1À l’échelle mondiale, le secteur agricole couvre 43 % de la population active (Chatellier, 2009 : 1). L’agriculture constitue la principale source de revenus de la plupart des gens vivant dans des zones rurales. Une très grande majorité de la population de ces régions sont des petits agriculteurs qui fournissent des produits alimentaires à la population et des matières premières pour l’exportation et l’agro-industrie (Mbah, Ezeano et al. 2016 : 14). Ce secteur constitue donc un secteur très important dans l’économie mondiale.
2Il existe une énorme différence entre les méthodes de production agricole des pays développés et celles des pays sous-développés. Dans les pays développés, l’agriculture pratiquée est intensive et mécanisée alors que dans les pays sous-développés elle est peu mécanisée et utilise un outillage rudimentaire. Selon les estimations de la FAO, 49 % de la population des pays sous-développés travaillent dans le secteur agricole alors que ce pourcentage s’élève à seulement 6 % dans les pays développés (Chatellier, 2009 : 1). Il existe d’énormes écarts de productivité du travail entre les agricultures manuelles, encore pratiquées aujourd’hui par de très nombreux paysans du Tiers-Monde et les agricultures moto-mécanisées des pays du Nord (Dufumier, 2007 : 616).
3L’agriculture des pays du sud étant une agriculture utilisant un outillage rudimentaire, la main-d’œuvre y occupe une place très importante. En Haïti, les agriculteurs pratiquent essentiellement une agriculture vivrière et utilisent encore pour la plupart des outils rudimentaires. Seulement 7 % des exploitations agricoles haïtiennes utilisent des matériels et équipements agricoles (MARNDR, 2010 : 57).
4En Haïti, les plaines représentent moins de 20 % de la superficie du pays (Jean, 2019 : 20) ce qui constitue une entrave à l’agriculture. Certaines contraintes sont liées au fait même que le pays pratique une agriculture de montagne. Ces contraintes de l’agriculture de montagne sont, par exemple, le manque de pistes de désenclavement, la limitation des ressources en eau, le niveau élevé des coûts de production par rapport à celui en plaine, la difficulté de mécanisation, les risques d’érosion des territoires à fortes pentes et l’isolement social et économique (Roose, 1992 : 59, 60).
5Vivant essentiellement de l’agriculture, les ruraux sont souvent démunis face au manque de productivité de la terre dans un contexte où l’appui du pouvoir central fait sévèrement défaut dans les pays du Sud (Phœbe, 2014 ; cité par Exentus, 2019 : 9). Les agriculteurs vivant dans les zones rurales sont obligés de migrer en quête de moyens de subsistance. Dans la plupart de ces pays, il existe une crise agraire qui engendre des mouvements migratoires de grande ampleur auxquels les gouvernements parviennent difficilement à s’opposer (Dufumier, 2007 : 616). On assiste notamment à une immigration de masse des régions rurales vers les régions urbaines, ce qui augmente le coût de la force de travail et parfois il devient difficile pour les agriculteurs qui peuvent payer la force de travail de trouver de la main-d’œuvre agricole disponible (Naing, Lwin et al. 2020 : 145).
6En Haïti, la faible performance de l’agriculture, conjuguée avec l’extension du secteur tertiaire et une demande de travail très faible au niveau du secteur agro-industriel, incite les agents économiques des ménages ruraux à laisser totalement ou partiellement le secteur agricole pour s’orienter vers le secteur des services (Boyer, 2010 : 3). La vente de main-d’œuvre salariée constituait autrefois une alternative de substitution à la main-d’œuvre familiale dans le milieu rural, mais, de nos jours, les salariés agricoles sont de moins en moins nombreux, en raison des conditions socio-économiques qui prévalent dans les campagnes du pays.
7Tout comme c’est le cas dans de nombreux autres pays du Tiers-Monde, la demande de main-d’œuvre agricole en Haïti tend à être plus élevée que l’offre de main-d’œuvre agricole, ce qui peut nous porter à parler de crise de la main-d’œuvre agricole dans le pays. La disponibilité de la main-d’œuvre agricole est tellement faible actuellement en Haïti qu’elle met en péril l’avenir de l’agriculture dans le pays. Dans ces conditions, il paraît opportun de mener la présente étude qui pourra fournir une piste de solution à différents acteurs tant privés que publics qui interviennent dans le secteur agricole.
8Cette étude a pour objectif de :
-
montrer que dans la commune de la Vallée de Jacmel, plusieurs contraintes majeures de la production agricole en Haïti incitent à la migration de travailleurs agricoles vers les villes et vers l’étranger ou à leur implication à temps plein dans des activités extra-agricoles ;
-
préciser l’état de crise dans la disponibilité de la main-d’œuvre agricole dans cette commune ;
-
envisager, pour la survie de l’agriculture dans cette commune la perspective de création d’une entreprise de prestation de services d’opérations culturales sur commande ;
-
faire une étude de faisabilité du projet-pilote de création de cette entreprise.
9Les données utilisées dans le cadre de cette étude ont été collectées sur le terrain, sur internet au niveau d’agences faisant la promotion de la mécanisation agricole et également au niveau d’entreprises haïtiennes et étrangères spécialisées dans la vente d’outils, de machines et d’accessoires agricoles. Tout d’abord, une enquête exploratoire exhaustive a permis de déterminer une population statistique de 1971 exploitations agricoles dans la commune de La Vallée de Jacmel. Sur l’ensemble de cette population, des données ont été collectées sur les entrées et sorties de main-d’œuvre entre 2009 et 2021, la quantité totale de main-d’œuvre utilisée et la quantité de main-d’œuvre salariée utilisée au cours de l’année 2021.
