Les Jeux olympiques et paralympiques (jop) ont animé la France et le monde entier pendant plusieurs semaines durant l’été 2024. Mais il ne faut pas oublier que le mouvement olympique, en crise, s’est réfugié auprès des grandes métropoles mondiales (Faure, 2024) pour surmonter des critiques vives sur les impacts environnementaux négatifs et les déficits budgétaires chroniques. À Paris, la préparation de ces événements s’est inscrite sur un temps long depuis la phase de candidature, et même avant (Schut, Beaudouin et Philippe, 2024). Si les préoccupations relatives à la durabilité des Jeux olympiques datent du début des années 1990 (Lopes dos Santos et Delaplace, 2024), cette durabilité est fortement contestée (Müller et al., 2021) tout comme celle d’autres mégaévénements sportifs comme la Coupe du monde au Qatar en 2022. Toutefois, Paris 2024 est la première édition à bénéficier pleinement de la mise en œuvre de l’Agenda Olympique 2020 promu par le Comité international Olympique (Lopes dos Santos et Delaplace, 2023). Même s’ils ont été revus à la baisse depuis la candidature de Paris, le projet parisien a ainsi mis en avant ses engagements dans le développement durable. De même, Los Angeles 2028 entend organiser les Jeux durables en utilisant des infrastructures existantes. Dans le cas de Paris, ces engagements qui visent les trois dimensions de la durabilité (économique, environnementale et sociale) s’expriment à différents niveaux : sur ses opérations directes en assurant initialement un bilan carbone qui s’approche de la neutralité puis de façon plus réaliste par la volonté de réduire les émissions carbone de moitié par rapport à Londres 2012 (objectif atteint selon le communiqué de presse du 05/12/2024) ; sur ses constructions (Village olympique, centre aquatique olympique) en favorisant le réemploi des matériaux et en promouvant des matériaux plus respectueux de l’environnement et en particulier le bois et, en assurant une seconde vie, en héritage à des équipements dont l’usage est temporaire, ou encore en remplaçant l’usage des groupes électrogènes classique par celui de l’électricité du réseau, etc. Si la solideo considère le village olympique comme un quartier préfigurant la ville de 2050, quelle sera la pérennité réelle de ces actions ?
En outre, les jeux olympiques et paralympiques, supposent une participation de visiteurs souvent massive même s’ils génèrent des effets d’éviction (Delaplace et al., 2023). S’ils font entrer des richesses sur le territoire d’accueil, ils engendrent aussi des déplacements dont le bilan carbone est d’autant plus élevé, qu’ils attirent des participants internationaux voyageant par avion ; les déplacements touristiques par voie aérienne étant les plus émetteurs de gaz à effet de serre (Delaplace, 2021). Si la période de pandémie a permis de démontrer la faisabilité des jop sans spectateurs en présentiel, comme ce fut le cas à Tokyo, les organisateurs ne peuvent limiter leur empreinte carbone qu’à l’aide d’actions compensatrices.
Par ailleurs, les aspects environnementaux ne sont pas exclusifs de l’héritage social (Collin et Schut, 2020) qui est un volet important des objectifs et des actions engagées en partenariat avec les collectivités ou le ministère de l’Éducation nationale notamment. L’accès à la pratique sportive pour tous, y compris les personnes en situation de handicap, l’éducation, le rapprochement entre le monde sportif et culturel en particulier par l’Olympiade culturelle, l’emploi de personnes en situation d’exclusion dans le cadre d’ESS 2024, les objectifs et projets sont nombreux. Quel sera leur héritage ? Comment évoluera l’employabilité des personnes recrutées et formées dans le cadre des Jeux olympiques et paralympiques ? Quant aux enjeux économiques si le comité d’organisation a toujours espéré maîtriser les coûts (Delalandre et Schut, 2024), ceux-ci ont néanmoins crû d’au moins 30 % voire jusque 50 % (en termes réels) depuis 2018 pour atteindre vraisemblablement 9 voire 10 milliards fin 2024 en partie en raison du contexte d’inflation. Les efforts pour contenir l’augmentation budgétaire contraignent à des choix de répartition qui mettent en tension les engagements sociétaux. À de nombreuses reprises, les acteurs politiques de Seine-Saint-Denis se sont manifestés pour rappeler l’engagement fait envers ce territoire à chaque fois qu’un événement était relocalisé.
Enfin, si les Jeux olympiques et paralympiques ont été principalement circonscrits à Paris et la Seine-Saint-Denis, de nombreuses autres collectivités ont rénové ou étendu leurs équipements sportifs pour accéder au label de « Centre de préparation aux Jeux ». Certaines ont accueilli des délégations étrangères, d’autres non, dans l’espoir de développer un tourisme sportif. Cet espoir est-il durable ? À défaut d’un tel destin, ces infrastructures sont-elles adaptées aux besoins locaux ? Les territoires labellisés ou non, hôtes ou non, invitent à une démarche comparative. La comparaison dans l’espace peut être étendue à une comparaison dans le temps. Pour des événements récurrents organisés périodiquement dans des lieux différents, quelles évolutions marquent les éditions successives ?
