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« Danses populaires » : une catégorie à questionner

Bâtir la catégorie du populaire au café-concert

Camille Paillet

Résumés

Indépendamment des critères esthétiques, les définitions canoniques des genres spectaculaires au XIXe siècle sont indissociables de celles déterminant la spécificité socioculturelle du lieu qui les accueille et par lequel ils sont perçus. Puisant son répertoire dans d’anciennes pratiques spectaculaires, le café-concert parisien joue avec un ensemble de références qui renvoient à une marque identitaire reconnue comme appartenant à une culture populaire du divertissement. Cet article se penche sur les enjeux et les effets de l’articulation des catégories sociales, symboliques et spectaculaires dans la fabrique d’une altérité populaire au café-concert. Il vise à rendre compte de l’évolution de la notion de populaire dans l’historiographie du café-concert en interrogeant la circulation des imaginaires entourant la construction socioculturelle des spectacles dans cet espace spécifique.

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Texte intégral

1À mi-chemin entre un café, un jardin d’agrément, un bal et une scène théâtrale, l’identité socioculturelle du café-concert s’est construite au cours du XIXe siècle par opposition au statut du lieu d’art. « Lieux dangereux et vulgaires », « spectacles immoraux », « artistes insipides » sont les expressions symptomatiques d’une perception négative fondée sur un ensemble idéologique qui s’appuie sur les origines prétendues populaires de ce divertissement, et qui concourt à dessiner les contours d’une illégitimité culturelle. Cet article vise à analyser les principes de distinction sociale et de hiérarchisation artistique en œuvre dans la construction catégorielle du café-concert parisien comme espace populaire. Il tente de revenir sur les racines de cette catégorisation afin de souligner les raisons idéologiques de l’invisibilisation des œuvres et des artistes de café-concert dans l’historiographie de la danse et plus généralement des arts du spectacle au XIXe siècle. Un premier temps est consacré à esquisser les contours définitionnels de ce loisir protéiforme en revenant sur les origines de son émergence à Paris sous le Second Empire et sur sa connivence avec d’autres formes de loisirs populaires, notamment les guinguettes. Un second volet s’intéresse à l’édification sociosymbolique du populaire à partir de l’analyse des différentes conceptions de ce terme dans l’histoire du café-concert et des imaginaires sociaux qui ponctuent la réception de ce divertissement. Conçu comme un éclaircissement contextuel préalable au développement d’études monographiques sur le répertoire des danses populaires au café-concert, cet article s’attache à identifier l’enveloppe morphologique, sociale, symbolique et idéologique d’un espace populaire en danse afin de souligner comment cet environnement préfigure et conditionne la production et la réception en amont des œuvres et des pratiques spectaculaires.

Le café-concert : une catégorie protéiforme

  • 1 CONDEMI Concetta, Les Cafés-concerts : histoire d’un divertissement (1849-1914), Paris, Quai Voltai (...)
  • 2 Sur le modèle de l’éclectisme du cabinet de curiosité, les spectacles dits de curiosité renvoient à (...)
  • 3 SAVEV Catherine, « Le Café-concert : un théâtre parallèle », in YON Jean-Claude (dir.), Les Spectac (...)

2L’institutionnalisation du café-concert découle de l’acquisition de nouvelles libertés publiques qui émergent pendant le Second Empire et qui touchent plusieurs secteurs économiques liés au milieu des divertissements. L’une des mesures libérales déterminantes pour l’apparition des cafés-concerts puis des music-halls est la nouvelle législation théâtrale qui se met en place par le décret de libéralisation du 6 janvier 1864. Ce décret qui met fin au régime des privilèges et autorise le développement économique d’un marché théâtral permet à de nombreux cafés, débits de boisson, entreprises de bal, qui existaient bien avant l’application de ce texte, de se convertir légalement en salles de spectacle. La liberté offerte aux entrepreneurs de spectacle a alors un sens essentiellement commercial puisque le répertoire du café-concert reste jusqu’en 1867 contraint par de nombreuses limitations scéniques telles que l’interdiction de recourir aux costumes théâtraux, la contrainte d’une mise en scène imposant un décor fixe sans machinerie, la prohibition d’ajouter des danses et des pantomimes dans les exécutions vocales et instrumentales, etc1. Héritières du statut des spectacles de curiosité au siècle précédent2, ces limitations font l’objet de critiques virulentes de la part des artistes, des directeurs de café-concert et de plusieurs intellectuels contestant leur caractère arbitraire et anachronique depuis le mouvement de libéralisation théâtrale de 1864. Sous la houlette de Camille Doucet, alors directeur de l’administration des théâtres, une réforme voit le jour le 31 mars 1867, autorisant les entrepreneurs de café-concert à programmer librement les spectacles de leur choix3. Cette mesure entraîne un renouvellement et un enrichissement de la programmation qui était principalement axée sur la chanson et les spectacles de curiosité. Bien que de nombreux directeurs n’aient pas hésité à empiéter sur les répertoires avant cette nouvelle réglementation, de nombreux genres spectaculaires tels que vaudeville, mélodrame, féerie, opérette, comédie, ballet, pantomime, opéra-comique, farce, revue, etc., deviennent officiellement autorisés à être programmés dans les cafés-concerts.

  • 4 PAILLET Camille, Déshabiller la danse. Les scènes de café-concert et de music-hall (Paris, 1864-190 (...)

3Un lexique extrêmement varié rend compte de cette période de l’histoire du café-concert : café-caveau, estaminet-lyrique, bal-concert, vauxhall, beuglant, bastringue, gargote, jardin-spectacle, boui-boui, café-spectacle, restaurant-lyrique, guinguette, goguette, bal-spectacle, salle lyrique, café-chantant, cabaret dansant, café-théâtre, etc. La liste est longue et le recensement périlleux, car la délimitation entre ces différents espaces spectaculaires n’est pas toujours claire, les sources passant souvent d’un terme à l’autre sans toujours décrire et justifier leur contenu. Face à cette hétérogénéité, le nom de café-concert se détache pour se construire en une structure stable, réglementée, et pour constituer l’un des plus hauts lieux du divertissement parisien de la seconde moitié du XIXe siècle4.

4L’identification du café-concert comme espace populaire rencontre, au fil de l’histoire de ce divertissement, des significations très différentes. Une première définition renvoie à la protohistoire du café-concert et aux diverses filiations composant l’héritage populaire de ce loisir entre la fin du XVIIIe siècle et le début des années 1860. Avant de s’établir en lieu de spectacle à part entière durant la seconde moitié du siècle, ces divertissements sont avant tout des cafés ordinaires qui accueillent ponctuellement des artistes-chansonniers, poètes, musiciens et bateleurs pour divertir les consommateurs.

  • 5 Née dans le contexte révolutionnaire du XVIIIe siècle, la goguette est un café-chantant majoritaire (...)
  • 6 BOLL André, Théâtres, spectacles et fêtes populaires dans l’histoire, Marseille, Éditions du Sagitt (...)
  • 7 CHAMPFLEURY, « Bals et concerts », in Paris Guide, par les principaux écrivains et artistes de la F (...)
  • 8 Ibid.

5La référence à la catégorie populaire dans l’historiographie du café-concert se rapporte à d’anciens lieux fréquentés par le peuple et associés dans l’imaginaire collectif aux loisirs des classes les plus modestes. La production chansonnière des goguettes5, certaines formes spectaculaires issues du théâtre forain, ainsi que plusieurs traditions dansées exportées des guinguettes et des pratiques carnavalesques sont régulièrement mobilisées dans les histoires du café-concert. À titre d’exemple, l’historien André Boll considère les spectacles donnés dans la baraque de l’artiste forain Nicolet comme « le premier music-hall français et parisien6 », tandis que Champfleury estime que bals et cafés-concerts sont « de proches parents7 » qui servent tous deux « de divertissement au peuple8 ».

De la guinguette au caf’conc’

  • 9 GASNAULT François, Guinguettes et lorettes. Bals publics et danse sociale à Paris entre 1830 et 187 (...)
  • 10 Promenade à tous les bals publics de Paris, barrières et guinguettes de cette capitale, ou Revue hi (...)
  • 11 Ibid.
  • 12 La répartition spatio-temporelle des cafés-concerts s’organise entre les saisons d’hiver et d’été. (...)
  • 13 DELVAU Alfred, Les Plaisirs de Paris. Guide pratique et illustré, Paris, Faure, 1867, p. 176.
  • 14 Ibid.

6Il existe en effet des caractéristiques communes et des ressemblances morphologiques entre certaines catégories de bal et de café-concert, particulièrement entre les guinguettes champêtres et les cafés-concerts de plein air. La guinguette désigne un débit de boissons dansant ou un petit restaurant qui organise ponctuellement des bals9. Ce terme émerge dans le premier tiers du XIXe siècle pour évoquer un bal public de basse catégorie fréquenté par la classe populaire. Avant l’annexion des banlieues parisiennes en 1860, les guinguettes prennent place en grand nombre autour des passages d’octroi, aux portes de la ville et sur les boulevards reliant les communes environnantes. Les locaux installés au dehors de la capitale sont exonérés de l’impôt d’octroi, ce qui explique que les boissons y sont peu chères et qu’ils attirent donc les bourses modiques. Par exemple, à la barrière de Belleville, dans la guinguette Le Petit-Ramponeau, le litre de vin coûte 20 centimes10. Du fait de leur filiation commune avec le commerce du vin, guinguette et café-concert se partagent la double fonction d’être un espace de restauration et de distraction. Une guinguette située sur le boulevard des Trois Couronnes à Belleville est décrite comme « un bal où tous les plaisirs sont réunis : danses, balançoires russes, jeux de bagues et de canonnier, tir au pistolet, tout est mis en activité pour les agréments de ceux qui s’y rendent11 ». La diversité des activités proposées dans cette guinguette nécessite un vaste espace en plein air où les clients peuvent à la fois manger, danser et jouer. Le charme champêtre de la guinguette, vanté par les chroniqueurs des guides touristiques, se retrouve dans certains établissements comme les Ambassadeurs et l’Alcazar d’Été qui constituent le rendez-vous estival incontournable des divertissements parisiens sous le Second Empire12. Les cafés-concerts se caractérisent par une pluralité identitaire puisqu’ils peuvent être, tout à la fois ou en alternance, un restaurant, un café, une guinguette, un bal et un théâtre. Au Casino-Cadet, la configuration de la salle se compose d’une série de galeries « au rez-de-chaussée et au premier étage, les galeries d’en bas où l’on cause, les galeries d’en haut où l’on fume13 ». La programmation est répartie entre « les jours de bals où l’on danse, c’est-à-dire les lundi, mercredi, vendredi et dimanche, et où l’on s’assied les jours de concert, c’est- à-dire les mardi, jeudi et samedi14 ».

