• 1 « Ninguém forma ninguém e que aformaçâo é inevitavelmente um trabalho de reflexâo dos percursos da (...)

5Parmi les chercheurs de ce mouvement, se trouvent Gaston Pineau, Matias Finger, Marie-Christine Josso, Pierre Dominicé, Antonio Nóvoa, Ivor Goodson et bien d’autres. C’est Pineau (2006) qui l’a caractérisé comme « courant de recherche-action-formation existentielle ». En effet, la formation des adultes n’est pas seulement « progrès » ou « développement » du côté du futur, car les adultes ont en même temps une vie qu’ils ont à considérer rétrospectivement : « Personne ne forme l’autre parce que la formation est inévitablement une réflexion sur les cours de la vie1 » (traduction de l’auteur).

• 2 « [...] a histôria de vida é outra maneira de considerar a educaçâo. Jâ nâo se trata de aproximar a (...)

6Bueno (2006) affirme que Nóvoa, Dominicé et Josso comprennent les « biographies éducatives » comme des instruments de formation qui ouvrent des nouvelles perspectives de recherche en éducation. Ainsi, il existe dans ce mouvement une reconceptualisation de la recherche en éducation, qui tend à réévaluer la subjectivité et à donner aux maîtres l’occasion de parler pour eux-mêmes. Pour Dominicé, « l’histoire de vie est une autre façon de considérer l’éducation. Son but n’est pas de rapprocher l’éducation de la vie, comme dans les perspectives de l’éducation nouvelle ou de la pédagogie active, mais d’envisager la vie comme un domaine de la formation. L’histoire de vie traverse la famille, elle est marquée par l’école et s’oriente vers la formation professionnelle, et en conséquence elle bénéficie du temps de la formation continue qui s’en empare pour construire un sens dans l’histoire d’une vie2 » (traduction de l’auteur).

• 3 « [...] ajudd-lo a reconhecer sua humanidade singular » (Josso, 2004, p. 9).

7L’approche autobiographique valorise la singularité des sujets à partir de la façon dont ils ont vécu leurs propres expériences. Mais cela ne signifie pas marcher seul, « sans l’autre ou le formateur », car c’est l’autre qui « aide à reconnaître son humanité singulière3 » (traduction de l’auteur).

• 4 « [...] reaçâo contra a hegemonia das formas de fazer pesquisa vinculadas ao determi- nismo causali (...)

8Josso (2004) situe cette approche en la mettant en relation avec la « réhabilitation progressive du sujet et de l’acteur », en « réaction contre l’hégémonie des formes de recherche liées à des concepts déterministes-causalistes, fonctionnalistes, marxistes-déterministes, prédominants jusqu’au cours des années 70 » (traduction de l’auteur4). Les histoires de vie peuvent donc être comprises comme un nouveau paradigme interdisciplinaire. Josso donne un rôle important à Guibert-Sledziewski ainsi qu’à des contributions comme celles de Carl Rogers, Paulo Freire et Bernard Honoré.

• 5 « [...] A prâtica dos ateliês biogrâficos de projeto mostra que a eflcacia [grifo nosso] da histôri (...)

12Dans les recherches, nous pouvons identifier une « croyance dans l’efficacité de l’expérience autobiographique » liée au renforcement des processus subjectifs associés à la socialisation. Pour Delory-Momberger (2006), la pratique des ateliers de projet biographique montre que l’efficacité de l’histoire de la vie dans les procédures de formation est liée de manière constitutive à la taille de la socialisation inhérente à l’activité biographique. J’entends ici par activité biographique toutes les opérations selon lesquelles les individus écrivent leurs expériences temporelles, organisent mentalement leurs gestes, leur comportement, leurs actions, conformément à une logique de configuration narrative⁵ (traduction de l’auteur).

• 6 « Miriha esperança é que os procedimentos histôrias de vida se multipliquem aflm de que todos aquel (...)

14Utilisant un langage métaphorique, Josso (2006) présente les figures de liaison comme des nœuds de marin, efficaces en raison de la stabilité temporaire qui permet à l’individu de mieux savoir ce qu’il est et ce qu’il a été. Ces nœuds sont des éléments importants pour élaborer et conduire des projets. Certains moments ou certains traits de la vie des sujets sont particulièrement signifiants, et ils ont valeur d’articulations. L’histoire de vie est ainsi un travail « interprétatif », qui donne au sujet l’occasion de comprendre et d’interpréter une démarche de formation qui se fonde sur une vie enrichie : « J’espère que les procédures des histoires personnelles multiplient les possibilités afin que tous ceux qui les utilisent et les vivent puissent trouver, par le biais de cette forme particulière, un nouveau lien social, un chemin d’humanité partagée. Ma conviction est que par ces procédures intentionnelles vont se nourrir d’autres relations avec nous- mêmes et avec les autres, dans un partage respectueux de nos singularités, un dialogue intense parce qu’il a une incidence sur les questions essentielles de l’existence, dans l’interpellation réciproque de nos a priori, de nos hypothèses, de nos préjugés6 » (traduction de l’auteur).

• 7 « [...] em relaçâo às prâticas biogrdflcas tradicionais nas quais se implicavam majorita- riamente (...)

