Remerciements
Cette recherche a été financée par l’Agence nationale de la recherche (ANR-11-LABX-0026-01). Cet article a bénéficié des discussions engagées avec Anne Krebs, directrice du service Études et Recherche du musée du Louvre, et Niko Melissano, chef du service Communication numérique du musée du Louvre, lors du séminaire organisé au Centre Dominique-Vivant Denon en 2018-2019.
1Dans l’espace public français, la publication des informations d’actualité et des connaissances culturelles en relation avec des expositions temporaires ou des collections de musées sont portées par les organisations patrimoniales et les figures historiquement légitimées que représentent ces institutions et les spécialistes de l’histoire de l’art rattachés aux métiers du patrimoine, de l’enseignement et de la recherche ainsi que du journalisme culturel. La recherche et la transmission du savoir font partie des missions historiques des musées et des conservateurs en charge de leurs collections. En tant qu’institutions patrimoniales, ces missions consistent, d’une part, à gérer, préserver et développer un patrimoine public de nature culturelle et scientifique et, d’autre part, à assurer sa diffusion et son partage auprès des publics (Poulot, 2014). Les politiques de communication des musées s’inscrivent dans un processus transversal de profondes mutations (Gottesdiener et Davallon, 2013 ; Poulot, 2014). Parmi celles-ci figurent, dans le contexte de nouveaux modes de gestion et de financement, le développement du marketing culturel, l’événementialisation de la culture et l’augmentation de la fréquentation avec une attention accrue portée aux publics. À partir des années 1980, le développement des expositions temporaires a marqué l’entrée des musées dans « l’ère de la communication ». Dans le « basculement de l’institution patrimoniale dans la logique de fonctionnement d’un média de flux », les musées cherchent à « conquérir le public, l’intéresser, le faire venir et même revenir à chaque nouvelle exposition » tout en développant des outils de médiation dans le cadre d’une politique des publics (Jacobi, 2013, 2-9). En effet, ces institutions restent à l’écoute de leurs publics et de leurs pratiques culturelles ou de visite dans le cadre de leur mission d’éducation et d’action culturelle et sociale visant à élargir l’accès à la culture à l’intention des publics, appréhendés dans leur diversité.
2De manière indissociable, les pratiques de communication culturelle conduites par les institutions muséales concernant leurs collections et leurs expositions ont progressivement évolué vers les dispositifs numériques in situ, et plus récemment vers l’Internet et les médias numériques. En cela, les institutions culturelles se sont adaptées, depuis l’introduction des premiers ordinateurs et des programmes interactifs multimédias dans les années 1990 (Davallon, 2000), aux évolutions continues des outils numériques et des pratiques numériques de leurs publics dans les usages qu’ils font de l’Internet, des artefacts électroniques et des médias numériques pour l’accès à la culture (Donnat, 2016 ; Tardy et Renaud, 2015 ; 2016). En lien avec les évolutions des modes de publication conduites par les musées dans les environnements numériques du web et plus récemment du web social, de nouveaux acteurs ont acquis une visibilité avec les nouvelles formes de diffusion et de circulation médiatique de l’information culturelle.
3Dans cet article, nous portons plus particulièrement l’attention sur les reconfigurations de légitimité et d’autorité, associées à différentes catégories d’acteurs historiquement légitimés ou ayant acquis une légitimité liée à leur activité sur les médias numériques. Dans l’espace public culturel, l’analyse porte sur des acteurs exprimant, par leurs prises de position et leurs pratiques discursives, une autorité à communiquer sur des événements culturels, dans ce cas d’étude, l’exposition temporaire « Delacroix (1798-1863) », organisée par le musée du Louvre en association avec le Metropolitan Museum of Art (MET). Une telle approche interroge le poids de l’autorité sociale et symbolique héritée en regard du rôle potentiel joué par les médias numériques dans l’émergence de nouveaux acteurs et de nouvelles pratiques communicationnelles. Elle apporte un éclairage différent et complémentaire sur ce sujet en regard des études actuelles sur la production et les usages numériques des ressources muséales (Gottesdiener et Davallon, 2013).
4Nous proposons d’amorcer la réflexion à partir d’un questionnement sur les figures de l’autorité mises en relation avec les médias historiques et les médias numériques envisagés comme des espaces de renégociation des relations et des hiérarchies entre différentes catégories d’acteurs. La méthodologie et les corpus retenus seront précisés en regard de cette problématique. Nous analyserons ensuite les pratiques des acteurs exprimant une légitimité à communiquer sur cette exposition en relation avec les formats médiatiques qui les rendent possibles et les évolutions des modes de circulation de l’information culturelle qui y sont associées.
