule exception, l’exposition It Begins with an Idea est nettement moins engagée dans ce type de dispositif. Aucun jeu n’est proposé et les installations interactives sont en nombre plus réduit.

Le registre du merveilleux scientifique

  • 17 Selon la formule empruntée par Alan G. Gross (1990 : 95) au poète Samuel Taylor Coleridge pour qual (...)

28Toutes les expositions en revanche recourent à une forme de « merveilleux scientifique », c’est-à-dire à un registre de discours dont le but est de frapper, voire fasciner ou sidérer, les visiteurs par la dimension extraordinaire ou mystérieuse de ce qui est présenté, dans un but de divertissement ou d’édification, au moyen de dispositifs destinés à susciter la « suspension d’incrédulité17 ».

29Ce merveilleux peut être nourri par l’esthétique travaillée d’expositions combinant approches scientifique et artistique, phénomène par ailleurs relativement ancien (Molinatti & Girault, 2007 : 108). À Rennes, les dispositifs ludiques analysés précédemment sont présentés dans un cadre aux couleurs vives, aux formes foisonnantes (totems, panneaux, images), faisant la part belle à l’humour, pouvant faire penser à un parc d’attractions à thématique scientifique. À Paris, l’exposition revendique de s’inscrire dans une ambiance plus feutrée, influencée par le surréalisme, ouvrant sur le rêve et l’imaginaire (fig. 2).

30À Londres, la présentation de certaines vitrines, fondées sur l’accumulation d’objets hétéroclites, les fait ressembler à de modernes cabinets de curiosités (fig. 3). Par ailleurs, aux côtés des dispositifs interactifs et ludiques omniprésents, une place importante est accordée aux œuvres artistiques, comparativement aux textes d’explication qui frappent par leur brièveté.

31La notion de synapse est par exemple mise en avant avec l’œuvre du même nom de l’artiste britannique Dryden Goodwin, série de portraits de passagers dans un train qui constituent comme autant de « connexions flottantes » entre les personnes. Mises bout à bout au moyen d’un montage vidéo, ces esquisses donnent l’impression d’être le film d’une sorte de processus cérébral, analogues pour l’artiste aux processus électrochimiques ultra-rapides se déroulant dans le cerveau, permettant à l’information de passer entre les cellules.

Fig. 2. Vue de l’exposition Cerveau, l’expo neuroludique, section « 7 milliards d’individus, 7 milliards de cerveaux ? », scénographie faisant appel à l’imaginaire (ici une galerie de « demi-portraits »).

Fig. 2. Vue de l’exposition Cerveau, l’expo neuroludique, section « 7 milliards d’individus, 7 milliards de cerveaux ? », scénographie faisant appel à l’imaginaire (ici une galerie de « demi-portraits »).

Photo L. Gueneau/EPPDCSI © Cité des sciences et de l’industrie, Paris.

Fig. 3. Vue de l’exposition Who Am I?, vitrine « What makes you so smart ? », scénographie faisant penser à un cabinet de curiosités, juxtaposant objets pittoresques, textes et images.

Fig. 3. Vue de l’exposition Who Am I?, vitrine « What makes you so smart ? », scénographie faisant penser à un cabinet de curiosités, juxtaposant objets pittoresques, textes et images.

Photo S. Lemerle © Science Museum, Londres.

32Enfin, le merveilleux esthétisant est au cœur de la manifestation vénitienne. Il se manifeste dans la mise en scène au deuxième étage d’objets provenant d’époques reculées, de mondes très divers et souvent « exotiques » (sumérien, égyptien, latin, arabe, perse, chinois, péruvien, etc.), présentés dans un cadre épuré, le long de coursives plongées dans l’obscurité et rehaussées de minces traits lumineux, mettant en valeur le contenu des vitrines (fig. 4). À l’étage supérieur, le visiteur peut déambuler au sein de galeries exposant des items plus récents, mais tout aussi pittoresques : instruments d’époque, représentations à l’encre de neurones par les pionniers des neurosciences Camillo Golgi et Santiago Ramón y Cajal, planches d’anatomie japonaises datant du xviiie siècle, cabinet de têtes pour aspirants phrénologues, etc.

