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Dossier

Laure Albin Guillot, artiste et/ou publiciste

Delphine Desveaux

Résumés

Laure Albin Guillot (1879-1962) fut une photographe-publiciste productive, à la pratique multiforme : un portrait vante un produit capillaire, un nu évoque les affres du sommeil... Le remploi est omniprésent. Son travail pour le luxe et les laboratoires pharmaceutiques est particulier car elle signe ostensiblement ses publicités, faisant de son nom une marque. La combinaison du succès selon Albin Guillot : être artisan, artiste et entrepreneure. Investie par l’État français de projets de musées et d'expositions depuis 1925, elle fut une référence de son temps.

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Texte intégral

  • 1 Delphine Desveaux et Michaël Houlette dir., Laure Albin Guillot : L’enjeu classique, Paris, Jeu de (...)
  • 2 Delphine Desveaux, Laure Albin Guillot : artisane d’art de la photographie, Paris, éditions Bernard (...)

1Conservé au sein des Collections Roger-Viollet par la Bibliothèque historique de la Ville de Paris depuis 2018, le fonds Laure Albin Guillot (1879-1962) a été acquis du temps de l’agence Roger‑Viollet en 1964. Composé de quelques quatre-vingt mille phototypes, il témoigne de l’imposante activité de la photographe durant sa longue carrière (du début des années 1920 jusqu’à la fin des années 1950). Portraitiste de studio (une grande majorité du fonds est consacré aux portraits), photographe de commande, amie des arts, Laure Albin Guillot excelle dans la promotion des sujets qu’elle photographie. L’exposition « Laure Albin Guillot, L’Enjeu classique » de 2013 au Jeu de Paume et le catalogue afférent1 ainsi que l’exposition « Laure Albin Guillot, artisane d’art de la photographie » à la Maison des artistes de Nogent-sur-Marne en 20182 montraient tous les aspects de sa pratique. Elles étaient les fruits de vingt ans d’étude du fonds.

  • 3 Laure Albin Guillot, Photographie publicitaire, Paris, Gauthier-Villars, « Nouvelle Bibliothèque Ph (...)

2Premier photographe français à théoriser la photographie en 1933 dans son ouvrage paru chez Gauthier Villars3, Laure Albin Guillot œuvre dans tous les domaines de la photographie : mode, publicité, illustration, portraits… Elle s’implique également dans la promotion de la photographie voire des photographies, au point de devenir le référent du médium en France pendant les années 1930.

Laure Albin Guillot, praticienne de la photographie appliquée à la mode et à la publicité

  • 4 À partir de 1924 dans L’Officiel de la mode, en 1926 dans Femina et en 1928 dans Le Jardin des mode (...)

3Figure tutélaire et officielle de la photographie française, Laure Albin Guillot fut une ardente publiciste. Débutant pour Vogue en 1922, elle publie rapidement aussi dans Les Modes, L’Officiel de la mode, Femina et Le Jardin des modes4. Le métier consiste alors à photographier lisiblement les nouveautés portées par des mannequins, quelques célébrités ou des mondaines, en studio ou en extérieur. Les objectifs se portent sur des extérieurs sages, monuments, jardins, sculptures classiques et vitrines des maisons de couture, la presse n’étant pas encore prête pour les reportages urbains virevoltants.

  • 5 Au départ pour les marques Lewis, Patou et Chantal.
  • 6 La publication d’un projet publicitaire pour les Galeries Lafayette paru dans Photo Illustration, n (...)
  • 7 Voir Delphine Desveaux et Michaël Houlette dir., Laure Albin Guillot : L’enjeu classique, op. cit.,(...)

4Le passage de l’illustration de mode à l’annonce publicitaire s’opère dès 1924, au moment où le travail de Laure Albin Guillot figure dans les pages de Vogue réservées aux annonces. Les encarts y sont simples : nom du créateur, adresse, rarement un argumentaire, les modèles se chargeant par leur grâce d’accrocher l’œil du lecteur5. À partir de 1926, Albin Guillot illustre les couvertures des catalogues du Printemps6 : consécration commerciale associée, semble-t-il, à une liberté formelle laquelle reste toutefois dans l’air du temps, entre poésie japonisante mise en couleur7 et étude graphique intrigante (donc attirante).

  • 8 Paul Burty-Haviland (1880-1950) et Imogen Cunningham (1883-1976) sont deux artistes photographes un (...)

5Contemporaine de Paul Burty-Haviland et Imogen Cunningham8, Laure Albin Guillot désire à la fois faire œuvre et profit. Depuis 1924, elle expose en galeries et à la Société française de photographie, est membre d’associations de photographes, de la Société des Artistes Décorateurs en même temps que de l’Union des Artistes Modernes. La photographe se vit en artisan d’art. Ses tirages ornent coffrets, paravents et lampes ou servent à relier des livres. Le « circuit » est parfois court : elle expose par exemple chez Edgar Brandt, boulevard Malesherbes, valorise les ferronneries Brandt dans des publicités, possède un exemplaire de la table aux hirondelles qu’elle utilise dans de nombreuses séances de studio et photographie la fille de Brandt en robe de mariée.

