Le monastère contre l’usine : une généalogie du contre-modèle social médiéval de la modernité industrielle (Grande-Bretagne, Allemagne fin XVIIIe-début XXe siècle)
Résumés
Entre la fin du XVIIIe et le début du XXe siècle, le Moyen Âge est progressivement constitué comme un thème littéraire et intellectuel majeur par un certain nombre d’hommes de lettres européens, et en particulier britanniques. Perçu comme un âge sombre et mystérieux dans les romans gothique de la fin du XVIIIe siècle, il devient, chez les auteurs de la tradition de critique culturelle comme Burke, Cobbett, Carlyle, Ruskin ou Morris, le lieu d’un idéal social. La période acquiert ainsi progressivement, au cours du XIXe siècle, la fonction de contre-modèle de la société industrielle, en réaction notamment à la réorganisation du monde du travail à l’œuvre tout au long de la période dans les pays d’Europe de l’Ouest.
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1Dès la fin du XVIIIe siècle, dans l’héritage de la tradition romantique, un certain nombre d’auteurs européens érige le Moyen Âge en modèle social face aux transformations que connaît alors la société occidentale en cours d’industrialisation. En Grande-Bretagne, si le modèle médiéval est constitué en idéal contre-révolutionnaire par un écrivain réactionnaire comme Edmund Burke à la toute fin du XVIIIe siècle, c’est comme parangon social qu’il est établi dès le premier tiers du XIXe siècle dans les écrits de différents auteurs qui, de Thomas Carlyle à William Morris, ont en commun d’avoir été intégrés à l’historiographie naissante du socialisme britannique au début du XXe siècle.
- 1 Terminologie plus adaptée que celle, encore non advenue au XIXe siècle, d’intellectuels (voir : Joh (...)
2La manière dont le Moyen Âge est mobilisé chez ces auteurs témoigne de la portée critique que la période acquiert progressivement au cours du XIXe siècle, en réaction notamment à la réorganisation du monde du travail à l’œuvre tout au long de la période en Grande Bretagne, mais également en France et dans les autres pays d’Europe de l’Ouest. Ce contexte, qui a comme corollaire la paupérisation des travailleurs (notamment en ville), invite les « hommes de lettres »1 à réfléchir à des solutions à ce qui émerge comme une « question sociale » qui agite et mobilise la classe politique européenne autour de la dégradation des conditions de travail ouvrières. C’est pour répondre à cette problématique sociale que le Moyen Âge est érigé non pas simplement comme modèle mais comme contre-modèle à la société industrielle. L’une de ses formes est celle du « socialisme de guilde », promu par William Morris et les premiers représentants du socialisme britannique – au sein de la Fabian Society notamment – à la fin du XIXe et au début du XXe siècle.
3Nous proposons, dans cette contribution, d’explorer la manière dont le Moyen Âge est progressivement établi, au cours du XIXe siècle, comme l’un des outils conceptuels de la critique sociale que formulent des auteurs qui entretiennent alors des rapports ambivalents avec les cadres interprétatifs de la pensée marxiste. Tout en ayant pour fonction d’opposer au modèle social moderne – incarné par l’image de l’usine – une organisation communautaire dont les principaux éléments sont largement le fruit d’une projection utopiste des contemporains, ce Moyen Âge se charge d’une radicalité politique dont les caractéristiques – par la mobilisation de l’image du monastère puis de la guilde notamment – répondent à la logique, autoréférentielle, du stéréotype.
Un Moyen Âge sombre et superstitieux au XVIIIe siècle
- 2 Léon Leclère, « Les limites chronologiques du moyen âge », Revue belge de Philologie et d’Histoire, (...)
- 3 David Matthews, « From Mediaeval to Mediaevalism. A New Semantic History », The Review of English S (...)
4L’expression « Moyen Âge » ou « Middle Ages » remonte au XVIIe siècle, quand elle est, pour la première fois en 1688, employée par Christophe Cellarius, de l’université de Halle en Prusse, dans son Historia medii aevi a temporibus Constantini magni ad Constantinopolim a Turcis captam2. Elle permet de désigner, chronologiquement, la période qui sépare les modèles classiques de l’Antiquité de leur réappropriation par la Renaissance. C’est ensuite de 1817 que date, en Grande-Bretagne, la première mise en circulation de l’adjectif « mediaeval », au moment où Thomas Dudley Fosbroke, dans la seconde édition de son livre British Monachism, or, Manners and Customs of the Monks and Nuns of England, l’utilise pour la première fois3. Ce chrononyme de l’âge « moyen », de l’entre-deux, se diffuse par la suite progressivement dans la littérature et la théorie du XIXe siècle. Il est associé à un autre terme, celui de « gothique », dont l’histoire est plus ancienne.