33Cette exposition se caractérise aussi par un imposant recours au métadiscours. Les organisateurs sont particulièrement prolixes pour exposer, au moyen de deux brochures distribuées dès l’entrée, leur projet de mettre en regard, voire de « remettre en question » (Fondazione Prada, 2022a : 8) certains de ces objets par des textes d’écrivains (dont Salman Rushdie ou Hervé Le Tellier), qui évoquent ces derniers ou les prennent pour prétextes pour élargir « les limites de notre champ d’investigation » et révéler « des histoires sociales, politiques et personnelles latentes » (ibid.). Cette tendance se dévoile aussi, au fur et à mesure de la progression dans les étages, par le désir explicitement formulé de perdre les visiteurs dans un « labyrinthe de vitrines et de moniteurs », qui se traduirait idéalement par un schéma de visite potentiellement reconfiguré à chaque nouvelle histoire racontée (ibid. : 3). Cette volonté de désorientation est manifeste dans une installation au second étage, « The Conservation Machine », constituée de trente-deux écrans encastrés dans trois murs, diffusant en boucle les allocutions d’éminents neuroscientifiques (Stanislas Dehaene, Joseph LeDoux, etc.) et philosophes (Patricia Churchland, Daniel Dennett, etc.) assis face caméra, en train de dire quelque chose, de se taire ou de se lever et de laisser la chaise vide (les vidéos n’étant pas synchronisées). L’installation vise clairement à faire appel davantage aux impressions sensorielles qu’aux facultés rationnelles des visiteurs. L’intention est moins didactique que destinée à nourrir une rêverie ou à entretenir un sentiment de vertige. Les discours s’inscrivent dans une veine méditative, esthético-philosophique, tout en doutes et paradoxes à l’endroit même des prétentions des neurosciences, à l’image de ce propos d’un chercheur indien : « Personne ne comprend le fonctionnement du cerveau, et tout le monde le sait. » (Fondazione Prada, 2022b : 53)

Fig. 4. Vue de l’exposition It Begins with an Idea, galerie du premier étage, scénographie reposant sur un cadre épuré, seulement éclairé par les vitrines et de minces lignes lumineuses au sol.

Fig. 4. Vue de l’exposition It Begins with an Idea, galerie du premier étage, scénographie reposant sur un cadre épuré, seulement éclairé par les vitrines et de minces lignes lumineuses au sol.

Photo S. Lemerle © Fondazione Prada, Venise.

Quelles évolutions pour la médiation muséale des neurosciences depuis les années 2000 ?

34Ces expositions illustrent la faveur pour le cerveau et ses sciences, que cela soit au sein d’établissements prestigieux qui leur consacrent des expositions permanentes, d’institutions aux dimensions plus restreintes qui leur accordent une attention centrale comparativement à d’autres domaines du savoir, ou encore de la part d’acteurs extérieurs au monde des MCS qui, en les mettant à l’honneur, les font accéder à des scènes où leur présence était jusqu’ici moins fréquente.

35Elles montrent par ailleurs les évolutions repérées et décrites en première partie, relativement à l’offre des musées et des expositions de science, tout en incitant à combiner ces idéaux-types dans l’analyse, plutôt qu’à les opposer entre eux. En premier lieu, tant à Paris qu’à Venise, Londres ou Rennes, des formes plutôt classiques de diffusion des connaissances bénéficient d’une scénographie recherchée, permise par les dispositifs et technologies les plus récents, empruntant aux modèles de musées de deuxième, voire de troisième génération. Si on les compare avec les résultats d’enquêtes réalisées dans les années 1990-2000, ces observations confirment une tendance de fond : les expositions continuent de pratiquer, d’une part, une vulgarisation de type descendant, proche du deficit model, qui n’accorde pas beaucoup d’attention aux débats et controverses traversant le champ de la recherche contemporaine ; et, d’autre part, une médiation recourant de façon quasi systématique aux formes hybridant science et art, par exemple avec l’usage esthétisant de l’iconographie issue de la neuro-imagerie, dont les problèmes posés par la lecture et l’interprétation ne sont jamais abordés (Molinatti & Girault, 2007 : 109). Des évolutions sont cependant à noter. Les discours muséaux sur le cerveau semblent davantage aborder les relations entre sciences du cerveau et société, par rapport à ce qui était constaté il y a vingt ans (ibid. : 113). Chaque institution affiche en effet sa volonté de rattacher sa manifestation à certains débats débordant le cadre strict de la recherche scientifique, et ce, en cohérence avec les évolutions les plus récentes des pratiques des MCS.

