Résumés
Cette étude interdisciplinaire porte sur une expertise en sciences humaines et sociales commanditée puis contestée par l’État, sur le risque requin à La Réunion. L’expert mandaté a déployé un dispositif participatif à visée transformative et rédigé un roman pour y révéler des rapports de pouvoir en contournant les pressions institutionnelles. Le double dispositif communicationnel (expertise scientifique et récit littéraire) est discuté avec l’expert-auteur et le commanditaire étatique. Se référant à la théorie de la gouvernance évolutive, cette étude illustre comment des formes de pouvoir-savoir sur la gestion des risques sont contestées et reconfigurées dans un contexte de controverse publique.
This interdisciplinary study explores a humanities and social science expertise commissioned and later contested by the State regarding shark risk in Réunion Island. The appointed expert implemented a participatory framework with transformative aims and authored a novel to expose power dynamics while circumventing institutional pressures. The dual communication approach (scientific expertise and literary narrative) is discussed with both the expert-author and the state commissioning authority. Referring to the theory of evolutionary governance, this study illustrates how power-knowledge forms related to risk management are contested and reconfigured in a context of public controversy.
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Plan
1. Introduction
2. Gestion du « risque requin » : expertises et matérialité des discours
2.1. Contexte socio-écologique des politiques de réduction du risque
2.2. De l’expertise commanditée à l’écriture d’un roman
2.3. Méthodes d’investigation des matériaux empiriques
3. Participation, négociations et divergences de représentations
3.1. L’expertise commanditée en SHS sur le « risque requin »
3.2. Une conception transformative de la participation
3.3. La contestation de l’expertise par l’autorité étatique
4. Communiquer dans d’autres termes : le dispositif littéraire
4.1. De l’expertise à la fiction
4.2. Un roman pour « agir » : questionner le cadrage du discours sur les risques
4.3. Le discours du roman
Conclusion
Aperçu du début du texte
1. Introduction
Concomitants de l’industrialisation du xixe siècle, les risques inhérents au processus de modernisation constituent un « fait social total », au sens de Marcel Mauss : ils concernent les sociétés modernes dans toutes leurs dimensions. Ces risques, appréhendés comme des externalités négatives, ont fait l’objet de politiques publiques généralement pensées par un système-expert clos composé d’administrateurs de l’État et d’experts scientifiques et techniques. Ces systèmes-experts opèrent une hiérarchisation des risques selon une conception positiviste, opposant le risque objectif, objectivable par la science, et le risque subjectif, tel que perçu par la population (Gilbert, 2003). L’expertise scientifique issue des sciences expérimentales questionne peu les fondements idéologiques des politiques publiques de gestion des risques (Habermas, 1973).
Dans la conception positiviste classique, la gestion du risque est centrée sur l’autorité administrative et l’acceptabilité soci...
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Pour citer cet article
Référence papier
Barbara Losen, Cécile Do Huu et Erwann Lagabrielle, « Construction et (dé)légitimation des savoirs et des représentations dans la gouvernance évolutive du « risque requin » (La Réunion) », Études de communication, 64 | 2025, 153-172.
Référence électronique
Barbara Losen, Cécile Do Huu et Erwann Lagabrielle, « Construction et (dé)légitimation des savoirs et des représentations dans la gouvernance évolutive du « risque requin » (La Réunion) », Études de communication [En ligne], 64 | 2025, mis en ligne le 01 janvier 2027, consulté le 07 novembre 2025. URL : http://journals.openedition.org/edc/18314 ; DOI : https://doi.org/10.4000/14b5l
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