  • 9 Liste exhaustive des couturiers et modistes identifiés dans les Collections Roger-Viollet : Agnès, (...)

6La mort de son époux en 1929 transforme l’artiste en devenir en entrepreneuse. Si le couple vivait en esthètes, les connaissances scientifiques du Dr Guillot s’associant à la curiosité de son épouse et à leur goût commun du beau, Laure Albin Guillot doit désormais gagner sa vie seule et son intention est de le faire avec succès. Elle quitte la rue du Ranelagh pour emménager boulevard Beauséjour, dans une grande maison xixe à laquelle elle fait accoler un studio moderne. Elle tient salon en plus d’atelier. Son salon et son jardin sont des cadres privilégiés de ses photographies de mode9.

  • 10 Tout en poursuivant la photographie de mode jusque dans les années 1950.

7À partir de 1929 et dans une veine commerciale assumée, la photographe exécute un grand nombre d’illustrations publicitaires10. Ses photographies sont pensées et construites pour inviter le public à lire une histoire courte : celle du produit. Un cosmétique reçoit un petit récit élégant (la lumière illumine le produit et son packaging, flatte le nom de la marque), concis (le produit est formidable parce que la lumière et le cadre le disent), fédérateur (comment vivre sans cette marque parfaite, cette poudre si fine, ce rouge si rouge, cette crème si réconfortante) ; un produit pharmaceutique sera défendu par le bien qu’il prodigue (une femme mimant une migraine ou un enfant pansé comme un œuf de Pâques) ou par une neutralité là encore élégante (des fleurs printanières traduisant la tranquillité suivant la prise d’une pastille Euphon).

Synthèse, n° 9, septembre 1935, p. 59, page illustrée d’une photographie de Laure Albin Guillot, remploi d’une photographie publicitaire pour tourne-disques

Synthèse, n° 9, septembre 1935, p. 59, page illustrée d’une photographie de Laure Albin Guillot, remploi d’une photographie publicitaire pour tourne-disques

© Musée Nicéphore Niépce, Ville de Chalon‑sur-Saône.

  • 11 Par exemple un portrait d’enfant par Albin Guillot figure dans L’Enfant dans la Photographie, publi (...)
  • 12 L’utilisation des ombres, fréquente chez Albin Guillot, est moins surréaliste et novatrice que cell (...)

8Il est acquis pour la photographe que le consommateur, habitué de longue date aux annonces publicitaires, sait lire ces images à la fois narratives et synthétiques11. Les ombres portées (une main se tend vers le produit, exprimant le désir12) et la qualité d’impression font beaucoup pour l’attractivité des compositions de Laure Albin Guillot qui tient à cette qualité graphique et matérielle, artisanale pourrait-on dire : lorsque la photographe publie en 1931 son opus Micrographie décorative, celui-ci est imprimé par Draeger, merveilleuse maison qui diversifie à l’envi aussi bien les supports (papiers, calques, rhodoïds, métaux…) que les procédés d’impression pour mettre chaque auteur, photographie ou image le plus en valeur possible. Les numéros annuels de Draeger, destinés aux professionnels de l’image (éditeurs, publicitaires, photographes, dessinateurs, graphistes, décorateurs, grands magasins…) et fort courus des amateurs de beaux procédés ou d’innovations, sont des exercices de maîtrise. L’artisanat et l’art de la main, toujours ; l’art de savoir montrer son produit, aussi.

Vu, n° 196, 10 décembre 1931, p. 2746, encart publicitaire pour Bénédictine illustré d’une photographie de Laure Albin Guillot

Vu, n° 196, 10 décembre 1931, p. 2746, encart publicitaire pour Bénédictine illustré d’une photographie de Laure Albin Guillot

© Musée Nicéphore Niépce, Ville de Chalon-sur-Saône.

  • 13 Les marques promues par Albin Guillot sont les suivantes : insecticide Fly-Tox, rouge Rigaud, bross (...)
  • 14 L’Art vivant, n° 154, novembre 1931.
  • 15 Le Syndicat de la Propriété artistique invite la photographe ainsi que Marcel Arthaud, René-Jacques (...)

9Pour Laure Albin Guillot, comme pour Yvonne Chevalier, André Vigneau, Pierre Boucher, André Steiner, René Zuber ou Marcel Arthaud, la publicité est un exercice photographique parmi d’autres, s’appliquant autant aux biens à vendre qu’aux services, aux entreprises ou à la religion13. L’auteure réalise d’innombrables annonces, brochures et prospectus, les signant presque tous dans le corps de l’image. Si elle n’est pas la seule à le faire, sa constance est exceptionnelle. Elle tient à être identifiée, vue, reconnue ; ses publicités font sa publicité. En novembre 1931, une photographie de flanc de voiture est ainsi publiée en couverture du numéro de L’Art vivant consacré en grande partie à l’automobile14 ; la photographe obtient que sa signature manuscrite soit reproduite dans la photographie, chose très rare pour l’époque. Pour Laure Albin Guillot, la réclame repose sur un talent inné et la reconnaissance du droit d’auteur est un dû, y compris dans le domaine de la publicité où le payeur prend traditionnellement le pas sur le créateur, celui-ci ayant pour usage, voire obligation, de s’effacer derrière le produit15.