Sa première utilisation, dans un contexte théorique, remonte à Vasari qui l’utilise comme qualificatif destiné à définir un style d’architecture médiévale. Dans l’introduction de ses Vies des meilleurs peintres (1550), il écrit :
- 5 « One of the people in the northern parts of Europe, forst called Getes, afterwards Goths. One not (...)
5À la suite de cette première occurrence, son usage se diffuse et son sens s’élargit à d’autres champs ainsi qu’à d’autres symboliques. Chez Vasari déjà, le terme est chargé d’une signification spécifique. S’il désigne un style architectural, son nom trouve ses origines dans celui de la race germanique des Goths dont l’idéal de beauté serait éloigné de celui, classique, des Grecs et des Romains. Cette filiation, entre le gothique et les Goths, renseigne sur la manière dont Vasari et ses contemporains considèrent les formes gothiques comme celles d’une architecture barbare. Le terme devient d’ailleurs rapidement synonyme de « barbare » et cette association perdure jusqu’au XIXe siècle. Dans une réédition de 1824 du Dictionary of the English Language de Samuel Johnson, le Goth est défini comme « celui qui n’est pas civilisé, celui qui n’a pas de connaissances générales, un barbare »5.
6De l’architecture, les frontières du gothique s’élargissent aussi vers la littérature au moment où, en 1711, dans un article du journal le Spectator, le poète Joseph Addison disqualifie les poètes anglais contemporains en les comparant à des « Goths de la poésie » :
- 6 « I look upon these writers as Goths in Poetry, who, like those in Architecture, not being able to (...)
« Je considère ces écrivains comme des Goths de la poésie, qui, comme ceux de l’architecture, ne pouvant s’élever à la belle simplicité des anciens Grecs et Romains, se sont efforcés de la remplacer par toutes les extravagances d’une fantaisie irrégulière »6.
- 7 « gothic and superstitious ages » (Mary Shelley, Prose Works, 1888, I, 348 in Alfred E. Longueil, « (...)
- 8 Mary Wollstonecraft Shelley, Frankenstein, Paris, Le Livre de Poche, 2009.
- 9 On parle, en langue anglaise, de « gothic novel ».
Dans ce passage entre architecture et littérature, le gothique est alors profondément associé à l’idée d’un manque d’harmonie et de régularité. Il est ce que le style classique académique n’est pas : équilibré, droit et symétrique. Le lien avec la période médiévale ne s’en trouve pas distendu pour autant et l’idée d’un « âge gothique » se diffuse parmi les écrivains britanniques que certains ou certaines, comme Mary Shelley, associent avec l’idée de superstition. Dans une lettre de 1812, l’écrivaine fait référence à ces « âges gothiques et superstitieux »7 qui inspirent largement son roman Frankenstein, à la frontière du fantastique8. Frankenstein s’inscrit dans la veine d’une mode littéraire qui trouve son origine avec la publication par Horace Walpole, en 1764, de The Castle of Otranto sous-titré A Gothic Story. Cette œuvre est considérée comme le premier exemple d’un genre qui – comme une branche du roman romantique – connaît une grande popularité à la fin du XVIIIe et au début du XIXe siècle, en particulier au Royaume-Uni : le roman gothique9.
- 10 Clara Reeve, The Old English Baron, Copenhague, Lindhardt og Ringhof, 2022.
- 11 Sophia Lee, The Recess. Or, A Tale of Other Times, Londres, T. Cadell and W. Davies, 1804.
- 12 Charlotte Smith, Emmeline, the Orphan of the Castle, Londres, N. Bruce, 1844.
- 13 Ann Radcliffe, The castles of Athlin and Dunbayne. A Highland story, Londres, Longman, 1811.
7Dans les années qui suivent la parution du Castle of Otranto, un certain nombre d’auteurs et, de manière significative, d’autrices, déclinent la thématique héritée de Walpole. On peut citer les titres de The Old English Baron. A Gothic Story de Clara Reeve en 177810, de The Recess, or a Tale of Other Times de Sophia Lee en 1783-178511, d’Emmeline, The Orphan of the Castle de Charlotte Smith en 178812 ou de The Castles of Athlinand Dundabyne. A Highland Story d’Ann Radcliffe en 178913, qui viennent compléter la bibliothèque des romans gothiques britanniques. Le gothique perd, à la faveur de cette nouvelle catégorie, ses implications raciales pour recouvrir une autre signification. Si l’univers de référence de ces romans est médiéval, il est aussi celui, sombre et ténébreux, du surnaturel. L’action est souvent située dans des lieux propices aux huis clos (château, donjon, labyrinthe, monastère, passages souterrains) qui accentuent le climat inquiétant dans lequel se déroulent les intrigues. Le Moyen Âge constitue alors une ressource dans laquelle les auteurs puisent afin de conférer à leur fiction une atmosphère de mystère et d’étrangeté. La distance avec la période historique n’est alors pas seulement temporelle. Le Moyen Âge est aussi le lieu imaginaire d’une autre rationalité par laquelle des formes de pouvoirs fantastiques se manifestent ainsi que l’espace de déploiement d’une altérité puissamment radicale.
