1Le mot « flexibilité » renvoie à l’idée d’ « élasticité », de « souplesse », et à une « grande faculté d’adaptation aux circonstances », selon le dictionnaire1. Comme l’ont montré plusieurs chercheuses et chercheurs depuis les années 1990 (Altet, 1992, 1996 ; Perrenoud, 1996), la notion d’ajustement est au cœur du métier d’enseignant (Bucheton, 2009 ; Saillot, 2020), car elle renvoie aux compétences « qui visent à répondre à l’imprévisibilité de la situation et aux besoins d’apprentissage des élèves » (Saillot, 2020, p. 81). Elles relèvent du kaïros, une des caractéristiques des gestes professionnels, qui démontre une certaine souplesse dans l’exercice du métier. Comme le mentionne Jorro, ce qui caractérise les gestes professionnels est l’appropriation par chaque professionnel.le des gestes du métier au moment de leur mise en œuvre qui dépend de processus d’ajustement, de régulation et d’improvisation, au moment opportun, en tenant compte de l’environnement dans lequel s’exerce le métier, et des individus en présence, en l’occurrence les élèves. Ainsi, nous formulons l’hypothèse que, pour un.e enseignant.e, la flexibilité reposerait sur ses compétences à s’ajuster aux élèves et à ce qui survient en classe, aux imprévus du métier. Cette flexibilité, cette compétence d’ajustement, caractéristique de la professionnalité des enseignant.e.s expert.e.s relève-t-elle de « méthodes pédagogiques » (Etienne, Ragano, et Talbot, 2019) ou de gestes et de postures prenant en compte l’environnement dans lequel se situent les apprenants et l’enseignant.e. ? Comment les professeur.e.s d’école parviennent-elles (ils) à s’adapter aux situations ?
2Dans cet article, nous proposons d’appréhender cette question à partir de notre recherche auprès des professeur.e.s d’école débutant.e.s sur la construction de leur professionnalité (Ferrero-Boutrais, 2015). Nous avons emprunté une approche psychophénoménologique outillée par l’entretien d’explicitation, qui a révélé les prises d'informations et les prises de décision que les professeur.e.s d’école effectuent en situation. Ainsi, nous avons obtenu une description fine du « procédural » de l’action (Ibid.), c’est-à-dire la manière dont les professeur.e.s d’école débutant.e.s s’y prennent pour accueillir l’imprévu qui se présente en situation de classe et agir dans l’instant.
3Dans une première partie, nous précisons les liens entre les gestes d’ajustement et les pratiques enseignantes d’improvisation (Perrenoud, 1994 ; Azéma, 2019) en situation de classe, en éclairant cette dernière notion à l’aune de la théorie de l’enaction. Dans un second temps, nous présentons la méthodologie de recherche utilisée et les résultats obtenus relativement aux prises d'informations et prises de décision des professeur.e.s. d’école novices en situation de classe. Enfin, dans une troisième partie nous proposons de discuter les enjeux et les perspectives pour la formation initiale et continue des enseignant.e.s.
4Les travaux de recherche visant à comprendre les pratiques professionnelles des enseignantes et enseignants en situation, et sur leur formation, se sont intéressé aux différentes composantes de l’activité des enseignant.e.s en termes de préparation/planification des séances, de rapport aux savoirs, de connaissances didactiques, mais aussi aux spécificités que comporte l’environnement d’exercice du métier qu’est l’espace matériel de la classe, espace comprenant également les élèves, avec leurs besoins éducatifs spécifiques et les interactions entre eux, mais aussi avec l’enseignante ou l’enseignant. Ainsi, les études menées par Altet (1994), Alin (2000 ; 2010), Jorro (2002), Bucheton (2009) et leurs équipes ont mis en évidence des « gestes professionnels » et notamment des « gestes d’ajustement ». Comme le souligne Saillot (2020), cette notion d’ajustement est précisément en lien avec « l’incertitude » et « l’imprévisibilité » propres à l’environnement dans lequel les enseignantes et enseignants exercent leur métier. Ainsi, nous rejoignons l’auteur quand il souligne la « flexibilité » dans « la gestion du temps et les interactions interindividuelles » (Ibid., p. 24) et la « succession de micro-décisions de tous ordres » dont font preuve les enseignantes et enseignants en situation de classe. Ces travaux mettent l’accent sur la complexité de l’acte d’enseigner et sur la part d’ « improvisation » (Azéma, 2019) contenue dans cette pratique. De plus, ces deux caractéristiques constituent une part importante et quotidienne de la professionnalité des enseignants.