5Les institutions patrimoniales, à la suite de Jean Davallon (1992), sont envisagées, dans leur dimension d’opérativité symbolique et sociale, comme des médias (Navarro et Renaud, 2019, 8). Elles développent des politiques et des pratiques de communication dans un espace public culturel caractérisé par l’hybridation des médias historiques et des dispositifs numériques. Dans ce contexte, nous souhaitons examiner dans quelle mesure les modalités de l’autorité et la présence de certains acteurs pourraient être reliées à leurs positions symboliques et sociales ainsi qu’à l’usage de certains formats médiatiques. Le « travail d’autorité » est décrit comme un « processus social par lequel certains acteurs sont légitimes ou se légitiment ». Selon quelles modalités parviennent-ils à « faire autorité » (Candel et Pergia Gkouskou-Giannakou, 2017, 6) dans les médias qu’ils investissent ? Dans le travail de construction de l’autorité des acteurs qui prennent la parole sur l’exposition temporaire de Delacroix, comment s’articulent les positions sociales d’autorité de ces différentes catégories d’acteurs avec leurs pratiques discursives et médiatiques ? Dans les institutions patrimoniales, l’autorité des acteurs repose sur leur statut social (Bourdieu, 1982) et la forte valeur symbolique des connaissances qu’ils diffusent. Toutefois, les médias numériques font émerger d’autres caractéristiques tenant au partage d’expériences ou d’émotions, aux « jugements profanes » (Pasquier, 2014) ou encore à la capacité à constituer des collectifs, à faire « communauté » (Bonnaccorsi et Croissant, 2017, 77).
6Un premier axe d’analyse porte sur l’autorité sociale et le poids des positions sociales héritées issues des hiérarchies de pouvoir. Ces régimes d’autorité s’imposent pour l’émission des discours d’érudition et d’évaluation portant sur les expositions conduites par les institutions patrimoniales dans l’espace public. Les dispositifs institutionnels des musées, qui sont également des dispositifs énonciatifs, permettent la production des discours institutionnels et scientifiques selon des procédures de contrôle, de sélection, d’organisation et de redistribution (Foucault, 1969). Ils relèvent en cela d’un ordre symbolique et de pouvoir ouvrant sur les processus d’institutionnalisation des rôles. À cet égard, les politiques des musées portent une conception normée des connaissances reconnues et valorisées, des relations instaurées avec les œuvres, l’histoire de l’art et des modalités de communication envers les publics. En relation avec les institutions patrimoniales, les locuteurs qui prennent la parole dans l’espace public détiennent le capital symbolique et culturel autant que l’autorité sociale des catégories professionnelles auxquelles ils appartiennent. Leur discours scientifique et de vulgarisation fait autorité car cette autorité est la reconnaissance de leur légitimité à s’exprimer sur leur domaine de spécialité. De plus, ces discours sont aussi dotés d’une valeur sociale liée au style expressif qui correspond à leur compétence linguistique et à leur niveau d’érudition, ces aspects reproduisant la place qu’ils occupent dans la hiérarchie sociale (Bourdieu, 1982).
7Dans un second axe d’analyse, les pratiques discursives engagées dans le web social sont étudiées en relation avec l’émergence de nouveaux acteurs, de nouvelles figures de l’autorité et de nouvelles pratiques (Pasquier, 2014). Selon cette hypothèse, les médias du web social, dans leurs formatages sociotechniques (Akrich, 1993 ; Latour, 1993), déplacent les lieux de prise de parole et sont envisagés comme des espaces de reterritorialisation (Schiele, 2005), de recomposition des relations entre acteurs. Nous examinons dans quelle mesure ces médias ont pu élargir les figures de l’autorité reconnues et légitimées pour prendre la parole sur des expositions à d’autres acteurs. Parmi les notions rattachées à l’autorité relevées par E. Candel, nous retenons pour notre étude que l’affirmation de l’autorité peut se manifester par la visibilité (Heinich, 2014), mesurée en termes quantitatifs sur les plateformes numériques. De manière complémentaire, sur le web, la notion de crédibilité consiste à gagner la confiance d’autrui et s’applique, en documentation, aux composants (source, message, présentation) d’un document (Serres, 2012). Enfin, nous examinons si les acteurs présents sur le web social sont porteurs de nouvelles pratiques sociales davantage participatives, de partage d’information culturelle et d’expérience, de commentaire et d’évaluation.