C’est ce contexte, celui de la mode des romans gothiques, qui cristallise l’attraction exercée par un Moyen Âge envisagé comme un spectre dans le paysage culturel européen, et notamment britannique, depuis la fin du XVIIIe siècle. C’est là que le modèle social médiéval du XIXe siècle prend paradoxalement racine.
Un Moyen Âge des « monastères » progressivement établi comme modèle social dans la première moitié du XIXe siècle
8La distance entre cette image, celle d’un Moyen Âge inquiétant, empreint de magie et de surnaturel, et celle qui se devine à la fin du XIXe siècle, dans les contours du Moyen Âge social constitutif du « socialisme de guilde » notamment, est notable. Entre les deux, le paysage social de la Grande-Bretagne géorgienne puis victorienne s’est profondément reconfiguré, à la faveur d’un large mouvement de réformes politiques, religieuses, sociales et urbaines ; et la période médiévale a progressivement acquis le statut d’instrument de la critique sociale.
9Les écrits de l’homme politique et député irlandais de la fin du XVIIIe siècle Edmund Burke constituent un précédent annonciateur. Son opposition à la société révolutionnaire se nourrit de l’idéalisation du modèle monastique médiéval. Si Burke n’utilise jamais le chrononyme « Moyen Âge » ou l’adjectif « médiéval », on trouve, dans ses Reflections on the Revolution in France, qui datent de 1790, différentes occurrences de la référence chevaleresque, charriant un imaginaire féodal érigé comme modèle social. Un passage de ses Reflections est, à cet égard, tout à fait significatif. Il s’agit de celui dans lequel l’auteur constate que :
- 14 « The age of chivalry is gone. That of sophisters, oeconomists, and calculators, has succeeded; and (...)
« L’âge de la chevalerie est fini. Celui des sophistes, des économistes et des calculateurs est advenu et la gloire de l’Europe s’est éteinte à jamais. Jamais, non jamais nous ne reverrons cette généreuse loyauté envers le rang et envers le sexe, cette soumission fière, cette obéissance, cette subordination du cœur, qui, dans la servitude même, conservaient l’esprit d’une liberté exaltée ! »14.
10Il convoque également, pour alimenter sa critique de la société révolutionnaire, le modèle de « bienveillance politique » que constituaient, selon lui, les institutions monastiques :
- 15 « In the monastic institutions, in my opinion, was found a great power for the mechanism of politic (...)
« Les revenus y étaient dirigés vers un usage public ; on y trouvait des hommes qui se mettaient vraiment à l’écart du monde et se dévouaient au bien commun ; sans rien d’autre que des relations et des principes publics, des hommes qui n’avaient pas la possibilité de convertir les propriétés de la communauté en une fortune privée »15.
Quelques années plus tard, en 1824, le radical William Cobbett mobilise également ce modèle dans son History of the Protestant Reformation. Il y présente les structures monastiques, détruites par la Réforme, comme de puissantes institutions sociales en ce qu’elles :
11C’est également par le truchement de la comparaison avec la société monastique que Thomas Carlyle cherche des solutions à la « condition de l’Angleterre » de son époque. Dans Past and Present, qui date de 1843, il convoque la figure de l’abbé Samson, personnage de la chronique de Jocelyn de Brakelond de la fin du XIIe siècle, pour faire du Moyen Âge un modèle social où prime le désintéressement personnel :
- 17 « One of the things that strike us most, throughout, in Jocelin’s Chronicle, and indeed in Eadmer’s (...)
« L’une des choses les plus surprenantes dans la Chronique de Jocelin ainsi que dans le Anselme d’Eadmer et dans d’autres Livres monastiques écrits, de toute évidence, par des hommes pieux, est qu’il n’y est presque jamais fait mention de “religion personnelle” et que l’essentiel de leurs pensées et de leurs réflexions se concentre sur les “privilèges de notre ordre”, “la stricte réalisation de nos devoirs”, “l’honneur de Dieu” (c’est-à-dire l’honneur de leur Saint), et ainsi de suite »17.
- 18 Ibid, p. 3.
La lecture de ces sources médiévales lui permet de mettre en lumière le décalage entre le sens du devoir et de la communauté propre au cadre monastique et l’avilissement de la société industrielle qui engendre la situation « la plus étrange jamais vécue dans l’histoire du monde » : la conjonction entre une augmentation exponentielle de la richesse produite et l’aggravation de la pauvreté18.
- 19 « Le paiement comptant comme seul lien social » souvent simplifié en « cash nexus » (Ibid, p. 41).
