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Entretiens et Leçons

Gros plan sur la Mission Bassin Minier Nord – Pas-de-Calais

Entretien avec Marie Patou, chargée de mission Patrimoine, Éducation, Réseaux internationaux à la MBM Nord – Pas-de-Calais
Mission Bassin Minier Nord - Pas-de-Calais: what is it? Interview with Marie Patou
Marie Patou

Texte intégral

Vous travaillez pour la Mission Bassin Minier du Nord-Pas-de-Calais. Pourriez-vous nous dire ce qui en a motivé la création en 2000 ?

Dans le Bassin minier du Nord et du Pas-de-Calais, l’activité charbonnière débute en 1720 et cesse définitivement en 1990 mais « l’après-mines » est envisagée et plus ou moins organisée depuis les années 1960. Tout au long de ces décennies, alors que, pour certains, il fallait faire table rase de la période minière, pour d’autres, il semblait indispensable de conjuguer l’Histoire avec le présent. En 1996, la Conférence Permanente du Bassin Minier (CPBM) a permis de confronter ces deux courants. Elle rassemblait plus de 1 000 personnes autour de 37 séances d’ateliers qui alimenteront le Livre Blanc du Bassin minier. En décembre 1998, le Comité Interministériel d’Aménagement et de Développement du Territoire (CIADT) en a adopté les actions prioritaires et a octroyé un financement spécifique. Tout ceci a alimenté un volet spécifique du contrat de plan État-Région 2000-2006.

Le 12 mai 2000, la Mission Bassin Minier est officiellement créée, confirmant la volonté des élus et des acteurs de l’aménagement et du développement du territoire d’unir leur force au sein d’un outil commun. Elle s’installe en 2002 sur un grand site minier emblématique, le 9-9bis à Oignies. Elle est aujourd’hui un outil d’ingénierie, de développement et d’aménagement et a vocation à appuyer la mise en œuvre d’un programme global de restructuration urbaine, sociale, économique et écologique du Bassin minier.

Ses chantiers sont donc très diversifiés depuis la protection, la planification et l’aménagement de grands sites miniers, des cités minières ou des cavaliers, à la Trame verte et bleue, depuis la coopération internationale à l’observation et l’urbanisme1… Entre 2002 et 2012, la Mission Bassin Minier a également été l’outil technique d’appui à la candidature du Bassin minier au Patrimoine mondial : elle a porté les recensements, inventaires et une partie des études nécessaires. Depuis 2013, elle est en charge de la gestion de la prestigieuse inscription du Bassin minier sur la Liste du patrimoine mondial de l’UNESCO2. La Mission Bassin Minier n’est ni propriétaire ni gestionnaire du patrimoine minier mais elle met en œuvre, en partenariat avec l’État, le plan de gestion « Bassin minier Patrimoine mondial » élaboré pendant la candidature et véritable cadre pour l’action collective au service de la préservation et de la valorisation du Bien inscrit. Elle travaille donc au quotidien avec les multiples acteurs et propriétaires du patrimoine minier.

Fig.1 - La fosse du 9-9bis à Oignies

Fig.1 - La fosse du 9-9bis à Oignies

C’est à Oignies, sur le carreau la fosse du 9-9 bis, que sont installés les bureaux de la Mission Bassin Minier

© Jean-Michel André-Mission Bassin Minier

Ce faisant, pourriez-vous évoquer, présenter, le Bassin minier aujourd’hui ainsi que ses patrimoines ?

Riche d’1,2 million d’habitants, le Bassin minier se situe dans le Nord de la France, à cheval sur deux départements, le Nord et le Pas-de-Calais. Il est aujourd’hui inclus dans la Région Hauts-de-France. Les villes principales qui le couvrent sont, d’Est en Ouest : Valenciennes, Douai, Lens et Béthune. À une trentaine de kilomètres au nord se trouvent Lille et sa métropole. Sur le plan géologique, le gisement du Nord-Pas-de-Calais est le plus étendu d’Europe du Nord-Ouest, après celui de la Ruhr en Allemagne. Une de ses spécificités est d’être le seul gisement de grande dimension entièrement souterrain : 120 kilomètres de long ; 12 kilomètres de large ; 1,2 kilomètre de profondeur.