Couverture de L’Art vivant, n° 154, novembre 1931, photographie de Laure Albin Guillot

Couverture de L’Art vivant, n° 154, novembre 1931, photographie de Laure Albin Guillot

Laure Albin Guillot, théoricienne de la photographie publicitaire

  • 16 L’ouvrage paraît certainement à l’été 1933. Il est illustré de vingt-sept photographies d’Albin Gui (...)
  • 17 Cf. compte-rendu de la causerie du 13 mars, « L’Art publicitaire photographique », Bulletin de la S (...)

10Nommée chef du service photographique des Beaux-Arts en 1932, Laure Albin Guillot assure la conservation et la diffusion des archives, passant commande aux photographes et participant aux acquisitions, sachant ici aussi reconnaître ce qui « parle » pour la postérité et la connaissance des œuvres et du territoire français. Cela n’empêche en rien la photographe de poursuivre ses réflexions sur la publicité puisqu’en 1933, elle publie Photographie publicitaire chez Gauthier-Villars16. Une conférence à la Société française de Photographie intitulée « L’Art publicitaire photographique » donnée en mars 1930 précède cette publication17. Le contenu de l’ouvrage n’est pas tant technique que psychologique et, partant, formel voire didactique.

  • 18 Laure Albin Guillot, Photographie publicitaire, op. cit., p. 10.

11L’auteure s’adresse aux annonceurs et aux métiers de la publicité en leur exposant le rôle croissant que la photographie va occuper dans le paysage publicitaire en passe de quitter complètement ou presque le dessin. Comme si l’on suivait la carrière de Laure Albin Guillot, le premier exemple proposé concerne la mode avec des propositions de pose suivant l’effet recherché ; elle restitue ses expériences, partage son savoir-faire et ses procédés, ses choix d’optiques et d’éclairage mais aussi son sens du style et des postures du mannequin. Le tout doit valoriser le produit et séduire le client car « la valeur marchande d’un objet ne peut qu’être augmentée par le luxe de son cadre d’exposition18 ».

  • 19 Marie-Emmanuelle Chessel, La Publicité, naissance d’une profession 1900-1940, Paris, CNRS Éditions, (...)
  • 20 Albert Marcellin, La Publicité et ses principes, Paris, Librairie d’Économie commerciale, 1932, p.  (...)
  • 21 L’École technique de la Publicité ouvre en 1927. Le Centre de préparation aux Affaires, inauguré en (...)
  • 22 Voir Octave-Jacques Gérin, Précis intégral de publicité, Paris, Dunod, 1926 et Albert Marcellin, La (...)

12La réclame meurt au profit de la publicité moderne19 et un nouveau microcosme se crée : annonceurs, publicistes, photographes, graphistes, décorateurs et mannequins, diffuseurs et imprimeurs sont tous au service des annonceurs, l’économie de la publicité étant circulaire. Il ne s’agit plus seulement pour les fabricants d’acheter des espaces dans les revues mais bien d’une nouvelle organisation du travail, déterminée par des objectifs financiers. Cette entreprise utilise les travaux des psychologues pour comprendre la perception et l’attention du consommateur et définir les « lois qui président à l’exercice de la pensée, des sentiments et de la volonté20 ». Chef de publicité est un métier d’avenir ; il deviendra parfois la profession de personnages de cinéma tant ces acteurs du monde moderne jouent un rôle clé dans l’économie occidentale. Leur discipline est d’ailleurs bientôt reconnue comme une branche du commerce à part entière : associations professionnelles, enseignement spécialisé21, la publicité développe ses outils analytiques et invente la « force de vente22 ».

13Laure Albin Guillot est la première photographe française à théoriser la publicité. Son ouvrage renseigne, guide, prévient, cadre. On pourrait presque dire que l’auteure indique fermement à la publicité comment (déjà) échapper à la vulgarité : comment être à la fois élégante et frappante, aimable et redoutable d’efficacité. Laure Albin Guillot est une personnalité de premier plan, à la fois artiste et référente institutionnelle. Son opus (soixante-et-une pages, bien plus long et plus riche que ce que sa forme modeste fait penser) donne des lettres de noblesse et d’intellectualisme à un domaine prospère en train de devenir florissant. Ajoutant à sa notoriété, Photographie publicitaire fait de Laure Albin Guillot une référence dans le métier, et même ‒ c’est ici une première ‒ une prescriptrice.

  • 23 Cette photographie du phare Marchal de Laure Albin Guillot est publiée dans L’Illustration en 1929 (...)
  • 24 Études trouvant écho en propagande politique, comme s’il s’agissait d’analyser les masses pour envi (...)
  • 25 Mathilde Kiener, L’Image de la photographie dans la presse publicitaire de l’entre-deux-guerres, mé (...)
  • 26 Voir à ce sujet l’exemple de la publicité pour les laines Pingouin parue dans Jardin des Modes, n°  (...)

