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Paroles de créateurs/Paroles en scène

En résonance d’une conférence sensible

Lulla Chourlin et Sarath Amarasingam

Résumés

Le texte vise à présenter les enjeux de savoirs sensibles du corps en restituant des écrits qui ont constitué les protocoles de recherche et de création d’une performance intitulée Conférence sensible, créée en 2018 avec le danseur Sarath Amarasingam et Lulla Chourlin, chorégraphe praticienne enseignante en Body-Mind Centering® (BMC®). Le propos de cette Conférence sensible était de questionner ce que la pratique somatique du BMC® apporte au danseur pour affiner sa danse. Différents dispositifs faisant émerger la parole et l’écriture « avant-pendant-après » l’expérience des touchers et des danses ont été mis en place et exposés au public. Sont partagés ici six textes issus de ce processus de recherche-création, l’ensemble insistant sur l’importance d’une circulation de la sensation, du mouvement, de la parole orale et écrite pour qu’une incorporation sensible ait lieu au sein de la pratique du BMC® comme de la pratique de la danse.

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Texte intégral

  • 1 Conférence Sensible de et avec Sarath Amarasingam et Lulla Chourlin, accompagnement d’Aurore Despré (...)
  • 2 Voir BAINBRIDGE COHEN Bonnie, Sentir, ressentir et agir, trad. Madie Boucon, Bruxelles, Contredanse (...)
  • 3 Ce que l’on nomme « systèmes du corps » en Body-Mind Centering® fait référence directe aux « systèm (...)

1En 2017-2018, la compagnie Astragale basée à Besançon a présenté, en divers lieux1, une performance nommée Conférence sensible portée par le danseur Sarath Amarasingam et moi-même, Lulla Chourlin, danseuse chorégraphe et praticienne enseignante en Body-Mind Centering® (BMC®). Notre propos artistique était de mettre en lien la pratique somatique du BMC® avec la danse et de questionner ce que la pratique somatique apporte au danseur pour affiner sa danse2. Comment l’expérience du corps proposée par les pratiques somatiques, et spécialement celle du BMC® nourrit-t-elle, transforme-t-elle le corps du danseur ? Comment ce dernier explore-t-il et incorpore-t-il les différentes propositions formulées par cette pratique et comment, dans leur mise à jour, un public diversifié les perçoit-il ? Conférence sensible s’entend alors comme une recherche-création aussi bien qu’une performance-débat sur la transmission, sur la réception et sur l’interprétation, menée sous le regard du spectateur témoin. Il s’agit de questionner, d’informer, de partager avec un auditoire, une expérience sensible vécue et interprétée par le danseur, comme d’en transporter les ressorts artistiques et poétiques. Lors de cette Conférence sensible, je proposais au danseur Sarath Amarasingam des expériences de toucher spécifiques, basées sur l’exploration sensorielle des « systèmes du corps3 » issus de la science anatomique : « toucher les os », « toucher les organes », « toucher les liquides », etc. Chaque expérience était suivie d’une incorporation en mouvement et d’une danse.

2Plus spécialement, les questions posées aux spectateurs comme à nous-mêmes étaient : comment le toucher du corps du danseur à travers un « système du corps » choisi transforme-t-il la perception qu’il a de son corps ? Comment interprète-t-il cette information ? Quelle est sa réponse en termes de mouvement ? Quelle est l’expérience de la praticienne dans son propre corps ? Comment le danseur habite-t-il sa danse suite à l’expérience ? Quelle est la perception du spectateur témoin ? Quelle transformation corporelle perçoit-il ? Ce sont bien ces enjeux d’une connaissance sensible et expérientielle du corps ouvrant vers la modulation sensorielle, posturale, corporelle, gestuelle et aussi vers les ressorts poétiques du corps, que nous souhaitions vivre dans nos postures respectives, comme les offrir à celle des spectateurs. Précisons que Conférence sensible présentait au public un processus de recherche sur le corps et de transmission « en train de se faire », un chemin de sensations, de questions, de découvertes et de réflexions, au fil de chacune des présentations. Si nous avions une structure des séquences que nous présentions, relevant elle directement des choix dramaturgiques et de mise en scène, toutes les expériences de toucher comme toutes les danses, en plus des dialogues entre nous, étaient choisies dans leur thématique juste avant chaque représentation, cela justement au regard même du processus d’incorporation du BMC® dans le corps du danseur Sarath Amarasingam, ces moments étant composés donc sur le champ.