5En effet, depuis les années 1980, de nombreuses recherches ont mis en évidence le lien étroit entre l’activité d’enseignement et l’adaptation à la situation de classe (Shavelson et Stern, 1981 ; Ropo, 1987 ; Tochon, 1984). Ce « fonctionnement improvisationnel », pour reprendre les termes utilisés par Tochon, désigne la « nature des processus mentaux qui permettent à l’enseignant de fonctionner, c’est-à-dire de s’adapter au contexte » (p. 437). L’auteur insiste sur le fait que cette caractéristique relevée chez les enseignant.e.s expert.e.s est l’expression d’un « professionnalisme » et qu’il « ne s’agit pas d’un fonctionnement aléatoire » ni d’une absence de « planification » et encore moins d’un manque de connaissances disciplinaires chez ces enseignant.e.s.
6Nous employons le terme « improvisationnel » pour indiquer la nature d’un fonctionnement analogique et adaptatif qui témoigne du professionnalisme des enseignants considérés ; il ne s’agit pas d’un fonctionnement aléatoire. Ce fonctionnement se manifeste dans « la pensée à voix haute » des enseignants par les remarques sur l’inadéquation des plans rigides, sur l’adaptation et la prise en compte des réactions des élèves, sur la souplesse et la mobilité des plans, sur les connexions fonctionnelles et le fait d’improviser sur le vif, pendant les interactions en classe (Tochon, 1993, p. 437).
7De ce rapide tour d’horizon des travaux de recherche sur les pratiques enseignantes, nous retenons la nécessité de considérer la complexité dans laquelle se réalisent les gestes professionnels qui sont nécessairement « ajustés » (Bucheton, 2009), empreints d’une part d’improvisation, liée au caractère imprévisible des interactions qui surviennent en situation, tant entre les élèves qu’entre l’enseignante ou l’enseignant et les élèves, sans oublier les évènements extérieurs au contexte pédagogique et didactique de la séance qui peuvent survenir. Dans ce contexte, les professionnel.le.s sont amené.e.s à prendre des décisions dans l’instant.
8Comme le relève Wanlin et Crahay, des recherches anglo-saxonnes, comme celles de Shavelson ont mis en évidence ces « interactions en classe » et ont porté une attention particulière à la « décision interactive » :
[…] tout acte d’enseignement est le résultat d’une décision consciente ou inconsciente que l’enseignant prend après un processus de traitement cognitif complexe d’informations disponibles. Ce raisonnement mène le chercheur à faire l’hypothèse que la compétence de base en enseignement est la capacité de prendre des décisions. (Wanlin et Crahay, 2012, p. 11)
9Les chercheurs anglo-saxons cités par Wanlin et Crahay se sont concentrés sur l’étude des décisions conscientes en utilisant diverses méthodes, comme le « rappel stimulé » et les « questionnaires sur les “politiques”de décision et d’évaluation » (Ibid.).
10Ces méthodes d’étude des prises de décision des enseignant.e.s s’apparentent à des réflexions « hors du feu de l’action » (Perrenoud, 2001), des réflexions sur l’action, à propos de celle-ci, effectuées dans un après-coup, dans une position de parole que Vermersch qualifie de « formelle » ou « distante », dans le sens où « le sujet, quand il s’exprime, n’est pas présent en pensée à la situation de référence » (p. 56). Or, une autre position de parole existe, dite « position de parole incarnée », qualifiée « d’impliquée, au sens où le sujet, au moment où il parle de la situation passée, est présent en pensée au vécu de cette situation. » (Ibid., p. 57). Cette position de parole spécifique fait référence à la théorie de l’enaction développée par Varela, Thomson et Rosch (1993). Cette théorie s’appuie sur une approche phénoménologique de l’action. En effet pour ces auteurs, il est nécessaire d’articuler « l’étude de l’expérience humaine sous son aspect corporel et culturel, et l’approche de la cognition humaine par les neurosciences, la linguistique et la psychologie cognitive » (p. 211). Dans cet ouvrage, les auteurs se réfèrent à la notion de « schème », citant Johnson (1987), et correspondant à la même notion telle que l’entend Piaget (1937), plus connu dans le monde francophone et européen.
La signification comprend les schèmes de l’expérience corporelle et les structures très conceptuelles de notre sensibilité[…]. Ces schèmes corporellement inscrits ne restent pas privés ou particuliers à la personne qui en fait l’expérience. Notre communauté nous aide à interpréter et à codifier un grand nombre d’entre eux. Ces schèmes deviennent des modes d’expérience et nous aident à déterminer la nature de notre compréhension signifiante, cohérente de notre « monde ». (Johnson, 1987, p. 175, cité par Varela et al. p. 211)
11La théorie de l’enaction est fondée sur la compréhension de l’action comme interdépendante de l’environnement et de l’action elle-même et de ses effets sur le monde, mais imprégnée aussi de l’individu et de l’univers social et culturel dans lequel il évolue. En ce sens, il s’agit d’une « action incarnée ». En effet, la cognition « dépend des types d’expériences qui découlent du fait d’avoir un corps doté de différentes capacités sensori-motrices », d’une part, et, d’autre part, « ces capacités individuelles sensori-motrices s’inscrivent elles-mêmes dans un contexte biologique, psychologique et culturel plus large » (Ibid., p. 234). Dans le cas des enseignant.e.s, cette perception par le corps et tous les sens (ouïe, vue, notamment) occupe une place importante comme nous l’avons décrit ailleurs (Boutrais, 2018).
12Le lien étroit entre perception, cognition et vécu singulier de l’individu est repris par Vermersch, complétée par la phénoménologie d’Husserl, dans ce qu’il nomme la psychophénoménologie, qui vise à étudier les actes cognitifs du point de vue de ce qui apparaît au sujet agissant, et à prendre en compte cette subjectivité dans la recherche. Pour accéder à celle-ci, l’outil d’aide à la verbalisation de l’action qu’est l’entretien d’explicitation permet de recueillir le « procédural » des personnes interviewées. Dans notre recherche (Ferrero-Boutrais, 2015), grâce à l’entretien d’explicitation nous accédons à la verbalisation des prises d’informations et prises de décision en situation des professeur.e.s d’école débutant.e.s, en nous appuyant sur cette approche psychophénoménologique.
13Nous présentons maintenant, la spécificité de l'entretien d'explicitation et l'intérêt de cette technique pour recueillir une description en première personne d'un vécu passé singulier et l’accompagnement spécifique vers la position de parole incarnée. Interrogeons-nous sur l’intérêt d’accéder à un vécu spécifié.
14Quand l'action que nous tentons de faire décrire à la personne interviewée lui est familière, celle-ci l'a effectuée plusieurs fois et aura naturellement tendance à tenir des propos génériques quand nous lui demanderons de nous en parler. Mais ces généralisations sur l'action passée empêchent la personne interviewée d'accéder à ses procédures, qui sont liées à une situation précise, singulière, spécifiée. Prenons un exemple, chaque jour de classe, le matin, après la sonnerie signifiant aux élèves qu'ils doivent se ranger avant d'entrer en classe, le professeur d’école se positionne à l'endroit habituel et demande aux élèves de se mettre en rang, de se taire, etc. Si nous demandons à une ou un professeur.e d’école de décrire ce moment du début de la journée de classe, nous obtiendrons des informations générales sur cette situation qui se reproduit chaque jour, et plusieurs fois par semaine. Si nous nous adressons à elle ou lui ainsi : « Je vous propose, si vous en êtes d'accord, de laisser revenir, le moment où ce matin vous vous êtes rendu(e) dans la cour de l'école à l'endroit habituel à 8h30. », nous orientons l'attention de la personne, nous provoquons une « visée attentionnelle » sur une situation spécifiée, ce jour-là, à cette heure-là. La mise en contexte proposée va lui permettre de retrouver ce moment spécifié. Pour répondre à cette incitation, la ou le professeur.e d’école interviewé.e va devoir se remémorer un vécu parmi tous ceux qui lui ressemblent. La personne interviewée va se tourner intérieurement vers son vécu passé spécifié, reprendre contact mentalement avec la situation « de ce matin, à 8h30 », « Ah ! Oui ! Il faisait froid ... ». Selon les termes de Mouchet :
[…] une des marques de fabrique de l'entretien d'explicitation est de pouvoir obtenir une granularité fine dans l'analyse sur une échelle temporelle courte, autrement dit cela renvoie pour nous à l'image de gratter fin et en profondeur, à un instant donné, pour mettre au jour les détails dans le déroulement de l'action. (2014, p. 25)
15La personne interviewée se place en « position de parole incarnée », elle est en prise avec ce vécu passé spécifié, unique. Cette posture est une posture d'introspection que Vermersch a appelé la « position de parole incarnée ou position d'évocation » (1994). Dans cette position de parole va se produire le « réfléchissement » (Vermersch, 1984, p. 80), c'est-à-dire le passage du vécu préréfléchi au « vécu représenté », selon la modélisation du passage du préréfléchi au réfléchi, de la conscience préréfléchie à la conscience réfléchie. Le maintien dans cette position de parole incarnée permet au sujet d'être « en contact avec son expérience dans une situation passée » (Mouchet, 2014, p. 25). Cette « forme de rappel redonne le vécu dans son déroulement temporel et sa dimension sensorielle » et « sollicite une mémoire concrète » (Ibid. p. 25). « L'entretien d'explicitation vise alors à créer, au niveau de la conscience réfléchie, un savoir expérientiel, verbalisé et thématisé. » (Ibid. p. 26).
16Afin de pouvoir accompagner l'évocation du vécu passé et de maintenir la personne interviewée en prise avec ce qu'elle faisait dans la situation spécifiée passée, il importe que l'interviewer sache distinguer les contenus des verbalisations. En effet, quand nous parlons d'une situation vécue passée certains passages de notre production orale ne portent pas seulement sur notre action. Vermersch distingue les « informations satellites de l'action vécue » représentées par le schéma suivant.
17Le souci constant de l’interviewer sera d'identifier à quelle catégorie les verbalisations du sujet appartiennent, dans le but d'intervenir en amenant la personne interviewée à mettre en mot ce qui relève du « procédural », ce qui est relatif à ses actions (matérielles et/ou mentales). Pour le chercheur-interviewer, il est important qu'il puisse obtenir des informations sur le contexte, sur les intentions, parfois, mais l'entretien d'explicitation vise principalement la description fine de l'action, des procédures, propres au sujet, dans la situation spécifiée. Tout en maintenant la personne en prise avec son vécu, l'interviewer pourra proposer une direction attentionnelle à la personne interviewée, afin d’obtenir des informations sur les prises d’informations et les prises de décision effectuées en situation. Faingold (2014) a précisé ce schéma organisationnel de l’action, à la suite de Vermersch, et qui a pour origine le modèle Triger Operate Test Exit (TOTE) (Vermersch, 1994, p. 145), élaboré par Miller, Galanter et Pribram (1960). Toute action est réalisée grâce aux prises d’informations, suivies d’identification, puis de prises de décision et d’effectuation, suivies par de nouvelles prises d'informations afin de décider de passer à l’action suivante. Ce modèle considère que l’unité d’analyse pertinente pour toute réalisation d’une tâche est « l’opération » qu’elle soit « d’exécution ou de prise d’information ». Nous reproduisons, ici, ce schéma de Faingold (2014), sur lequel nous nous sommes appuyée pour analyser les entretiens d’explicitation de notre corpus.
|
PRISE D’INFORMATION - IDENTIFICATION
A quoi êtes-vous attentif ? A quoi vous percevez que ?
A quoi vous voyez que ?
|
|
PRISE DE DECISION - EFFECTUATION
Qu’est-ce que vous faites ? Comment faites-vous ?
|
Figure 2 : Questionnement des opérations contenues dans l’action
18Grâce aux entretiens d’explicitation, de nombreuses informations ont été recueillies sur l’activité procédurale des professeur.e.s d’école interrogé.e.s (pensées privées, actions élémentaires, prises d’informations et prises de décision). Des gestes professionnels ajustés (Bucheton, 2009 ; Jorro, 2006 ; Saillot, 2020) des enseignant.e.s en classe ont émergé des données recueillies.
19Nous présentons dans la partie suivante la constitution de notre corpus et l’analyse des données avant d’aborder les résultats obtenus.
20Avant de présenter notre corpus, nous tenons à préciser que la technique de l’entretien d’explicitation nécessite une formation spécifique que nous avons suivie auprès de Faingold et de Vermersch, lui-même, entre 2005 et 2010. Nous continuons d’utiliser cette technique d’entretien et de faire partie du groupe de recherche sur l’explicitation (GREX22), fondé par Vermersch.
- 3 Les Instituts Universitaires de Formation des Maîtres (IUFM) succèdent aux Ecoles Normales de forma (...)
21Les personnes volontaires ayant participé à cette recherche sont six enseignantes débutantes (en première ou deuxième année d’exercice). Nous avons procédé aux entretiens au cours de l’année scolaire 2011/2012. Les professeures d’école volontaires étaient toutes des femmes ; cela ne reflète pas la proportion de femmes dans cette profession et constitue une des limites en ne permettant pas de comparaison des pratiques entre hommes et femmes. Ces personnes exerçaient soit en école maternelle soit en école élémentaire. Elles ont suivi une formation à l’Institut universitaire de formation des maîtres (IUFM3) et en sont sorties en 2010. Avec chacune de ces professeures des écoles débutantes nous avons réalisé un entretien d’explicitation. Lors de chaque entretien d’explicitation, après avoir demandé aux personnes interviewées de « laisser revenir un moment de classe qui s’était bien passé » pour elles, nous les avons accompagnées, en position de parole incarnée, afin d’obtenir la description fine de leurs actions en situation. À la fin de ce premier temps d’entretien, une fois la personne sortie d’évocation, nous lui avons demandé ce qu’elle avait su faire, selon elle, lors de cette séance et ce qui était important pour elle en tant qu’enseignante, quelles étaient les valeurs auxquelles elle tenait (temps d’entretien semi-directif). Avec trois de ces professeures des écoles, l’entretien d’explicitation ayant été long (plus de 45 minutes), nous avons réalisé l’entretien semi-directif quelques mois plus tard, après qu’elles avaient lu la retranscription de l’entretien d’explicitation. Lors de ce second entretien, les questions étaient les mêmes que celles du temps d’entretien semi-directif réalisé à la suite de l’entretien d’explicitation pour les quatre autres personnes.
22Nous avons ainsi obtenu un corpus de données qualitatives de neufs entretiens de plus d’une heure chacun (six entretiens d’explicitation, dont quatre suivis d’un temps d’entretien semi-directif, et deux entretiens semi-directifs). Dans cet article, nous nous centrons sur l’analyse des six entretiens d’explicitation et ce qu’elle révèle concernant les prises d’informations et les prises de décision en situation de classe, lors de séances que les professeures d’école ont choisies comme des séances qui s’étaient bien passées pour elles.
23L’analyse des verbatim permet d’extraire des informations sur la manière dont les enseignantes interviewées mettent en œuvre, sans en avoir conscience, le modèle TOTE présenté ci-dessus. En effet, les déclencheurs d’action peuvent être identifiés dans les propos recueillis, de même que les indicateurs repérés pendant l’action par les personnes quand elles décrivent leur « procédural » en restant en prise avec leur vécu singulier. Ces passages des entretiens sont présentés ci-dessous et montrent l’importance du guidage par l’interviewer. L’interviewée est invitée à mettre des mots sur ce qui lui revient de la situation passée et ces propos comprennent les indicateurs qui constituent des prises d’informations en acte, ainsi que la description des prises de décision qui s’ensuivent.
24Après avoir effectué l’analyse des verbatim de cette manière, nous avons constaté des similitudes parmi les descriptions des actions en classe : indicateurs relevés, par les professeures d’école, sur les mouvements et gestes des élèves, sur les paroles prononcées par les élèves. Les informations ainsi prélevées par les professeures d’école sont suivies par des prises de décision en acte, comme : suspendre le déroulement de la séance, en modifier le cours ou bien donner la parole aux élèves et la prendre en compte dans le déroulement de la séance, quitte à s’écarter de la planification initialement prévue. Ces prises d’informations et prises de décision constituent, pour les professeures d’école débutantes, des gestes professionnels (Jorro, 2002 ; Bucheton, 2009) révélant de « compétences émergentes » (2018) chez ces six professeures d’école, titulaires en première ou deuxième année d’exercice, et sous-tendues par des valeurs (2015).
25Afin d’illustrer la manière dont les entretiens ont été analysés nous présentons des extraits de verbatim d’entretiens, le premier concerne une professeure d’école qui relate une séance en école élémentaire et le deuxième une séance en école maternelle.
26Extrait 1 : Odile (classe de CE1)
C 113 : oui donc, ça m'intéresse, vous me dites, vous avez l'impression que certains élèves ont peut-être un petit peu perdu le fil des choses…
Odile 114 : oui
C 115 : à quoi vous voyez ça ?
Odile 116 : (silence 2 secondes) à leur manque de réaction ! (rires)
C 117 : d'accord
Odile 118 : à ... le regard, alors… (silence 2 secondes), oui à leur regard, voilà.
C 119 : le regard, il est comment à ce moment-là ? qu'est-ce que vous percevez de ce regard ?
Odile 120 : alors, pour certains élèves, y a certains élèves, je sais pas si ils sont perdus, mais il me regarde avec attention, donc je pense qu'au contraire ils essayent de comprendre, parce qu'ils essaient de récupérer le fil.
C 121 : hmm, avec attention d'accord
Odile 122 : oui avec attention, et d'autres enfants, euh… d'autres enfants qui en ont rien à faire, qui sont en train de jouer, enfin de regarder ailleurs, ça les… qui s'occupent, voilà ils occupent leurs mains en même temps que la maîtresse essaye de les remettre… dans la réflexion.
C 123 : d'accord donc le fait qu'ils s'occupent avec autre chose, vous vous dites que finalement ils sont peut-être pas concentrés…
Odile 124 : c'est-à-dire qu'ils me regardent, mais leurs mains sont en train de faire autre chose, donc, euh…
C 125 : et là peut-être vous vous dites à vous-même quelque chose à ce moment-là ?
Odile 126 : oui je me dis : celui-là… euh, je me dis, c'est pas très conscient mais je, je comprends que l'élève a décroché, enfin que en tout cas il est pas à 100 % dans la réflexion.
27Dans cet extrait, nous identifions les prises d’informations que l’enseignante effectue sur les élèves. Son attention en situation se porte sur le manque de réaction des élèves, sur leurs regards, sur les mouvements qu’ils font avec leurs mains.
28Extrait 2 : Céline (classe de petite et moyenne section de maternelle)
C 21 : Alors vous, vous êtes où quand ils sont à la table ?
Céline 22 : Alors la petite était assise et moi j'étais derrière, au-dessus.
C 23 : Vous êtes derrière au-dessus.
Céline 24 : Au début, pour voir comment elle tenait sa paire de ciseaux. Et quand, comme elle y arrivait pas, elle commençait à s'énerver. Et donc je me suis assise à côté, la place était libre.
C 25 : D'accord vous vous êtes assise à côté d'elle. Voilà, on va prendre le temps de revenir à ce moment. Là, où vous êtes assis à côté d'elle. Vous pouvez fermer les yeux si ça vous aide à revoir le déroulement, et essayez de voir à ce moment-là peut-être, elle était à votre gauche ou à votre droite ?
Céline 26 : Elle était à ma gauche.
C 27 : À votre gauche, voilà. Essayez de voir un petit peu peut-être ce qu'elle vous dit, ce qu'elle est en train de faire. Et puis juste décrivez ce qui vient.