15Parmi les auteurs que nous avons mentionnés, Dominicé (2006) est celui qui s’intéresse le plus aux aspects structurels de la société et aux relations que les sujets établissent avec les problèmes économiques, sociaux et politiques contemporains. Ainsi, il fait apparaître, dans un « nouvel horizon biographique », les difficultés du sujet face à la « désinstitutionnalisation » des formes traditionnelles de vie, et le besoin de construire des façons de vivre en relation avec les perturbations et les incertitudes du monde contemporain. Chez lui, le nouvel horizon qui s’ouvre devant la mondialisation implique des formes plurielles de construction sociale, et oblige l’adulte à établir de nouvelles relations avec le monde du travail et les environnements culturels. Avec Pineau, il parle de l’autobiographie en tant que recherche et construction du sens (à la fois sensibilité, direction et signification) : « En ce qui concerne les pratiques biographiques traditionnelles, elles impliquent largement un sujet cohérent et qui s’oriente surtout sur des fonctions sociales et leur transmission. Les pratiques modernes semblent poussées par les besoins d’une formation et d’une orientation inachevées et permanentes à la recherche du sens dans les trois acceptions du terme, la sensibilité, la direction et la signification7 » (traduction de l’auteur).

• 8 « [...] O relato da biografla educativa serviria, entâo, igualmente de suporte para clarificar a po (...)

16Dominicé présente des pratiques biographiques comme des pratiques de socialisation, car ce ne sont pas seulement des pratiques de révélation de soi mais aussi d’affirmation de soi où, dans des contextes de « désinstitutionnalisation », les sujets comprennent mieux leurs relations à la vie et à l’histoire : « L’apport de l’éducation par la biographie serait alors, également une base pour permettre de soutenir le sujet dans la vie et l’histoire : il faut mieux savoir d’où nous venons ; quelles sont nos traditions et qui nous avons combattu au cours de notre vie, au nom de quoi nous allons protester contre le racisme, la corruption ou l’hégémonie du nationalisme8. »

• 9 « [...] sua aposta biopolîtica éada reapropriaçâo, pelos sujeitos, da legitimidade de seu poder de (...)

17Par conséquent, Dominicé (2006), se référant à Pineau, affirme qu’il s’agit d’un processus qui provient d’un « savoir-pouvoir sur la vie » et des « options bioéthiques ou biopolitiques » des sujets. Pineau (2006) reconnaît que l’adoption des pratiques biographiques implique la constitution d’un sujet réflexif et, selon lui, « sa décision, par une option biopolitique, consiste en la réappropriation de sa légitimité à pouvoir faire une réflexion qui tienne compte de la construction de sa vie9 ». Caractérisées ainsi, les pratiques biographiques conduisent la personne à croire en des « formes d’existence » pouvant soutenir une « esthétique de l’existence », au sens de Michel Foucault.

• 10 « [...] meio privilegiado de acesso ao conhecimento verdadeiro » (Idem, 2004, p. 39).

18Ce texte ne souhaite pas traiter de toutes les questions relevant de la relation entre la mémoire et l’histoire, spécifiquement de l’histoire de vie, mais il nous semble que l’expérience biographique en tant qu’expérience de formation s’appuie sur une compréhension positive de la mémoire que Seixas (2004), à certaines conditions de réminiscence, considère comme un « moyen privilégié d’accès aux connaissances véritables10 » (traduction de l’auteur).

• 11 « [...] com imagens que aparecem e desaparecem independente de nossa vontade » (Seixas, 2004, p. 46 (...)

20Chez Seixas (2004), la mémoire contribue à la formation de l’identité à condition qu’on ne la réduise pas à la « mémoire volontaire », proche d’une mémoire « intellectuelle », fonctionnelle, ou assurant une continuité pratique. Dans la « mémoire involontaire » au contraire, la relation avec le passé est discontinue, spontanée et affective. Seixas trouve dans le travail de Marcel Proust et Henri Bergson des contributions à la compréhension de cet autre plan de la mémoire, où les souvenirs « sont comme des images qui apparaissent et disparaissent indépendamment de notre volonté » (traduction de l’auteur11). La mémoire involontaire est chargée d’affectivité, et les procédures permettant d’y avoir accès sont différentes de celles de la mémoire volontaire.

• 12 « [...] a parte sombria, inquiétante e frequentemente terriflcante da historia » (Ansart, 2004, p.  (...)

22Il est donc clair que, dans ce mouvement de recherche-formation, les relations avec le passé se réfèrent à une pluralité de temps, où s’ouvre une signification qui ne peut être construite que dans ce processus. Mais la mémoire qui nous permet la (re)mise à jour de notre expérience — qui conduit les sujets à restituer ce qui a été réduit au silence et à lui donner accès sous une nouvelle forme — est aussi celle où peuvent demeurer les souvenirs les plus douloureux. Ansart (2004), se référant au thème de la relation entre la mémoire et la rancœur, dit que, à côté des relations humaines positives, la mémoire également rend à nouveau présente « la part sinistre, inquiétante et souvent terrifiante de l’histoire » (traduction de l’auteur12). Autrement dit, nous devons considérer aussi la rancœur, l’envie, les souhaits de la vengeance et les fantômes de mort, tenter de les comprendre ou de les expliquer.