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D’un imprimeur à un menuisier. La commande d’une presse au xviie siècle

Rémi Mathis

Résumés

On dispose d’assez peu de renseignements sur le matériel utilisé par le monde de la gravure – ce contrat, déjà signalé mais toujours inédit – est donc un rare cas de marché pour la fabrication d’une presse taille-douce à Paris au xviie siècle, commandée par l’imprimeur Jean Goyton au menuisier Jean Mery. Il est à la fois intéressant pour les questions de commande (personnes impliquées, prix, délai…) et celles relatives à la description de l’objet.

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Entrées d’index

Mots-clés :

archives, matériel, presse

Index géographique :

France

Index chronologique :

17e siècle
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Texte intégral

Introduction

1La production d’estampes est une activité économique qui ne peut exister que parce qu’elle permet de dégager un profit et de constituer une carrière. Dès lors, il est important de comprendre les conditions d’activité, non seulement des graveurs mais aussi de l’ensemble de la chaîne de production de la matrice et de l’estampe puis de la commercialisation de cette dernière. Et cela passe par la connaissance des coûts induits par les activités ; or, il est très rare de trouver de semblables informations. Cela rend la publication de telles archives d’autant plus importante.

  • 1 Marianne Grivel, Le Commerce de l’estampe à Paris au xviie siècle, Genève, Droz, p. 23-24.
  • 2 Rémi Mathis, « La vente d’une presse à taille-douce en 1674 : autour de Pierre et René Lochon, Anto (...)

2L’importance de cet acte pour comprendre le prix d’une presse fait qu’il est déjà cité par Marianne Grivel en 19861. Cette dernière compare également les mesures à celles données par Abraham Bosse, afin de déterminer si l’approche de ce graveur répond à une réalité matérielle quotidienne – si sa description est bien celle d’une presse taille-douce ordinaire du milieu du xviie siècle, ce qui est globalement le cas. Nous avons nous-mêmes signalé ce contrat lors de l’édition d’un autre acte qui concerne la vente (et non la construction) d’une presse taille-douce en 16742, pour la faible somme de cent livres.

  • 3 Jean Goyton (1628/9-1714) est célèbre pour avoir été l’imprimeur du Cabinet du roi, directement ins (...)

3Le présent marché corrobore notre analyse : faire fabriquer une presse en bois, ex nihilo, par un menuisier ne coûte que quarante-quatre livres. Celle-ci est commandée et achetée de manière directe par un imprimeur en taille-douce depuis longtemps signalé (sinon connu), Jean Goyton3. Le menuisier, Jean Méry, doit la livrer au jour de Pâques (cette année-là le 9 avril), donc un mois seulement après la commande.

Ill. 1. Marché entre l’imprimeur Jean Goyton et le menuisier Jean Mery pour la construction d’une presse à imprimer les tailles-douces. Archives nationales, minutier central, XLIII, 103, 13 mars 1662

Édition

4Source : Archives nationales, minutier central, XLIII, 103, 13 mars 1662

5Marché du 13e mars 1662

  • 4 Dans le quartier de la rue Saint-Jacques, près du collège de France.
  • 5 Entendre « bois de fil ».

6Fut present en sa personne Jean Mery, maistre menuissier à Paris, y demeurant rue Saint Jean de Latran4, parroisse Sainct-Benoist, lequel a promis et promet par ces presentes fournir et livrer à Jean Goiton, imprimeur en taille-douce demeurant à Paris, fauxbourg Saint-Marcel, parroisse Saint Hipolite, à ce present et acceptant, une presse d’imprimeur en taille-douce de bois de chesne bon, loyal et marchand, de laquelle les jumelles seront de quatre pouces d’espoisseur et d’un pied de large et une table de bois de noier de deux pieces, servante à lad. presse, au costé de laquelle sera une allesse de sept pouces, une croisée pour servir à ladite presse de bois de chesne d’un pouce et demy d’espoisseur, un chaperon pour servir à ladite presse qui excedera d’un tallon, poucé à l’entour de bois de fille5, et aura icelle presse vingt-sept pouces de large entre les jumelles, les pattes de ladite presse auront cinq pouces de largeur et quatre pouces d’espoisseur.