36Sur le plan des pratiques de médiation, on peut voir aussi une forme de continuité dans le fait que tous ces discours à visée didactique recourent à des dispositifs interactifs et ressortant tous à une forme ou une autre de merveilleux scientifique, cherchant à susciter l’engagement émotionnel des visiteurs (plaisir, surprise, fascination, etc.). Cet engagement peut reposer sur la proposition faite aux visiteurs d’interagir avec divers dispositifs. Il peut aussi, comme avec It Begins with an Idea, reposer sur une approche patrimoniale et esthétisante cherchant davantage l’édification. Par ailleurs, l’absence de mention, dans l’étude de 2007, du caractère divertissant et ludique de nombreux dispositifs peut conduire à penser à un accroissement de son importance dans les pratiques de médiation. On pourrait tenir là un trait important des pratiques contemporaines en matière de médiation scientifique, qui ferait aussi écho au phénomène plus général, constaté par des enquêtes sur les pratiques culturelles en France, d’une « ludification » du rapport à la culture, en particulier chez les jeunes et sans doute au-delà (Octobre, 2014 : 92-93).

  • 18 Voir le compte rendu de l’exposition dans l’édition italienne du magazine Vogue (Chiara, 2022).

37La comparaison de ces quatre expositions suscite aussi plusieurs questions. La première d’entre elles touche à la possibilité d’élargir ces conclusions, réalisées à partir de la médiation des sciences du cerveau, à d’autres sciences. Une autre concerne l’influence de la logique propre à chaque établissement sur l’élaboration des expositions, parallèlement aux présupposés épistémologiques ou idéologiques de leurs concepteurs, notamment en matière de dispositifs de médiation et de publics cibles. On pourrait expliquer ces différences en faisant référence à des objectifs politiques plus généraux, imposés par exemple par le statut de chaque établissement, lié à ses tutelles ou encore résultant d’un contexte local d’offres concurrentes ou complémentaires. Il s’agirait dès lors de combiner la prise en compte de ces logiques avec l’analyse de l’influence évidente des responsables scientifiques des expositions. Le ton très général et ambitieux de l’exposition Cerveau de la CSI doit sans doute beaucoup au fait d’avoir pour commissaire un professeur au Collège de France. Du côté de la Fondation Prada, on trouve aussi une politique de prestige, mais d’inspiration plus esthétisante qu’académique, tôt repérée dans son activité dans le secteur artistique (Ryan, 2007), et qui semble aussi s’appliquer pour la culture scientifique, si l’on en croit les jugements élogieux émis sur l’exposition dans la presse de mode18.

  • 19 La réouverture de ce dossier pourrait notamment s’inspirer des notations d’Andrew Barry sur le cont (...)
  • 20 Peu d’études existent par exemple sur les pratiques de la Fondazione Prada, en dehors de quelques a (...)

38Les résultats de l’enquête suggèrent nombre d’autres pistes, comme celle des traditions nationales en matière de muséologie scientifique19. L’une des plus prometteuses touche à l’examen d’une éventuelle ligne de partage distinguant non pas les musées aux riches collections patrimoniales des centres scientifiques plus tournés vers l’animation, mais plutôt l’ensemble des MCS, tendant plus à valoriser la participation et la réflexivité des publics, d’acteurs plus généralistes, tels que les fondations privées, dont les propositions ponctuelles d’expositions scientifiques semblent se rattacher à un modèle de médiation plus traditionnel, encore plus descendant, même si formellement très sophistiqué20.

Haut de page

Bibliographie

Babou (Igor). 2004. Le Cerveau vu par la télévision. Paris : Presses universitaires de France.

Babou (Igor) & Le Marec (Joëlle). 2003. « Science, musée et télévision : Discours sur le cerveau ». Communication & Langages, 138, p. 69-88, DOI : 10.3406/colan.2003.3238.