10Les tailles des exploitations agricoles étant très hétérogènes dans la zone, une typologie de la population enquêtée en fonction du critère taille de l’exploitation agricole a été faite. Ainsi, 5 types ont été constitués et dans chacun de ces types, on a constitué un échantillon pour le calcul du coût actuel moyen de la main-d’œuvre salariée pour les exploitations agricoles du type. Ces 5 types seront les 5 segments de marché qui seront considérés dans le cadre de ce travail pour l’étude de faisabilité du projet-pilote d’une entreprise de prestation de services d’opérations culturales sur commande dans la commune. Donc, tout le long de ce texte, les termes « type » et « segment » auront la même signification lorsqu’ils sont employés pour désigner des catégories d’exploitations agricoles. La méthode d’échantillonnage par quota a été utilisée. Pour ce faire, le poids de l’échantillon choisi dans chaque type ou segment d’exploitations agricoles par rapport à l’échantillon global reflète le poids de la sous-population du type dans la population totale. Chaque type constitue une sous-population et pour chaque opération culturale, les quotas sont basés sur la proportion de chaque type dans la population totale. En effet, l’échantillon total de chaque opération culturale sera constitué en prélevant dans chaque segment ou type un sous-échantillon dont la taille dépendra de la part du segment dans le marché-cible de l’opération en question.
11Les données collectées ont été traitées sur Excel. On a d’abord déterminé les flux de main-d’œuvre entre 2009 et 2021 afin de déterminer l’évolution de la disponibilité de main-d’œuvre sur l’ensemble des exploitations enquêtées. En raison du fait qu’il soit difficile pour certains répondants de préciser l’année exacte des entrées et sorties de main-d’œuvre, les flux de main-d’œuvre ont été présentés par période de temps et la disponibilité de main-d’œuvre a été déterminée pour 2009, 2015 et 2021. Ensuite, on a traité et analysé les données collectées sur la quantité de main-d’œuvre salariée utilisée, les coûts liés à l’utilisation de la main-d’œuvre salariée et les coûts des bâtiments, matériels, équipements, ressources humaines et les autres frais généraux (taxes et impôts, fournitures, frais de déplacement des employés) liés au projet futur d’entreprise pouvant contribuer à résoudre le problème de la disponibilité de main-d’œuvre et assurer la survie de l’agriculture dans la commune de la Vallée de Jacmel.
12Cette section présente les résultats obtenus à partir du traitement de l’ensemble des données collectées. Ces résultats sont présentés sous forme de tableaux et de commentaires en rapport aux objectifs de l’étude. On présente donc au niveau de cette partie les flux de main-d’œuvre par période de temps entre 2010 et 2021 sur l’ensemble des exploitations concernées par cette étude, l’évolution de la disponibilité de main-d’œuvre au niveau de l’ensemble de ces exploitations ainsi qu’une description et une analyse de rentabilité pour le projet futur d’entreprise pouvant contribuer à résoudre le problème de la disponibilité de main-d’œuvre dans la commune.
13Le tableau 1 présente les flux d’entrée et de sortie de main-d’œuvre agricole sur l’ensemble des exploitations agricoles concernées par l’étude au cours de deux périodes : celle allant de 2010 à 2015 et celle allant de 2016 à 2021. Les entrées de main-d’œuvre agricole sont constituées par les personnes qui ont commencé à travailler sur les exploitations agricoles au cours de la période concernée ainsi que celles qui sont revenues sur l’exploitation au cours de cette période et qui travaillent maintenant dans le secteur agricole. Les sorties de main-d’œuvre sont constituées par les travailleurs agricoles qui ont abandonné le secteur agricole au cours de la période en question pour migrer ou pour s’adonner à temps plein à des activités extra-agricoles ainsi que les travailleurs agricoles qui sont morts ou qui sont devenus inactifs pour cause de maladie, de handicap ou de vieillesse. Le flux net de main-d’œuvre agricole pour une période donnée est la différence entre les entrées de main-d’œuvre agricole (2e et 3e colonnes du tableau) et les sorties de main-d’œuvre agricole (4e et 5e colonnes du tableau).
Tableau 1 : Flux de main-d’œuvre agricole entre 2010 et 2021 dans la commune de la Vallée de Jacmel
Période
|
Nombre de travailleurs agricoles ayant atteint l’âge de travailler
|
Nombre de personnes revenues sur l’exploitation
|
Nombre de travailleurs agricoles ayant abandonné le secteur agricole pour migrer ou s’adonner à des activités extra-agricoles dans la zone
|
Nombre de travailleurs agricoles morts et travailleurs agricoles inactifs pour cause de maladie, de handicap ou de vieillesse
|
Flux net de main-d’œuvre (Entrées – Sorties)
|
2010 – 2015
|
224
|
4
|
505
|
139
|
-416
|
2016 – 2021
|
121
|
32
|
846
|
17
|
-710
|
Total
|
345
|
36
|
1351
|
156
|
-1126
|
Source : Enquête des auteurs, novembre 2021 – janvier 2022
14Entre 2010 et 2021, les sorties de main-d’œuvre sont largement supérieures aux entrées de main-d’œuvre. Le flux de main-d’œuvre est négatif et augmente en valeur absolue de la première à la deuxième période, ce qui montre que de plus en plus de travailleurs agricoles abandonnent le secteur agricole. Il y a donc une diminution progressive de la disponibilité de main-d’œuvre agricole dans la région et c’est principalement dû au fait que de nombreux habitants des sections communales de la commune abandonnent le secteur agricole soit pour laisser la commune ou pour pratiquer à temps plein des activités extra- agricoles.
15Jacmel, Port-au-Prince, Léogâne et la République dominicaine sont les principales destinations des travailleurs agricoles qui laissent la zone. Ceux qui laissent le secteur pour s’adonner à temps plein à des activités extra-agricoles se tournent principalement vers le secteur du transport (taxi moto) et certains métiers de la construction (maçonnerie, ébénisterie, etc.). De 2010 à 2021, le nombre de travailleurs agricoles qui laissent la commune représente 86,16 % des sorties de main-d’œuvre alors que le nombre de travailleurs agricoles qui laissent le secteur pour s’adonner à temps plein à des activités extra-agricoles dans la commune représente 13,84 % des sorties de main-d’œuvre. Ceci s’explique par le fait que l’isolement de la zone, le manque d’activités économiques et le manque d’entreprises pouvant créer des emplois limitent les options en termes d’emplois non agricoles. Les entrées de main-d’œuvre sont très faibles et sont loin de pouvoir compenser les sorties. Ceci s’explique par le fait que beaucoup de jeunes qui atteignent l’âge de travailler ne choisissent pas d’intégrer le secteur agricole.
16Le tableau ci-dessous présente l’évolution de la disponibilité de la main-d’œuvre agricole sur l’ensemble des exploitations agricoles concernées par l’étude.
Tableau 2 : Évolution de la disponibilité de la main-d’œuvre agricole sur l’ensemble des exploitations agricoles concernées par l’étude
Année
|
Nombre de travailleurs agricoles
|
Variation en %
|
2009
|
4990
|
|
2015
|
4574
|
-8,34 %
|
2021
|
3864
|
-15,52 %
|
Source : enquête des auteurs, novembre 2021 – janvier 2022
17Le nombre de travailleurs agricoles de l’ensemble des exploitations agricoles concernées par cette étude a diminué progressivement. Entre 2009 et 2021, le nombre de travailleurs agricoles dans la zone a diminué de 23,86 % dans la commune. De nombreuses contraintes de l’agriculture dans la zone ont motivé des travailleurs agricoles à laisser la zone où à abandonner le secteur agricole au profit d’activités extra-agricoles. On peut citer l’absence d’universités obligeant les jeunes à laisser la commune après leurs études classiques, les attaques phytosanitaires de certaines plantes comme les citrus et le sorgho qui constituent une menace pour l’économie de la zone depuis quelques années, la pénibilité du travail agricole avec les méthodes de production agricole pratiquées actuellement dans la zone, l’érosion, le problème de l’accès à l’eau et la mauvaise qualité des routes agricoles rendant difficile d’exploiter convenablement les terres agricoles de certaines localités.
18On assiste à une baisse de la disponibilité de la main-d’œuvre agricole dans la commune dans un contexte où les méthodes de production agricole ne se modernisent pas. Dans des situations où la main-d’œuvre familiale ne suffit pas pour la réalisation des opérations culturales, les agriculteurs font appel à des vendeurs de main-d’œuvre salariée qui font des prestations de services soit individuellement ou dans des groupes traditionnels dénommés Eskwad ou kounabè. Ces vendeurs de main-d’œuvre salariée deviennent de plus en plus rares notamment en raison de l’image jugée dégradante de cette activité et de la pénibilité du travail agricole. On trouve donc dans la commune une situation de crise dans la disponibilité de la main-d’œuvre agricole (crise de rareté) étant donné que l’offre de travail agricole tend à être inférieure à la demande de main-d’œuvre agricole.
19La crise de la main-d’œuvre agricole au niveau du pays peut provoquer une diminution de la production agricole. Actuellement, 50 % des besoins alimentaires du pays sont importés (Theodat, 2017 : 2) et nous nous trouvons dans une situation où la main-d’œuvre agricole diminue alors que le nombre de bouches à nourrir augmente, la croissance démographique étant actuellement de 1,2 % selon les données de la Banque Mondiale. Le pays a raison de s’inquiéter pour la diminution de la disponibilité de la main-d’œuvre agricole, vu que les agriculteurs qui restent dans le secteur ne sont pas vraiment en train de mécaniser leur processus de production et n’arrivent donc pas à augmenter leur productivité. Il sera très difficile de substituer des machines agricoles à la main-d’œuvre agricole sortante par des machines agricoles au sein des exploitations agricoles parce que la faible taille des exploitations agricoles et les faibles moyens d’existence ne permettent pas aux exploitations de se procurer de machines agricoles. Il devient donc très important d’explorer les possibilités d’exploitation collective des machines agricoles ainsi que les possibilités d’implantation d’entreprises de prestation de services d’opérations culturales sur commande.
20L’implémentation d’entreprises de prestation de services d’opérations culturales sur commande est l’une des pistes de solutions possibles de cette crise dans la disponibilité de la main-d’œuvre agricole dans la commune de la Vallée de Jacmel. En effet, étant très pauvres et de très petite taille, les exploitations agricoles familiales qui pratiquent l’agriculture dans la commune ne peuvent pas se payer des machines agricoles qui pourraient leur permettre d’augmenter leur productivité. En ce sens, l’entreprise de prestation de services d’opérations culturales sur commande est un moyen pour ces exploitations agricoles d’avoir accès à des machines agricoles sans avoir à en acheter grâce aux services offerts par une entreprise spécialisée.
21Cette entreprise a pour objectif de réaliser un projet-pilote pour permettre aux agriculteurs d’effectuer les opérations culturales à un coût inférieur à ce qu’ils avaient l’habitude de dépenser avant l’entreprise afin de cultiver toute leur SAU pendant au moins l’une des deux grandes campagnes de production dans une année tout en étant rentable dès la première année.
22Il importe d’étudier la faisabilité du projet-pilote de création d’une entreprise de prestation de services d’opérations culturales dans la commune de la Vallée de Jacmel comme solution de la crise de la main-d’œuvre agricole dans cette commune. Le projet-pilote de création de l’entreprise de prestation de services d’opérations culturales est faisable si elle permet aux agriculteurs de dépenser moins d’argent pour les opérations culturales tout en permettant en même temps aux travailleurs agricoles de gagner plus d’argent que ce qu’ils avaient l’habitude de gagner en vendant leur force de travail de manière informelle et aussi s’il est rentable.
23Le marché-cible de la future entreprise est l’ensemble des exploitations agricoles qui utilisent la main-d’œuvre salariée pour au moins l’une des opérations culturales au cours d’au moins l’une des deux grandes campagnes de production dans la commune. Le tableau 3 présente la répartition des exploitations agricoles par segment de marché.
Tableau 3 : Effectif du marché-cible par segment de marché
Type ou Segment
|
Description du type ou segment
|
Population totale
(Nombre d’EA)
|
I
|
0.1 ha ≤ SAU < 0.5 ha
|
276
|
II
|
0.5 ha ≤ SAU < 1.5 ha
|
780
|
III
|
1.5 ha ≤ SAU < 3 ha
|
360
|
IV
|
3 ha ≤ SAU < 4,5 ha
|
189
|
V
|
4.5 ha ≤ SAU ≤ 7,75 ha
|
65
|
Total
|
|
1670
|
SAU : surface agricole utile.
Source : Enquête des auteurs, novembre 2021 – janvier 2022
24Les exploitations agricoles ont recours à la main-d’œuvre salariée pour différentes opérations culturales. Afin de satisfaire l’ensemble des besoins du marché-cible, l’entreprise offrira différents services d’opérations. Le tableau 4 présente l’effectif du marché-cible par opération culturale dans chaque segment de marché.
Tableau 4 : Effectif (nombre d’exploitations agricoles) du marché-cible par opération culturale dans chaque segment de marché
Segment
|
Effectif Labourage
|
Effectif Hersage
|
Effectif semis/Plantation
|
Effectif désherbage
|
Effectif récolte
|
I
|
271
|
177
|
217
|
202
|
70
|
II
|
770
|
550
|
625
|
600
|
270
|
III
|
350
|
260
|
295
|
300
|
165
|
IV
|
184
|
155
|
149
|
134
|
75
|
V
|
65
|
50
|
65
|
65
|
25
|
Total
|
1640
|
1192
|
1351
|
1301
|
605
|
Source : Enquête des auteurs, novembre 2021 – janvier 2022
25Pour chaque opération culturale, la demande potentielle est la demande de cette opération (en termes de nombre d’hectares) pour les exploitations agricoles au cours d’une campagne de production. La demande potentielle d’un service d’opération culturale en hectare est donc la somme de la partie de la superficie cultivée sur laquelle les exploitations agricoles ont utilisé la main-d’œuvre salariée pour l’opération en 2021 et la superficie non cultivée en 2021. Le tableau 5 présente la demande potentielle des différentes opérations culturales.
Tableau 5 : Demande potentielle des différentes opérations culturales
Opération
|
Demande potentielle totale
(en ha)
|
Labourage
|
2313.94 ha
|
Hersage
|
1902.11 ha
|
Semis/Plantation
|
2189.84 ha
|
Désherbage
|
2058.78 ha
|
Récolte
|
1792.06 ha
|
Source : Enquête des auteurs, novembre 2021 – janvier 2022
26Le coût moyen à l’heure actuelle de la main-d’œuvre salariée par opération culturale pour les agriculteurs de la zone est la moyenne des coûts sous forme de salaires payés aux travailleurs agricoles (coûts variables) sur l’ensemble des exploitations agricoles qui pratiquent cette opération culturale.
Tableau 6 : Coût moyen à l’hectare de la main-d’œuvre salariée utilisée à l’heure actuelle pour effectuer les différentes opérations culturales
Coût moyen du labourage par hectare à l’heure actuelle
(en HTG)
|
Coût moyen du hersage par hectare à l’heure actuelle
(en HTG)
|
Coût moyen du semis par hectare à l’heure actuelle
(en HTG)
|
Coût moyen du désherbage par hectare à l’heure actuelle
(en HTG)
|
Coût moyen de la récolte par hectare à l’heure actuelle
(en HTG)
|
27 107,21
|
22 914,71
|
14 386,55
|
12 821,92
|
12 136,72
|
Source : enquête des auteurs, novembre 2021 - janvier 2022
27Pour son lancement, la future entreprise aura besoin de matériels et équipements pour effectuer les opérations culturales et également de bâtiments, matériels et employés permanents pour le fonctionnement de son administration.
28Afin de pouvoir estimer les besoins futurs de l’entreprise, on a considéré 3 alternatives de combinaison des facteurs travail et capital. On a considéré une alternative traditionnelle avec des outils simples et plus de main-d’œuvre, une alternative mécanique avec des machines et moins de main-d’œuvre et une alternative semi-mécanique avec des outils et des machines plus ou moins performants et plus ou moins de main-d’œuvre.
29Pour chacune des opérations culturales, on a d’abord confronté les différentes alternatives aux caractéristiques physiques de la zone d’étude : relief, accessibilité des parcelles, taille des parcelles. Il s’est avéré que beaucoup de terres agricoles sont très pentues, certaines parcelles ne sont pas accessibles à des tracteurs agricoles et motoculteurs à quatre roues à cause de la mauvaise qualité des routes et, comme c’est le cas pour la plupart des exploitations agricoles haïtiennes, la SAU des exploitations est constituée de plusieurs parcelles de petite taille et parfois très dispersées dans l’espace. À la lumière de ces caractéristiques, l’alternative mécanique avec des machines et peu de main-d’œuvre a été rejetée pour toutes les opérations culturales. On a ensuite considéré pour chaque opération une alternative semi-mécanique et une alternative traditionnelle pour lesquelles nous avons effectué des calculs de coûts à l’hectare et on a retenu, pour chaque opération, l’alternative qui présente le plus faible coût à l’hectare. Dans le tableau 7, nous présentons les matériels faisant partie des combinaisons de facteurs retenues pour chaque opération. Les prix des différents matériels ont été collectés en dollars américains au niveau d’entreprises chinoises spécialisées dans la vente de machines agricoles et convertis en gourdes haïtiennes au taux de change de février 2022. La détermination du nombre de matériels et équipements tient compte grosso modo de tout ce qui est dit dans cette section et, en plus, de la demande potentielle (en nombre d’hectares) et de la nécessité pour l’entreprise de réduire le coût des opérations culturales pour les exploitants agricoles, sans aucune prétention de précision rigoureuse.
Tableau 7 : Liste des besoins de la future entreprise pour les différents services d’opérations culturales
- 1 Le labourage et le hersage seront effectués par les mêmes machines agricoles, mais avec des accesso (...)
Opération
|
Matériels et équipements
|
Quantité
|
Prix unitaire
(en HTG)
|
Montant
(en HTG)
|
Labourage et Hersage1
|
Tracteur 7.5 cv à 2 roues avec une charrue à soc et une fraise rotative comme accessoires
|
100
|
79 386,90
|
7 938 690,23
|
Semis
|
Semoir manuel
|
60
|
13 231,15
|
793,869
|
Désherbage
|
Désherbeur mécanique rotatif à main
|
50
|
20 063,23
|
1 003 161,5
|
Récolte
|
Machine à couper
|
40
|
39 092,03
|
2 231 252,88
|
Machine de récolte de maïs
|
3
|
222523,892 9
|
Total
|
11 966 973,61
|
Source : enquête des auteurs, novembre 2021 – janvier 2022
30L’entreprise sera gérée à partir de trois (3) locaux dont un bureau central au niveau de Musac, première section communale de la commune de la Vallée de Jacmel et un bureau dans chacune des deux (2) autres sections communales. Le tableau 8 présente les besoins en matériels, équipements et bâtiment pour le fonctionnement de l’administration de l’entreprise. Les prix des différents matériels et équipements ont été collectés au niveau d’entreprises haïtiennes. Étant donné qu’il n’existe aucune statistique officielle sur le prix du loyer dans la commune, on a utilisé un montant forfaitaire fixé à la lumière des prix actuels du loyer dans la zone d’étude.
Tableau 8 : Liste des besoins en matériels et équipements de la future entreprise
Rubrique
|
Quantité
|
Prix unitaire
(en HTG)
|
Montant
(en HTG)
|
Table (bureau)
|
5
|
35,750
|
178,750
|
Chaises
|
12
|
2 200
|
26 400
|
Classeur métallique
|
1
|
22 000
|
22 000
|
Imprimante
|
1
|
40,250
|
40,250
|
Calculatrice
|
3
|
750
|
2,250
|
Ordinateur
|
1
|
73,450
|
73,450
|
Kit solaire 2500 watts
|
1
|
194 800
|
194 800
|
Tricycle
|
3
|
235 000
|
705 000
|
Bureau principal
|
1
|
300 000
|
300 000
|
Bureaux annexes dans les sections communales
|
2
|
100 000
|
200 000
|
Total
|
1 742 900
|
Source : enquête des auteurs, novembre 2021 - janvier 2022
31Le coût des investissements nécessaires regroupe l’ensemble des investissements nécessaires pour l’administration et les matériels et équipements nécessaires pour lancer l’entreprise et effectuer les opérations culturales ainsi que le montant de l’encaisse de départ de l’entreprise. L’encaisse de départ a été estimée de manière empirique et représente 1/12 des coûts variables totaux annuels de l’entreprise de telle sorte que l’encaisse de départ soit capable de couvrir les coûts variables du premier mois de fonctionnement de l’entreprise. Le tableau 9 présente un récapitulatif des investissements nécessaires pour lancer la future entreprise.
Tableau 9 : coûts des investissements nécessaires pour lancer la future entreprise
Désignation
|
Coût (en HTG)
|
Frais d’établissement
|
8,218
|
Investissement nécessaire pour le service de labourage et le service de hersage
|
7 938 690,23
|
Investissement nécessaire pour le service de semis
|
793,869
|
Investissement nécessaire pour le service de désherbage
|
1 003 161,5
|
Investissement nécessaire pour le service de récolte
|
2 231 252,88
|
Investissement nécessaire pour l’administration de l’entreprise
|
1 742 900
|
Encaisse de départ
|
1 685 483,15
|
Total
|
15 403 574,76
|
Source : enquête des auteurs, novembre 2021 - janvier 2022
32On ne peut pas juger de la faisabilité de la future entreprise sans analyser sa rentabilité. La future entreprise est faisable uniquement si elle peut être rentable tout en offrant tous les services d’opérations culturales à un prix inférieur à celui que les agriculteurs avaient l’habitude de payer et en permettant aux travailleurs agricoles d’avoir un revenu plus élevé que ce qu’ils gagnaient auparavant.
33Pour chacune des opérations culturales, le coût total est la somme des coûts sur tous les segments de marché. Les coûts fixes incluent l’amortissement linéaire en matériel et équipement, le salaire fixe des employés, les frais généraux (loyer, fourniture) ainsi que le coût du marketing. Les coûts variables incluent les coûts de carburant et les coûts de la main-d’œuvre directe (salaires). En ce qui concerne la durée de vie des matériels, étant donné que la plupart des fournisseurs de matériels et d’équipements n’étaient pas en mesure de préciser leur durée de vie exacte, tous les matériels et équipements ont été évalués sur la base du manuel de procédures administratives et comptables pour la gestion et la comptabilisation des immobilisations corporelles élaboré par l’Office de Management et des Ressources Humaines (OMRH) de la République d’Haïti.
34Étant donné que certains coûts fixes concernent plusieurs opérations culturales, nous avons utilisé la méthode des centres d’analyse qui consiste à arranger les coûts fixes dans des groupes homogènes appelés « centres d’analyse » avant de les imputer entre les différents services en fonction d’unités d’œuvre. Nous avons ainsi constitué les cinq (5) centres d’analyse suivants : Administration et Gestion, Tracteurs à deux roues, Matériel de Semis, Matériel de Désherbage et Matériel de Récolte. Pour l’administration, on a utilisé le volume des ventes en hectare comme unité d’œuvre. L’administration de l’entreprise sera gérée par neuf (9) employés permanents dont un directeur général, un secrétaire, un responsable de logistique, trois (3) chauffeurs de tricycle et deux responsables locaux au niveau des sections communales et un gérant. Le total des salaires de ces employés permanents dans une année s’élève à 1 530 546,80 gourdes.
35Pour les 4 autres centres d’analyse, on a utilisé le nombre d’heures de fonctionnement des matériels comme unité d’œuvre. Le tableau 10 présente les coûts fixes des différents centres d’analyse et le coût fixe par unité d’œuvre utilisé pour imputer ces coûts aux différents services.
Tableau 10 : Coûts fixes des différents centres d’analyse
Centres d’analyse
|
Unités d’œuvre
|
Nombre total d’unités d’œuvre
|
Coûts fixes annuels (amortissements ou salaires permanents)
(en HTG)
|
Coût fixe/unité d’œuvre
(en HTG)
|
Tracteurs à deux roues
|
Nombre d’heures de fonctionnement
|
187342,897 8
|
1 389 270 791
|
7 415 657 636
|
Matériels et équipements de semis
|
Nombre d’heures de fonctionnement
|
13725,133 33
|
175553,262 5
|
12,790 641 68
|
Matériels et équipements de désherbage
|
Nombre d’heures de fonctionnement
|
14598,933 33
|
138 927 075
|
9 516 248 333
|
Matériels et équipements de récolte
|
Nombre d’heures de fonctionnement
|
23894,133 33
|
390469,253 8
|
16,341 637 02
|
Administration et Gestion
|
Services d’opérations vendus en hectare
|
10 256,72
|
1 530 546,8
|
149,223 806 4
|
Total
|
|
|
3 624 767 182
|
|
Source : enquête des auteurs, novembre 2021 - janvier 2022.
36Le service de labourage de la future entreprise a un coût total de 14 726 600,75 gourdes. Le service de labourage occupe une place très importante dans la structure de coûts de la future entreprise. Il s’agit du service ayant la demande potentielle la plus élevée. Le coût total moyen à l’hectare de ce service est de 6 364,3 gourdes (14,726,600.75 gdes / 2313.94 has)
Tableau 11 : Coût total moyen du labourage pour chaque segment de marché
Segment
|
Coût Variable
(en HTG)
|
Coût fixe
(en HTG)
|
Coût Total
(en HTG)
|
I
|
552 494,03
|
46 514,27
|
599 008,31
|
II
|
3 591 648,32
|
302 379,58
|
3 894 027,90
|
III
|
3 996 888,93
|
336 496,64
|
4 333 385,57
|
IV
|
3 444 329,47
|
289 976,86
|
3 734 306,32
|
V
|
1 997 688,01
|
168 184,63
|
2 165 872,65
|
Total
|
13 583 048,77
|
1 143 551,98
|
14 726 600,75
|
Source : enquête des auteurs, novembre 2021 – janvier 2022
37Le coût total du hersage est de 7 137 047,52 gourdes et le coût total moyen à l’hectare de cette opération est de 3 752,17 gourdes (7,137,047.52 gdes / 1902.11 has). Cette opération est effectuée avec la même machine que le labourage, mais avec des accessoires différents. Le fait que le coût moyen à l’hectare du hersage soit inférieur à celui du labourage s’explique par le fait qu’avec ces types de motoculteur à deux roues, le labourage prend plus de temps que le hersage (Paman, Inaba et al., 2015 : 366).
Tableau 12 : Coût total du labourage pour chaque segment de marché
Segment
|
Coût Variable
(en HTG)
|
Coût fixe
(en HTG)
|
Coût Total
(en HTG)
|
I
|
225 703,55
|
31 531,85
|
257 235,4
|
II
|
1 485 113,32
|
207 477,3
|
1 692 590,62
|
III
|
1 848 314,88
|
258 218,26
|
2 106 533,14
|
IV
|
1 681 404,26
|
234 900,06
|
1 916 304,32
|
V
|
1 021 654,17
|
142 729,88
|
1 164 384,05
|
Total
|
6 262 190,17
|
874 857,35
|
7 137 047,52
|
Source : enquête des auteurs, novembre 2021-janvier 2022
38Le semis a un coût total de 1 834 352,14 gourdes et un coût total moyen à l’hectare de 837,99 gourdes (1,834,352.14 gdes / 2189 has). Cette opération a un coût total moyen inférieur à celui des autres opérations notamment à cause du fait qu’elle est effectuée avec des semoirs manuels ne nécessitant pas de carburant. Le tableau 13 présente le coût total du semis pour chacun des segments de marché.
Tableau 13 : Coût total du semis pour les différents segments de marché
Segment
|
Coût Variable
(en HTG)
|
Coût fixe
(en HTG)
|
Coût Total
(en HTG)
|
I
|
54 010,38
|
18 377,83
|
72 388 204
|
II
|
352 132,03
|
119 818,11
|
471 950,14
|
III
|
403 054,83
|
137 145,34
|
540 200,17
|
IV
|
352 403,06
|
119 910,33
|
472 313,39
|
V
|
207 048,82
|
70 451,41
|
277 500,23
|
Total
|
1 368 649,11
|
465 703,03
|
1 834 352,14
|
Source : enquête des auteurs, novembre 2021 – janvier 2022
39Le coût total du désherbage est de 3 208 819,9 gourdes. Cette opération sera effectuée par de petites machines à désherber (désherbeurs portés) qui permettent d’effectuer l’opération à une vitesse assez élevée pour permettre d’avoir un coût total moyen à l’hectare de 1 558,60 gourdes (3,208,819.9 gdes / 2058.78 has). Le tableau 12 présente le coût total du désherbage pour chacun des segments de marché.
Tableau 14 : Coût total du désherbage pour les différents segments de marché
Segment
|
Coût Variable
(en HTG)
|
Coût fixe
(en HTG)
|
Coût Total
(en HTG)
|
I
|
103 652,85
|
18 356,50
|
122 009,35
|
II
|
678 276,58
|
120 120,05
|
798 396,64
|
III
|
803 557,96
|
142 306,88
|
945 864,84
|
IV
|
714 550,49
|
126 544,02
|
841 094,51
|
V
|
426 009,92
|
75 444,64
|
501 454,56
|
Total
|
2 726 047,80
|
482 772,10
|
3 208 819,90
|
Source : enquête des auteurs, novembre 2021 - janvier 2022
40Le coût total de la récolte est de 4 557 748,68 gourdes et le coût total moyen à l’hectare de cette opération est de 2 543,30 gourdes (4,557,748.69 gdes / 1792.06 has). Comme c’est le cas pour toutes les autres opérations, l’essentiel du coût total de la récolte est constitué par les coûts variables. Ceci s’explique par le fait que l’entreprise utilise pour la récolte des matériels plus ou moins sophistiqués qui ne coûtent pas très cher et une quantité plus ou moins importante de travailleurs agricoles. Le tableau 15 présente le coût total de la récolte pour chacun des segments de marché.