  • 15 JACOTOT Sophie, Danser à Paris dans l’entre-deux-guerres. Lieux, pratiques et imaginaires des danse (...)

7Des connivences se retrouvent également dans l’imaginaire des pratiques populaires de la danse et dans ses représentations sur les scènes du café-concert. Le répertoire chansonnier emprunte aux airs connus de la musique à danser des bals publics et le bal, en tant que thème littéraire et espace dramaturgique, et s’infiltre dans la composition des vaudevilles, revues et autres pièces représentées aux cafés-concerts. De plus, le répertoire chorégraphique du café-concert illustre la présence de nombreuses danses sociales : des multiples variations du quadrille aux danses de couple fermées jusqu’à certaines formes folkloriques, en particulier la polka et la scottish. Au début du XXe siècle, la circulation des pratiques dansées entre ces deux espaces festifs se poursuit avec l’introduction des danses de société des Amériques15.

  • 16 Parmi cet ensemble : CARADEC François, WEILL Alain, Le Café-concert, Paris, Hachette Massin, 1980 ; (...)

8Tout en s’en démarquant, certains éléments traditionnels issus de la guinguette sont renouvelés dans le répertoire spectaculaire des cafés-concerts et des music-halls aux XIXe et XXe siècles. Ce phénomène semble alimenter les imaginaires sociaux sur les danses de société et bâtir le café-concert comme une catégorie sociosymbolique du populaire. Cette catégorisation perdure dans l’historiographie : elle est visible notamment dans la littérature consacrée à l’histoire des cafés-concerts et des music-halls entamée dès les années 1930 par des journalistes, d’anciens directeurs de music-hall, des personnalités issues du milieu de la radio et de la télévision, et de nombreux collectionneurs16. Animée par une dynamique folkloriste visant à réhabiliter un genre longuement discrédité et à perpétuer une certaine tradition française, cette profusion bibliographique basée sur un ensemble de témoignages constitue « les histoires » du café-concert, mais également les principales ressources actuelles de l’historiographie de ce divertissement.

Archéologie d’un divertissement populaire

  • 17 « Bals, concerts et cafés-concerts », Dictionnaire Courcelle, 1899. Archives de la Préfecture de po (...)
  • 18 PÉNET Martin, « Le Café-concert, un nouveau divertissement populaire », in YON Jean-Claude, op. cit (...)

9D’après le Dictionnaire de police Courcelle, le café-concert désigne un établissement dont la principale raison sociale est la vente de boissons et qui a la fonction de distraire la clientèle par un spectacle vocal et musical ou des spectacles de curiosité pendant plus de trois mois17. L’activité commerciale est un élément central des cafés-concerts. Elle est d’ailleurs l’une des conditions nécessaires pour pouvoir jouir du spectacle proposé. L’accès y est gratuit, il n’y a pas de billetterie comme au théâtre, mais il est obligatoire de payer le prix minimum d’une consommation, dont le renouvellement est souvent imposé par les gérants des établissements. Le principe de gratuité qui prévaut dans plusieurs salles jusqu’à la fin du XIXe siècle façonne l’idée selon laquelle le café-concert est un loisir accessible à tous les niveaux de la société, surtout pour ceux qui n’ont pas les moyens de se rendre au théâtre18. Cette accessibilité qui permet d’entrer à toute heure sans réservation préalable, et de profiter d’un spectacle moyennant le simple tarif d’une consommation, attire une population variée, notamment les publics les plus modestes. Cette ouverture sociale est l’une des principales raisons pour lesquelles le café-concert est souvent identifié comme un loisir populaire, bien qu’il ne concerne comme nous le verrons qu’une catégorie bien spécifique d’établissements.

  • 19 DAUMARD Adeline, Les Fortunes françaises au XIXe siècle, Paris, Mouton, 1973.

10Le terme populaire renvoie ici aux classes sociales les plus pauvres de la société. Dans ses travaux sur les fortunes françaises au XIXe siècle, Adeline Daumard affirme qu’il est assez aisé d’évaluer la proportion de la population parisienne pauvre à cette période, en recoupant les données démographiques avec celles issues des registres des déclarations de succession19. Entre les habitants exemptés de la taxe municipale parce qu’ils payent moins de 200 francs de location par année, ceux qui ne laissent pas suffisamment de biens personnels pour donner lieu à une déclaration après décès, ou encore ceux qui ne parviennent pas à réunir les 38 francs requis pour le service funéraire le moins coûteux, l’auteur estime qu’environ deux tiers de la population parisienne peuvent être qualifiés de pauvres au XIXe siècle.

  • 20 GUESLIN André, Gens pauvres, pauvres gens dans la France du XIXe siècle, Paris, Aubier, 1997.
  • 21 MILLIOT Vincent, Les Cris de Paris ou Le peuple travesti. Les Représentations des petits métiers pa (...)

11Cette perspective socioéconomique réunit et fusionne des catégories sociales qui sont en réalité très différentes. En effet, si l’état de pauvreté est commun aux indigents, aux chômeurs, aux vagabonds et aux travailleurs des usines ou des ateliers, ces divers groupes sociaux se caractérisent par des modalités d’existence éloignées les unes des autres20. Durant la seconde moitié du XIXe siècle, l’expansion du paupérisme urbain lié à l’industrialisation du travail conduit à une distinction plus nette entre les conditions du prolétariat ouvrier et des populations pauvres. Est pauvre celui qui n’a pas de travail ou qui exerce ponctuellement de petits métiers qui ne sont pas régis par l’économie salariale officielle21.