Barry (Andrew). 1998. « On interactivity: Consumers, citizens and culture », p. 85-102 in The Politics of Display: Museums, Science, Culture / sous la direction de Sharon Macdonald. Londres/New York : Routledge.

Bergeron (Andrée). 2016. « Médiation scientifique : Retour sur la genèse d’une catégorie et ses usages ». Arts et Savoirs, 7, DOI : 10.4000/aes.876.

Bordeaux (Marie-Christine). 2008. « Un agir communicationnel propre à l’action culturelle : La médiation culturelle confrontée au phénomène de l’illettrisme ». Culture & Musées, 11, p. 59-77, DOI : 10.3406/pumus.2008.1469.

Bourdieu (Pierre). 1971. « Le marché des biens symboliques ». L’Année sociologique, 22, p. 49-126.

Boutel (Jean-Luc). 2020. Merveilleux scientifique. Bordeaux : Les Moutons électriques (Artbooks féériques).

Bucchi (Massimiano) & Trench (Brian). 2014. « Science communication research: Themes and challenges », p. 1-14 in Routledge Handbook of Public Communication of Science and Technology / sous la direction de Massimiano Bucchi & Brian Trench. 2e éd. Londres/New York : Routledge.

Cameron (Duncan F.). 1971. « The museum, a temple or the forum ». Curator: The Museum Journal, 14(1), p. 11-24, DOI : 10.1111/j.2151-6952.1971.tb00416.x.

Carù (Antonella), Ostillio (Maria Carmela) & Leone (Giuseppe). 2017. « Corporate museums to enhance brand authenticity in luxury goods companies: The case of Salvatore Ferragamo ». International Journal of Arts Management, 19(2), p. 32-45.

Chiara (Federico). 2022. « Fondazione Prada, 5 cose da sapere sul progetto Human Brains che fa il punto sul nostro cervello ». Vogue Italia, 2 septembre, en ligne : https://www.vogue.it/news/article/fondazione-prada-human-brains-cervello-ricerca-scientifica [consulté le 5 février 2024].

Ehrenberg (Alain). 2018. La Mécanique des passions : Cerveau, comportement, société. Paris : Odile Jacob.

Ehrenberg (Alain). 2021. « Neurosciences cognitives et idéaux d’autonomie ». Revue française de psychanalyse, 85, p. 93-103, DOI : 10.3917/rfp.851.0093.

Eidelman (Jacqueline) & Van Praët (Michel). 2000. « Introduction », p. 1-14 in La Muséologie des sciences et ses publics : Regards croisés sur la Grande Galerie de l’évolution du Muséum national d’histoire naturelle / sous la direction de Jacqueline Eidelman & Michel Van Praët. Paris : Presses universitaires de France.

Fondazione Prada. 2022a. Human Brains: It Begins with an Idea. Venise : Fondazione Prada.

Fondazione Prada. 2022b. Human Brains. It Begins with an Idea. English Texts. Venise : Fondazione Prada.

Gross (Alan G.). 1990. The Rhetoric of Science. Cambridge, Mass. : Harvard University Press.

Hilgartner (Stephen). 1990. « The dominant view of popularization: Conceptual problems, political uses ». Social Studies of Science, 20(3), p. 519-539, DOI : 10.1177/030631290020003006.

Humbert (Sarah). 2021. « Rennes. Tout savoir sur l’“Incroyable cerveau”, avec la nouvelle expo à l’Espace des sciences ». Ouest-France, 13 septembre, en ligne : https://www.ouest-france.fr/bretagne/rennes-35000/rennes-tout-savoir-sur-l-incroyable-cerveau-avec-la-nouvelle-expo-a-l-espace-des-sciences-10d60db6-1480-11ec-acf0-3f32804666b8 [consulté le 11 janvier 2024].

King (Lindsay M.) & Clement (Russell T.). 2010. « Western European Art Foundations and Publishing ». The Journal of Academic Librarianship, 37(1), p. 5-8, DOI : 10.1016/j.acalib.2010.10.001.