12Chez ces trois auteurs, le fonctionnement de la communauté monastique est utilisé comme contre-modèle à une société industrielle structurée autour d’un système de relations individuelles dépersonnalisées, médiées par la valeur marchande, que Carlyle qualifie de « Cash-payment for the sole nexus »19. Envisagé comme parangon de l’organisation sociale médiévale, le modèle monastique est l’un des outils convoqués dans la lutte politique contre l’industrialisation et les fondements idéologiques de l’économie politique. Le Moyen Âge constitue ainsi, dès la fin du XVIIIe siècle, une source auprès de laquelle aussi bien les réformistes sociaux – radicaux comme Cobbett ou tory comme Carlyle – que des figures du conservatisme comme Burke viennent puiser. Érigé en idéal contre-révolutionnaire, le modèle médiéval est également mobilisé pour répondre aux problématiques sociales de la première moitié du XIXe siècle en Grande-Bretagne. Le Moyen Âge est alors progressivement associé, au cours de la période victorienne, à un certain nombre de caractéristiques spécifiques qui en viennent à constituer une image stéréotypique de la période à travers notamment l’imaginaire monastique.
13Parmi les images qui circulent alors, on trouve, à cet égard, dans les écrits du théoricien de l’architecture Augustus Pugin, la représentation d’une ville médiévale de 1440, identifiée par la présence d’un nombre important d’églises, de chapelles et d’enclos monastiques à laquelle est opposée l’image de la même ville, en 1840, dans laquelle les clochers ont été remplacés les cheminées de usines industrielles. Ce « contraste » – pour reprendre le titre de l’ouvrage de Pugin – entre les deux villes est tout à fait exemplaire de la manière dont sont alors envisagées les villes médiévales, chargées d’églises, et le rôle qui est conféré aux structures ecclésiastiques et monastiques du Moyen Âge dans la gestion du lien social.
Figure 1 : Augustus Pugin, Gravure comparant une ville en 1440 et la même ville en 1840

Source : Augustus Pugin, Contrasts. Or, A Parallel Between the Noble Edifices of the Fourteenth and Fifteenth Centuries and Similar Buildings of the Present Day. Shewing the Present Decay of Taste. Accompanied by Appropriate Text, 1836, p. 66.
14Se structure alors, dans l’héritage de cette théorie culturelle critique, une opposition stricte entre deux modèles sociaux : un premier, médiéval, dans lequel la société serait organisée selon un certain nombre de principes moraux à l’image des communautés monastiques du Moyen Âge, pensées comme exemplaires ; un second, moderne, caractérisé par une profonde désorganisation sociale et l’absence de toute institution régulatrice. C’est la question des cadres au sein desquels pourrait se déployer avec efficacité une philanthropie envisagée comme nécessaire au bien-être social, qui structure alors l’opposition. De ce modèle monastique, d’autres images viennent progressivement peupler la représentation critique du Moyen Âge victorien et notamment celle de la guilde.
Du monastère à la guilde (Grande-Bretagne, Allemagne fin XIXe-début XXe siècle)
15Le modèle corporatif médiéval – synthétisé dans la notion de « guilde » qui désigne le regroupement, au sein d’une structure de type associative, d’un groupe d’artisans d’une même profession – devient progressivement une référence majeure chez les pourfendeurs de la société industrielle. C’est ce modèle qui va, notamment, inspirer le critique social John Ruskin lorsqu’il entreprend la fondation, en 1871, de sa communauté de la Guild of St George. Dans sa lettre 79 de Fors Clavigera, adressée aux « ouvriers et paysans de Grande-Bretagne », le 18 juin 1877, il la présente ainsi :
- 20 E. T. Cook et A. Weddeburn (ed.), The Works of John Ruskin, Londres, G. Allen, 1903-1912, vol. XXIX(...)
« Vous avez cette terre qui vous a été donnée pour travailler, avec laquelle vous devez faire du mieux que vous pouvez pour tous les hommes […] ; et bien que je doive faire l’effort de vous convaincre d’accepter presque chacune des lois des anciennes guildes, cette acceptation, j’en suis convaincu, se fera dans la plus grande compréhension de l’importance de cette étroite association, et (si cette pensée n’est pas trop éloignée de votre caractère) davantage dans l’esprit d’un corps de moines rassemblés pour un service missionnaire, que d’un corps de marchands rassemblés pour la promotion du commerce le plus honnête et le plus utile soit-il »20.
16On voit ici comment le modèle corporatiste de la guilde naît, en quelque sorte, de l’idéal que constitue la communauté monastique médiévale chez les auteurs de la théorie culturelle critique britannique depuis la fin du XVIIIe siècle. Le monastère et la guilde apparaissent alors comme les éléments stéréotypiques de la représentation du Moyen Âge dans la seconde moitié du XIXe siècle. Ils constituent l’imaginaire médiéval de Ruskin et de ses contemporains qui utilisent le Moyen Âge comme ressource pour critiquer le système productif industriel. Ruskin fait alors de la guilde médiévale un modèle à suivre, notamment pour la production des objets décoratifs en Grande-Bretagne. Dans une lettre que Ruskin adresse à son ami Henri Acland en 1859 – publiée, la même année, dans le recueil The Oxford Museum – il décrit l’idéal corporatif qu’il aspire à faire renaître :
- 21 « workmen as we have yet to create them: men inheriting the instincts of their craft through many g (...)