8Les matériaux constitutifs de l’étude sur l’exposition temporaire « Delacroix (1798-1863) » reposent sur un ensemble d’éléments d’information et de discours qui ont été collectés, sans viser une exhaustivité, afin de rendre compte des figures d’autorité en les mettant en relation avec différents formats médiatiques et des régimes d’information et de communication rattachés à une diversité d’acteurs collectifs et individuels.
9Un premier ensemble de données concerne les actions de communication, les discours et les pratiques médiatiques du musée en relation avec l’exposition. Elles sont appréhendées dans les événements mis en place, les pages web d’informations publications sur le site du musée, les billets publiés sur l’exposition sur le compte Facebook du musée. Un deuxième sous-corpus rassemble les articles issus de la presse nationale ou régionale ayant fait l’objet d’un partenariat média ou ayant publié un article sur l’exposition Delacroix (30 articles de presse retenus suite à la collecte dans la base de données Factiva et Europresse). Un troisième sous-corpus regroupe les billets sur l’exposition provenant de 16 blogs culturels. Le quatrième sous-corpus rassemble les tweets (5 778), collectés automatiquement pendant la durée de l’exposition, contenant l’un des deux hashtags dédiés à l’événement.
10La constitution des matériaux d’observation collectés fait apparaître la nécessité d’élaborer une méthodologie adaptée à des spécificités d’hétérogénéité. Elle tient à la nature des données – discours d’information culturelle émanant de l’institution patrimoniale, discours médiatiques, discours et échanges issus du web social. Elle concerne également la diversité des acteurs, associée à des médias et des dispositifs éditoriaux différents en termes de formatage sociotechnique. Le recours à des méthodologies mixtes associe l’analyse qualitative des discours et le traitement instrumenté du langage naturel. Dans la lignée de Johnson et al. (2007), les méthodes mixtes permettent d’approfondir et d’élargir notre compréhension de phénomènes communicationnels et langagiers. Cette approche permettra de décrire et d’analyser des discours émanant de sources et d’acteurs (individuels ou collectifs) différents (des informations institutionnelles, des informations d’actualité issues de la presse, des blogs, des messages issus de plateformes de réseaux sociaux tels que billets postés sur Facebook ou tweets émis sur Twitter). Dans les analyses quantitatives, les méthodes et les outils utilisés relèvent de l’exploration de corpus au moyen de l’analyse textométrique. Nous nous appuyons notamment sur un algorithme développé par Reinert (2007) et Ratinaud et Marchand (2015). Dans cette approche, un corpus est une collection d’unités de texte (UT) divisées en unités contextuelles (UC). Une classification hiérarchique descendante fondée sur un algorithme spécifique est effectuée dans laquelle le nombre de classes finales, qui regroupent des UC, n’est pas a priori donné. Il est important de souligner que cet algorithme ne catégorise pas les textes (UT). Un autre avantage de cet algorithme est d’éviter d’inclure de très petits morceaux de mots typiques qui provoquent, en analyse factorielle, la création d’axes liés à des artefacts qui n’ont aucun intérêt lorsqu’on travaille sur la sémantique des mots.
11L’apport de ces méthodes quantitatives est, d’une part, de permettre le passage à l’échelle et, d’autre part, d’étudier des phénomènes combinatoires, des motifs lexico-syntaxiques, des réseaux d’acteurs. Des réseaux de co-occurrences ouvrent sur la construction de classifications ou d’agrégations (clusters) et des représentations de type cartographique utilisées dans une visée heuristique. Les analyses qualitatives et interprétatives (analyse de contenu, analyse du discours) portent sur des extraits du corpus.
12La figure d’autorité historique du musée d’art et d’antiquités du Louvre, inauguré en 1793 dans le palais du Louvre, s’impose dans l’espace public par sa légitimité scientifique et sa réputation d’institution patrimoniale de stature internationale. Cette institution, qui joue un rôle majeur dans la politique culturelle, a accueilli, en 2018, plus de dix millions de visiteurs, ce qui la place comme le musée le plus fréquenté au monde1. Classé par la presse culturelle parmi les cinq plus importants musées au monde, le musée du Louvre s’est récemment engagé dans une politique de recherche en nouant une dizaine de partenariats scientifiques et en ouvrant en 2016 le Centre Dominique-Vivant Denon dédié à l’histoire du Louvre et des musées (cf. note 2).
13Organisée par le musée du Louvre et le Metropolitan Museum of Art (New York), l’exposition temporaire « Delacroix (1798-1863) » s’est déroulée du 28 mars au 21 juillet 2018 au musée du Louvre, en lien avec le musée national Eugène Delacroix dont il a la responsabilité. Au soir du 23 juillet 2018, date de sa clôture, l’exposition a accueilli près de 540 000 visiteurs, « le plus grand succès jamais rencontré par une exposition du musée du Louvre dans ses murs » (communiqué de presse du 26/07/2018).
- 2 Rubrique « Espace presse » du musée du Louvre, dossier de presse de 29 pages sur l’exposition Del (...)
14Le dossier de presse de l’exposition diffusé par le musée présente Eugène Delacroix comme « l’un des géants de la peinture française » dont la carrière artistique est retracée dans cette exposition historique présentant 180 œuvres, principalement des peintures2. L’argument est le besoin d’une vision globale de la carrière de l’artiste qui s’est étendue sur une quarantaine d’années, la dernière grande exposition sur Delacroix ayant été organisée à Paris en 1963, à l’occasion du centenaire de sa mort. En relation avec l’exposition, un cycle d’événements culturels est organisé in situ sous forme de conférences de présentation de l’exposition, d’un cycle de conférences-lectures à partir de textes critiques, d’extraits du Journal et de la correspondance de Delacroix, de son carnet de voyage au Maroc, mais aussi de la fiction littéraire d’Adrien Goetz, de l’Académie des beaux-arts ou encore d’un film documentaire. Un cycle de concerts « Delacroix et la musique » (œuvres de Chopin, Beethoven, Liszt, Mozart, Haydn, Berlioz, Saint-Saëns, Massenet, Gounod, David), un cycle de visites de l’exposition et des publications complètent le programme culturel.
15L’autorité scientifique du musée du Louvre, organisateur de l’exposition et détenant une partie des œuvres présentées, se matérialise dans sa politique de communication culturelle appuyée sur le communiqué et le dossier de presse, les catalogues de présentation de l’exposition et de l’artiste, les événements culturels planifiés. La communication centralisée et verticale de diffusion passe également par les dispositifs numériques du site web du musée et les réseaux sociaux avec un spot promotionnel diffusé sur les réseaux sociaux. Les figures légitimées en histoire de l’art prennent en charge les communications et les publications scientifiques et culturelles marquées par l’érudition. Les deux commissaires d’exposition, Sébastien Allard, conservateur général du patrimoine, directeur du département des peintures, et Côme Fabre, conservateur du patrimoine, département des peintures, assurent la présentation de l’exposition à l’auditorium du Louvre, interviennent dans un cycle de conférences-lectures, dirigent le catalogue officiel de l’exposition (co-édition musée du Louvre éditions / Hazan). Des entretiens sont également diffusés dans les médias historiques désormais présents dans les environnements numériques (presse et magazines culturels, radio et podcasts audio), des tournages sont réalisés avec les médias audiovisuels (TF1, France 3 national, BFM TV, Arte). Des spécialistes de l’histoire de l’art, rattachés à des universités, à l’Institut national du patrimoine, à l’École du Louvre, à l’École normale supérieure..., et des journalistes culturels prennent part à des numéros hors-série de revues (Beaux-Arts Magazine, Connaissance des Arts, Le Figaro hors-série, Télérama hors-série).
16Les trois figures ci-après récapitulent, dans les corpus pris en compte dans notre étude, la circulation de l’information culturelle en relation avec l’exposition :
Figure 1 : Programme culturel du musée et pics d’activité sur le web social, mars-avril 2018
Figure 2 : Programme culturel du musée et pics d’activité sur le web social, mai-juin 2018
Figure 3 : Programme culturel du musée et pics d’activité sur le web social, juillet 2018
- 3 Ce corpus a été collecté manuellement, l’API de Facebook ne permettant plus, depuis avril 2018, l (...)
17La communication sur le web social ouvre-t-elle à des pratiques moins centralisées et à d’autres acteurs ? Le compte du Louvre sur la plateforme Facebook a publié, entre le 13/03/2018, date du premier billet, et le 24/07/2018, date du dernier billet, 28 billets bilingues (en français et en anglais3) faisant référence à l’exposition. Il apparaît que le musée, selon une communication verticale, reste exclusivement centré sur les informations et les événements culturels dont il est l’organisateur, tous les liens externes renvoyant vers le site officiel. Les billets publiés par le musée sont consacrés en grande partie à des informations promotionnelles et pratiques concernant les dates, l’organisation de sous-événements (jeu-concours, promenades organisées par le musée Eugène Delacroix, onze nocturnes gratuites en juillet, concerts...), la boutique du musée, les modalités de réservation et d’achat de billets avec un lien vers le site du musée. Le style conversationnel est fortement incitatif (« Rendez-vous au Louvre le... », « Réservez vos billets », « Découvrez... »), parfois familier (« Les deux commissaires, Sébastien Allard et Côme Fabre, vous disent tout jeudi 5 avril à 12h30 et à 18h30 à l’Auditorium du Louvre »), voire décalé et inattendu (« Bon anniversaire Eugène Delacroix ! Né il y a 220 ans, le 26 avril 1798, Delacroix s’est vite imposé comme le chef de file de la peinture romantique française »). Seuls cinq messages proposent une interaction avec les publics sous forme d’un jeu « Jouez avec Delacroix » avec des questions liées aux tableaux de l’artiste, par exemple une question sur La Barque de Dante (1822).
18La participation des publics est essentiellement limitée à des mentions « Like » et à des commentaires d’évaluation laudateurs très succincts (tels que « super », « magnifique »). Les trois messages les plus relayés relèvent de la communication événementielle et promotionnelle. Dans le flux des billets, l’analyse des mentions « Like » fait ressortir deux périodes temporelles rapprochées d’augmentation de ces mentions, le 24 mars et le 26 avril. Le billet du 24 mars (6 083 Like) annonce l’ouverture de l’exposition, le 29 mars ; il est repris le jour de l’ouverture de l’exposition, le 29 mars (4 133 Like). Le billet publié le 26 avril suscite un troisième pic de « Like » (2 510) ; il concerne, dans les bornes temporelles de l’exposition, le sous-événement médiatisé de l’anniversaire de Delacroix. Le diagramme à bâtons de ces mentions, des commentaires et des partages décroit rapidement.
Figure 4 : Diagramme à bâtons des mentions « Like » sur les billets du compte Facebook du Louvre
Figure 5 : Courbes des commentaires et des partages sur les billets du compte Facebook du Louvre
19Au final, même si, dans les messages publiés, le style de communication adopté cherche à instaurer une relation plus proche, parfois familière, avec les publics, le musée maintient une communication verticale et hiérarchisée de diffusion, focalisée exclusivement sur ses activités. Les formes de participation des publics sont très limitées.
- 4 Les articles de presse ont été collectés dans les bases de données Factiva et Europresse (requête (...)
20Les journalistes culturels de presse écrite font partie des figures d’autorité familières amenées à s’exprimer sur les expositions nationales. Trente articles publiés à l’occasion de l’exposition temporaire4, majoritairement signés par des journalistes spécialisés en histoire de l’art, ont été identifiés dans la presse nationale, régionale et hebdomadaire. Nous questionnons la position d’autorité et le rapport aux œuvres adoptés par les journalistes au travers du lexique qu’ils utilisent pour commenter l’exposition.
- 5 Iramuteq, logiciel sous licence GNU/GPL conçu par P. Ratinaud, Lerass (EA 827), Université Toulou (...)
21Dans cet objectif, nous utilisons, à l’aide du logiciel Iramuteq5 (Ratinaud et Marchand, 2015), la méthode statistique de classification descendante hiérarchique (Reineirt, 2007) qui permet le repérage, mené avec les méthodes et les outils d’analyse de données textométriques, des formes lexicales cooccurrentes de manière transversale à l’ensemble des articles de presse. L’identification des « mondes lexicaux » (Reinert, 2007) des articles émergent du traitement statistique. Ils résultent du regroupement itératif des formes lexicales formant l’environnement linguistique immédiat (le co-texte) au sein des textes.
- 6 À chaque classe est associée une liste de mots ou de métadonnées représentatifs avec leur score d (...)
22Trois classes calculées avec leurs pourcentages6 émergent : classe 1, 13,9 % (en rouge) ; classe 2, 67,4 % (en vert) ; classe 3 (18,7 %) (en bleu). La représentation visuelle ci-après est une projection des mots principaux de chacune des trois classes sur le plan factoriel. Elle permet d’évaluer la proximité ou l’opposition entre les classes.
Figure 6 : AFC des classes lexicales
23L’analyse du plan factoriel sur lequel se projettent les termes témoigne de la grande homogénéité des discours de ces journalistes bien qu’ils soient rattachés à différents titres de presse différents. En effet, les classes se projettent très distinctement et sans recouvrement. L’analyse des termes représentatifs des trois classes lexicales fait apparaître que les discours des journalistes culturels restent focalisés sur l’histoire de l’art et la carrière de l’artiste, avec la citation fréquente des noms des deux commissaires de l’exposition. Les journalistes reprennent les titres des tableaux et leur description, ainsi que les techniques picturales, en les accompagnant de références littéraires et artistiques, notamment Byron, Baudelaire, Virgile, Géricault. Sur le plan de l’énonciation, les articles se caractérisent par l’absence des déictiques – en particulier, « je », « nous » manifestant une implication personnelle. Cette absence est renforcée par l’emploi de constructions impersonnelles, par exemple : « On se dit d’abord : une rétrospective Eugène Delacroix (1798-1863) au Louvre, est-ce nécessaire ? » (Le Monde, 29/03/2018), « Dans l’atelier de la rue de Fürstenberg, on découvre ainsi la suite » (Le Figaro, 21/04/2018). Dans leurs articles, les journalistes se mettent ainsi à distance de leur sujet et manifestent très peu leur émotion. Les discours sont écrits sur le modèle d’une critique d’art académique reproduisant les contenus, et un rapport érudit et distancié aux œuvres présentées et à l’artiste.
24Les pratiques d’information et de communication engagées sur le web social favorisent-elles l’émergence de nouveaux acteurs comme nouvelles figures de l’autorité, légitimes pour commenter et évaluer l’exposition portant sur un artiste célèbre ? La plateforme Twitter permet les interactions entre une grande diversité d’acteurs, incluant le musée et les publics. Nous avons analysé les échanges rattachés au hashtag de l’exposition temporaire, #ExpoDelacroix.
25Le corpus de tweets a été collecté du 22 mars au 30 juillet 20187. Au total, toutes langues confondues, 5 778 tweets et retweets ont été envoyés par 2 975 comptes. Parmi ces comptes, 50 comptes ont été identifiés comme étant des comptes d’organisations (institutions patrimoniales, organes de presse, associations, etc.8). Le tableau 1 ci-dessous présente les tweets et retweets en langue française.
Nombre total de tweets
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5212
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Nombre de tweets originaux
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441 (8,5 %)
|
Nombre de retweets
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4 771 (91,5 %)
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Tableau 1 : Volumétrie du corpus de tweets
26La volumétrie générale permet d’observer que, sur la période de quatre mois, un faible nombre de tweets originaux a été émis, avec par conséquent un pourcentage de retweets très élevé. La forme de participation a donc été fortement limitée à la rediffusion de messages.
- 9 Logiciel NOS, développé dans le projet ANR-Labex ComNum, Labex « Les passés dans le présent ».
27En vue de qualifier des comptes par des caractéristiques de visibilité et de crédibilité (cf. section 2) liées aux figures d’autorité, les traitements présentés ci-après ont été réalisés en exploitant le logiciel NOS9 (Juanals et al., 2016 ; 2017) permettant de calculer différents scores.
28Nous avons évalué la visibilité d’un compte au moyen d’un score qui caractérise la proportion des comptes qui diffusent les tweets de ce compte. Ce score, appelé score « relayé » calcule le ratio entre le nombre de comptes distincts qui ont retweeté ce compte et le nombre total de comptes ayant envoyé un tweet ou un retweet. Le tableau 2 présente les quatre comptes ayant le score le plus élevé.
Les principaux comptes relayés
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Score relayé
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Nombre de tweets originaux envoyés
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Musée du Louvre
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0,51
|
71
|
Scribe accroupi
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0,16
|
33
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Adrien Goetz
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0,10
|
19
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GallicaBnF
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0,03
|
2
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Tableau 2 : Score de visibilité
- 10 Le calcul du score passeur ne prend pas en compte le nombre de followers.
29En vue d’évaluer la crédibilité d’un compte, nous avons utilisé un second score, appelé score « passeur », qui calcule le produit cartésien entre le nombre des comptes qu’un compte A retweete et le nombre des comptes qui retweetent ce compte A. Le fait de calculer un score qui est le produit cartésien des degrés entrants et sortants plutôt que la somme de ceux-ci (calcul classique du degré dans un graphe) privilégie les comptes qui ont une double activité. À titre d’illustration, un robot qui ne ferait que retweeter aura un score nul de même qu’un compte qui enverrait de nombreux tweets sans en retweeter aucun. La valeur de ce score n’est pas significative en soi, elle fournit simplement un moyen de comparer les comptes entre eux. Le tableau 3 ci-après présente, dans l’ordre décroissant d’importance, les quatre comptes ayant un score passeur significatif. À titre d’information, le nombre de followers10 de chacun de ces comptes, repris le 27 juillet sur leur compte Twitter, est mentionné.
Principaux comptes passeurs
|
Indication du nombre de followers de ces comptes
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Musée du Louvre
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1 411 367
|
Scribe accroupi
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9 129
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Adrien Goetz
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5 063
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Hannah Marie Seidl
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1 713
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Tableau 3 : Les principaux « comptes passeurs »
30Trois comptes se distinguent en termes de visibilité et de crédibilité, le compte institutionnel de la Bibliothèque nationale de France affichant un score faible. Le musée du Louvre joue son rôle de compte institutionnel, figure d’autorité dans le domaine patrimonial et organisateur de l’exposition ; Hannah Marie Seidl est chargée des relations publiques au musée du Louvre. Un nouvel acteur émerge avec le compte de Scribe accroupi. Il s’agit d’un membre des Amis du Louvre qui se présente sur son blog11 comme un « visiteur compulsif de musées et d’expositions, passionné par les Arts, la photographie et la vidéo ». La majorité de ses tweets contiennent de brèves descriptions de tableaux accompagnées de photos ou des liens vers des vidéos, par exemple : « Retrouvez la vidéo de présentation de “La mort de Sardanapale” sur YouTube et sur mon Blog #ExpoDelacroix ».
31Le compte d’Adrien Goetz est tenu par un enseignant-chercheur de Sorbonne Université, membre de l’Académie des beaux-arts, historien d’art et romancier. Les tweets envoyés ont aussi un contenu érudit mais certains sont factuels et promeuvent l’exposition, par exemple :
-
« Eugène #Delacroix fut élu en 1857 à l’@AcadBeauxarts à sa huitième tentative. Pour raconter cette aventure [...] » ;
-
« Parfois un accrochage génial c’est aussi simple que ça ! Je ne vous en montre pas plus. Ce n’est que la première salle. Vous croyez avoir tout vu et vous n’avez rien vu » ;
-
« L’#ExpoDelacroix @MuseeLouvre est enthousiasmante ».
32Concernant les trois premiers comptes passeurs, nous avons mené la recherche des collectifs partagés par ces comptes deux à deux. Le tableau 4 ci-dessous montre que ces comptes passeurs ont peu de comptes en commun, comme le montre aussi la figure 7 réalisée avec le logiciel libre de visualisation Gephi (Bastian et al., 2009) :
Compte passeur A
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Compte passeur B
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Nombre de comptes partagés par A et B
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Musée du Louvre
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Scribe accroupi
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139
|
Musée du Louvre
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Adrien Goetz
|
83
|
Scribe accroupi
|
Adrien Goetz
|
53
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Tableau 4 : Recouvrement des collectifs des principaux « comptes passeurs »
Figure 7 : Les collectifs des comptes passeurs
33Sur le hashtag de l’exposition temporaire, trois figures d’autorité émergent, dont le musée du Louvre et deux comptes actifs dans le web social, en notant qu’Adrien Goetz est aussi un acteur rattaché à la sphère d’influence académique et muséale. Les collectifs rattachés à ces communautés sont peu partagés.
- 12 Akaliam, Aubalcon, Culturebox, Envie d’Ailleurs, Frenchmorning, Gazette, Hpg, Inha, Lunettesrouge (...)
34Nous avons identifié 16 blogs12 ayant consacré chacun 1 billet à l’exposition Delacroix, et 1 blog ayant publié 2 billets. L’intérêt porté à ces blogueurs est qu’ils représentent de nouveaux acteurs qui ne sont pas présents dans la sphère médiatique généraliste ou académique de l’art et de la culture. Ils instaurent un rapport plus proche au lecteur, dans un style plus informel et davantage conversationnel. Deux blogs se détachent : l’auteur du blog Lunettes Rouges, titulaire d’une thèse en photographie expérimentale soutenue à l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, affiche une légitimité universitaire et son blog est hébergé par le site de presse Le Monde. Scribe accroupi est connu comme membre des Amis du Louvre et comme un auteur de messages et de billets culturels dans la sphère des réseaux socionumériques.
35En raison du faible nombre de billets (17) et de leur taille limitée (entre 259 et 500 mots), nous avons réalisé une analyse de contenu thématique en identifiant 3 catégories : Histoire de l’art (7 billets), Informations pratiques (8 billets) et Opinion (2 billets). Du point de vue de l’énonciation, à l’inverse de la presse, les billets se caractérisent par une prise en charge énonciative omniprésente concernant les œuvres présentées :
-
« Cela fait longtemps que j’aime Delacroix » (Le blog d’Akaliam, 06/07) ;
-
« J’ai retrouvé avec une grande joie les tigres de Delacroix » (Envie d’Ailleurs, 14/04) ;
-
« Ainsi Cléopâtre et le paysan, que je ne connaissais pas » (Lunettes Rouges, 06/06).
36Le blog Lunettes Rouges emploie également la marque de l’impersonnel, se rapprochant parfois des articles de presse (« on ne cesse de s’émerveiller [...]. On reste longtemps dans cette salle ». Le blog érudit de Scribe accroupi se démarque nettement des autres blogs avec un billet (20/04) incluant une vidéo de 30 minutes de conférence filmée assurée par les deux commissaires de l’exposition et 12 photographies de tableaux.
37Les deux blogs d’opinion sont de polarité opposée : on note des évaluations positives, par exemple : « Je redécouvre ce qui m’avait tant plu chez Delacroix : un sens de l’expression fabuleux et ce rouge – ce rouge surtout – qui confèrent à la moindre nature morte ou esquisse une force peu commune » ; ou des avis négatifs : « À moins d’être pédant, les tableaux religieux et les grands décors (fort mal présentés) deviennent ensuite assez lassants ; et les salles finales sont d’une banalité terrible ».
38Ces blogs culturels marquent l’émergence de nouveaux producteurs et diffuseurs d’information culturelle. Les billets, tout en se distinguant les uns des autres par leur hétérogénéité discursive, présentent des caractéristiques communes : elles tiennent à la brièveté des textes, à un style conversationnel, à une forte implication émotionnelle et à un rapport plus familier aux œuvres.
39Dans le cadre de l’exposition temporaire « Delacroix (1798-1863) » organisée par le musée du Louvre, nous avons porté l’attention sur les figures d’autorité qui apparaissent dans les différents médias numériques en relation avec les modes de production et de circulation de l’information culturelle, au sein et entre ces espaces.
40La figure d’autorité du musée du Louvre est transversale aux médias numériques. Toutefois, il apparaît que l’écosystème informationnel numérique du musée du Louvre reste clos sur ses différents espaces médiatiques. Sur le site web du musée, les liens et les références indiquées renvoient aux pages internes de ses activités culturelles et des sous-événements dédiées à l’exposition. De même, sur les comptes du musée des plateformes Facebook et Twitter, les liens externes insérés aux messages renvoient vers les ressources mises en ligne sur son site web. Il n’y a pas de références à des ressources externes, telles que les numéros hors-série des revues sur l’exposition, les podcasts radio dédiés à l’artiste et à l’exposition, ou encore des billets de blogs culturels. Sur le compte Facebook du musée, nous n’avons pas identifié de commentaire émanant d’une figure d’autorité issue des réseaux socionumériques ou en l’histoire de l’art en dehors des commissaires de l’exposition. Sous le hashtag de l’exposition sur Twitter, des tweets sur l’exposition émanant d’autres institutions patrimoniales ou de comptes privés ne sont repris par le musée.
41Dans la presse écrite sur les sites web des journaux, les journalistes spécialistes de l’histoire de l’art assurent le suivi régulier de toutes les expositions en tant que figures d’autorité instituées par les titres de presse. En revanche, ces journalistes culturels ne sont pas intervenus sur Facebook ou Twitter. De plus, leurs articles ne reprennent pas des citations et des visualisations de tweets ou de billets de Facebook fortement relayés, alors que la presse y a recours dans d’autres domaines – notamment politique. Parmi les 16 blogs culturels qui ont posté un court billet sur l’exposition, nous ne disposons pas d’indicateur permettant de mesurer leur niveau de diffusion et leur communauté de lecteurs mais leur présence est restée limitée, à l’exception notable de Scribe accroupi, à leur espace éditorial.
42Concernant le hashtag de l’exposition Delacroix sur la plateforme Twitter, les figures d’autorité émergent des dynamiques de production et de circulation de l’information. C’est le dispositif sociotechnique de la plateforme qui permet de faire apparaître ces figures d’autorité comme le résultat des interactions entre les différents comptes, incluant celui du musée et les comptes privés ainsi que d’autres organisations culturelles. Pour le hashtag de l’exposition, ce sont le musée du Louvre, Scribe accroupi et Adrien Goetz. Nous les considérons comme les figures d’autorité pour cet événement culturel sur Twitter car ils sont à la fois des comptes relayés et des comptes passeurs, ce qui est une qualification plus précise que la seule indication du nombre de followers de ces comptes.
43Nous concluons à une reconfiguration limitée des figures de l’autorité dans plusieurs formats médiatiques incluant les médias historiques et numériques en ligne sur Internet. De plus, les figures d’autorité qui émergent restent attachées à leur milieu médiatique et la circulation de l’information culturelle entre différents médias numériques est peu observée. Les médias du web social font toutefois émerger les participations d’autres acteurs que les figures d’autorité scientifique héritées, notamment les blogueurs culturels et les comptes passeurs sur la plateforme Twitter, ainsi que le grand public dans un rôle limité de rediffusion. Ils constituent ensemble l’actualisation singulière des formes de diffusion et de circulation mises en œuvre autour de l’exposition temporaire d’ampleur internationale sur Delacroix.