Le Goff (Jacques). 1988. « Le merveilleux scientifique au Moyen Âge », p. 87-113 in Zwischen Wahn, Glaube und Wissenschaft : Magie, Astrologie, Alchemie und Wissenschaftsgeschichte / sous la direction de Jean-François Bergier. Zurich : Verl. der Fachvereine.

Lemerle (Sébastien). 2013. Le Singe, le gène et le neurone : Du retour du biologisme en France. Paris : Presses universitaires de France (Science, histoire et société).

Lemerle (Sébastien). 2014. « Le neurone des newsmagazines : Le traitement des neurosciences dans la presse française des années 2000 », p. 81-108 in Neurosciences et société : Enjeux des savoirs et pratiques sur le cerveau / sous la direction de Brigitte Chamak & Baptiste Moutaud. Paris : Armand Colin.

Lemerle (Sébastien). 2021. « La Semaine du cerveau à Paris (2014-2017) : Étude sur les contraintes de la vulgarisation des neurosciences ». Sociologie, 12(2), p. 129-147, en ligne : https://shs.cairn.info/revue-sociologie-2021-2-page-129 [consulté le 13 février 2025].

Macdonald (Sharon). 1998a. « Exhibitions of power and power of exhibitions: An introduction to the politics of display », p. 1-21 in The Politics of Display: Museums, Science, Culture / sous la direction de Sharon Macdonald. Londres/New York : Routledge.

Macdonald (Sharon). 1998b. « Supermarket science? Consumers and the “public understanding of science” », p. 103-120 in The Politics of Display: Museums, Science, Culture / sous la direction de Sharon Macdonald. Londres/New York : Routledge.

Molinatti (Grégoire) & Girault (Yves). 2007. « La médiation muséale des neurosciences : Quatre expositions récentes sur le cerveau ». Culture & Musées, 10, p. 97-123, DOI : 10.3406/pumus.2007.1442.

Nieto-Galan (Agustí). 2016. Science in the Public Sphere: A History of Lay Knowledge and Expertise. Londres/ New York : Routledge.

Octobre (Sylvie). 2014. Deux pouces et des neurones : Les cultures juvéniles de l’ère médiatique à l’ère numérique. Paris : ministère de la Culture et de la Communication, DEPS/La Documentation française.

Pedretti (Erminia) & Navas Iannini (Ana Maria). 2020. Controversy in Science Museums: Re-Imagining Spaces and Practice. Londres/New York : Routledge.

Pedretti (Erminia) & Navas Iannini (Ana Maria). 2023. « Vers des musées scientifiques de quatrième génération : Changer les objectifs, changer les rôles ». Culture & Musées, 41, p. 151-186, DOI : 10.4000/culturemusees.10013.

Ryan (Nicky). 2007. « Prada and the Art of Patronage ». Fashion Theory, 11(1), p. 7-24, DOI : 10.2752/136270407779934588.

Schiele (Bernard). 2014. « Science museums and centres: Evolution and contemporary trends », p. 40-55 in Routledge Handbook of Public Communication of Science and Technology / sous la direction de Massimiano Bucchi & Brian Trench. 2éd. Londres/New York : Routledge.

Schiele (Bernard). 2017. « Participation et engagement », p. 47-54 in Cultures de sciences / sous la direction de Joëlle Le Marec & Bernard Schiele. Montréal : Acfas.

Science Museum. 2016. « Press statement: What sex is your brain exhibit, Who am I? Gallery », 16 septembre, en ligne : https://www.sciencemuseum.org.uk/about-us/press-office/press-statement-what-sex-your-brain-exhibit-who-am-i-gallery [consulté le 26 janvier 2024].

Thomas de la Peña (Carolyn). 2003. « Ready-to-wear globalism: Mediating materials and Prada’s GPS ». Winterthur Portfolio, 38(2/3), p. 109-129, DOI : 10.1086/421423.

Haut de page

Notes

1 En dépit de profondes différences entre les époques, la « première culture de la curiosité », avant la fin du xviiie siècle, « contenait certains des signes de l’identité qui allait marquer les musées scientifiques » par la suite, en particulier le recours privilégié aux registres spectaculaire et visuel (Nieto-Galan, 2016 : 149-150, 157).