Fig. 2 - Périmètre d’inscription du Bassin minier au Patrimoine mondial

Fig. 2 - Périmètre d’inscription du Bassin minier au Patrimoine mondial

© Mission Bassin Minier

Le Bassin minier ne correspond aujourd’hui à aucun périmètre administratif et constitue encore moins une entité territoriale juridique établie, clairement définie et délimitée. En effet, c’est l’attribution successive de concessions par l’État, et leur juxtaposition, qui a formé un territoire de 120 000 hectares et qui lui a donné un corps juridique durant le temps de son exploitation et ce, jusqu’aux abandons des travaux miniers (sorties de concession) étalés entre la fin des années 1990 et 2007. Aujourd’hui, sur le plan administratif, le Bassin minier est concerné par une région, deux départements, 7 Communautés d’Agglomération ou de communes, environ 200 communes et deux pôles métropolitains.

Sur le plan patrimonial, 270 ans d’activité charbonnière ont laissé plus de 1 200 éléments de patrimoine minier recensés sur près de 150 communes et sur une étendue d’environ 100 000 hectares : une centaine de bâtiments de fosse isolés, 4 fosses d’extraction quasi-complète, 21 chevalements, 225 terrils, une dizaine d’étangs d’affaissement, 563 cités minières, 241 équipements de Société de Secours Minière (santé), 57 édifices religieux, une soixantaine d’équipements collectifs (salle des fêtes, écoles, stades, sièges…), 209 kilomètres de chemins de fer… Soit une estimation de 65 % du patrimoine ayant existé dans les années 1950-1960. Le périmètre du Bassin minier inscrit au Patrimoine mondial en 2012 (au titre de paysage culturel évolutif vivant) est un échantillonnage représentant 25 % du patrimoine restant, soit 4 000 hectares de paysage minier.

Fig. 3 - Cité Bruno à Dourges (Pas-de-Calais)

Fig. 3 - Cité Bruno à Dourges (Pas-de-Calais)

La cité Bruno est la plus ancienne cité-jardin d’Europe continentale. Cité minière exceptionnelle du Bassin minier Patrimoine mondial, elle a été l’objet d’une rénovation « pilote » : trois ans de travaux financés par l’État, le département du Pas-de-Calais, le conseil Régional et l’Europe, afin d’en faire un exemple de ce que peut être une reconversion réussie.

© Jean-Michel André-Mission Bassin Minier

Au regard de l’importance industrielle historique du Bassin minier (il est le premier bassin en France à partir des années 1880), comment se fait-il que la volonté de patrimonialiser les éléments hérités de la production charbonnière apparaisse si tardivement ?

Je ne partage pas nécessairement le caractère « tardif » souvent attribué à la patrimonialisation dans le Bassin minier. Il est vrai qu’elle est plus récente que dans les régions industrielles anglo-saxonnes européennes notamment, très empreinte de la dimension « monumentale » du patrimoine industriel ou très souvent réduite à l’objet technique. Mais en y prêtant bien attention et en s’affranchissant des récits historiques peut-être trop établis et/ou « non-réinterrogés », on s’aperçoit que les premiers frémissements patrimoniaux interviennent, certes de façon modeste, il y a une soixantaine d’années, dès les années 1960, puis dans les années 1970, (création de musées de la mine, sauvetage de chevalements notamment), dans un contexte de désindustrialisation particulièrement brutal et dans un bassin toujours en activité. En réalité, la patrimonialisation dans le Bassin minier suit l’évolution et l’élargissement du champ patrimonial en France, avec l’introduction classiquement connue du patrimoine industriel (idem pour le patrimoine moderne) dans les années 1970 et 1980, puis de la notion de paysage patrimonial.