14La photographe cadre notamment le phare automobile Trilux allumé dans une vue frontale, l’entour se trouvant de fait plongé dans une pénombre qui laisse la place à la phrase promotionnelle, manuscrite et signée Laure Albin Guillot : « Cette photo d’un ‟Trilux”, tous feux allumés, j’ai voulu la faire pour vous, Monsieur Marchal. Vous avez donné la vie à ma voiture : elle a, la nuit, des yeux d’un incomparable éclat23. » La publicité utilise alors les études psychologiques sur l’individu et ses pulsions d’achat ou d’adhésion24, lesquelles analysent davantage l’influence des mots que celle des images sur le consommateur25. Les camelots sont encore légion ; les hommes de petits métiers arpentent les rues et haranguent les habitants pour leur vendre leurs produits ou leurs services ; dans les esprits, la réclame est encore solidaire du boniment, de la parole du vendeur vers l’acheteur. La vente, même via les annonces imprimées, est directe ; on montre le produit et le slogan remplace le camelot26.

  • 27 Louis Chéronnet souhaite aussi un urgent musée de la photographie. Voir à ce sujet les numéros spéc (...)
  • 28 Laure Albin Guillot, Photographie publicitaire, op. cit., p. 5.

15En janvier 1933, Laure Albin Guillot est aussi chargée du projet d’un musée de l’enregistrement (cinémathèque, archives de la musique et de la radio27), dans un bâtiment qui serait de Mallet-Stevens. À l’occasion de campagnes pour Kodak et des postes radio, elle photographie des cinémas, flattant les ombres des salles obscures, magnifiant caméras et bobines. Le cinéma est évoqué dès cette date comme lien possible entre le public et la lecture photographique : « L’influence du cinéma est énorme : il nous a appris à traduire les images, à penser au travers d’elles, et les générations d’après-guerre en ont été marquées profondément28. »

  • 29 Travaillant souvent à partir de montages, Albin Guillot intervient peu sur ses photographies, ni gr (...)
  • 30 Laure Albin Guillot, Photographie publicitaire, op. cit., p. 8.
  • 31 Les vitrines des commerces individuels cataloguent l’en vente et les grands magasins créent le méti (...)
  • 32 « Les photos qui illustrent ce livre s’efforcent à démontrer qu’un texte ne constitue pas un élémen (...)

16La presse dispose désormais de techniques performantes d’impression des photographies, même si Laure Albin Guillot s’étonne dans son ouvrage du faible usage qui en est fait pour la publicité, arguant que le produit est plus fidèle à lui-même photographié que dessiné29 : « L’objectif, lui, voit strictement juste et l’article à vendre est montré tel qu’il est, non plus dessiné de façon approximative30. » La démonstration est imparable, la photographe se présentant comme une étalagiste qualifiée, en mesure de mettre en valeur mieux que tout autre le produit afin de tenter le client31. Le photographe sachant présenter, éclairer donc magnifier le produit, peut-être est-il même loisible de se passer du boniment pour ne lire que « l’image32 » ?

  • 33 638 numéros et 27 hors-séries de VU sont publiés. Sur les 27 hors-séries publiés entre le 1er octob (...)

17Cet environnement, qu’on n’appelle pas encore médiatique, est en pleine expansion et Photographie publicitaire participe de cette montée en puissance d’une presse illustrée qui domine la diffusion de l’information, presse à fort tirage dont les titres se multiplient au vu des profits engendrés par les ventes. Vu, lancé en mars 1928 par Lucien Vogel, reste la référence du temps. Laure Albin Guillot y publie quelques photographies dès avril 1928 et les chiffres de la publicité dans Vu confirment les dires de la photographe33. Même si pour Laure Albin Guillot, les choses traînent, la photographie remplace bel et bien le dessin dans la presse, en publicité comme ailleurs. L’époque des tycoons est toute proche, même s’il faudra attendre la fin de la Seconde Guerre mondiale pour voir exploser la publicité.

  • 34 Tristan Bernard, Les Moyens du bord, Paris, Flammarion, 1927. Le projet d’illustration de Laure Alb (...)
  • 35 Albin Guillot est une référence immédiate dans les domaines de la publicité et de l’illustration. V (...)

18Si l’envahissement de la presse par la photographie sert les finances de Laure Albin Guillot, l’artiste s’intéresse de près aux nouveautés graphiques et se documente sans cesse. Une photographie qu’elle réalise pour un projet d’illustration de l’ouvrage Les Moyens du bord34 en atteste : Albin Guillot procède à une mise en scène au sein de son propre bureau dans la bibliothèque duquel on reconnaît les séries complètes d’Arts et métiers graphiques, Gebrauchsgraphik, L’Art vivant et les albums publiés par Das Deutsche Lichtbild et la Société française de Photographie35.

Laure Albin Guillot, Projet d'illustration pour Les Moyens du bord, Paris, vers 1950

Laure Albin Guillot, Projet d'illustration pour Les Moyens du bord, Paris, vers 1950

© Collections Roger-Viollet, BHVP/Ville de Paris.

Laure Albin Guillot, créatrice au service de la photographie publicitaire

  • 36 Elle illustre la Cantate du Narcisse de Paul Valéry en 1941 chez Arta, publie avec lui Arbres chez (...)
  • 37 Laure Albin Guillot avait exposé ses portraits des artisans d’art à l’Exposition de 1925 et Paul Lé (...)