« des ouvriers tels que nous devons encore les créer : des hommes héritant des instincts de leur métier à travers de nombreuses générations, rigoureusement formés à tous les arts mécaniques qui portent sur leurs matériaux, et familiarisés dès l’enfance avec toutes les conditions de leur magnifique et parfait traitement ; informés et raffinés à l’âge adulte, par l’observation constante de tous les faits et formes naturels ; puis classés, selon leurs capacités prouvées, dans des entreprises ordonnées, dans lesquelles chaque homme devra connaître son rôle, et l’assumer calmement et sans effort ni doute – indiscutablement bien, – incontestablement accompli – envoyé et armé cap-à-pie pour sa place et sa fonction »21.
On devine ici les contours de la corporation médiévale telle qu’elle est alors fantasmée au XIXe siècle.
17Cet univers devient ensuite, à la fin du siècle, un élément structurant du mouvement des Arts & Crafts. L’organisation du travail artistique au sein de ce courant s’organise sur le modèle de la guilde. C’est le cas de la Century Guild of Artist, créée par l’architecte Arthur Heygate Mackmurdo en 1883 mais aussi de la Art Workers Guild fondée par cinq jeunes praticiens issus du studio de l’architecte néo-gothique Richard Norman Shaw en 1884 et qui rassemble notamment des architectes, des artisans d’art, des peintres et des sculpteurs. Figure de proue des Arts & Crafts et acteur du mouvement socialiste britannique, William Morris rejoint cette Art Workers Guild en 1888 et y reçoit le statut de « master » en 1892. Un autre exemple de guilde créée dans ce contexte est la Guild and School of Handicraft, fondée en 1888 par l’architecte Charles Robert Ashbee, qui constitue l’une des expressions les plus dynamiques du modèle productif des Arts & Crafts. Fondée d’abord à Londres, elle déménage à Chipping Campden dans le Gloucestershire en 1902. Elle compte, dans ses premières années, plus de 50 employés qui travaillent essentiellement le métal et réalisent des boucles de ceinture, des bijoux, des couverts et de la vaisselle mais aussi des meubles.
Figure 2 : La Guild and School of Handicraft à Chipping Campden (début XXe siècle)

Source : Chipping Campden History Society.
18Le modèle de la guilde est, par la suite, l’une des grandes références et l’un des importants principes organisationnels de mouvement du Bauhaus, qui se structure dans l’héritage revendiqué des Arts & Crafts et de Ruskin. Walter Gropius, le fondateur du mouvement, l’établit comme fondement dans le Manifeste qu’il rédige en 1919 :
- 22 Élodie Vitale, Le Bauhaus de Weimar (1919-1925), Liège, Éditions Mardaga, 1989, p. 280.
« Architectes, sculpteurs, peintres, nous devons tous revenir au métier ! Il n’y a pas “d’art professionnel”. Il n’y a pas de différence de nature entre l’artiste et l’artisan. L’artiste n’est qu’un artisan inspiré. Il est de rares instants, des instants de lumière où, par-delà sa volonté et par la grâce du ciel, l’œuvre de ses mains devient art. Mais tout artiste doit nécessairement posséder une compétence technique. C’est là qu’est la vraie source de l’imagination créatrice.
Formons donc une corporation d’une nouvelle sorte, une corporation sans cette séparation de classes qui dresse un mur de dédain entre artisan et artiste ? Tous ensemble concevons et réalisons l’architecture nouvelle, l’architecture de l’avenir, où peinture, sculpture et architecture ne feront qu’un, et qui, des mains de millions d’ouvriers, s’élèvera un jour vers le ciel, symbole de cristal d’une foi nouvelle »22.
19Notons ici que, nourri des expériences des Arts & Crafts, le projet du Bauhaus, qui en constitue la postérité la plus significative, précise la manière dont le modèle corporatif fonctionne comme un outil nécessaire à l’unification des arts à laquelle le mouvement aspire. Le fondement de cette unification repose sur l’idée d’une similarité de condition et de nature entre artistes et artisans. Elle permet à Gropius de s’opposer à la professionnalisation – et à la spécialisation qui en découle – de l’art de son époque et de réaffirmer son caractère profondément artisanal et technique. Ce retour aux « métiers » va puiser dans l’imaginaire corporatiste médiéval que la progressive disparition de l’apprentissage au sein de l’atelier – au profit des instituts spécialisés de formations comme le Royal Institute of British Architects en Grande-Bretagne ou le Königlich Technische Hochschule zu Berlin (Académie royale des techniques de Berlin), fondé en 1879 à Berlin, à la suite de la fusion entre la Royal Building Academy et la Royal Trade Academy – est venue effacer. Gropius s’oppose directement à cette spécialisation et à cet apprentissage au sein des écoles d’art créées, en Europe, au XIXe siècle :
- 23 Ibid.