Fig.4 - Paysage patrimonial du Bassin minier Nord – Pas-de-Calais

Fig.4 - Paysage patrimonial du Bassin minier Nord – Pas-de-Calais

Vue prise depuis le mémorial canadien de Vimy (62)

© Jean-Michel André-Mission Bassin Minier

Il est vrai que les multiples démolitions des fosses d’extraction et des infrastructures de production vont alerter d’abord une minorité, puis des collectifs plus nombreux et diversifiés, et venir amplifier une conscience patrimoniale de moins en moins parcellaire. L’arrêt de l’activité en 1990 va provoquer les premières reconnaissances au titre de la loi des monuments historiques et la candidature au Patrimoine mondial en 2002 va accélérer la reconnaissance collective du patrimoine minier. Contrairement à de nombreuses affirmations, les inscriptions au titre des monuments historiques (loi 1913), au titre des sites (loi 1930) ou encore l’inscription du Bassin minier au Patrimoine mondial en 2012 ne sont ni les marqueurs du début de la patrimonialisation dans le Bassin minier, ni ceux d’une notification de son achèvement. Certes fondamentaux, ils n’en sont que des jalons qui sont venus conforter (et non initier) et accélérer un processus depuis longtemps entamé et sans forcément s’insérer dans un cadre réglementaire officiel bien défini. De plus, cette patrimonialisation est toujours en cours ; le patrimoine minier, a fortiori quand il est habité, continue d’être contesté comme patrimoine à part entière3.

En 2012, le Bassin minier du Nord-Pas-de-Calais a obtenu une reconnaissance institutionnelle prestigieuse, avec son inscription sur la Liste du patrimoine mondial. Quel a été votre rôle dans cette reconnaissance et quel est votre rôle dans la gestion quotidienne de cette inscription ?

Je suis titulaire d’un DEA en histoire contemporaine de l’université de Lille III et je me suis toujours intéressée aux politiques patrimoniales en France et hors de France, et plus particulièrement à la Convention du patrimoine mondial de l’UNESCO, tant sur son application nationale qu’internationale. J’ai d’abord travaillé pour l’association de portage de la candidature du Bassin minier au Patrimoine mondial (BMU), en coordination étroite avec la Mission Bassin Minier, avec la charge de la préparation de la proposition d’inscription. J’en ai plus particulièrement rédigé les parties historiques et descriptives. Après l’inscription du Bassin minier, j’ai rejoint la Mission Bassin Minier avec pour missions de partager avec le plus grand nombre cette prestigieuse reconnaissance et de monter des projets de médiation auprès de tous publics : habitants, jeunes, Éducation nationale, action sociale… Je suis également membre du conseil scientifique du Centre Historique Minier de Lewarde.

La patrimonialisation et la valorisation à grande échelle d’un patrimoine minier et industriel soulèvent des problématiques originales, au-delà des soutiens financiers et matériels. Sur quelles compétences et sur quels acteurs pouvez-vous vous appuyer ?

La Mission Bassin Minier est gestionnaire de l’inscription du Bassin minier au Patrimoine mondial et non du patrimoine minier en général. Mais l’ambition est déjà colossale et cette gestion nécessite une coordination sans faille entre l’ensemble des propriétaires et gestionnaires, des acteurs et des partenaires du territoire. La Mission s’appuie ainsi sur un système de gouvernance complexe, articulant plusieurs instances4 : instances politiques (Conférence des territoires, comités locaux par arrondissement), instances de suivi (comité technique, comité des grands sites miniers, Rencontres du Bassin minier Patrimoine mondial), instances nationales (telle l’Association des Biens français du Patrimoine mondial).

