• 1 Genève, cabinet d’arts graphiques du Musée d’art et d’histoire, cote SDA livre 0001.

2L’album, conservé aujourd’hui au cabinet d’arts graphiques du Musée d’art et d’histoire de Genève1, est un des nombreux témoignages des liens qui unissent artistes et « amateurs » dans l’Europe des arts du xvii^e siècle. Rassemblant cent vingt-quatre eaux-fortes réalisées par Caylus d’après des dessins de maîtres anciens appartenant aux collections du roi de France, il permet d’envisager la question du rôle central que les « connoisseurs » et les théoriciens du cercle réuni par Pierre Crozat dans son hôtel de la rue de Richelieu affectent à l’estampe dans la diffusion de la connaissance des arts, et tout particulièrement du dessin. Ce sont les résultats des recherches qu’elle a menées autour de ces deux axes qu’Alexandra Blanc nous livre ici.

• 2 Genève, Bibliothèque de Genève, Ia 419.
• 3 Paris, Bibliothèque nationale de France, bibliothèque de l’Arsenal, EST-63.
• 4 Paris, Bibliothèque nationale de France, département de Estampes et de la Photographie, AA-15-FOL (...)
• 5 Paris, BINHA. Jacques Doucet, FOL-EST-105.

3Après avoir resitué l’activité de Caylus aquafortiste dans son contexte intellectuel et esthétique, l’auteur aborde le recueil Arlaud, thème central de son étude, en le confrontant à cinq autres albums rassemblant eux aussi tout ou partie de l’œuvre gravé du comte. Elle étudie ainsi un autre recueil genevois ayant appartenu au juriste et écrivain suisse Jean-Jacques Burlamaqui (1694-1748)2, un album conservé à la Bibliothèque de l’Arsenal et provenant du marquis de Paulmy3, deux recueils du département des Estampes de la BnF, dont l’un fut acquis par Hugues-Adrien Joly à la vente Pierre-Jean Mariette en 17754 et enfin un recueil appartenant à la Bibliothèque de l’INHA – Jacques Doucet, qui présente la particularité de porter l’adresse de l’éditeur d’estampes Gaspard Duchange (1662-1757) sur sa page de titre5.

• 6 Samuel Rocheblave, Essai sur le comte de Caylus, l’homme, l’artiste, l’antiquaire, 1889, p. 149.

4C’est essentiellement la composition de chacun des albums qui est ici examinée avec soin. Ne résultant pas d’une entreprise éditoriale comme le Recueil Crozat, par exemple, mais d’un geste individuel de collectionneur, ils diffèrent les uns des autres, en dépit de quelques similitudes de juxtaposition, et semblent adaptés aux goûts et aux besoins de leurs possesseurs. Au milieu de l’apparent « fouillis » où rien ne semble « guider le curieux » ainsi que le constate à propos du recueil Mariette du département des Estampes Samuel Rocheblave6 se dégage pourtant peu à peu un motif, une ligne directrice : par la confrontation des styles, des dessinateurs, des écoles qui s’opposent ou se répondent, ces livres de gravures, tout en permettant à leur propriétaire de passer un agréable moment, sont destinés à former le goût de l’amateur ou de l’artiste et à le faire pénétrer plus avant dans la connaissance visuelle et intime des maîtres italiens des xvi^e et xvii^e siècle, qui constituent l’essentiel des corpus rassemblés.