  • 22 POULOT Denis, Question sociale. Le Sublime ou le travailleur comme il est en 1870 et ce qu’il peut (...)
  • 23 Cette expression argotique provient d’une dérision qui exprime l’insoumission des travailleurs à le (...)
  • 24 POULOT Denis, op. cit., p. 147.
  • 25 Ibid., p. 22.
  • 26 Ibid., p. 30.
  • 27 Ibid.

12Un fossé se creuse dans la perception des classes populaires, distinguant plus nettement la classe des travailleurs honnêtes de celle des « mauvais pauvres ». Selon la classification proposée dans le témoignage de Denis Poulot, « l’ouvrier vrai » se remarque par une grande capacité de travail, une propension à l’économie, une conduite respectable et sérieuse ainsi qu’une attitude exemplaire envers sa famille22. Aux antipodes figure le portrait du travailleur nommé « sublime23 », qui dépense sans compter et manque de respect à son patron. Les goûts en matière culturelle sont tout autant contrastés. Le « sublime » est de toutes les soirées de bal où il se vante de côtoyer les danseuses de cancan les plus en vogue et boit plus que de raison dans les marchés de vin qui édifient, selon Poulot, le vrai « atelier où l’on façonne le sublime24 ». Quant à « l’ouvrier vrai », il cherchera plutôt à « développer son intelligence par de bonnes et saines lectures25 », à conduire sa femme et ses enfants au théâtre « pas autant de fois qu’il le voudrait, le samedi ou le dimanche de paie26 », en veillant à choisir « le drame de préférence27 ».

13Cette association dichotomique se profile tout au long du XIXe siècle dans la hiérarchisation des lieux d’art et de divertissement. Cette classification s’élabore à partir d’un ensemble de discours évoquant l’appartenance réelle ou fantasmée des publics qui les fréquentent. Certains témoignages issus des mémoires d’artistes et de promoteurs du café-concert, certains éléments provenant de la littérature touristique sur Paris, ainsi que plusieurs sources policières produites dans le cadre de la surveillance des lieux de spectacle au XIXe siècle dessinent les contours sociologiques de la communauté du café-concert parisien. Dans une perspective quantitative, ces informations parcimonieuses indiquent parfois le nombre des membres composant le public, par une logique comptable dans les rapports policiers, ou par le biais d’une évaluation approximative, jaugeant les succès ou les échecs d’un spectacle en fonction du nombre de places vides dans la salle. Les détails concernant la composition sociologique des publics se portent quelquefois sur l’âge, sur le sexe, sur les origines géographiques et ethniques ou sur l’identité socioprofessionnelle. Mais la plupart du temps, ils se résument à des stéréotypes, qui s’expriment par certaines formulations récurrentes telles que « gens sans aveu » ou « femmes interlopes ».

Le populaire comme disqualificatif

14L’exemple d’un dossier de demande d’autorisation pour l’ouverture d’un nouveau café- concert en 1871 situé dans le quartier d’Auteuil révèle la dimension idéologique du contrôle policier des spectacles tout en soulignant la fusion entre des paramètres sociologiques et symboliques dans le regard porté sur les classes populaires dans la seconde moitié du XIXe siècle. Le requérant, Monsieur Louis Philippe Étienne Bernard, est un marchand de vin âgé de 40 ans qui sollicite l’autorisation d’ouvrir un café-concert à la même adresse que son domicile. Après enquête sur les origines sociales, le passé professionnel et les ressources économiques du demandeur, la requête est rejetée à cause de la mauvaise clientèle fréquentant les débits adjacents au dit établissement.

  • 28 Rapport de la police municipale du 16e arrondissement. Réponse d’une demande d’avis, 6 septembre 18 (...)
  • 29 Ibid.
  • 30 Ibid.
  • 31 CHEVALIER Louis, Classes laborieuses et classes dangereuses à Paris pendant la première moitié du X (...)

15D’après l’enquêteur, les dimanches et les lundis, le café-concert serait fréquenté « par des chauffeurs, mécaniciens et employés des bateaux à vapeur ainsi que par des femmes interlopes, et [serait] entouré de petits débits où se réfugient des individus qui ne vivent on ne sait trop de quoi28 ». La réticence du préfet à accorder l’autorisation repose sur la « mauvaise fréquentation29 » du quartier où est prévu l’emplacement de l’établissement, ainsi que sur la méfiance à l’égard de la catégorie socioprofessionnelle rattachée à la clientèle supposée de cet établissement. Les ouvriers du secteur des transports routiers et fluviaux ainsi que les mécaniciens sont identifiés par le personnel de police comme une population d’individus dangereux et violents. En précisant qu’« avec une société semblable, il est à craindre que des rixes aient lieu entre les consommateurs30 », le préfet nourrit un discours policier habituel sur les classes populaires qui procède à leur assimilation aux populations délictueuses31.

  • 32 CHARTIER Roger, Culture écrite et société. L’ordre des livres (XIVe-XVIIIe siècle), Paris, Albin Mi (...)

16Objet des discours de la classe au pouvoir, la catégorie du populaire apparait dans ce cas comme la production d’un regard, d’une assignation et d’une disqualification, apposée par les élites sur certaines pratiques jugées illégitimes. Dans cette perspective, le populaire désigne moins une réalité historique qu’une volonté politique de catégorisation sociale. Partant du constat que la culture populaire n’existe pas en soi, mais qu’elle est une invention des élites, Roger Chartier va jusqu’à inverser le paradigme en admettant que finalement « la culture populaire est une catégorie savante32 ».

  • 33 CHARLE Christophe, Théâtres en capitales. Naissance de la société du spectacle à Paris, Berlin, Lon (...)
  • 34 Programmes de l’Alcazar d’été, Bibliothèque historique de la ville de Paris, fonds Actualités, séri (...)

17Le regard policier sur les cafés-concerts pénètre les imaginaires liés à la réception de ces divertissements et contribue à alimenter une perception disqualifiante à leur égard. L’association symbolique entre délinquance et altérité populaire se glisse par exemple dans la hiérarchisation des établissements qui se renforce dans la seconde moitié du XIXe siècle, marquée par les effets d’un marché du spectacle de plus en plus concurrentiel33. En effet, le développement d’une industrie des spectacles sous le Second Empire entraîne une hiérarchisation sociale plus grande entre les cafés-concerts et les publics. Répondant à un idéal libéral et démocratique, le principe de gratuité du café-concert n’est pas sans rencontrer de nombreuses difficultés et ne durera qu’un temps. Par exemple, en 1869, à l’Alcazar d’Été, l’entrée demeure libre, moyennant une consommation au tarif minimum d’un franc. Quatre ans plus tard, l’accès est désormais payant. Il en coûte cinquante centimes pour une place tandis que la réservation d’un fauteuil est possible au prix d’un franc. En 1875, le prix, unique cette fois-ci, est quatre fois plus cher et s’élève à deux francs34. Ce phénomène d’enrichissement qui succède aux mesures libérales prises sous le Second Empire et s’accélère aux débuts de la Troisième République marque une rupture dans l’histoire sociale du café-concert. Les salles enrichies et modernisées se distinguent nettement des cafés-concerts plus modestes et se démarquent des origines populaires des premiers établissements en s’adressant à une clientèle issue de la petite et moyenne bourgeoisie.

  • 35 CONSTANTIN Marc, Histoire des cafés-concerts et des cafés de Paris, Paris, Renauld, 1872, p. 102.
  • 36 CHADOURNE André, Les Cafés-concerts, Paris, Dentu, 1889, p. 22.

18La nomenclature exposée dans les guides des loisirs parisiens au XIXe siècle ne sélectionne que cette catégorie prestigieuse de café-concert, à l’instar de l’Alcazar, de l’Eldorado, ou encore des Ambassadeurs. Tous les autres, qui restent pourtant majoritaires, ne sont généralement pas ou rarement mentionnés. Relégués à la catégorie du populaire, ils intéressent peu les chroniqueurs qui ont l’ambition de s’adresser à un lectorat cultivé et de préserver les valeurs associées à l’image de la capitale aux yeux des touristes provinciaux et étrangers. Ainsi Marc Constantin se contente de répertorier les établissements les plus importants en affirmant : « Nous voilà bien renseignés sur les principaux cafés-concerts de Paris. Quant aux cafés-concerts secondaires et tertiaires, il en est jusqu’à cent que je pourrais nommer35. » André Chadourne affiche lui aussi un désintérêt « à passer en revue les salles de second, troisième et de… quinzième ordre qui pullulent dans Paris36 ». Quelques-uns de ces divertissements sont toutefois présentés aux lecteurs comme une curiosité pittoresque pour qui veut connaître le peuple de Paris. Mais le plus souvent, ils sont décrits comme des lieux vulgaires, répugnants, bruyants, enfumés et les spectacles sont jugés bêtes, grivois, et immoraux. Les clients qui les visitent sont des individus louches aux comportements déviants et criminels. Cette assignation délictueuse issue d’une vision policière fait écho aux imaginaires qui circulent autour des « bas-fonds » parisiens.

Exotisation et corporéité populaire

  • 37 À mi-chemin entre le feuilleton romancé de la presse à grand tirage et les guides touristiques sur (...)
  • 38 KALIFA Dominique, Les Bas-fonds. Histoire d’un imaginaire, Paris, Le Seuil, 2013, p. 17.
  • 39 SEIGEL Jerrold, Paris bohème. Culture et politique aux marges de la vie bourgeoise (1830-1930), tra (...)
  • 40 PRIVAT D’ANGLEMONT Alexandre, Paris anecdote, Paris, Delahays, 1860, p. 217.
  • 41 Ibid.
  • 42 KALIFA Dominique, op. cit., p. 205.

19La notion de « bas-fonds » émerge au début du XIXe siècle à la fois dans les discours des réformistes sociaux et dans la littérature pittoresque37. Elle désigne les localités populaires et les figures du petit peuple parisien identifiées par le prisme de la misère, du vice et du crime. Les bouis-bouis et autres bouges apparaissent comme les sphères d’accueil de cette classe marginalisée de la société où règnent sédition politique, commerces parallèles et mœurs scandaleuses. Comme le souligne Dominique Kalifa, les « bas-fonds » relèvent d’une représentation culturelle née à la croisée « du désir de réforme et de moralisation porté par les élites, mais aussi d’une soif d’évasion et d’exotisme social, avides d’exploiter le potentiel d’émotions sensationnelles dont, aujourd’hui comme hier, ces milieux sont porteurs38 ». Quelques-uns de ces établissements attirent donc une partie de la bohème parisienne qui y trouve une certaine authenticité, une liberté comportementale ou qui y puise ses sources d’inspiration39. Dans Paris anecdote, Alexandre Privat d’Anglemont invite les lecteurs à se perdre « là-bas, bien loin, au fond d’un faubourg impossible, plus loin que le Japon, plus inconnu que l’intérieur de l’Afrique, dans un quartier où personne n’est jamais passé40 » pour y découvrir « quelque chose d’incomparable, de curieux, d’affreux, de charmant, de désolant, d’admirable41 ». Exotisme social et fascination pour l’élément populaire constituent à la fois un facteur d’érotisme, le frisson du danger, une source de libération, « tout autant que la certitude réconfortante d’appartenir à l’autre monde42 ».

  • 43 DELVAU Alfred, Dictionnaire de la langue verte. Argots parisiens comparés, Paris, Dentu, 1866.

20Catégories sociale, exotique et esthétique se rejoignent dans une incorporation du populaire qui dialogue entre la scène et la sociabilité de la salle. La mise en scène de personnages qui font référence à des figures populaires construit une passerelle entre les identités sociales et symboliques des artistes de café-concert. Les corporéités populaires sont campées par l’usage d’un langage argotique ainsi que par l’intonation d’une voix qui varie selon les registres, mais qui est généralement de haute tessiture, parfois qualifiée par les expressions « forte en gueule » ou « gouaille populaire43 ». La force de caractère poussant à se sortir d’une condition précaire et d’où découle une attitude insolente et frondeuse, la célèbre « gouaille populaire », pénètre aussi l’esthétique du café-concert. Par exemple, l’interprétation gestuelle de certains artistes lyriques joue avec un ensemble de références scéniques participant à cette fabrique de typologies sociales qui se caractérisent — soit par une affiliation géographique plus ou moins lointaine (l’étranger, le breton, le provincial) ou proche de la capitale (le faubourien, le migrant) — soit par un statut socioprofessionnel identifiable (le paysan, la couturière, l’ouvrier) ou par de petits métiers (cochers, marchands ambulants, chiffonniers, etc.) Cet exotisme social repose sur des binarités nationales ou locales qui tendent à opposer les figures représentant l’étranger et le Français, le natif parisien et le faubourien ainsi que les frontières entre l’urbanité et la ruralité.

  • 44 STASZAK Jean-François, « Qu’est-ce que l’exotisme ? », Le Globe. Revue genevoise de géographie, n° (...)
  • 45 Ibid.
  • 46 Ibid.

21Produit d’un imaginaire qui dicte ce qui est proche ou lointain, le processus d’exotisation des classes populaires se concrétise par deux phénomènes concomitants que Jean-François Staszak explicite dans son article « Qu’est-ce que l’exotisme ? ». Selon le géographe, l’exotisation implique une décontextualisation de l’objet perçu comme étrange afin de parvenir « à l’aborder, à se saisir de lui44 » et une recontextualisation qui permet de le placer dans un cadre familier afin de pouvoir le contempler en observant là « où il s’écarte de nos valeurs et de nos habitudes45 ». Ainsi, dit-il : « L’exotisation est un changement de contexte, par lequel l’objet exotisé est mis à disposition (de lointain, il devient proche) et qui construit son étrangeté46. » L’exotisation des classes populaires représentée dans les spectacles de café-concert au XIXe siècle se matérialise également par un ensemble d’éléments gestuels qui se rattache dans l’imaginaire collectif et dans la mythologie des « bas-fonds » parisiens à une corporéité populaire. L’excessivité des mouvements du cancan par exemple, la vulgarité des gestes reliés à la sphère sexuelle ou scatologique dans la chanson érotique, la nonchalance et la négligence d’une attitude corporelle libre et sans-façon donnent à voir un réalisme corporel et une liberté comportementale, dans lesquels les fonctions organiques du corps sont mises en valeur.

  • 47 GORDON Rae Beth, De Charcot à Charlot. Mises en scène du corps pathologique, Rennes, Presses univer (...)
  • 48 Ibid.
  • 49 PESSIN Alain, Le Mythe du peuple et la société française du XIXe siècle, Paris, Presses universitai (...)

22Une sorte d’excédent corporel se retrouve dans certaines descriptions physiologiques qui tendent à identifier les mouvements spectaculaires comme l’expression d’une pathologie. Certaines danses sociales spectacularisées sur les scènes de café-concert depuis le Second Empire puisent dans ce que Rae Beth Gordon a identifié sous l’expression « esthétique épileptique47 ». Dans son ouvrage De Charcot à Charlot, l’auteure souligne les échanges entre la corporéité mise en scène au café-concert et la production d’un imaginaire du corps pathologique, notamment le répertoire gestuel hystérique48. Cette circulation entre la littérature médicale, le répertoire spectaculaire et la médiatisation artistique du café-concert façonne une corporéité faite de gesticulations mécaniques, de mouvements angulaires, involontaires (tics) ou grimacés qui se retrouve dans l’interprétation scénique. L’expression de cette excessivité fait écho au dérèglement pathologique observé par la psychiatrie au XIXe siècle, mais il semble qu’elle soit également une caractéristique majeure de l’identité sociosymbolique du corps populaire à cette même période. En effet, dans le contexte sociopolitique du XIXe siècle, l’excessivité du geste, comme démesure morale ou offense politique, est avant tout celle du peuple49. La colère des foules, la violence des émeutes révolutionnaires marquent la sensibilité et l’imagination de toute cette période. Les secousses gestuelles au café-concert ne sont peut-être pas étrangères à l’agitation sociale qui se produit au-dehors. Au-delà des possibles implications politiques du spectacle des corps au café-concert, il apparait que certaines corporéités valorisent une forme d’insolence verbale et physique qui puise dans l’archéologie populaire de ce divertissement et qui contribue à alimenter l’imaginaire projeté sur l’altérité populaire.

  • 50 COUTELET Nathalie, MOINDROT Isabelle (dir.), L’Altérité en spectacle (1789-1918), Rennes, Presses u (...)
  • 51 DÉCORET-AHIHA Anne, Les Danses exotiques en France (1880-1940), Pantin, Centre national de la danse (...)

23À l’instar d’autres altérités spectaculaires au XIXe siècle50, en particulier la catégorie du spectacle exotique51, l’altérité populaire du café-concert se bâtit au sein d’un système hautement idéologique. Cette esquisse définitionnelle du café-concert comme espace sociosymbolique du populaire invite à engager une réflexion sur l’impact de cette catégorisation sur la danse en tant que telle. Soulignant l’importance de l’environnement contextuel et discursif dans la fabrique de l’étiquette populaire du café-concert, il reste à interroger les effets de cette construction identitaire du lieu par où voir et percevoir la danse dite populaire. Comment l’identification sociosymbolique de l’espace en danse conditionne-t-elle le contenu des pratiques dansées et comment agit-elle sur l’élaboration des statuts et des valeurs attribuées aux danses de divertissement ? Ce questionnement invite à interroger les rapports entre réception et production en développant davantage une étude esthétique sur l’analyse du geste chorégraphique dans le répertoire des danses sociales spectacularisées au café-concert, et en portant une attention particulière au phénomène culturel et politique de leur folklorisation.

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Bibliographie

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YON Jean-Claude (dir.), Les Spectacles sous le Second Empire, Paris, Armand Colin, 2010.

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Notes

1 CONDEMI Concetta, Les Cafés-concerts : histoire d’un divertissement (1849-1914), Paris, Quai Voltaire, 1992.

2 Sur le modèle de l’éclectisme du cabinet de curiosité, les spectacles dits de curiosité renvoient à une grande variété de lieux et de genres spectaculaires qui n’ont en commun que le seul fait de ne pas porter le nom de théâtre. Parmi cet ensemble très disparate figurent les attractions issues du théâtre forain telles que des danses de corde, les tours de force et d’adresse, les exercices acrobatiques, les numéros de voltige et de contorsion, les spectacles de dressage d’animaux, les expériences de prestidigitation et de phénomènes physiques, les exhibitions humaines, les panoramas, les marionnettes, les feux d’artifice, etc.

3 SAVEV Catherine, « Le Café-concert : un théâtre parallèle », in YON Jean-Claude (dir.), Les Spectacles sous le Second Empire, Paris, Armand Colin, 2010, pp. 366-377.

4 PAILLET Camille, Déshabiller la danse. Les scènes de café-concert et de music-hall (Paris, 1864-1908), Thèse de doctorat en arts vivants, spécialité danse, sous la direction de Marina Nordera, Université Côte d’Azur, 2019.

5 Née dans le contexte révolutionnaire du XVIIIe siècle, la goguette est un café-chantant majoritairement fréquenté par la classe ouvrière autour de la chanson militante et politique. L’historiographie tend à faire coïncider le mouvement de répression des goguettes après les évènements de 1848 avec l’émergence du café-concert.

6 BOLL André, Théâtres, spectacles et fêtes populaires dans l’histoire, Marseille, Éditions du Sagittaire, 1942, p. 113.

7 CHAMPFLEURY, « Bals et concerts », in Paris Guide, par les principaux écrivains et artistes de la France, vol. 2, Paris, Librairie internationale, 1867, p. 997.

8 Ibid.

9 GASNAULT François, Guinguettes et lorettes. Bals publics et danse sociale à Paris entre 1830 et 1870, Paris, Aubier, 1986.

10 Promenade à tous les bals publics de Paris, barrières et guinguettes de cette capitale, ou Revue historique et descriptive de ces lieux, Paris, Imprimerie de Cosson, 1830, p. 166.

11 Ibid.

12 La répartition spatio-temporelle des cafés-concerts s’organise entre les saisons d’hiver et d’été. La promenade sur les Champs-Élysées constitue le rendez-vous champêtre des Parisiens pendant les beaux jours. Les établissements tels que l’Alcazar d’Hiver, l’Eldorado, la Scala, le Pavillon de l’Horloge et bien d’autres assurent le relais pour l’hiver offrant aux Parisiens et aux touristes une programmation spectaculaire tout au long de l’année.

13 DELVAU Alfred, Les Plaisirs de Paris. Guide pratique et illustré, Paris, Faure, 1867, p. 176.

14 Ibid.

15 JACOTOT Sophie, Danser à Paris dans l’entre-deux-guerres. Lieux, pratiques et imaginaires des danses de société des Amériques (1919-1939), Paris, Nouveau Monde éditions, 2013.

16 Parmi cet ensemble : CARADEC François, WEILL Alain, Le Café-concert, Paris, Hachette Massin, 1980 ; FESCHOTTE Jacques, Histoire du music-hall, Paris, Presses universitaires de France, 1965 ; SALLÉE André, CHAUVEAU Philippe, Music-hall et café-concert, Paris, Bordas, 1985.

17 « Bals, concerts et cafés-concerts », Dictionnaire Courcelle, 1899. Archives de la Préfecture de police de Paris [DB 100].

18 PÉNET Martin, « Le Café-concert, un nouveau divertissement populaire », in YON Jean-Claude, op. cit., pp. 349-365.

19 DAUMARD Adeline, Les Fortunes françaises au XIXe siècle, Paris, Mouton, 1973.

20 GUESLIN André, Gens pauvres, pauvres gens dans la France du XIXe siècle, Paris, Aubier, 1997.

21 MILLIOT Vincent, Les Cris de Paris ou Le peuple travesti. Les Représentations des petits métiers parisiens (XVIe-XVIIIe siècles), Paris, Publications de la Sorbonne, 1995.

22 POULOT Denis, Question sociale. Le Sublime ou le travailleur comme il est en 1870 et ce qu’il peut être, Paris, Librairie internationale, 1870.

23 Cette expression argotique provient d’une dérision qui exprime l’insoumission des travailleurs à leurs patrons et aux valeurs familialistes.

24 POULOT Denis, op. cit., p. 147.

25 Ibid., p. 22.

26 Ibid., p. 30.

27 Ibid.

28 Rapport de la police municipale du 16e arrondissement. Réponse d’une demande d’avis, 6 septembre 1871 Archives de la Préfecture de police de Paris [27 DA].

29 Ibid.

30 Ibid.

31 CHEVALIER Louis, Classes laborieuses et classes dangereuses à Paris pendant la première moitié du XIXe siècle, Paris, Plon, 1969.

32 CHARTIER Roger, Culture écrite et société. L’ordre des livres (XIVe-XVIIIe siècle), Paris, Albin Michel, 1996, p. 205.

33 CHARLE Christophe, Théâtres en capitales. Naissance de la société du spectacle à Paris, Berlin, Londres et Vienne (1860-1914), Paris, Albin Michel, 2008.

34 Programmes de l’Alcazar d’été, Bibliothèque historique de la ville de Paris, fonds Actualités, série 102.

35 CONSTANTIN Marc, Histoire des cafés-concerts et des cafés de Paris, Paris, Renauld, 1872, p. 102.

36 CHADOURNE André, Les Cafés-concerts, Paris, Dentu, 1889, p. 22.

37 À mi-chemin entre le feuilleton romancé de la presse à grand tirage et les guides touristiques sur Paris, la littérature pittoresque englobe une multitude d’ouvrages qui se réclament du Paris des « bas-fonds » en croquant les us et coutumes du petit peuple, ses mœurs, ses loisirs et ses vices.

38 KALIFA Dominique, Les Bas-fonds. Histoire d’un imaginaire, Paris, Le Seuil, 2013, p. 17.

39 SEIGEL Jerrold, Paris bohème. Culture et politique aux marges de la vie bourgeoise (1830-1930), traduit de l’anglais par Odette Guitard, Paris, Gallimard, 1991.

40 PRIVAT D’ANGLEMONT Alexandre, Paris anecdote, Paris, Delahays, 1860, p. 217.

41 Ibid.

42 KALIFA Dominique, op. cit., p. 205.

43 DELVAU Alfred, Dictionnaire de la langue verte. Argots parisiens comparés, Paris, Dentu, 1866.

44 STASZAK Jean-François, « Qu’est-ce que l’exotisme ? », Le Globe. Revue genevoise de géographie, n° 148, 2008, p. 13.

45 Ibid.

46 Ibid.

47 GORDON Rae Beth, De Charcot à Charlot. Mises en scène du corps pathologique, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2013.

48 Ibid.

49 PESSIN Alain, Le Mythe du peuple et la société française du XIXe siècle, Paris, Presses universitaires de France, 1992.

50 COUTELET Nathalie, MOINDROT Isabelle (dir.), L’Altérité en spectacle (1789-1918), Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2015.

51 DÉCORET-AHIHA Anne, Les Danses exotiques en France (1880-1940), Pantin, Centre national de la danse, 2004 et PALAZZOLO Claudia, Mise en scène de la danse aux Expositions de Paris (1889-1937). Une fabrique du regard, Paris, L’Œil d’or, 2017.

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Pour citer cet article

Référence électronique

Camille Paillet, « Bâtir la catégorie du populaire au café-concert »Recherches en danse [En ligne], 9 | 2020, mis en ligne le 18 novembre 2020, consulté le 11 février 2025. URL : http://journals.openedition.org/danse/3572 ; DOI : https://doi.org/10.4000/danse.3572

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Auteur

Camille Paillet

Camille Paillet est docteure en danse à l’Université Côte d’Azur. Après une thèse portant sur les cafés-concerts et les music-halls parisiens au XIXe siècle, elle poursuit ses recherches sur les espaces spectaculaires du divertissement. Son approche interdisciplinaire articule des questionnements liés à l’histoire du corps et du genre, aux rapports entre danse savante et populaire, aux interactions entre érotisme et censure des spectacles, ainsi qu’à l’évolution du statut des métiers artistiques. Elle enseigne par ailleurs la théorie des spectacles dans plusieurs universités françaises (Université Côte d’Azur, Sorbonne Nouvelle-Paris 3, Université Paris 8).

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