Au quotidien, la Mission travaille avec l’ensemble des propriétaires du patrimoine minier (bailleurs, Communautés d’Agglomération ou de communes, communes, Départements, associations, privés), ainsi que toutes les structures de valorisation patrimoniale : musées, Pays d’art et d’histoire, service patrimoine des sites… Au sein de la Mission, l’équipe est pluridisciplinaire, chacun apportant sa pierre à l’édifice de la gestion et de la valorisation de l’inscription : urbanistes, géographes, architecte, historien(ne), spécialiste des collectivités locales…

Fig. 5 - Schéma du plan de gestion de la Mission Bassin minier

Fig. 5 - Schéma du plan de gestion de la Mission Bassin minier

© Mission Bassin Minier

Outre l’ambition patrimoniale, quels intérêts votre action représente-t-elle pour les collectivités territoriales amenées à soutenir vos efforts ? En d’autres termes, quelles sont vos autres objectifs à l’exception de la valorisation patrimoniale ?

Le Bassin minier est avant tout un cadre de vie qui poursuit son évolution. Avec l’inscription sur la Liste du patrimoine mondial, il ne s’agit pas de le figer ou de le « mettre sous cloche ». À travers l’inscription, il s’agit bel et bien de s’appuyer sur ce patrimoine et de le promouvoir comme un facteur de fierté et de renouveau, notamment pour les habitants. Cette inscription offre en outre de belles perspectives, à la fois pour la protection et la reconversion du patrimoine minier, pour une image renouvelée et attractive du Bassin minier, mais aussi pour son développement social, culturel et économique. L’exploitation minière fut à la source du développement du territoire. La reconnaissance internationale du patrimoine minier poursuit ce développement en agissant comme un accélérateur pour l’amélioration du cadre de vie, le tourisme, de nouveaux équipements culturels et bien d’autres facettes encore…

Travaillez-vous avec les habitants ? Si oui, comment suscitez-vous leur adhésion ?

Je ne suis pas vraiment partisane de la formulation « travailler avec les habitants », en ce sens que partager les valeurs de l’UNESCO, de la Convention du patrimoine mondial et les raisons de l’inscription du Bassin minier relèvent davantage de rencontres, d’un partage d’émotions, d’échanges sensibles et de beaucoup de créativité ! Et le vocable générique « habitant » cache une telle diversité qu’il faut se méfier des recettes toutes faites. De manière générale, même s’ils soutiennent et s’ils sont fiers de ces nouvelles valeurs accordées au territoire (autres que les sempiternels clichés…), il faut toujours garder à l’esprit que les habitants « n’ont rien demandé », notamment pas de « travailler » sur le patrimoine minier et sa place dans l’histoire du monde. Je me sens davantage comme un agent révélateur que comme un « travailleur » de la médiation patrimoniale. Et si leur adhésion à ces nouvelles visions patrimoniales est souhaitée, les habitants ont parfois une telle appréhension de la Culture en général et du patrimoine en particulier, qu’il faut savoir humblement accepter que cette vision patrimoniale ne soit pas partagée, du moins pas en quelques semaines ou en quelques mois.

À l’époque de la candidature (2002-2012), l’association BMU a souhaité associer et sensibiliser la population, résidente ou extérieure au Bassin minier.

Fig. 6 - La candidature du Bassin minier au Patrimoine mondial, un portage collectif

Fig. 6 - La candidature du Bassin minier au Patrimoine mondial, un portage collectif

© Olivier Sampson pour la Mission Bassin Minier

Dès 2003, elle a invité la population locale à constituer des clubs (une vingtaine pour environ une centaine de personnes), véritables relais de la démarche d’inscription mais aussi outils réels de valorisation patrimoniale à l'échelle d'une commune, d'un établissement scolaire. Structures autonomes, ces clubs ont rassemblé adhérents, bénévoles, particuliers, professionnels et ont réalisé des expositions, des festivités ou encore des publications… Les clubs se sont spontanément éteints quelques années après l’inscription, la quête du Graal étant achevée, la dynamique n’était plus la même. Un condensé de leurs soutiens et de leurs productions a été réalisé dans l’ouvrage « Passeurs de mémoire5 ».