Au niveau environnemental, la question de la propreté de la Seine et celle de l’organisation des épreuves de surf à Teahupo’o en Polynésie française ont focalisé l’attention médiatique. Sur le premier point, la prise en charge de cette problématique a nécessité une mobilisation élargie des acteurs concernés, l'État, les collectivités locales, le service d’assainissement et de gestion des eaux. Enjeu de gouvernance, ces investissements durables pour une meilleure gestion de l’eau ont également un enjeu social post-Jeux dans la mesure où ils permettent aux habitants de profiter de lieux de baignades naturelles. L’organisation de l’événement joue le rôle d’accélération des politiques publiques. Sur le second, l’organisation des épreuves de surf qui a bien failli être remise en question en raison des atteintes aux coraux, que la construction de la nouvelle tour des juges occasionnait, pose la question de la conception même de la durabilité et de l’héritage dans le contexte polynésien (Delaplace et al., 2024).
Ce dossier thématique propose d’interroger la durabilité, en référence aux 17 objectifs du développement durable définis par l’onu, des Jeux Olympiques et autres mégaévénements sportifs, et ce, dans toutes ses dimensions (environnementale, sociale et économique). Les propositions d’article pourront s’ancrer dans différentes disciplines (aménagement-urbanisme, économie, gestion, sociologie, staps), dès lors qu’elles questionnent, la durabilité de ces mégaévénements dans leur globalité ou dans des territoires donnés. Les travaux centrés sur les contradictions potentielles entre mégaévénements et durabilité, sur des aspects comparatifs entre évènements et/ou sur leurs conditions de déroulement dans les territoires seront les bienvenus. Plus précisément des contributions peuvent aborder (liste non limitative) :
- La production du village olympique comme référence de l’urbanisme durable pour la ville de 2050,
- La gestion des déchets et l’économie circulaire associée aux mégaévénements,
- Les innovations associées à la mise en œuvre de la durabilité de ces mégaévénements,
- Le devenir des infrastructures sportives (grands équipements, équipements éphémères, piscines données aux communes de Seine-Saint-Denis, équipements des Centres de préparation aux Jeux…) et la durabilité associée à leur gestion ex post,
- Les effets territorialisés de l’accueil des événements sportifs en termes de développement durable,
- La baignabilité de la Seine et les conditions de sa pérennité,
- Les infrastructures et services de transport associés aux évènements sportifs,
- Le bilan carbone, la neutralité environnementale et les actions compensatrices mises en œuvre dans le cadre des évènements sportifs,
- Le développement de la pratique sportive et les conditions de sa pérennité sur les territoires,
- Le développement de nouvelles formes de tourisme plus durables associées aux mégaévénements.
- Marie Delaplace
- Pierre-Olaf Schut
- Julien Vastenaekels
Les articles proposés devront être des documents originaux. Ils peuvent néanmoins avoir fait l’objet de communications lors d’un colloque ou de documents de travail, à condition d’être réadaptés au format de la revue.
Les propositions d’articles (résumés de 4 500 signes espaces compris, hors bibliographie) seront soumises à un avis de pertinence pour juger de leur adéquation avec le cadrage du dossier. Ces propositions devront donc être suffisamment précises (titre de l’article, question de recherche, outils théoriques, terrain étudié, principaux résultats). Elles devront inclure les noms et prénoms des auteur·e·s, leur statut et leur rattachement institutionnel, ainsi que le courriel de l’auteur·e correspondant.
Les auteur·e·s avisés positivement seront invités à soumettre un article complet (entre 30 000 et 55 000 signes espaces compris, bibliographie et première page incluses).
Chaque article, sous couvert d’anonymat, sera soumis à deux relectures anonymes. Cette double relecture pourra donner lieu à des demandes de corrections (mineures ou majeures), à une ré-écriture éventuelle, voire à un refus de l’article.
Si des modifications demandées ne sont pas effectuées, et ce sans justification, le comité de coordination du dossier et le Comité de rédaction de la revue se réservent le droit de ne pas publier le texte concerné.
- Publication de l’appel à article : 17 février 2025
- Date limite de réception des résumés étendus : 06 juillet 2025
- Avis du comité de coordination du dossier : 15 juillet 2025
- Date limite de réception des articles : 15 novembre 2025
- Publication prévue : automne 2026
- Format des résumés : 4 500 signes espaces compris max., hors bibliographie.
- Format des articles : entre 30 000 et 55 000 signes espaces compris, bibliographie, notes et première page incluses.
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