Céline 28 : Donc, je...elle a la paire de ciseaux dans la mauvaise main.
C 29 : Ah. C'est quoi la mauvaise main ?
Céline 30 : Dans la main gauche, alors je lui redemande, je lui demande d'écrire son prénom, elle y arrive pas, mais elle prend le stylo spontanément de la main droite.
C 31 : D'accord.
29Céline prend, elle aussi, des informations sur le corps et les gestes de l’élève, comme le fait Odile dans l’extrait 1. L’extrait 2 donne des informations sur la décision qui suit la prise d'informations car Céline choisit de s’asseoir à côté de l’élève quand elle perçoit que celle-ci est en difficulté.
30Un autre moment de prise d'informations et de prise de décision est identifié, celui où elle constate la manière dont l’élève saisit la paire de ciseaux. Ici, la professeure d’école débutante ne demande pas directement à l’élève si elle tient les ciseaux de manière correcte ou dans sa main de prédilection, mais elle suscite chez l’élève une autre action pour pouvoir confirmer ce qu’elle a identifié (« elle a la paire de ciseaux dans la mauvaise main ») (identification), en demandant à l’élève une tâche qui va nécessiter chez l’enfant d’utiliser spontanément sa main de prédilection.
31Cette prise de décision suivie d’une effectuation (cf. Figure 2) (je lui demande d'écrire son prénom) traduit une compétence professionnelle que nous qualifions d’« émergente » car survenue en situation et non encore conscientisée par la professeure. La réaction de l’enseignante est habile ici, dans le cas d’une intervention auprès d’une élève de classe maternelle, car elle permet à l’enfant une réaction spontanée qui confirme l’identification faite par l’enseignante.
32Les extraits présentés ici montrent comment les entretiens se sont déroulés et comment des prises de d’informations et des prises de décision sont verbalisées lors de la description de moments de classe spécifiés. Ainsi, nous mettons en évidence la manière dont les enseignantes interviewées improvisent en classe et agissent en tenant compte de ce qui advient au moment de la séance. Nous formulons l’hypothèse selon laquelle ces prises d’informations en situation constituent des déclencheurs d’ajustement, dans le sens où ces éléments informatifs prélevés sur les élèves entraînent des prises de décision qui composent cet ajustement entre ce qui était prévu et ce qui survient en situation.
33Dans les entretiens, nous avons remarqué que les prises d'informations étaient, parfois, accompagnées de « pensées privées » (Vermersch, 1993), d’identification, ou « réflexions en action » au sens de Schön (1994). Si les prises d'informations portent essentiellement sur la perception des paroles et des gestes des élèves, y compris les mimiques de leurs visages, ces informations sont traitées par l’enseignante ou l’enseignant, à travers des pensées privées, qui peuvent se traduire parfois par un dialogue interne (« je me dis que… »).
34Ces prises d'informations sont suivies, dans la description de l’action, de prises de décision de différentes natures, selon les situations et les enseignant.e.s. Selon les cas, les prises de décision effectuées amènent les professeures d’école débutantes à attendre les réponses des élèves pour continuer la séance, ou à attendre le bon moment pour demander à un.e élève d'être tuteur ou tutrice d'un autre élève. Les prises de décision ont souvent une incidence sur le déroulement de la séance tel qu’il était planifié car la professeure d’école décide d’apporter une aide à un ou une élève en difficulté, d’ajuster son action (enchaîner les étapes de la séance ou procéder au moment de correction collective d'un exercice). Dans certaines situations, les professeures d’école modifient les modalités de travail de l'ensemble de la classe, passant, par exemple, dans une classe à double niveau, d’un travail séparé entre les deux niveaux, tel qu’il était prévu dans la préparation, à un travail en commun pour les deux niveaux, parce que l’enseignante s’est aperçue que les élèves de CE1 voulaient répondre à la question qu’elle adressait aux élèves de CE2. A la fin de l’entretien, cette professeure d’école fait part de ses prises de conscience :
Élise 552 : Normalement c'était une séance sur les attributs et puis au final, ça a été une séance sur le groupe nominal avec les adjectifs, puis ça a permis d'éclaircir les choses, la notion pour tous les élèves, donc c'était pas plus mal. Voilà.
C 553 : D'accord. Donc vous en gardez un bon souvenir de cette séance-là ?
Élise 554 : Oui, oui, c'était une autre façon de faire et puis ça permet aussi de pas de se laisser déborder, parce qu'au final, j'ai quand même réussi que ça parte pas dans tous les sens non plus. On a essayé de se recentrer sur ce que je voulais. Et puis ça permet de voir que les élèves peuvent aussi s'aider entre eux et vraiment construire leurs connaissances entre eux, les CE1 vers les CE2 et inversement.
C 555 : Humm. Humm.
Élise 556 : Ce que j'ai pas l'habitude du tout de faire
C 557 : Oui.
Élise 558 : On travaille vraiment très peu en commun.
C 559 : Humm. Donc qu'est-ce que vous avez su faire sur cette séance-là, d'après vous ?
Élise 560 : Ben j'ai su, on va dire, redistribuer les paroles pour que les difficultés des CE1 puissent être effacées par les CE2 qui ont expliqué, que les CE1, pareil, que ce soit la même chose dans les deux sens et qu'y ait pas d'incompréhensions surtout puisque les CE1 n'en étaient pas là. […]
Le fait de pouvoir travailler tous ensemble et pourquoi pas même à l'avenir de regarder les deux manuels vraiment pour voir qu'est-ce qu'on pourrait mettre en commun. Des choses que les CE1 pourraient faire avant et que les CE2 pourraient rattraper ensuite.
C 563 : Humm.
Élise 564 : Dans d'autres domaines. Les mathématiques, ça pourrait aussi être le cas sur plein de notions en fait. Ça peut être un réinvestissement pour les CE2 et puis une phase de découverte pour les CE1, avec les CE2 qui les font revenir dessus. Comme en début de CE2, ils font quand même beaucoup de révisions, donc ça pourrait permettre aussi de les inclure un petit peu plus, et puis, au moins, ça permet aux élèves aussi de mieux se connaître en début d'année.
C 565 : Oui. Humm. Humm.
Élise 566 : Au niveau de la cohésion de classe c'est une bonne chose.
35L’analyse des données de l’ensemble de notre corpus nous permet de modéliser l’activité des enseignantes et enseignants en situation, à partir de leurs prises d'informations et de leurs prises de décision, comme le montre le schéma suivant :
Figure 3 : Modélisation de l'action en situation des enseignantes et enseignants
36Cette possibilité d’agir de manière non planifiée à l’avance laisse la place à la créativité de l’enseignant, comme le notent les auteurs anglo-saxons Erickson (1982) et Sawyer (2011) quand ils parlent respectivement de « fonctionnement improvisationnel » et d’« improvisation disciplinée ». De plus, comme le souligne Jorge (2016) « dans l’improvisation, il s’agit d’entrelacer le connu avec l’inconnu », ainsi les enseignant.e.s qui improvisent acceptent de laisser une place à l’inconnu dans le connu.
- 4 Définition extraite du Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales (CNRTL) https://www.cn (...)
37Comme nous le faisons apparaître sur le schéma (cf. Figure 3), chacune des quatre opérations (prises d'informations, identification, prises de décision, effectuation) suppose une « posture d’ajustement » (Saillot, 2020, p. 81) particulière de l’enseignante ou de l’enseignant, que nous avons caractérisée en reprenant, en partie, la typologie des gestes professionnels établie par Alin (2010). Le terme de « posture » a été choisi à dessein et est ici entendu comme « attitude morale ou physique, volontaire ou non, qui se remarque par ce qu’elle a d’inhabituel ou de peu naturel »4. Ces différentes postures représentent des enjeux pour la formation initiale et continue des professeur.e.s d’école, comme nous allons le développer dans la partie suivante.
38Dans cette troisième partie, nous abordons les enjeux qui se dessinent à partir de notre recherche quant à la formation initiale et continue des enseignant.e.s. En effet, les compétences nécessaires aux ajustements en classe nécessitent un apprentissage explicite en formation, car ces gestes professionnels restent souvent invisibles dans la mesure où ils font partie d’un « allant de soi » peu explicité par les enseignant.e.s expert.e.s. Leur mise en évidence dans notre recherche permet d’attirer l’attention sur l’importance de casser l’évidence du « procédural » afin de mieux comprendre les processus à l’œuvre, en acte. Comme le souligne Saillot, la mise au jour « d’une posture professionnelle d’ajustement offre un cadre d’analyse aux observateurs ou aux acteurs afin d’accompagner des prises de conscience qui permettent d’agir ensuite avec une certaine vigilance réflexive et pragmatique de ce que l’on fait et de ce que l’on dit » (2020, p. 82).
39Les ajustements en situation de classe des professeur.e.s d’école résultent de la succession de prises d'informations sur les élèves (regards, gestes, mimiques du visage), traitées dans l’instant et suivies de prises de décision non moins instantanées qui débouchent sur une effectuation (action ou non action) et l’oriente. Si les ajustements sont des signes de professionnalisme (Tochon, 1993), se dessine alors là un enjeu en termes de formation. Comment, en formation initiale permettre aux futur.e.s enseignant.e.s d’acquérir les postures et capacités nécessaires pour favoriser chez eux les ajustements en situation ? En formation continue, la question se pose également, de faire prendre conscience aux enseignant.e.s de la manière dont elles ou ils s’ajustent à la situation dans l’instant avec les élèves dans le but de développer la pratique réflexive propice au développement professionnel.
40Nous évoquons quelques pistes qui pourraient être étudiées, en nous appuyant sur les postures que nous avons identifiées dans la modélisation proposée dans cet article (cf. Figure 3). Certaines conditions sont nécessaires pour que les enseignant.e.s puissent faire preuve de flexibilité dans l’exercice de leur métier, et notamment en situation de classe, en présence d’élèves. En effet, être capable de prendre des informations sur les élèves, au cours de la séance de classe suppose de les écouter et de les observer, et que l’enseignant.e. soit à l’écoute de ces perceptions sensorielles (ce qu’elle ou il voit, ce qu’elle ou il entend provenant des élèves). C’est à cette condition, dans cette posture d’écoute de soi qu’elle ou il pourra apprécier, évaluer et analyser ses prises d'informations. Ce traitement de l’information nécessite une capacité à s’autoriser à accueillir et à s’ajuster à ce qui survient et nécessite alors un certain lâcher-prise (Bucheton, 2009) de la part des professeur.e.s d’école, dans la mesure où elle ou il devra peut-être renoncer à suivre à la lettre ce qu’elle ou il avait planifié et préparé. Cette posture de lâcher-prise (Bucheton, 2009) engendre l’effectuation des opérations qui s’imposent dans l’instant, en acceptant d’agir selon son intuition, de créer, voire d’innover, à ce moment précis. Le cycle peut perdurer comme le montre les flèches du schéma (Figure 3) car de nouvelles prises d'informations seront effectuées, et ainsi de suite.
41La mise en œuvre des ajustements en classe résulte de deux gestes concomitants se traduisant par la capacité à écouter et observer les élèves mais également celle d’accueillir et de prendre en compte ce qui est observé, et de plus d’accepter de s’écarter de la planification pour agir dans l’instant.
42Ces gestes, signes d’une compétence professionnelle, relèvent, comme le souligne Tochon, « de l’enseignant expert » et suppose des connaissances disciplinaires et didactiques solides (Tochon, 1993) afin de permettre à l’enseignant.e de poursuivre l’objectif d’enseignement-apprentissage.
43La formation initiale et continuée des enseignant.e.s doit leur apporter ces connaissances disciplinaires et didactiques indispensables, mais a aussi pour but de leur permettre d’être capables de mobiliser ces ressources, à bon escient. Cette compétence permettant la flexibilité des enseignant.e.s, à l’heure où les besoins éducatifs des élèves sont diversifiés, peut être développée, renforcée et entretenue grâce à des réflexions individuelles et collectives sur des situations de classes diverses. Plusieurs dispositifs mis en œuvre dans les Instituts Nationaux du Professorat et de l’Education (INSPE), tels que le GEASE5, les analyses de pratiques et les analyses réflexives de situations (dispositif GPS6) (Boutrais, 2019), poursuivent cet objectif de développement professionnel. Cependant, les représentations sont encore très prégnantes parmi les étudiant.e.s se destinant aux métiers de l’enseignement et de la formation, selon lesquelles la planification doit être mise en œuvre comme gage d’efficacité. Si la préparation des séances en amont de celles-ci demeure indispensable, il convient de faire prendre conscience aux futur.e.s enseignant.e.s que les capacités d’ouverture aux autres (aux élèves) et d’autorisation que l’on se donne à soi-même sont nécessaires pour s’ajuster aux besoins des élèves en situation.
44Dans cet article, nous avons tenté d’apporter notre participation à la compréhension des pratiques des enseignantes et des enseignants en situation de classe, à partir d’exemples singuliers issus de notre recherche sur la construction du « je » professionnel des professeur.e.s d’école débutant.e.s. La mise en évidence des prises d'informations chez les enseignant.e.s, comme déclencheurs d’ajustement entraînant des prises de décision, dans l’interaction avec les élèves, en situation de classe, apporte des éléments de compréhension de la flexibilité dont sont capables les professeur.e.s d’école débutant.e.s. Cet « ajustement mutuel », selon Sensevy (2011), entre professeur.e et élèves suppose, comme nous avons tenté de le montrer, des postures d’ouverture à soi et à l’autre qui peuvent être mises au travail en formation, tant initiale que continue. Si un des enjeux en formation d’enseignantes et d’enseignants est la maîtrise des contenus disciplinaires et didactiques, il n’en demeure pas moins que le sens du kaïros est aussi à développer et à travailler en formation afin de tenter de sortir de certaines représentations déterministes sur le « charisme » de l’enseignant.e. Dans cette optique, s’intéresser à des situations d’enseignement-apprentissage qui se sont bien passé du point de vue des enseignant.e.s novices ou expérimenté.e.s permet de mettre en évidence les ressources mobilisables, de les conscientiser afin que les individus les transforment en compétences professionnelles, dans une perspective d’ajustement et de flexibilité pédagogique et didactique. Ces considérations soulèvent d’autres questions dont celles de la durée de la formation initiale et continuée des enseignantes et enseignants et du temps accordé à l’analyse de pratiques professionnelles.
Flux RSS