Les actions de médiation patrimoniale de proximité sont aujourd’hui principalement menées par les grandes structures culturelles du territoire mais la Mission Bassin Minier est très souvent associée (parfois co-construisent) à certaines d’entre elles, à l’image du projet avec les 5 centres sociaux de Valenciennes « Ambassadeurs du Patrimoine mondial » (2017-2022), au titre de la Politique de la ville, ou encore « L’Odyssée des bâtisseurs » en 2018 à la Cité des Électriciens à Bruay-La-Buissière6… L’année 2022 a marqué les 10 ans de l’inscription. Elle a été l’occasion de mener également quelques actions événementielles spectaculaires. Comme le bilan est en cours, il faudra encore quelques semaines de patience pour en prendre connaissance, mais il est déjà possible de citer la résidence-mission « Les Arpenteurs » par la Compagnie des mains sales.

Quelles démarches ont été mises en place pour collaborer avec les écoles, les lycées et les universités ?

Nous n’avons pas de démarche spécifique mise en place. De manière générale, nous répondons presque toujours et dans la mesure du possible aux sollicitations des enseignantes et enseignants des écoles, des collèges, des lycées et des universités (Université d’Artois ou de Valenciennes, voire au-delà de la région) sur le Bassin minier au Patrimoine mondial, et ce, depuis 20 ans. Mais certains établissements se saisissent davantage de cette opportunité, sur le long terme. Ainsi, j’accompagne depuis 2017 les classes de Noémie Dufour, professeur des écoles à l’école Julie-Victoire DAUBIÉ à Hasnon sur le thème « Bassin minier Patrimoine mondial, acteur de là où je vis, j’habite en citoyen du monde7 ».

Fig. 7 - Lâcher de ballons sur le Bassin minier (Grenay, juin 2016)

Fig. 7 - Lâcher de ballons sur le Bassin minier (Grenay, juin 2016)

Restitution de la résidence d’artiste sur la valeur universelle exceptionnelle du Bassin minier.

© ULLOA Films Benoit Tanguy-Nord Drone Services

La Mission Bassin Minier a renforcé sa collaboration avec le ministère de l’Éducation nationale depuis 2018 avec la mission-projet accordée par la Direction Régionale Académique à l’Éducation Artistique et Culturelle (DRAEAC) à Sandrine Béraud, professeur d’Histoire-Géographie au lycée Darchicourt à Hénin-Beaumont. Sa mission consiste à proposer des pistes pédagogiques, tous niveaux et tous programmes, sur le Patrimoine mondial et l’inscription du Bassin minier. Dans le cadre de la réforme du lycée, la Convention du patrimoine mondial et son application font partie du thème n° 4 « Identifier, protéger et valoriser le patrimoine : enjeux géopolitiques » de la spécialité HGGSP de Terminale, notamment en introduction mais également dans les différents axes et autres jalons dont l’objet conclusif sur la patrimonialisation dans la Bassin minier. En étroite coopération avec la DRAEAC, la Mission Bassin Minier a produit des outils de connaissance sur la Convention du patrimoine mondial et sur des cas d’études géopolitiques. Elle accompagne trois enseignantes de trois lycées, depuis les cas d’études vus en classe jusqu’à la préparation du Grand oral.

Enfin, sur le plan des études supérieures, la Mission Bassin Minier est très étroitement associée à la chaire partenariale d’architecture « Acclimater les territoires post-miniers » et du réseau international sur le Post-minier de l’ENSA Paris-Belleville.

Avez-vous pu bénéficier du soutien d’anciens mineurs, acteurs qui possèdent encore la connaissance de leur métier et de ses outils ?