« Les anciennes écoles d’art ne purent réaliser cette unité. Et comment l’auraient-elles pu, puisque l’art ne s’enseigne pas ? Elles doivent redevenir des ateliers. Cet univers où l’on n’est que dessinateur ou qu’artiste doit redevenir un univers architectural. Quand un jeune homme, qui se sent l’âme d’un créateur, commence, comme autrefois, par apprendre un métier, alors “l’artiste” improductif qu’il était n’est plus condamné à pratiquer imparfaitement son art, car son métier, où il peut exceller, lui permet de cultiver ses dons »23.
20La fondation du Bauhaus fait directement référence, dans les termes mêmes, au système corporatif médiéval. Le Bauhaus fut baptisé ainsi en référence à la « Bauhütte », terme utilisé pour désigner l’atelier au sein duquel se rassemble, au Moyen Âge, l’ensemble des corps de métiers impliqués dans la construction d’un édifice public et notamment des bâtiments cathédrales. C’est dans cette matrice, celle des chantiers de construction médiévaux des cathédrales – ceux de la fabrique –, que la représentation de la guilde par Ruskin, Morris et Gropius, trouve ses fondements.
- 24 Robert Owen, « Address to the Trades’ Unions », The Crisis (1833-4), vol. III, p. 156-157.
- 25 Garfield V. Cox, « The English Building Guilds. An Experiment in Industrial Self-Government », Jour (...)
21C’est d’ailleurs, de manière tout à fait significative, que les premières expérimentations d’organisations syndicales en Grande-Bretagne, qui se font précisément en reprenant le vocabulaire de la guilde, ont d’abord lieu dans le milieu du bâtiment. Avant l’acte de reconnaissance des « trade union » par l’État au moment du Trade Union Act de 1871, c’est notamment autour du réformateur social Robert Owen, au début des années 1830, que le mouvement connaît ses premiers tâtonnements. En 1833, ce dernier milite en faveur de la mise en place, à l’échelle nationale, d’un système de coopération productive fondé sur le modèle de la guilde24. Ce sont alors les métiers du bâtiment qui jouent le rôle de précurseurs et c’est autour d’une Operative Builders’ Union – créée en 1831 à Birmingham et rassemblant l’Operative Society of Bricklayers, la Friendly Society of Operative House Carpenters and Joiners, la Operative United Painters, la Operative Federal Plasterers, la Operative Plumbers’ and Glaziers’ Society, la Slaters Society et la Friendly Operative Stonemasons – que s’organise la première Grand National Guild of Builders à l’initiative notamment, en 1834, de la création à Londres, sous l’égide d’Owen, de la Grand National Consolidated Trades Union25. La genèse de ces trade unions se fait dans un rapport étroit avec l’imaginaire de la guilde dont Owen s’inspire pour le développement de ses « communautés coopératives de production » destinées à encadrer l’ensemble des « classes productives », les « maîtres » comme les travailleurs qui :
La terminologie, celle du « corps » de métier et des « maîtres », fait écho à un système de représentation médiéval qui, dans le contexte des transformations socio-économiques de la Grande-Bretagne des années 1830 est établi comme contre-modèle au système industriel, en premier lieu dans les métiers du bâtiment.
22La gravure de la Cathédrale de Feininger, qui orne le texte du Manifeste de Gropius ne laisse planer aucun doute sur l’univers référentiel au sein duquel le mouvement compte se situer. Ses lignes sont immanquablement gothiques et médiévales et dessinent un horizon d’attente formel et conceptuel qui résonne avec le propos liminaire de Gropius.
Figure 3 : Lyonel Feininger, Cathedral (Kathedrale) for Program of the State Bauhaus in Weimar (Programm des Staatlichen Bauhauses), 1919

Source : MoMA (New York).
La cathédrale gothique incarne la possibilité de l’union des arts. Elle témoigne, dans l’esprit des contemporains, de la possibilité de voir émerger un système productif dans lequel l’ensemble des corps de métiers œuvrent et concourent ensemble au même objet et au même dessein.
23La promesse de l’union des arts dont elle est porteuse n’est pas un horizon d’attente purement esthétique, elle relève d’un projet de société qui s’éclaire à la lumière du qualificatif de « socialiste » qui lui est parfois associée. Derrière les brisures, les arcs boutants et les flèches, le gothique est la forme d’un modèle productif, celui d’un travail pensé dans le cadre d’une réalisation collective, au sein d’un espace où prédomineraient des relations de pouvoir horizontales. Le Bauhaus reçoit ici en héritage l’imaginaire politique du gothique tel qu’il a été façonné par la théorie critique du XIXe siècle, de Cobbett à Morris et qui arbore, dorénavant, ouvertement, l’épithète socialiste.