19La promotion est aussi une question de réseau et celui, élégant et ample, de Laure Albin Guillot qui travaille, visite et reçoit en continu est rentable. Très active, la photographe cumule expositions, publications et fonctions officielles ; amie entre autres des écrivains Paul Valéry36 et Marcelle Maurette, proche de l’homme d’État Paul Léon (cousin de Mallet-Stevens) et des maîtres-artisans Leleu, Ruhlman, Dufrêne ou Dunand37, elle récolte un succès impressionnant et fédère les créateurs, dont elle est, et qu’elle sait comme nul autre distinguer.

  • 38 Albin Guillot illustre les calendriers Mazda 1949 et 1952 (seuls retrouvés à ce jour) avec Ergy Lan (...)
  • 39 Léandre Vaillat, « Un concert à l’hôtel de Sagonne », L’Illustration, n° 5088, 14 septembre 1940, p (...)

20Son engagement envers les arts décoratifs, qu’il s’agisse de défendre l’artisanat ou les nouveautés38, est constant et profond. En plus de publier dans des revues spécialisées, grand public ou d’entreprise, Laure Albin Guillot couvre des événements comme l’ouverture de l’école de plein air de Beaudoin et Lods à Suresnes en 1934, avec son pavillon de classe transparent équipé de pupitres Prouvé. Elle illustre aussi des reportages comme celui de Léandre Vaillat sur l’Hôtel de Sagonne occupé par Darantière qui est publié dans L’Illustration39. Cet article se présente comme une « quintessence Albin Guillot » qui valorise à la fois l’architecture de Mansart, la musique (Fauré et la cantatrice Claire Croizat dont la photographe fit un portrait de mains extraordinaire), le métier d’imprimeur de Darantière, son goût en sa demeure pour le xviie siècle et l’investissement de l’artisan envers la diffusion. Vaillat virevolte, appariant musique et architecture, évoquant la typographie comme une « littérature fixée » et les artisans en tant qu’« aristocratie du travail » ; l’exercice de promotion est élégant mais tangible.

Laure Albin Guillot, Vœux de collaboration de la revue, Synthèse, n° 1, janvier 1936

Laure Albin Guillot, Vœux de collaboration de la revue, Synthèse, n° 1, janvier 1936

© Musée Nicéphore Niépce, Ville de Chalon-sur-Saône.

Laure Albin Guillot, Publicité pour les laboratoires Cortial, Synthèse, n° 5, mai 1935

Laure Albin Guillot, Publicité pour les laboratoires Cortial, Synthèse, n° 5, mai 1935

© Musée Nicéphore Niépce, Ville de Chalon-sur-Saône.

  • 40 Son style pour la médecine restant proche de ceux de Régis Lebrun, André Vigneau ou Marcel Arthaud.
  • 41 Art et Médecine est publié par les Laboratoires Debat, Diversion par les Laboratoires Longuet, Pro (...)
  • 42 Très présente dans la revue qui promeut les travaux publicitaires, en particulier le n° 42 dédié à (...)
  • 43 Revue mensuelle des industries d’art et de luxe, de l’habitation et des arts décoratifs modernes.

21Les collaborations de la photographe avec les magazines de mode, ses illustrations des magazines littéraires et d’actualité comme Lecture pour tous, L’Illustration, Vu et son engagement dans les revues professionnelles40 comme Synthèse, Études médicales et artistiques, La Revue du médecin, Art et Médecine41 et Arts et métiers graphiques42 voire Les Échos d’Art43 ouvrent à Laure Albin Guillot le champ des possibles et de nombreuses collaborations.

22Appréciée pour sa modernité affable, elle est un membre éminent de la photographie française de l’entre-deux-guerres et les commandes affluent : mode, lingerie, bijouterie, alcool, pharmacie, parfum, cosmétiques, électroménager, automobile, arts décoratifs, tabac, édition, finances… Peu de domaines lui échappent et les marques ou les instances qui la sollicitent sont parmi les plus représentatives du temps. On sent dans ces œuvres de commande ce qui séduit les annonceurs : un talent pour rendre sujets et objets à la fois présents et mystérieux, en un mot : attractifs. La clientèle ciblée est bourgeoise et citadine, comme la photographe dont l’esthétique épurée et polie accroche son consommateur. Certains courriers qui lui sont adressés détaillent le type d’annonce prévue et le mode de diffusion (magazines, prospectus, affichettes) ; le style reste à la discrétion de la photographe ou se trouve discuté sans qu’il ait été jugé utile de le faire par écrit. Nous ne sommes pas encore dans le benchmarking ni le briefing. Le directeur de la Société d’Étude et de Publicité M. Fauqueux lui écrit par exemple ceci en 1948 :

  • 44 Lettre datée du 14 octobre 1948 de M. Fauqueux, directeur de la Société d’Étude et de Publicité, 46 (...)