La candidature au Patrimoine mondial a été soutenue par le biais des Clubs BMU, dont faisaient partie d’anciens mineurs qui d’ailleurs exprimaient leur vif besoin d’être enfin pris en considération dans la « grande » histoire de France et du monde. Mais le patrimoine technique au sens de savoir-faire n’a pas été un pilier de l’inscription du Bassin minier. Cette dernière relève de la Convention du patrimoine mondial de 1972 et non de la Convention du patrimoine culturel immatériel. Pour résumer de manière un peu caricaturale, ce ne sont pas les pratiques liés au métier du mineur et à sa vie quotidienne qui ont été inscrites au Patrimoine mondial. Malheureusement, le patrimoine technique du Bassin minier, au sens de témoignages physiques de l’histoire des techniques minières (infrastructures de production), est le patrimoine restant le plus lacunaire et le « plus faible » comme souligné par le rapport d’expertise ICOMOS de 2012.

Fig. 8 - Machine d’extraction de la fosse 9-9bis à Oignies

Fig. 8 - Machine d’extraction de la fosse 9-9bis à Oignies

© Jean-Michel André-Mission Bassin Minier

Quelles stratégies patrimoniales mettez-vous en œuvre afin de produire un discours capable d’embrasser l’ensemble du bassin minier ? Quels moyens vous permettent de valoriser un tel patrimoine ?

La Mission Bassin Minier ne peut être impliquée dans l’ensemble des stratégies patrimoniales du Bassin minier. Elle met déjà en œuvre la stratégie liée à l’inscription au Patrimoine mondial. La notoriété et le prestige du Patrimoine mondial produisent en soi un discours assez fédérateur à l’échelle du territoire : « L’histoire des mineurs vaut celle des rois, ni plus, ni moins ». Sur un plan différent, un autre élément de discours assez fédérateur repose sur la démonstration que le Patrimoine mondial constitue une des clefs fondamentales de la transition énergétique, économique et sociale d’un territoire comme le Bassin minier et non un à-côté freinant.

Fig. 9 - Page de couverture du conte Vilain petit chevalement

Fig. 9 - Page de couverture du conte Vilain petit chevalement

Ce conte a été écrit et illustré en 2021 par les habitants-usagers des 5 centres sociaux de Valenciennes-ACSRV dans le cadre de l’action Ambassadeurs du Patrimoine mondial (2017-2022), financé dans les dispositifs Politique de la ville.

© ACSRV

Sur cette gestion de l’inscription, les moyens de la Mission Bassin Minier sont essentiellement ceux d’une structure d’ingénierie (conseil et accompagnement) au service des projets et des demandes des collectivités territoriales. Pour être plus précis, ce sont avant tout des moyens humains et de l’expertise à 360° afin de faire levier et de mettre en musique cette inscription, y compris financièrement (en investissement et en fonctionnement).

Enfin, dans quelle mesure prenez-vous en compte la dimension technique de cet héritage dans vos stratégies de valorisation ?

  • 8 La fosse d’Arenberg à Wallers, le Centre historique minier à Lewarde, la fosse du 9-9bis à Oignies, (...)

Comme évoqué précédemment, la dimension technique du patrimoine n’est pas le point de force de l’inscription au Patrimoine mondial. Mais à l’échelle des grands sites miniers du territoire8, la question des machines, des techniques et du métier de mineur est valorisée sur place à l’occasion des visites, selon leurs stratégies individuelles propres.

Fig.10 - Écoliers en visite au Centre historique minier à Lewarde

Fig.10 - Écoliers en visite au Centre historique minier à Lewarde

Installé sur le carreau de l’ancienne fosse Delloye, au cœur du Bassin minier, le Centre historique minier de Lewarde regroupe 8 000 m² de bâtiments industriels, sur un site de 8ha. Créé à l’initiative des Houillères en 1982, il a ouvert au public en 1984 avec pour mission de conserver et valoriser la culture minière du Nord-Pas de Calais, afin de témoigner auprès des générations futures des trois siècles d’activité minière.