- 27 G. D. H Cole, Guild Socialism Restated, Londres, Routledge, 1920.
- 28 Arthur J. Penty, The Restoration of the Guild System, Londres, Sonnenschein, 1906.
24Dans ces années d’après-guerre, la cathédrale est socialiste tout comme le socialisme est dit « de guilde » avec la parution notamment, en 1920, du Guild Socialism Restated par G. D. H. Cole27 qui fait écho à la publication, quelques années auparavant, en 1906, de l’ouvrage de l’architecte et écrivain Arthur Penty, membre de la socialiste Fabian Society, intitulé The Restauration of the Guild system28. Si on parle de « socialisme de guilde », c’est précisément que la référence aux guildes médiévales est centrale dans la pensée d’un grand nombre d’acteurs britanniques du mouvement socialiste, au premier rang desquels William Morris qui est l’un des fondateurs du premier parti socialiste britannique, la Social Democratic Federation, créé en 1881, tout comme elle l’est pour le mouvement syndical qui se structure également autour de cet imaginaire corporatiste médiéval.
25Alors qu’il était encore perçu comme un âge sombre et mystérieux à la fin du XVIIIe siècle en Grande Bretagne, notamment avec la mode des romans gothiques où le surnaturel pouvait facilement s’immiscer, le Moyen Âge devient, au cours du XIXe siècle, par le réinvestissement symbolique dont il fait l’objet chez les auteurs de la tradition de critique culturelle britannique comme Burke, Cobbett, Carlyle, Ruskin ou Morris, le lieu d’un idéal social. Il fait alors l’objet de projections fantasmatiques qui le chargent de traits caractéristiques qu’on peut qualifier, notamment en raison de la singularité du contexte politique et social dans lequel ils sont formulés, de stéréotypes. L’idéal communautaire médiéval, qui se fixe dans l’esprit des modernes et qui perdure jusqu’à aujourd’hui, se cristallise en effet au cours du XIXe siècle dans la recherche d’un contre-modèle à opposer au modèle industriel libéral. La représentation matricielle de la communauté médiévale, qui alimente la critique de la société contemporaine, fait émerger un canevas théorique par l’opposition entre « société » et « communauté », qui joue un rôle dans la structuration, à la fin du XIXe siècle, de la discipline sociologique aussi bien durkheimienne que wébérienne. La notion d’« idéal-type », mobilisée par Weber pour qualifier la fonction de son modèle de la commune médiévale, résonne singulièrement avec celle de « stéréotype » qui permet d’envisager la manière dont se constitue, au cours du XIXe siècle, l’imaginaire moderne du Moyen Âge.
Notes
1 Terminologie plus adaptée que celle, encore non advenue au XIXe siècle, d’intellectuels (voir : John Gross, The Rise and Fall of the Man of Letters, Londres, Macmillan, 1969).
2 Léon Leclère, « Les limites chronologiques du moyen âge », Revue belge de Philologie et d’Histoire, 1-1, 1922, p. 69.
3 David Matthews, « From Mediaeval to Mediaevalism. A New Semantic History », The Review of English Studies, 62-257, 2011, p. 700.
4 Giorgio Vasari, Les vies des meilleurs peintres, sculpteurs et architectes, Paris, Berger-Levrault, 1984, p. 101.
5 « One of the people in the northern parts of Europe, forst called Getes, afterwards Goths. One not civilized, one deficient in general knowledge, a barbarian » (Samuel Johnson, A Dictionary of the English Language. In which the Words are Deduced from Their Originals, Explained in Their Different Meanings, and Authorized by the Names of the Writers in Whose Works They are Found, C. and J. Rivington, 1824, p. 322).
6 « I look upon these writers as Goths in Poetry, who, like those in Architecture, not being able to come up to the beautiful Simplicity of the old Greeks and Romans, have endeavoured to supply its place with all the Extravagancies of an irregular Fancy » (Joseph Addison, The Spectator, No. 62, 11 may 1711)
7 « gothic and superstitious ages » (Mary Shelley, Prose Works, 1888, I, 348 in Alfred E. Longueil, « The Word “Gothic” in Eighteenth Century Criticism », Modern Language Notes, 38-8, 1923, p. 455).
8 Mary Wollstonecraft Shelley, Frankenstein, Paris, Le Livre de Poche, 2009.
9 On parle, en langue anglaise, de « gothic novel ».
10 Clara Reeve, The Old English Baron, Copenhague, Lindhardt og Ringhof, 2022.
11 Sophia Lee, The Recess. Or, A Tale of Other Times, Londres, T. Cadell and W. Davies, 1804.
12 Charlotte Smith, Emmeline, the Orphan of the Castle, Londres, N. Bruce, 1844.
13 Ann Radcliffe, The castles of Athlin and Dunbayne. A Highland story, Londres, Longman, 1811.
14 « The age of chivalry is gone. That of sophisters, oeconomists, and calculators, has succeeded; and the glory of Europe is extinguished forever. Never, never more, shall we behold that generous loyalty to rank and sex, that proud submission, that dignified obedience, that subordination of the heart, which kept alive, even in servitude itself, the spirit of an exalted freedom» (Edmond Burke, Reflections on the Revolution in France, James Dodsley, Londres, 1790, p. 84-85).