Tableau 15 : Coût total de la récolte pour les différents segments de marché
Segment
|
Coût Variable
(en HTG)
|
Coût fixe
(en HTG)
|
Coût Total
(en HTG)
|
I
|
145 935,39
|
22 660,02
|
168 595,41
|
II
|
964 950,50
|
149 832,03
|
1 114 782,53
|
III
|
1 251 864,90
|
194 382,46
|
1 446 247,35
|
IV
|
822 370,51
|
180 031,40
|
1002401,909 9
|
V
|
714 740,63
|
110 980,87
|
825 721,50
|
Total
|
3 899 861,92
|
657 886,77
|
4 557 748,69
|
Source : enquête des auteurs, novembre 2021 – janvier 2022
41La fixation de prix de la future entreprise se fera sur la base des coûts de production. Pour déterminer les prix des différentes opérations culturales, une marge de 40 % sera ajoutée sur les coûts totaux. Les prix des différentes opérations culturales sont inscrits dans le tableau 16.
Tableau 16 : Prix à l’hectare des différentes opérations culturales
Opération
|
Coût Total moyen
(en HTG/ha)
|
Marge
|
Prix à l’hectare
(en HTG)
|
Labourage
|
6364,3
|
40 %
|
8910
|
Hersage
|
3752,17
|
40 %
|
5253
|
Semis
|
837,66
|
40 %
|
1173
|
Désherbage
|
1558,51
|
40 %
|
2182
|
Récolte
|
2543,3
|
40 %
|
3561
|
Source : enquête des auteurs, novembre 2021 - janvier 2022
42Le prix à charger à l’hectare par l’entreprise sera de 3 fois moins que le coût actuel des exploitations agricoles pour le labourage, de 4 fois moins pour le hersage, de 12 fois moins pour le semis, de 5 fois moins pour le désherbage et de 3 fois moins pour la récolte, comme le montre le tableau suivant.
Tableau 17 : Tableau de comparaison des coûts actuels à l’hectare de l’exploitation agricole et des prix à l’hectare de l’entreprise pour les différentes opérations culturales
Opération culturale
|
Coût actuel/ha de l’exploitation agricole (en HTG)
|
Prix/ha de l’entreprise (en HTG)
|
Nombre de fois Coût actuel/ha > Prix/ha de l’entreprise
|
Labourage
|
27 107,21
|
8,910
|
3 fois
|
Hersage
|
22 914,71
|
5,253
|
4 fois
|
Semis
|
14 386,55
|
1,173
|
12 fois
|
Désherbage
|
12 821,92
|
2,182
|
5 fois
|
Récolte
|
12 136,72
|
3,561
|
3 fois
|
Source : enquête des auteurs, novembre 2021 – janvier 2022
43Les recettes totales de la future entreprise sont constituées des recettes totales de tous les services d’opérations culturales sur tous les segments de marché.
Tableau 18 : Recettes totales annuelles de la future entreprise pour les différentes opérations culturales et pour chaque segment de marché
Seg.
|
Recette Totale pour le Service de Labourage
(en HTG)
|
Recette Totale pour le Service de Hersage
(en HTG)
|
Recette Totale pour le Service de Semis
(en HTG)
|
Recette Totale pour le Service de Désherbage
(en HTG)
|
Recette Totale pour le Service de Récolte
(en HTG)
|
Total
(en HTG)
|
I
|
838 611,92
|
360 127,04
|
101 366,67
|
170 809,32
|
219 802,84
|
1 690 717,79
|
II
|
5 451 640,93
|
2 369 610,34
|
660 881,39
|
1 117 730,6
|
1 453 375,02
|
11 053 238,28
|
III
|
6 066 741,88
|
2 949 125,83
|
756 453,3
|
1 324 181,53
|
1 885 515,53
|
12 982 018,07
|
IV
|
5 228 030,64
|
2 682 807,34
|
661 390,06
|
1 177 506,3
|
1 746 309,83
|
7
|
V
|
3 032 222,74
|
1 630 126,3
|
388 589,22
|
702 020,88
|
1 076 517,58
|
6 829 476,70
|
Total
|
1
|
9 991 796,84
|
2 568 680,64
|
4 492 248,61
|
6 381 520,81
|
44 051 495,02
|
Source : enquête des auteurs, novembre 2021 - janvier 2022
44Le profit de la future entreprise est la différence entre les recettes totales (chiffre d’affaires) après prélèvement de la Taxe sur le Chiffre d’Affaires (TCA) et les coûts totaux de l’entreprise. La Taxe sur le Chiffre d’Affaires est de 10 % en Haïti. Le profit est présenté dans le tableau 18.
Tableau 19 : Profit de la future entreprise sur une année
Coûts Totaux en HTG
|
Recettes Totales en HTG
|
Profit en HTG
(Recettes Totales – TCA – coûts Totaux)
|
31 464 568 997
|
44 051 495,02
|
8 181 776,52
|
Source : enquête des auteurs, novembre 2021 - janvier 2022
Tableau 20 : Taux de rendement sur investissement de la future entreprise
Coût total des investissements nécessaires pour le lancement de l’entreprise
|
Profit de la première année
|
Taux de rendement sur investissement
|
15 403 574,76
|
8 181 776,52
|
53.12 %
|
Source : enquête des auteurs, novembre 2021 - janvier 2022
45L’entreprise est rentable et permet d’avoir un taux de rendement sur investissement de 53,12 % dès la première année tout en offrant tous les services d’opérations culturales à un prix inférieur à celui que les agriculteurs avaient l’habitude de payer ; ce qui parallèlement permet aux travailleurs agricoles d’avoir un revenu plus élevé que ce que ce qu’ils gagnaient auparavant en offrant leur force de travail de manière informelle aux exploitations agricoles.
46La future entreprise présente des avantages financiers et non financiers à la fois pour les demandeurs de services et pour les travailleurs agricoles. De ce fait, la future entreprise a absolument le potentiel de favoriser la survie du secteur agricole dans la commune dans le contexte de la crise de la main-d’œuvre agricole.
47La future entreprise permettra aux demandeurs de services de dépenser moins d’argent pour les différentes opérations culturales. Pour toutes les opérations culturales, les prix chargés à l’hectare par l’entreprise seront inférieurs au coût total moyen à l’hectare de la main-d’œuvre salariée à l’heure actuelle pour les exploitations agricoles.
48La future entreprise permettra également aux travailleurs agricoles de gagner beaucoup plus d’argent que ce qu’ils avaient l’habitude de gagner en offrant leur force de travail de manière informelle dans la commune. Les travailleurs agricoles avaient l’habitude de gagner 250 gourdes pour une journée de 5 heures de travail, soit en moyenne 50 gourdes par heure. La future entreprise paiera aux travailleurs agricoles 750 gourdes par journée de 8 heures de travail, soit en moyenne 93.75 gourdes par heure. D’où une augmentation de salaire horaire de 87,5 %.
49La future entreprise présentera également des avantages non financiers. Au cours de l’enquête, les exploitations agricoles ont signalé de nombreuses contraintes liées à l’utilisation de la main-d’œuvre salariée parmi lesquelles le problème de ponctualité des travailleurs agricoles et le fait qu’il soit parfois difficile de les trouver à cause du fait que l’offre de main-d’œuvre salariée soit inférieure à la demande de main-d’œuvre salariée. L’entreprise va résoudre ces problèmes car elle permettra aux agriculteurs de placer leur commande en temps voulu et d’effectuer leurs opérations culturales à temps.
50L’entreprise va également révolutionner le statut de travailleur agricole qui était perçu auparavant comme dégradant. Grâce à la future entreprise, les travailleurs agricoles seront maintenant des contractuels travaillant pour une entité formelle et la perception même de la vente de main-d’œuvre agricole va changer avec le temps.
51Les différents risques liés au projet futur d’entreprise seront répartis en quatre (4) catégories : les risques opérationnels, les risques liés au marché, les risques liés à l’environnement et les risques de liquidité. En termes de degré d’importance, un risque pourra être faible, moyen ou élevé. Le tableau suivant présente les différents risques, leur degré d’importance et les stratégies de mitigation.
Tableau 21 : Risques de la future entreprise et stratégies de mitigation
Risques
|
Niveau
|
Stratégie de mitigation
|
Risques opérationnels
|
Difficulté d’utilisation de machines agricoles en raison du relief et de la taille et l’accessibilité des parcelles.
|
Élevé
|
L’entreprise fait le choix de motoculteurs à deux roues (power tillers) faciles à transporter et adaptés à la taille des parcelles.
|
Les travailleurs agricoles ne sont pas habitués aux machines agricoles.
|
Moyen
|
L’entreprise accordera une grande importance à la formation des travailleurs agricoles.
|
L’entreprise charge un prix à l’hectare et les superficies déclarées par les travailleurs agricoles peuvent ne pas être fiables.
|
Moyen
|
Les travailleurs agricoles seront formés sur des méthodes empiriques d’estimation de la taille de parcelles.
|
Risques liés au marché
|
Les demandeurs de services ne sont pas habitués aux machines agricoles et peuvent être réticents face à l’idée de contacter la future entreprise au cours de la première année.
|
Faible
|
L’entreprise aura un marketing de proximité grâce aux activités de sensibilisation des agents locaux de marketing.
|
Risques liés à l’environnement
|
L’utilisation de machines agricoles dans des zones de forte pente entraîne l’érosion.
|
Moyen
|
L’entreprise sensibilisera les agriculteurs sur la nécessité d’adopter des mesures de conservation de sols.
|
Risques de liquidité
|
Les coûts variables de la future entreprise sont très élevés et cela peut être à la base de rupture de fonds de roulement.
|
Élevé
|
L’entreprise prévoit une encaisse de départ qui représente 1/12 des coûts variables totaux annuels et s’assurera que les demandeurs de services payent à l’avance.
|
Source : enquête des auteurs, novembre 2021 - janvier 2022
52Cette étude nous a permis de mesurer l’ampleur de la crise de la main-d’œuvre agricole dans la commune de la Vallée de Jacmel en déterminant les flux d’entrées et de sorties de main-d’œuvre agricole entre 2010 et 2021 et en suivant l’évolution de la disponibilité de la main-d’œuvre agricole au cours de la période allant de 2009 à 2021. Cette crise de la main-d’œuvre agricole justifie la nécessité de création d’une entreprise de prestation de services d’opérations culturales sur commande dans la commune. Les résultats de l’étude montrent ce qui suit :
-
Entre 2010 et 2021, les sorties de main-d’œuvre agricole sont largement supérieures aux entrées de main-d’œuvre agricole. Le nombre de travailleurs agricoles ayant abandonné le secteur agricole de 2016 à 2021 est supérieur au nombre de travailleurs agricoles ayant abandonné le secteur de 2010 à 2015. La disponibilité de main-d’œuvre agricole au niveau des exploitations agricoles concernées par l’étude évolue de manière décroissante entre 2009 et 2021 et a connu une diminution de 23,86 %.
-
Une entreprise de prestation de services d’opérations culturales sur commande dans la commune est faisable et peut permettre aux agriculteurs de dépenser moins d’argent pour les opérations culturales tout en permettant aux travailleurs agricoles d’avoir un salaire 87,5 % plus élevé que ce qu’ils avaient l’habitude de gagner en vendant leur force de travail de manière informelle. Cette entreprise aura un taux de rendement sur investissement de 53,5 % en utilisant des machines agricoles plus ou moins performants avec plus ou moins de main-d’œuvre.
53Ne pouvant pas supporter les investissements initiaux élevés que requiert la mécanisation agricole, les entreprises de prestation de services d’opérations culturales sur commande peuvent permettre aux agriculteurs d’utiliser des machines agricoles au niveau de leurs exploitations grâce à ces entreprises spécialisées qui permettent en même temps d’améliorer la situation socio-économique des travailleurs agricoles. Les différents acteurs intervenant dans le secteur agricole doivent penser à favoriser l’émergence de telles entreprises comme piste de solution à la crise de main-d’œuvre agricole afin d’assurer la survie du secteur agricole.