© Jean-Michel André-Mission Bassin Minier

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Table des illustrations

Titre Fig.1 - La fosse du 9-9bis à Oignies
Légende C’est à Oignies, sur le carreau la fosse du 9-9 bis, que sont installés les bureaux de la Mission Bassin Minier
Crédits © Jean-Michel André-Mission Bassin Minier
URL http://journals.openedition.org/ephaistos/docannexe/image/11540/img-1.jpg
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Titre Fig. 2 - Périmètre d’inscription du Bassin minier au Patrimoine mondial
Crédits © Mission Bassin Minier
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Fichier image/jpeg, 453k
Titre Fig. 3 - Cité Bruno à Dourges (Pas-de-Calais)
Légende La cité Bruno est la plus ancienne cité-jardin d’Europe continentale. Cité minière exceptionnelle du Bassin minier Patrimoine mondial, elle a été l’objet d’une rénovation « pilote » : trois ans de travaux financés par l’État, le département du Pas-de-Calais, le conseil Régional et l’Europe, afin d’en faire un exemple de ce que peut être une reconversion réussie.
Crédits © Jean-Michel André-Mission Bassin Minier
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Titre Fig.4 - Paysage patrimonial du Bassin minier Nord – Pas-de-Calais
Légende Vue prise depuis le mémorial canadien de Vimy (62)
Crédits © Jean-Michel André-Mission Bassin Minier
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Titre Fig. 5 - Schéma du plan de gestion de la Mission Bassin minier
Crédits © Mission Bassin Minier
URL http://journals.openedition.org/ephaistos/docannexe/image/11540/img-5.jpg
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Titre Fig. 6 - La candidature du Bassin minier au Patrimoine mondial, un portage collectif
Crédits © Olivier Sampson pour la Mission Bassin Minier
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Titre Fig. 7 - Lâcher de ballons sur le Bassin minier (Grenay, juin 2016)
Légende Restitution de la résidence d’artiste sur la valeur universelle exceptionnelle du Bassin minier.
Crédits © ULLOA Films Benoit Tanguy-Nord Drone Services
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Titre Fig. 8 - Machine d’extraction de la fosse 9-9bis à Oignies
Crédits © Jean-Michel André-Mission Bassin Minier
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Titre Fig. 9 - Page de couverture du conte Vilain petit chevalement
Légende Ce conte a été écrit et illustré en 2021 par les habitants-usagers des 5 centres sociaux de Valenciennes-ACSRV dans le cadre de l’action Ambassadeurs du Patrimoine mondial (2017-2022), financé dans les dispositifs Politique de la ville.
Crédits © ACSRV
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Titre Fig.10 - Écoliers en visite au Centre historique minier à Lewarde
Légende Installé sur le carreau de l’ancienne fosse Delloye, au cœur du Bassin minier, le Centre historique minier de Lewarde regroupe 8 000 m² de bâtiments industriels, sur un site de 8ha. Créé à l’initiative des Houillères en 1982, il a ouvert au public en 1984 avec pour mission de conserver et valoriser la culture minière du Nord-Pas de Calais, afin de témoigner auprès des générations futures des trois siècles d’activité minière.
Crédits © Jean-Michel André-Mission Bassin Minier
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Pour citer cet article

Référence électronique

Marie Patou, « Gros plan sur la Mission Bassin Minier Nord – Pas-de-Calais »e-Phaïstos [En ligne], XI-2 | 2023, mis en ligne le 24 octobre 2023, consulté le 12 juin 2025. URL : http://journals.openedition.org/ephaistos/11540 ; DOI : https://doi.org/10.4000/ephaistos.11540

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Auteur

Marie Patou

Titulaire d’un DEA d’Histoire contemporaine (Université Lille III), Marie Patou est chargée de mission Patrimoine-Education – Réseaux Internationaux à la Mission Bassin minier Nord-Pas de Calais.

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Droits d’auteur

CC-BY-NC-SA-4.0

Le texte seul est utilisable sous licence CC BY-NC-SA 4.0. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.

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