Chère Madame, je vous remets, ci-inclus, la photographie Bater et la photographie B, acceptées par le client. Il s’agit de la refaire en mettant les aiguilles sur la même graduation sur le petit et grand modèle. Vous trouverez, ci-joint, la mise en page de l’annonce pleine page pour SELECTION ; un texte au-dessus et un texte dans le bas. Le texte du dessus : en noir sur la photo, le texte du bas vient en réserve blanche sur le noir. J’espère qu’il sera possible de réaliser le document photographique cet après-midi et je donnerai au clicheur toutes les indications utiles pour l’exécution des textes. Veuillez agréer, Chère Madame, l’expression de mes sentiments les meilleurs44.

  • 45 Albin Guillot publie une seule fois dans le numéro spécial de L’Illustration consacré à l’Expositio (...)

23De Photographie publicitaire à la fin de sa carrière, Laure Albin Guillot fut un peu le « Au service de la France » photographique. Non pas du point de vue d’une politique nationaliste comme on a longtemps voulu le faire croire, mais dans la veine des écrits de ses proches que sont Jean Cocteau et Paul Valéry, convoquant le style d’une France cultivée, inventrice, amatrice de ce qu’on appelle aujourd’hui l’artisanat de luxe et soucieuse de ce que l’hygiène et la médecine peuvent offrir de confort. Ses participations aux comités de l’Exposition de photographie aux Arts décoratifs (1936), de l’Exposition internationale45 et du projet Femmes artistes d’Europe au Jeu de Paume (1937) figurent comme autant de publicités pour le médium photographique et la nation française.

  • 46 Henri Verne, Le Louvre la nuit, Grenoble, B. Arthaud, 1937.
  • 47 L’ouvrage est édité par le gouvernement français à l’occasion de la visite officielle des souverain (...)
  • 48 Secrétaire aux Beaux-Arts.
  • 49 Henri Massis et Maximilien Vox dir., Nouveaux Destins de l’intelligence française, ministère de l’I (...)
  • 50 Réalisé à compte d’auteur, imprimé par Desfossez.
  • 51 Ses travaux publicitaires et de commandes ont souvent permis à la photographe de réaliser ce à quoi (...)
  • 52 Maurice Edmond Sailland, dit Curnonsky, Cuisine et vins de France, Paris, Larousse, 1953.

24Elle illustre l’ouvrage Le Louvre la nuit46, publié en 1937, qui promeut tout autant les collections du musée que l’électrification des salles réalisée à grand frais par l’État, ainsi que le cahier d’Aspects de la France47, commandé par Georges Huisman48 et paru en juillet 1938, qui est caractéristique des commandes photographiques paysagères de l’État. Quand en 1942, Maximilien Vox remploie les photographies d’avant-guerre d’Albin Guillot et de Doisneau (entre autres) dans Nouveaux Destins de l’intelligence française49, n’est-elle pas encore une fois une « tête de gondole » photographique idéale pour exposer ce « style français » cher à Jean Cocteau en plein dévoiement pendant l’Occupation ? Splendeurs de Paris réalisé avec Maurice Garçon dès 1945 et publié à sept cents exemplaires50 redonne la main à l’auteure sur son travail51 quand l’illustration de Cuisine et Vins de France de Curnonsky52 valorise la gastronomie.

25En 1940, si Laure Albin Guillot prend sa retraite de l’État, sa production reste importante, nombre de particuliers désirant un portrait flatteur et une signature célèbre. Et d’ailleurs, son art du portrait n’est-il pas lui aussi publicitaire ? Les maisons d’édition l’utilisent pour montrer leurs auteurs sur les jaquettes et dans la presse, les comédiens pour y signer leurs dédicaces, la photographe elle-même vante son travail, en posant, à la droite d’André Gide, un de ses portraits de Paul Valéry. Cela ne fait aucun doute : plus qu’aucune autre, la carrière de Laure Albin Guillot a lié l’utile à l’agréable et le rentable à l’enjeu artistique.

Laure Albin Guillot, « André Gide rue Vanneau, Paris, vers 1935 »

Laure Albin Guillot, « André Gide rue Vanneau, Paris, vers 1935 »

© Collection particulière.

Laure Albin Guillot, « Portrait dédicacé de Françoise Rosay, vers 1935 »

Laure Albin Guillot, « Portrait dédicacé de Françoise Rosay, vers 1935 »

© Collection particulière.

L’auteur tient à remercier Sylvain Besson, directeur des collections du musée Nicéphore Niépce, autant pour les travaux de dépouillement proposés que pour l’aimable autorisation de reproduire les pages de magazines conservés au musée ; remerciements chaleureux à Aurore Caraïtoglou et Martine Tichet pour leur relecture.

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Notes

1 Delphine Desveaux et Michaël Houlette dir., Laure Albin Guillot : L’enjeu classique, Paris, Jeu de Paume/La Martinière, 2013.

2 Delphine Desveaux, Laure Albin Guillot : artisane d’art de la photographie, Paris, éditions Bernard Chauveau/Fondation nationale des arts plastiques, « La Collection du Parc », 2018.

3 Laure Albin Guillot, Photographie publicitaire, Paris, Gauthier-Villars, « Nouvelle Bibliothèque Photographique », 1933.

4 À partir de 1924 dans L’Officiel de la mode, en 1926 dans Femina et en 1928 dans Le Jardin des modes. Elle publie également dans Mieux Vivre (une seule publication retrouvée, n° 1, janvier 1937) et Rester Jeune (uniquement des publicités, dans le n° 31 d’avril 1936).