Expérience du toucher

Expérience du toucher

Lulla Chourlin et Sarath Amarasingam, CRR de Besançon, 25 novembre 2017

©Yves Petit

3Au cours du processus de recherche et de création, de nombreux protocoles spectaculaires (dispositifs spatiaux, rythmiques, sonores, lumineux), mais aussi méthodologiques de recherche guidée par la pratique, ont été explorés pour faire circuler le toucher, la danse, la parole et l’écriture en mots - ceux-ci ayant été composés pour être exposés au public en direct ou en différé, notamment en voix off. Ainsi, « avant, pendant, après » l’expérience de toucher, ou encore « avant, pendant, après » la danse, Sarath et moi entrions en dialogue oral ou en processus d’écriture sensible. Par la parole et par l’écrit, il s’agissait alors de se poser en situation de percevoir, d’analyser, d’observer, de transcrire de façon directe ce qui se passe dans l’instant dans les corps, non seulement du danseur mais aussi de la praticienne BMC®. Par-là, nous expérimentions tous les deux et nous notions en mots ce qui s’éprouve dans les corps et dans la pensée en situation. Ce sont quelques extraits de ces paroles retranscrites ou quelques extraits de ces écritures que nous souhaitons partager ici.

« Je ne pourrais pas danser » – Lulla Chourlin

4« Je ne pourrais pas danser » est un texte écrit dans la visée d’introduire la Conférence Sensible et de révéler au spectateur ma nécessité, en tant que praticienne de BMC®, d’incorporer des principes du BMC® ou des systèmes du corps pour être prête à danser.

« Je ne pourrais pas danser
Sans sentir ma peau caresser l’air et mon enveloppe me dessiner dans l’espace.
Je ne pourrais pas danser
Sans réveiller mes os, les petits, les longs, les carrés,
les tordus, les simples, les compliqués qui me forment et me déforment.
Je ne pourrais pas danser
Sans laisser le poids de ma chair se décoller de mes os et pendre agréablement à ma carcasse.
Je ne pourrais pas danser
Sans mes organes déposés à leur place ou alors suspendus aux fils tressés qui les retiennent avec douceur et fermeté.
Je ne pourrais pas danser
Sans le glissement voluptueux de mes fibres musculaires spiralées qui s’étirent dans leurs lits de fascias.
Je ne pourrais pas danser
Sans toute la complicité de mes cellules joyeuses si heureuses d’être vivantes.
Je ne pourrais pas danser
Sans mon corps
Sans mon âge
Avec tous les âges
Je ne pourrais pas danser
Sans mon corps d’enfant, de jeune fille, de femme
Mon corps humain, usé, mais pas trop
Je ne pourrais pas danser
Seule
Sans vous
Sans nous »

Je ne pourrais pas danser sans…

Je ne pourrais pas danser sans…

Lulla Chourlin, CRR de Besançon, 25 novembre 2017

©Yves Petit

« Les ancêtres » – Lulla Chourlin

5« Les ancêtres » est une « mise en mot » d’une préparation physique interne pour être disponible à la danse. Debout, j’écoute mon corps, je porte mon attention sur sa manière d’être en relation avec la terre, sur ma manière d’être traversée par la gravité. Après cette expérience, j’écris. Dans Conférence sensible, ce texte a été diffusé en voix off, alors que je suis assise au plateau, la parole et les mots permettant au spectateur de suivre l’expérience d’incorporation.

« Je contacte la terre sous mes pieds/j’observe où ça me traverse.

La gravité me traverse péniblement aujourd’hui. Ça monte dans les os : tibia fémur bassin colonne mais stop cela s’arrête aux cervicales. Alors je recommence le parcours le voyage de la terre à mon intérieur/et non ça ne passe pas.

  • 4 D1 : première dorsale ; C7 : septième cervicale.

Je dois agir, agir sur les cervicales. Le passage entre D1 et C74, c’est vraiment le grand passage c’est très chargé de mémoires qui m’appartiennent et ne m’appartiennent pas.

J’ai des ancêtres dans le haut du dos. Je me demande ce qu’ils ont porté ! Ah oui peut être toute la paysannerie française, le village, labeur, la rudesse de la vie, le travail c’est la charnière du travail qui n’est pas fluide aujourd’hui. Le grand-père qui allait faucher son pré à quatre heures du matin… L’odeur des foins, enfin les foins, ce qu’on m’en raconte, c’était aussi la fête.

Comme si ce temps que je n’ai pas connu est imprégné là. Ma mémoire cellulaire le connait. Je lutte à cet endroit.

J’ai pratiqué le BMC pour trouver la fluidité, trouver un corps enraciné sinon j’allais tomber. Je ne tenais pas debout sur terre et maintenant je me tiens debout dans le BMC.

La vertèbre D1 est devenue une bosse. J’aimerais tellement que ça me traverse là, trouver la fluidité de la vie, la respiration des cellules, être vivante … là. »

« Rendez-vous au sommet de mes sensations » – Sarath Amarasingam

6« Rendez-vous au sommet de mes sensations » est un texte écrit après une expérience de toucher sur les os et les fibres musculaires porté par la praticienne Lulla Chourlin.

« Écrire sur une feuille, c’est comme écrire sur l’espace
Il s’agit d’être là en superficie et d’entrer dans la profondeur des océans. Comme une baleine irait dans des petits pays.
La justesse de mon voyage
S’altérer, changer, danser, partir, rester, faciliter, s’autoriser… connaître, comprendre, incarner, se manifester par…
Se transporter au pays des faisceaux fibres, c’est trop ambitieux pour aujourd’hui
Être vrai à l’endroit où on est, c’est ma devise.
Comment parler de sensations comme d’être en lien avec soi et l’environnement ?
Comment les stimuli externes résonnent-ils sur mes territoires internes ?
Les informations externes m’envahissent et il y a des freins internes qui sont cachés.
Il faut les trouver, les identifier et libérer les énergies bloquées.
Trouver des repères. Créer de la confiance entre le dedans et le dehors. Être conscient de cette circulation d’information que je peux prendre ou laisser.
Ce voyage me permet de remonter à l’intérieur, un peu comme un grimpeur pour aller au sommet de la montagne. Moi je veux aller à la pointe de mon vécu de l’instant. »

Trouver les os

Trouver les os

Lulla Chourlin et Sarath Amarasingam, CRR de Besançon, 25 novembre 2017

©Yves Petit

« Toucher le pied du danseur » – Lulla Chourlin

7Juste après les touchers portés sur le corps de Sarath, je garde une mémoire vive de mes expériences et de mes sensations, cela non seulement de ce qui se passe dans le corps touché, mais aussi de mes sensations propres en tant que touchante. Alors que mes mains se trouvaient sur le pied de Sarath, ce texte relate de mes sensations internes et de celles que je ressens dans l’ensemble de son corps.

  • 5 « Fibula » est le terme employé dans la nouvelle nomenclature anatomique pour remplacer le terme de (...)

« Toucher
Toucher le pied du danseur
Chaque os est incarné dans le corps qui touche et dans le corps touché
Je connecte jusque dans mon cerveau.
Je me projette dans la sensation
Du petit orteil à la sacro-iliaque ?
ça passe ou ça passe pas ?
Ce n’est pas simple, il y a de l’encombrement, c’est comme déjà occupé !
Mais une ligne d’intention se dessine, comme un fin rayon laser doux.
Le tibia prend sa puissance, il affirme son rôle, sa présence.
Il porte beaucoup. Sans lui, on ne serait pas fier, on ramperait à genoux. Il nous tient debout tout de même, vertical, il avance sagittal, traverse, parcours. Alors bien sûr à côté, la fibula5 que je touche paraît si fragile, si fine.
Si le tibia est le roi, la fibula virevolte, princesse. Elle a bien sa place, légère comme une plume. Elle va adoucir et mine de rien étayer le rôle du Tibia.
Mais là je la cherche, je la sens prisonnière de ses frères jumeaux les gastrocnémiens qui la collent au roi.
Elle voudrait être libre, voler de ses propres ailes, mais en gardant le lien et en trouvant son confort de danseuse spiralée, entourée de ses frères musclés.
Il danse, le danseur
Il danse avec sa fibula comme avec une partenaire fine et légère.
Il pourrait s’envoler lui aussi… »

« Marcher les yeux fermés » – Sarath Amarasingam

8« Parler-danser » est une méthodologie visant à parler le mouvement en train de se faire. C’est une pratique que nous avons souvent expérimentée pour aligner la pensée, le mouvement et l’action en deux points qui doivent converger : 1/ « Je dis ce que je fais » et 2/ « Je fais ce que je dis », sans aucune projection du passé ou du futur dans l’action du moment présent. Par exemple : « Je pose ma main sur la table et j’écarte les doigts » en même temps que je le fais exactement. Ce texte est une transcription en direct écrite par Lulla Chourlin en observation d’une séquence de « Parler-danser » de Sarath Amarasingam.

« Marcher les yeux fermés/s’arrêter/regarder la main/Réfléchir
J’ai envie de poser la main puis le genou/je me lève/je touche le sol en marchant/
Regarder devant soi/s’arrêter/les coudes me tirent/cercle avec les bras/je ramène les la main devant/
Je contiens quelque chose dans ma main, j’attire, ma main droite s’éloigne de l’autre main, je pose fémur-ulna, mon pied, du talon, s’éloigne du genou droit.
J’ai envie d’enlever ma main pour chuter, je le fais  balance au sol.
Je pousse
Je repense à ce que Lulla a dit, relâcher le pied du talon, éloignement des iliaques, plus de poids dans mes mains
Le ressenti dont elle parle, est ce que je sens ? je sens trop de poids dans le bassin.
Je me repousse du sol/J’avance, je glisse, je regarde en bas…
J’ai envie d’enlever ma jambe et de chuter/Une jambe, la droite ? la gauche ?
Comme ça, j’irais sur la droite mais j’ai envie de regarder le public donc, la gauche.
Plaquer mon dos au sol/Je transfère le poids sur ma jambe droite, j’enlève le pied/
Je recommence car je suis tombé sur mon épaule. Transfert de poids sur jambe droite/je me rapproche du sol/oh ! ça ne marche pas
Je me rends compte que je l’aime bien cette position en « orteillant » prêt à partir : Oui j’aime bien cette position. Je marche avec le talon, je change de direction avec le gros orteil, le pied de la cheville guide.
J’essaie de penser à ce qu’on a fait au début, est ce que la ligne de force traverse jusqu’au pubis, je veux voir : si j’initie par le pubis, j’ai un ressenti jusqu’aux orteils.
Donc le gros orteil très présent. Est-ce que la ligne médiane de la jambe est présente ? ça me donne envie de faire des équilibres/je le fais/Il me manque les pieds…. Les petits orteils... les petits orteils arrivent à moi… En allant chercher les petits orteils j’ai la fibula qui vient.
C’est marrant j’ai pensé que ça m’aurait donné envie de faire des spirales et ça me donne envie de faire des dégagés. Oué, j’arrive pas à passer à autre chose…
J’ai envie de changer, d’aller dans le haut du haut… Si je voulais aller chercher les spirales, je devrais aller au sol mais j’ai pas envie.
Je vais dans le haut du corps, dans le dos du cou (corps). En allant dans le haut du corps j’arrive dans une sorte de spirale mais c’est marrant, c’est les membres supérieurs qui initient la spirale. En même temps j’ai l’impression que c’est un petit aller-retour. »

« Il est lourd » – Lulla Chourlin

9Le 27 février 2017, après une expérience de toucher invitant le danseur à céder à la gravité alors qu’il y résiste habituellement, Sarath se met à danser. En écriture automatique, j’écris ce que j’observe de la transformation de la danse de Sarath que je ne n’avais jamais vu bouger de cette manière.

« Il est lourd... très lourd... Comme jamais je ne l’ai vu lourd... Et ce n’est pas une histoire de terre... Il est lourd de sa lourdeur, de son poids de la mesure de son poids.
Il est sincère et authentique dans sa lourdeur.
L’organique l’amène dans un autre poids... Le poids de lui-même... dans sa lenteur mouvante… Une matière qui se répand parce que c’est comme ça/C’est juste ça/et c’est beau de simplicité, de plénitude vivante comme la lave du volcan qui s’étire encore rougeoyante.
La tête est lourde, elle ne se décolle pas... Elle adhère à la gravité… Et ça libère le reste du corps qui bouge dans une infinie lenteur, une douceur.
Il s’écoute, écoute le monde, le monde l’écoute... Il entend le silence, le silence du corps qui se déploie dans une infinie lenteur : habité/vivant/matière en transformation.
Le ciel l’attire, le ciel est plus fort que la terre/l’attraction céleste... Le poids dans le ciel. Il trouve ses appuis pour s’ériger, trouve la colonne, elle va faire le lien... Il la déploie, trouve le ciel mais encore plus la terre.
Il aimerait bouger par le poids du bas cette fois/ne pas toujours initier du haut. C’est sa recherche, bouger avec le poids du bas. Il réussit. C’est un autre danseur qui apparaît un autre visage empreint d’une gravité rayonnante.
Il se déplace dans une totale présence.
Danse la présence... »

  • 6 Voir le chapitre « Le Body-Mind-Centering dans l’enseignement de Lulla Chourlin », in DESPRÉS Auror (...)

10Au travers de ces six textes, je constate combien la parole, même la plus descriptive, apparaît poétique, et j’en reste toujours étonnée. Ce qui apparaît comme un protocole de recherche sur le corps, la perception, le mouvement peut-il faire poésie ? Il y va, selon moi, d’une sorte de distanciation du réel, du temps et de l’espace qui appelle un imaginaire des sensations comme des mots qui se jouent entre eux pour les dire. À moins qu’il ne s’agisse au contraire d’une adhésion aux réalités profondes du corps par l’imaginaire ? Mais, disons que pour un travail véritable de poésie, il faudrait certainement un travail d’écriture supplémentaire, mais là n’est pas notre objet. Aucune prétention littéraire ici. Au contraire même, il s’agissait plutôt de laisser brute cette matière produite sur l’instant, afin qu’elle éclaire directement ces sensations et mouvements qui nous importent. J’ai donc choisi de ne pas « travailler », ni encore de « retravailler » à cette occasion, ces textes afin de garder une certaine fraîcheur authentique, parfois naïve… Disons que, si le Body-Mind Centering® se base sur des principes de l’anatomie et de la physiologie, sur des données scientifiques donc, l’incorporation des matières (les os, les organes, les liquides…) est un réel voyage basé sur l’expérience que chacun en fait. L’imaginaire qu’il développe fait partie de l’incorporation. La sensation du corps, la perception en éveil, s’avancent dans une sorte d’imaginaire du corps et du mouvement, qui confère à cette pratique une sorte de poésie de la sensation en elle-même6. Cette poésie de la sensation ne peut exister sans la parole qui participe du processus d’incorporation, soit sans les mots, oraux ou écrits. Des sensations et des mouvements aux mots parlés ou écrits, on y voit à l’œuvre un exercice d’affinement, de précision, qui collabore complètement au processus d’incorporation. C’est inextricablement par la sensation, par le mouvement et par le mot que peut avoir lieu l’aventure sensible.

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Bibliographie

BAINBRIDGE COHEN Bonnie, Sentir, ressentir et agir, trad. Madie Boucon, Bruxelles, Contredanse, 2002.

DESPRÉS Aurore, Travail des sensations dans la pratique de la danse contemporaine. Logique du geste esthétique, Lille, Éditions ANRT, 2000, https://hal.archives-ouvertes.fr/tel-02544811, page consultée le 21 mai 2023.

HARTLEY Linda, Wisdom of The Body Moving, Berkeley, North Atlantic Books, 1989.

WRIGHT MILLER Gill, ETHRIDGE Path, TARLOW MORGAN Kate, Exploring Body-Mind-Centering, Berkeley, North Atlantic Books, 2011.

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Notes

1 Conférence Sensible de et avec Sarath Amarasingam et Lulla Chourlin, accompagnement d’Aurore Després, a fait l’objet durant l’année 2017-2018, de présentations à l’issue de résidences de création à la Friche artistique de Besançon et de diverses présentations publiques : à l’auditorium du Conservatoire à rayonnement régional du Grand Besançon, le samedi 25 novembre 2017 à 14h30 ; dans le studio du Pôle 164 Danse à Marseille, le vendredi 12 janvier 2018 à 19h30 ; dans le « Grand studio » du Centre de développement chorégraphique La Briqueterie à Vitry-sur-Seine, le vendredi 16 février à 17h ; dans un studio de Cité Danse Grenoble, le vendredi 9 mars 2018. Voir site de la Cie Lulla Chourlin, [en ligne], https://compagnie-lullachourlin.com, page consultée le 26 mars 2023.

2 Voir BAINBRIDGE COHEN Bonnie, Sentir, ressentir et agir, trad. Madie Boucon, Bruxelles, Contredanse, 2002; HARTLEY Linda, Wisdom of The Body Moving, Berkeley, North Atlantic Books, 1989; WRIGHT MILLER Gill, ETHRIDGE Path, TARLOW MORGAN Kate, Exploring Body-Mind-Centering, Berkeley, North Atlantic Books, 2011.

3 Ce que l’on nomme « systèmes du corps » en Body-Mind Centering® fait référence directe aux « systèmes du corps » dont parlent l’anatomie et la physiologie. Nous parlons du système squelettique, du système organique, du système nerveux, du système musculaire, du système hormonal, etc. Le travail en BMC® se base donc sur les savoirs anatomiques et physiologiques traditionnels que nous amenons dans une pratique corporelle, une expérience par le toucher, par le mouvement parfois par la voix, ceci de façon très concrète. On dit que la personne qui en fait l’expérience « incorpore » ce système, le « met en corps ». Voir BAINBRIDGE COHEN Bonnie, op.cit.

4 D1 : première dorsale ; C7 : septième cervicale.

5 « Fibula » est le terme employé dans la nouvelle nomenclature anatomique pour remplacer le terme de « péroné ».

6 Voir le chapitre « Le Body-Mind-Centering dans l’enseignement de Lulla Chourlin », in DESPRÉS Aurore, Travail des sensations dans la pratique de la danse contemporaine. Logique du geste esthétique, Lille, Éditions ANRT, 2000, pp. 388-443, [en ligne], https://hal.archives-ouvertes.fr/tel-02544811, page consultée le 21 mai 2023.

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Table des illustrations

Titre Expérience du toucher
Légende Lulla Chourlin et Sarath Amarasingam, CRR de Besançon, 25 novembre 2017
Crédits ©Yves Petit
URL http://journals.openedition.org/danse/docannexe/image/6806/img-1.jpg
Fichier image/jpeg, 170k
Titre Je ne pourrais pas danser sans…
Légende Lulla Chourlin, CRR de Besançon, 25 novembre 2017
Crédits ©Yves Petit
URL http://journals.openedition.org/danse/docannexe/image/6806/img-2.jpg
Fichier image/jpeg, 139k
Titre Trouver les os
Légende Lulla Chourlin et Sarath Amarasingam, CRR de Besançon, 25 novembre 2017
Crédits ©Yves Petit
URL http://journals.openedition.org/danse/docannexe/image/6806/img-3.jpg
Fichier image/jpeg, 187k
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Pour citer cet article

Référence électronique

Lulla Chourlin et Sarath Amarasingam, « En résonance d’une conférence sensible »Recherches en danse [En ligne], 12 | 2023, mis en ligne le 15 novembre 2023, consulté le 19 avril 2025. URL : http://journals.openedition.org/danse/6806 ; DOI : https://doi.org/10.4000/danse.6806

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Auteurs

Lulla Chourlin

Lulla Chourlin, danseuse, chorégraphe, performeuse, praticienne diplômée en Body-Mind Centering® (BMC®), est directrice de la Cie Astragale et codirectrice de la formation des praticiens en BMC® de l’association Soma. Son parcours a été jalonné de rencontres importantes et déterminantes pour la direction de son travail : la pratique du Contact Improvisation avec Steve Paxton, Nancy Stark Smith, Kirstie Simson, Didier Silhol, la pratique de la danse improvisée avec Julyen Hamilton, Simone Forti, Barre Philips, Mark Tompkins. Axant son travail sur la danse, le corps dans l’espace public, l’interdisciplinarité, la composition instantanée, elle crée, avec sa Cie Astragale, de nombreux spectacles et performances interdisciplinaires in situ.

Sarath Amarasingam

Danseur, pédagogue et chorégraphe franco-sri-lankais, chercheur en mouvement, Sarath Amarasingam est passionné par les différents langages de la danse : les danses hip hop, indiennes, contemporaines. Depuis 2015, il se forme à l’éducation somatique par le mouvement (BMC). Aujourd’hui, il mène une recherche qu’il appelle la danse autobiographique.
En 2005, il obtient une licence en danse à l’université Paris VIII et entreprend un master sur la transmission de la danse hip hop. En 2013, il rejoint Héla Fattoumi et Éric Lamoureux au centre chorégraphique national (CCN) de Caen comme danseur puis au CCN de Belfort jusqu’à aujourd’hui. Il est également titulaire du diplôme d’État de professeur de danse contemporaine depuis 2017. En 2018, il crée Advaïta L Cie pour tenir une parole chorégraphique à partir des notions comme la transdisciplinarité et l’interculturalité.

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Droits d’auteur

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