2 Une autre comparaison éclairante ici serait celle des évolutions respectives du musée du CNAM et du Science Museum : là où le premier reste ancré dans une perspective assez traditionnelle, liée au premier modèle historique et recourant occasionnellement aux dispositifs interactifs, le second semble avoir clairement opté pour le troisième modèle.

3 Voir la page consacrée à l’exposition, visitée en juin 2022, sur le site internet de la Cité des sciences et de l’industrie : https://www.cite-sciences.fr/fr/au-programme/expos-permanentes/les-expositions/cerveau [consulté le 11 janvier 2024]. Pour un aperçu du parcours de Stanislas Dehaene, voir la page « Biographie et publications » qui lui est consacrée sur le site du Collège de France : https://www.college-de-france.fr/fr/chaire/stanislas-dehaene-psychologie-cognitive-experimentale-chaire-statutaire/biography [consulté le 4 février 2024].

4 « Human Brains ». Fondazione Prada, en ligne : https://humanbrains.fondazioneprada.org/en [consulté le 5 février 2024]. L’exposition It Begins with an Idea s’est tenue d’avril à novembre 2022, et a été visitée en novembre 2022.

5 L’une des membres de ce comité est journaliste et est désignée comme spécialiste en vulgarisation scientifique (« giornalista, specializzata in divulgazione scientifica »). Tous mes remerciements à Claudio Pogliano de l’université de Pise, pour les pistes qu’il m’a données sur cette exposition et la politique de la Fondation Prada en général.

6 Exposition visitée en février 2023.

7 Sur le lancement de l’exposition, visitée en mars 2023, voir Humbert, 2021.

8 Voir le site de l’Espace des sciences : https://www.espace-sciences.org et celui des Champs libres : https://www.leschampslibres.fr [consultés le 11 janvier 2024].

9 Dans le domaine francophone, voir, pour les expositions et les musées : Babou & Le Marec, 2003 ; Molinatti & Girault, 2007. Pour la télévision, Babou, 2004 ; l’édition et la presse, Lemerle, 2013 et 2014 ; les festivals scientifiques, Lemerle, 2021.

10 Cette attention aux pratiques et aux dispositifs n’impliquait pas par ailleurs de solliciter des entretiens avec les organisateurs afin de recueillir leurs propres représentations des situations concrètes étudiées.

11 L’expression « merveilleux scientifique » est à prendre ici au sens défini par Jacques Le Goff (1988) de discours utilisant la science à la façon des mirabilia (faits qui, par leur caractère extraordinaire, frappent d’étonnement) au Moyen Âge, plutôt que dans le sens du genre littéraire post-vernien de la fin du xixe siècle qui s’autodésignait ainsi (Boutel, 2020).

12 « Cerveau, l’expo neuroludique ». Cité des sciences et de l’industrie, en ligne : https://www.cite-sciences.fr/fr/au-programme/expos-permanentes/les-expositions/cerveau [consulté le 11 janvier 2024].

13 Ma traduction, ainsi que pour toutes les citations suivantes.

14 Siècle des Lumières.

15 On retrouve ces deux citations sur la page consacrée à l’exposition (déjà citée).

16 Citations extraites de la page consacrée à l’exposition (déjà citée).

17 Selon la formule empruntée par Alan G. Gross (1990 : 95) au poète Samuel Taylor Coleridge pour qualifier la démarche de nombre de discours de vulgarisation scientifique.

18 Voir le compte rendu de l’exposition dans l’édition italienne du magazine Vogue (Chiara, 2022).

19 La réouverture de ce dossier pourrait notamment s’inspirer des notations d’Andrew Barry sur le contenu assez différent que donnaient le Science Museum et la CSI à la notion d’interactivité à la fin des années 1990 (Barry, 1998 : 87-96).

20 Peu d’études existent par exemple sur les pratiques de la Fondazione Prada, en dehors de quelques articles sur ses interventions dans les domaines de l’histoire de la mode (Thomas de la Peña, 2003) et de l’art contemporain et de ses « avant-gardes » (Ryan, 2007). Sur les corporate foundations et leurs relations avec les milieux culturels, voir Carù, Ostillio & Leone, 2017 ; King & Clement, 2011. Les études sur les manifestations relatives aux sciences semblent encore plus rares.