5 Au départ pour les marques Lewis, Patou et Chantal.

6 La publication d’un projet publicitaire pour les Galeries Lafayette paru dans Photo Illustration, n° 26, février 1937, consacré à l’auteure continue de démonter son importance dans le domaine, le texte l’y opposant dans sa démarche à Picasso.

7 Voir Delphine Desveaux et Michaël Houlette dir., Laure Albin Guillot : L’enjeu classique, op. cit., illustrations des pages 76 et 77 ainsi que la couverture de Laure Albin Guillot, Photographie publicitaire, op. cit.

8 Paul Burty-Haviland (1880-1950) et Imogen Cunningham (1883-1976) sont deux artistes photographes unis par nombre de leurs sujets et leur force créatrice, mais séparés par leur style.

9 Liste exhaustive des couturiers et modistes identifiés dans les Collections Roger-Viollet : Agnès, Alexandrine, Alix Maguy, Balenciaga, Balmain, Bourdeu, Bruyère, Carven, Charles Simon, Charles Montaigne, Claire Comte, Daniel Masson, Dormoy, Fanny Mauve, Fath, Fléchet, Gaston, Germaine Bouché, Germaine Lecomte, Grès, Hermès, Jean Dessès, Jeanne Lafaurie, Lanvin, Legroux, Lelong, Lucile Paray, Mad Carpentier, Marcelle Alix, Marcelle Chaumont, Marcelle Tizeau, Molyneux, O’Rossen, Paquin, Patou, Piguet, Poiret, Raphaël, Ricci, Rinocci, Rittener, Rochas, Rose-Vienne, Rouff, Schiaparelli, Stetson, Vionnet, Worth.

10 Tout en poursuivant la photographie de mode jusque dans les années 1950.

11 Par exemple un portrait d’enfant par Albin Guillot figure dans L’Enfant dans la Photographie, publié en 1949 par les établissements Jacquemaire à Villefranche-sur-Saône, fabricants de la Blédine, avec un texte de Louis Chéronnet.

12 L’utilisation des ombres, fréquente chez Albin Guillot, est moins surréaliste et novatrice que celle de Maurice Tabard.

13 Les marques promues par Albin Guillot sont les suivantes : insecticide Fly-Tox, rouge Rigaud, brosse à dents et crème Gibbs, crèmes Diadermine, Phébel, savon Roger et Gallet, chocolat Marquis, apéritif Saint-Raphaël, liqueur Bénédictine, poudre Justin Dupont, biscottes Delft, Heudebert, poudre à récurer Jako, amidon Robin, blanc Vildo, bière Slavia, beurre Sadac, cirage Lion noir, bouillon Sedobrole, tissus Rhodia, Rodier, cigarettes Balto, Gitanes-Vizir, Naja, Week-End, casquette Elina, lampes Mazda, champagne Mumm, cognacs Denis Mounié, Henessy, Martell, Martial, vin Bardinet, Calvet, lessive Titomana, lingerie Cibil, Neyret, Ornano, bas Montagut, parfums Anny Blatt, Guerlain, Houbigant, Le Galion, Lelong, Lubin, Paquin, Piver, Rambaut, Revillon, Vibert, Vigny, phare Marchal, peinture Radiose, porcelaines Bernardaud, Meissen, Saxe Sèvres, cristaux Baccarat, Daum, Lalique, Saint-Louis, bijoux Desprez, Murat, René Robert, Templier, horlogeries Atmos, Clerc, Ermeto, Jaeger-Lecoultre, Oméga, Orlam, orfèvrerie Christofle, magasins Félix Potin, vermicelle et macaroni Délices, pommade Salantale, hôtel Georges V, Petit Séminaire, Fédération des Fabricants de Tapis ; Laboratoires Albert Rolland, Bottu, Brunot, Chromine, Corbière, Cortial, Daniel‑Brunet, Deschiens, Fandre, Grémy, Guyot, Hoffmann-La Roche, La Biomarine, Lambiotte, Longuet, Marinier, Mayoli‑Spindler, Midy, Saulnier, Trouette-Perret.

14 L’Art vivant, n° 154, novembre 1931.

15 Le Syndicat de la Propriété artistique invite la photographe ainsi que Marcel Arthaud, René-Jacques et Marcel Bovis sur le sujet. Voir Musée Nicéphore Niépce, Archives Marcel Arthaud, courrier du 16 juin 1945 (celui-ci ne donne pas plus de précisions). Albin Guillot ne publie pas à notre connaissance dans la Gazette du Club de la Publicité comme nous aurions pu nous y attendre.

16 L’ouvrage paraît certainement à l’été 1933. Il est illustré de vingt-sept photographies d’Albin Guillot, d’Emmanuel Sougez, d’André Vigneau et du Studio Deberny-Peignot. Voir M. C. De Santeul, « L’Art photographique “publicitaire” », L’Informateur de la photographie (revue mensuelle industrielle professionnelle commerciale publiée sous le patronage de la Chambre syndicale des industries et du commerce photographiques), XIIIe année, n° 151, septembre 1933, p. 113-116.