15 « In the monastic institutions, in my opinion, was found a great power for the mechanism of politic benevolence. There were revenues with a public direction; there were men wholly set apart and dedicated to public purposes, without any other than public ties and public principles; men without the possibility of converting the estate of the community into a private fortune » (Ibid, p. 176)
16 « The immediate cause we find to be the poverty and degradation of the main body of the people; and these, through many stages, we trace back to the “Reformation”, one of the effects of which was to destroy those Monastic Institutions which, as we shall now see, retained the produce of labour in the proper places, and distributed it in a way naturally tending to make the lives of the people easy and happy ». (William Cobbett, History of the Protestant Reformation in England and Ireland, Londres, 1857 [1824], p. 83).
17 « One of the things that strike us most, throughout, in Jocelin’s Chronicle, and indeed in Eadmer’s Anselm, and othet old monastic Books, written evidently by pious men, is this, That there is almost no mention whatever of “personal religion” in them; that the whole gist of their thinking and speculation seems to be the “privileges of our order”, “strict exactions of our dues”, “God’s honour” (meaning the honour of our Saint), and so forth » (Thomas Carlyle, Past and Present, Londres, Chapman and Hall, 1843, p. 76)
18 Ibid, p. 3.
19 « Le paiement comptant comme seul lien social » souvent simplifié en « cash nexus » (Ibid, p. 41).
20 E. T. Cook et A. Weddeburn (ed.), The Works of John Ruskin, Londres, G. Allen, 1903-1912, vol. XXIX, p. 147.
21 « workmen as we have yet to create them: men inheriting the instincts of their craft through many generations, rigidly trained in every mechanical art that bears on their materials, and familiarized from infancy with every condition of their beautiful and perfect treatment; informed and refined in manhood, by constant observation of all natural fact and form; then classed, according to their proved capacities, in ordered companies, in which every man shall know his part, and take it calmly and without effort or doubt—indisputably well,—unaccusably accomplished—mailed and weaponed cap-à-pie for his place and function » (E. T. Cook et A. Weddeburn [ed.], Works, op.cit., vol. XVI, p. 224)
22 Élodie Vitale, Le Bauhaus de Weimar (1919-1925), Liège, Éditions Mardaga, 1989, p. 280.
23 Ibid.
24 Robert Owen, « Address to the Trades’ Unions », The Crisis (1833-4), vol. III, p. 156-157.
25 Garfield V. Cox, « The English Building Guilds. An Experiment in Industrial Self-Government », Journal of Political Economy, 29-10, 1921, p. 778.
26 Robert Owen, The Crisis, 11 janvier 1834, vol. III, no. 20 cité in Ralph Miliband, « The Politics of Robert Owen », Journal of the History of Ideas, 15-2, 1954, p. 241.
27 G. D. H Cole, Guild Socialism Restated, Londres, Routledge, 1920.
28 Arthur J. Penty, The Restoration of the Guild System, Londres, Sonnenschein, 1906.
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Titre | Figure 1 : Augustus Pugin, Gravure comparant une ville en 1440 et la même ville en 1840 |
Crédits | Source : Augustus Pugin, Contrasts. Or, A Parallel Between the Noble Edifices of the Fourteenth and Fifteenth Centuries and Similar Buildings of the Present Day. Shewing the Present Decay of Taste. Accompanied by Appropriate Text, 1836, p. 66. |
URL | http://journals.openedition.org/essais/docannexe/image/12710/img-1.png |
Fichier | image/png, 598k |
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Titre | Figure 2 : La Guild and School of Handicraft à Chipping Campden (début XXe siècle) |
Crédits | Source : Chipping Campden History Society. |
URL | http://journals.openedition.org/essais/docannexe/image/12710/img-2.jpg |
Fichier | image/jpeg, 210k |
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Titre | Figure 3 : Lyonel Feininger, Cathedral (Kathedrale) for Program of the State Bauhaus in Weimar (Programm des Staatlichen Bauhauses), 1919 |
Crédits | Source : MoMA (New York). |
URL | http://journals.openedition.org/essais/docannexe/image/12710/img-3.jpg |
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Pour citer cet article
Référence électronique
Pauline Guillemet, « Le monastère contre l’usine : une généalogie du contre-modèle social médiéval de la modernité industrielle (Grande-Bretagne, Allemagne fin XVIIIe-début XXe siècle) », Essais [En ligne], 20 | 2023, mis en ligne le 20 juin 2023, consulté le 07 février 2025. URL : http://journals.openedition.org/essais/12710 ; DOI : https://doi.org/10.4000/essais.12710
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