Haut de page

Table des illustrations

Titre Fig. 1. Vue de l’exposition Incroyable cerveau, section « Biologie », poupée articulée aux bras repositionnables.
Crédits Photo S. Lemerle © Espace des sciences, Rennes.
URL http://journals.openedition.org/culturemusees/docannexe/image/12802/img-1.jpg
Fichier image/jpeg, 344k
Titre Fig. 2. Vue de l’exposition Cerveau, l’expo neuroludique, section « 7 milliards d’individus, 7 milliards de cerveaux ? », scénographie faisant appel à l’imaginaire (ici une galerie de « demi-portraits »).
Crédits Photo L. Gueneau/EPPDCSI © Cité des sciences et de l’industrie, Paris.
URL http://journals.openedition.org/culturemusees/docannexe/image/12802/img-2.jpg
Fichier image/jpeg, 332k
Titre Fig. 3. Vue de l’exposition Who Am I?, vitrine « What makes you so smart ? », scénographie faisant penser à un cabinet de curiosités, juxtaposant objets pittoresques, textes et images.
Crédits Photo S. Lemerle © Science Museum, Londres.
URL http://journals.openedition.org/culturemusees/docannexe/image/12802/img-3.jpg
Fichier image/jpeg, 468k
Titre Fig. 4. Vue de l’exposition It Begins with an Idea, galerie du premier étage, scénographie reposant sur un cadre épuré, seulement éclairé par les vitrines et de minces lignes lumineuses au sol.
Crédits Photo S. Lemerle © Fondazione Prada, Venise.
URL http://journals.openedition.org/culturemusees/docannexe/image/12802/img-4.jpg
Fichier image/jpeg, 132k
Haut de page

Pour citer cet article

Référence papier

Sébastien Lemerle, « Le neurone exposé : quatre exemples contemporains de médiation muséale des sciences du cerveau »Culture & Musées, 45 | 2025, 155-177.

Référence électronique

Sébastien Lemerle, « Le neurone exposé : quatre exemples contemporains de médiation muséale des sciences du cerveau »Culture & Musées [En ligne], 45 | 2025, mis en ligne le 01 juin 2025, consulté le 06 juillet 2025. URL : http://journals.openedition.org/culturemusees/12802 ; DOI : https://doi.org/10.4000/141cm

Haut de page

Auteur

Sébastien Lemerle

Université Paris-Nanterre
Sébastien Lemerle est professeur des universités en sociologie à l’université Paris-Nanterre et au Centre de recherches sociologiques et politiques de Paris. Il a d’abord travaillé sur les relations entre champ scientifique et champ intellectuel par le biais de la question du biologisme (Le Singe, le gène et le neurone, PUF, 2013). Plus récemment, ses recherches ont porté sur l’histoire sociale des idées scientifiques ainsi que sur la vulgarisation et la culture scientifiques, en particulier dans le domaine des neurosciences (Le Cerveau reptilien : Sur la popularité d’une erreur scientifique, CNRS éditions, 2024).
Dernières parutions : « Biologisation » , p. 137-151 in Catégoriser : Lexique des constructions sociales de la différence / sous la direction de Marlène Bouvet, Florent Chossière, Marine Duc & Estelle Fisson, Lyon, ENS Éditions, 2024 ; avec Nuala Caomhánach, « Methodological approaches for the life sciences and intellectual history », p. 205-219 in The Routledge Handbook in the History and Sociology of Ideas / sous la direction de Stefanos Geroulanos & Gisèle Sapiro, New York, Routledge, 2023 ; « Le goût des neurosciences : Les publics de la Semaine du cerveau à Paris (2016-2017) ». Revue européenne des sciences sociales, 60(2), 2022, p. 95-127, DOI : 10.4000/ress.9144.
→ slemerle[at]parisnanterre.fr

Haut de page

Droits d’auteur

CC-BY-SA-4.0

Le texte seul est utilisable sous licence CC BY-SA 4.0. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.

Haut de page
Rechercher dans OpenEdition Search

Vous allez être redirigé vers OpenEdition Search