7Le tout bien et deubment fait au dire de gens à ce connoissans, que ledit Merry a promis fournir et livrer audit acceptant dans le jour de Pasques prochain venant, à peine de tous despens.

  • 6 « tournois » écrit en double par erreur en raison du changement de page.
  • 7 Biffé : lors la deblivrance de ladite presse par

8Ce present marché ainsy fait moyennant le prix et somme de quarante-quatre livres tournois6, de laquelle somme ledit Mery confesse avoir receu dudit Goiton celle de unze livres dont quittance, et le surplus, montant à trente-trois livres tournois7, ledit Goiton a promis et promet payer audit Mery en sa maison à Paris ou au porteur lors la dellivrance de ladite presse.

9Car ainsy etc. promettans etc. obligeans etc. chacun en droit soy, renonceans etc

10Fait et passé à Paris ès estudes, l’an mil six cens soixante deux, le treiziesme mars, et ont signé

  • 8 Charles II Quarré, notaire titulaire de l’étude XLIII de 1660 à 1685.
  • 9 Gilbert Bonodat, notaire titulaire de l’étude XVII de 1660 à 1670.

11Mery
Goyton
Quarré
8
Bonodat9

Ill. 2. Marché entre l’imprimeur Jean Goyton et le menuisier Jean Mery pour la construction d’une presse à imprimer les tailles-douces : signatures. Archives nationales, minutier central, XLIII, 103, 13 mars 1662

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Notes

1 Marianne Grivel, Le Commerce de l’estampe à Paris au xviie siècle, Genève, Droz, p. 23-24.

2 Rémi Mathis, « La vente d’une presse à taille-douce en 1674 : autour de Pierre et René Lochon, Antoine Sanson et Pierre Pocque », Nouvelles de l’estampe, 271, 2024. URL : http://journals.openedition.org/estampe/4970 ; DOI : https://doi.org/10.4000/estampe.4970.

3 Jean Goyton (1628/9-1714) est célèbre pour avoir été l’imprimeur du Cabinet du roi, directement installé à la Bibliothèque royale.

4 Dans le quartier de la rue Saint-Jacques, près du collège de France.

5 Entendre « bois de fil ».

6 « tournois » écrit en double par erreur en raison du changement de page.

7 Biffé : lors la deblivrance de ladite presse par

8 Charles II Quarré, notaire titulaire de l’étude XLIII de 1660 à 1685.

9 Gilbert Bonodat, notaire titulaire de l’étude XVII de 1660 à 1670.

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Table des illustrations

Légende Ill. 1. Marché entre l’imprimeur Jean Goyton et le menuisier Jean Mery pour la construction d’une presse à imprimer les tailles-douces. Archives nationales, minutier central, XLIII, 103, 13 mars 1662
URL http://journals.openedition.org/estampe/docannexe/image/6362/img-1.jpg
Fichier image/jpeg, 564k
Légende Ill. 2. Marché entre l’imprimeur Jean Goyton et le menuisier Jean Mery pour la construction d’une presse à imprimer les tailles-douces : signatures. Archives nationales, minutier central, XLIII, 103, 13 mars 1662
URL http://journals.openedition.org/estampe/docannexe/image/6362/img-2.jpg
Fichier image/jpeg, 393k
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Pour citer cet article

Référence électronique

Rémi Mathis, « D’un imprimeur à un menuisier. La commande d’une presse au xviie siècle »Nouvelles de l’estampe [En ligne], 273 | 2025, mis en ligne le 15 avril 2025, consulté le 08 juillet 2025. URL : http://journals.openedition.org/estampe/6362 ; DOI : https://doi.org/10.4000/13xks

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Auteur

Rémi Mathis

Archiviste paléographe, conservateur en chef des bibliothèques, directeur adjoint de la bibliothèque de l’École nationale des chartes – PSL, chercheur titulaire au centre Jean-Mabillon (EA3624)

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