17 Cf. compte-rendu de la causerie du 13 mars, « L’Art publicitaire photographique », Bulletin de la Société Française de Photographie, n° 4, avril 1930. Les plaques de projection de cette conférence sont encore aujourd’hui conservées par la SFP.

18 Laure Albin Guillot, Photographie publicitaire, op. cit., p. 10.

19 Marie-Emmanuelle Chessel, La Publicité, naissance d’une profession 1900-1940, Paris, CNRS Éditions, « Histoire contemporaine », 2002.

20 Albert Marcellin, La Publicité et ses principes, Paris, Librairie d’Économie commerciale, 1932, p. 56.

21 L’École technique de la Publicité ouvre en 1927. Le Centre de préparation aux Affaires, inauguré en 1930 à l’initiative de la Chambre de Commerce de Paris, accorde une place à la publicité dans son enseignement.

22 Voir Octave-Jacques Gérin, Précis intégral de publicité, Paris, Dunod, 1926 et Albert Marcellin, La Publicité et ses principes, op. cit.

23 Cette photographie du phare Marchal de Laure Albin Guillot est publiée dans L’Illustration en 1929 ainsi que dans VU, n° 81, numéro spécial : Le Salon de l’automobile, 2 octobre 1929, p. 790 et dans Vendre, Volume X, n° 67, juin 1929, p. 442. Voir aussi Laure Albin Guillot, « N’oublions pas notre appareil photographique », Bulletin PLM, n° 45, mars 1936. Dans ce même bulletin, Yvonne Chevalier évoque quant à elle la vitesse par le flou du paysage et non en montrant sa Terrot 350 CC. Notons qu’après ce coup de maître, la firme se repliera pendant plus de vingt ans sur l’image d’un chat noir aux yeux jaunes signée Jean Colin.

24 Études trouvant écho en propagande politique, comme s’il s’agissait d’analyser les masses pour envisager de les canaliser.

25 Mathilde Kiener, L’Image de la photographie dans la presse publicitaire de l’entre-deux-guerres, mémoire de Master 2 en histoire de l’art, Paris, École des hautes études en sciences sociales, 2007.

26 Voir à ce sujet l’exemple de la publicité pour les laines Pingouin parue dans Jardin des Modes, n° 127, 15 février 1930. Le slogan indique : « À St-Moritz, à Chamonix, les femmes dont l’élégance fait loi, portent pour le ski, de souples vêtements en Laines du Pingouin, en vente dans toutes les bonnes maisons, produites par les plus importantes usines lainières de France. Les Laines du Pingouin offrent une gamme de coloris spécialement choisie pour tous les sports ». Dans ce même numéro, sont également publiées des publicités de Laure Albin Guillot pour Patou et Lanvin.

27 Louis Chéronnet souhaite aussi un urgent musée de la photographie. Voir à ce sujet les numéros spéciaux Photographie de 1933 et 1934 de la revue Arts et métiers graphiques.

28 Laure Albin Guillot, Photographie publicitaire, op. cit., p. 5.

29 Travaillant souvent à partir de montages, Albin Guillot intervient peu sur ses photographies, ni graphiquement, ni par des retouches poussées ; elle recadre certes, joue avec les angles, à la fois comme un photographe et comme un graphiste.

30 Laure Albin Guillot, Photographie publicitaire, op. cit., p. 8.

31 Les vitrines des commerces individuels cataloguent l’en vente et les grands magasins créent le métier d’étalagiste, organisant le roulement des vitrines par saison ou arrivage avec une mise en scène dramatisée de leurs produits. Le luxe suivra, mais les années qui nous occupent sont encore à la discrétion, privilégiant la clientèle et n’offrant pas ses tentations à la rue.

32 « Les photos qui illustrent ce livre s’efforcent à démontrer qu’un texte ne constitue pas un élément publicitaire indispensable. » : Laure Albin Guillot, Photographie publicitaire, op. cit., p. 19. Laure Albin Guillot prend pour exemple son montage pour Fly-Tox qui représente une mouche envisageant un verre de lait tenu par une main d’enfant (page 35) et écrit (page 36) : « La mouche, posée au bord du verre qui, tout à l’heure effleurera vos lèvres, ne provoque‑t-elle pas un frisson de dégoût ? » Le Fly-Tox est à l’époque moins inquiétant que la mouche.

33 638 numéros et 27 hors-séries de VU sont publiés. Sur les 27 hors-séries publiés entre le 1er octobre 1933 et le 14 novembre 1936, 15 contiennent des publicités. Cela constitue un total de 448 publicités, dont 211 illustrées par au moins une photographie : 35 photomontages (Electro-Lux, Houbigant, Ovomaltine, Peugeot, Renault) ; 26 pour l’industrie photographique (Leica/Leitz, Richard, Vogtlander), 67 pour l’industrie automobile (Hotchkiss, Peugeot, Renault), 48 pour le chocolat en poudre (Banania, Marquise de Sévigné, Ovomaltine, Phoscao), 78 pour les cosmétiques (Houbigant, Kleinert, Palmolive), 32 pour le confort moderne (Electro-Lux, Power Tone, Radio LL, