Navigation – Plan du site

AccueilAppels à contributionAppels en coursDossier thématique n° 62 « Le jou...

Dossier thématique n° 62 « Le journaliste de sport : un acteur de société en mutation »

Thematic issue n° 62 "The sports journalist: an actor in a changing society"

Dossier coordonné par Fabien Wille (GERiiCO, Université de Lille) et Lucie Schoch (LACCUS, Université de Lausanne)

Les Jeux olympiques qui se dérouleront à Paris en 2024 feront vraisemblablement l’objet d’une couverture médiatique massive, que ce soit au sein de la presse écrite, de la radio, de la télévision ou du web, et ceci tant à l’échelle locale que planétaire. Conformément à la nature des relations qui lient historiquement le sport aux médias (Wille, 2003), ce méga-événement sportif sera probablement le témoin de transformations médiatiques, qu’elles soient d’ordre technologique ou sociétale, bousculant ainsi les normes et les contraintes professionnelles des journalistes. Partant du postulat que leur fonction consiste à « donner du sens » et à co-construire une vision du monde qui nous entoure (Tétu, 1999), les journalistes constituent des acteurs sociaux à part entière, et non de simples témoins-médiateurs hors du jeu social (Delforce,1996).

Or cette question est rarement posée à propos du sport, porté par des discours sociaux qui tendent à le présenter au travers de valeurs « mythiques », qui répondrait ipso facto à certains problèmes sociétaux actuels tels que la santé publique, le bien-être mais également la sécurité des populations ou l’intégration des minorités. Pourtant, le sport est également un terrain où émergent les problèmes qui contrarient ce modèle, que ce soient à propos des violences, des incivilités, du racisme dans les stades, de l’homophobie, des discriminations liées au sexe, au genre ou au handicap, ou plus récemment à propos de la question de la violation des droits humains ou du développement durable. Le spectacle sportif médiatisé constitue alors le témoin contemporain de questions sociétales qui le traversent. Présenté souvent comme un miroir de nos sociétés, il est également un lieu de débordements affectifs, il exacerbe les passions, il est par nature compétitif et hiérarchisant (Marchetti et al., 2015), il stigmatise les différences au sein d’un espace public de plus en plus inclusif et qui de ce fait, montre les limites actuelles de l'instrumentalisation du sport de haut niveau au service des stratégies d'ingénierie sociale (Wille et al., 2018).

Le journaliste de sport adopte alors bien souvent la posture de défenseur et de gardien des valeurs démocratiques et des vertus du sport (Wille et Blion 2013), dont il tire une part de sa légitimité (Souanef, 2019). Or, si le journalisme spécialisé est révélateur de la faible autonomie du champ journalistique à l'égard des univers sociaux dont ils parlent (Dargelos et Marchetti, 2000), cela est particulièrement saillant dans le journalisme de sport qui peut apparaître comme une spécialité dominée (Schoch et Ohl, 2021). Conjointement, les économies des médias et des sports sont historiquement fortement imbriquées et leurs enjeux se sont considérablement intensifiés ces dernières décennies qui bouleversent les routines professionnelles et imposent des contraintes spécifiques (temporalités nouvelles, accès à l’information, proximité avec l’espace économico-sportif…).

À ce contexte, s’ajoute l’irruption des technologies du numérique. La diversification et la multiplication des canaux de diffusion de l’information et l’apparition de modes d’expression différenciés (blogs, réseaux sociaux, etc.), engendrant le développement de la « fast info » modifient la relation avec le consommateur. Les amateurs de sport (blogueurs, streamers ou influenceurs) et les équipes chargées des relations médias et publiques des organisations sportives adoptent de nombreux rôles et tâches historiquement attribués au journalisme sportif, rendant les frontières du journalisme sportif plus floues pour le public (Nölleke et Birkner, 2019). Les journalistes sont également confronté aux interpellations directes des téléspectateurs dont les feedbacks (par exemple les tweets) interfèrent sur les pratiques et les discours (Oelrichs, 2020), ce qui nécessite une maîtrise des situations de communication plus complexes (Montañola et al., 2015 ; Papa, 2013). Cette forte interactivité, interconnectivité et mobilité qui caractérise désormais la médiatisation du sport et particulièrement celle des grandes manifestations (Schutz et al., 2010) induit une nouvelle organisation du travail et appelle à des compétences et routines professionnelles nouvelles (Mirabito et al., 2022). Les conditions de production de l’information par les journalistes de sport s’en retrouvent transformées et toute la profession ébranlée (Hardin et Billings, 2022).

Aussi, en tant que fait social, le sport constitue le journaliste comme un acteur de société dans sa façon de regarder les choses, de les penser et d’en parler, au confluent des normes professionnelles, sportives et sociales, le journaliste de sport évoluant dans un univers normé, contraint et socio-construit. Mais face aux mutations, qu’elles soient sportives, sociétales ou professionnelles, quelles sont ces normes explicites et/ou implicites ? Dans quelle mesure interfèrent-elles dans les pratiques journalistiques et les discours produits ?

Ce numéro thématique invite à nous interroger sur la façon dont les journalistes de sport participent à la construction de « l’espace public » (Habermas, 1961), les récits sportifs appréhendés comme une mise en représentation sociale et politique du monde qui nous entoure. Une attention particulière sera accordée aux transformations récemment observées dans la production de l’information sportive, particulièrement saillantes lors des manifestations sportives de grande envergure. Les contributions s’attacheront à identifier des procédés discursifs (Schaeffer, 1989), qui se structurent, d’une part par un acte communicationnel qui s’élabore sur la base des processus d’énonciation et d’autre part par l’acte réalisé, le spectacle sportif médiatisé étant ainsi appréhendé comme un lieu de co-construction de la parole publique (Rabatel et Koren, 2008).

Les contributions pourront en particulier s’inscrire dans les axes suivants. D’une part, les contextes d’énonciation au travers de l’analyse des conditions d’exercice d’une profession, notamment :

  • les normes – professionnelles, sportives et sociales – et les contraintes qui pèsent (ou non) sur les pratiques professionnelles ainsi que leurs effets sur le récit journalistique, par exemple :

    • le journalisme de sport au prisme du genre : mécanismes de féminisation, pratiques professionnelles et style journalistique genrés

    • les conséquences de la COVID-19 dans le journalisme sportif…

  • l’influence des médias du numérique sur les processus informationnels et communicationnels dans le sport comme :

    • l'utilisation des médias sociaux et le remodelage de l'agenda des informations sportives

    • les nouvelles technologies, les nouveaux profils de poste et les nouvelles pratiques dans les rédactions sportives (numériques)…

  • le professionnalisme dans le journalisme sportif (formation - recrutement)

D’autre part, de porter une attention toute particulière au récit et ainsi penser le journaliste de sport comme porteur d’une parole publique, un co-constructeur de sens dans l’espace public :

  • la nature du récit sportif, son organisation (dispositifs sémio-techniques) : entre information, divertissement et fiction

  • le spectacle sportif médiatisé : bien public ou produit de positionnement médiatique ?

  • le journaliste de sport au service des stratégies d'ingénierie sociale, particulièrement lors des grands événements sportifs

  • le rôle des discours médiatiques produits, en lien notamment avec le handicap et le sport féminin, dans les processus de transformation sociale.

Comité de lecture

Valérie Bonnet, Université Paul Sabatier Toulouse III

Roxane Coche, University of Florida (USA)

Nicolas Delorme, Université de Bordeaux

Jean-François Diana, Université de Lorraine

Nicolas Kaciaf, Université de Lille

Florence Le Cam, Université libre de Bruxelles (Belgique)

Fabien Ohl, Université de Lausanne (Suisse)

Françoise Papa, Université Grenoble Alpes

Olivier Standaert Université catholique de Louvain (Belgique)

Marilou Saint-Pierre, Université d’Ottawa (Canada)

Mickael Terrien, Université de Lausanne (Suisse)

Sélection des propositions

La sélection des propositions de contribution se fait en deux temps :

  • sur la base d’un résumé de 1 500 à 2 000 mots qui présentera les objectifs, l’argumentation et l’originalité de la proposition ainsi que quelques orientations bibliographiques,

  • pour les résumés retenus, une seconde évaluation sera réalisée sur la base des articles définitifs.

Les instructions aux auteurs, à respecter scrupuleusement, sont disponibles sur le site de la revue : https://journals.openedition.org/edc/668

L’évaluation sera assurée de manière anonyme par au moins deux lecteurs du comité.

L’envoi des résumés au plus tard le 30 janvier 2023 au format Word (.docx) ou OpenDocument (.odt) se fait aux adresses suivantes :

Les propositions d’articles et les articles définitifs d’une longueur de 35 000 à 40 000 signes (espaces, notes de bas de page et bibliographie compris) peuvent être soumis en français ou en anglais. Les articles définitifs sont publiés en français pour la version papier du numéro de la revue, français (et le cas échéant en anglais) pour la version électronique. Aucun engagement de publication ne peut être pris avant la lecture du texte complet.

Calendrier

  • 30 janvier 2023 : soumission des résumés pour évaluation

  • 1er avril 2023 : notification de l’acceptation ou du refus

  • 1er septembre 2023 : soumission de la version complète des articles

  • 1er décembre 2023 : réception des versions définitives des articles

  • Juin 2024 : publication du dossier dans le numéro 62 d’Études de Communication

Bibliographie

Dargelos, B. et Marchetti, D. (2000). Les « professionnels » de l'information sportive entre exigences professionnelles et contraintes économiques. Regards Sociologiques, 20, 67-87. http://www.regards-sociologiques.fr/n20-2000-05.

Damian-Gaillard, B. et Montañola, S. (2014). Genre et information médiatique en SIC : une articulation à approfondir. Revue française des sciences de l’information et de la communication, 5. https://doi.org/10.4000/rfsic.1088.

Delforce B. (1996). La responsabilité sociale des journalistes : donner du sens. Les cahiers du journalisme, 2, 16-32. https://www.cahiersdujournalisme.net/pdf/02/02_Delforce.pdf.

Habermas, J. (1978 [1961]). L'espace public : archéologie de la publicité comme dimension constitutive de la société bourgeoise. Payot.

Hardin, M. et Billings, A. C. (2022). A Fracturing Profession on Shifting Terrain: Challenges and Directions for Sports Journalism. Communication & Sport, 10(3), 395–397. https://doi.org/10.1177/21674795221095618.

Marchetti, D., Raséra, F., Schotté, M. et Souanef, K. (dir.) (2015). Classements sportifs [dossier]. Actes de la recherche en sciences sociales, 209(4). https://www.cairn.info/revue-actes-de-la-recherche-en-sciences-sociales-2015-4.htm.

Mirabito, T., Collett, J. et Pluchinsky, D. (2022). News Routines in the TV Sports Department: Shifting Expectations and Technology in an Increasingly Digital Landscape. Communication & Sport, 10(1), 143–167. https://doi.org/10.1177/2167479520928000.

Nölleke, D. et Birkner, T. (2019). Bypassing traditional sports media? Why and how professional volleyball players use social networking sites. Studies in Communication and Media, 8(3), 287–310. https://doi.org/10.5771/2192-4007-2019-3-287.

Oelrichs, I. (2020). Adoption of Innovations in Digital Sports Journalism: The Use of Twitter by German Sports Journalists. Communication & Sport, 216747952096178. https://doi.org/10.1177/216747952096178.

Papa, F. et Collet, L. (2013). Entre experts et amateurs : le journaliste de sport 2.0, un professionnel en quête de légitimité. Les Cahiers du Journalisme, 25, 80-99. https://www.cahiersdujournalisme.net/pdf/25/6.PAPA-COLLET.pdf.

Rabatel, A. et Koren, R. (2008). La responsabilité collective dans la presse. Question de communication, 13, 7-24. https://doi.org/10.4000/questionsdecommunication.1587

Schaeffer, J.-M. (1989). Qu’est-ce qu’un genre littéraire. Seuil.

Schoch, L. et Ohl, F. (2021). “How can they like doing that?” The ambivalence towards the definition of the dirty work in sports journalism. Journalism studies, 22(3), 263-281. https://doi.org/10.1080/1461670X.2020.1861474.

Schultz, B. et Sheffer, M.-L. (2010). An Exploratory Study of How Twitter Is Affecting Sports Journalism. International Journal of Sport Communication, 3(2), 226-239. https://doi.org/10.1123/ijsc.3.2.226.

Souanef, K. (2019). Le journalisme sportif. Sociologie d'une spécialité dominée. Presses universitaires de Rennes.

Tétu, J.-F. (1999). Introduction. Jamet C. et Jannet A.-M. (dir), La mise en scène de l’information. L’Harmattan, 1-13.

Wille, F. (2003). Le Tour de France : un modèle médiatique. Presses universitaires du Septentrion.

Wille, F. et Blion, R. (2013). Le programme MARS, Media Against Racism and Sport : une tentative de construction de la responsabilité sociale des médias de sport. Les cahiers du journalisme, 25, 118-139. https://www.cahiersdujournalisme.net/pdf/25/8.WILLE-BLION.pdf.

Wille, F., Papa, F., Montañola, S., Damian-Gaillard, B., Francony, J.-M. et Kervella, A. (2018). Question the social responsibility of sports journalists: is diversity taken into account and how in the mediatisation of major sport events? Reimagining Sustainability: Communication and Media Research in a Changing World. IAMCR 2018, 23-24. https://iamcr.box.com/shared/static/j9xco0ei3iz1layq8qmnhfwk6xu7cdxp.pdf.

Haut de page
  • Logo Groupe d’études et de recherche interdisciplinaires en information et communication
  • Logo Université Lille - Sciences Humaines et Sociales
  • OpenEdition Journals
Rechercher dans OpenEdition Search

Vous allez être redirigé vers OpenEdition Search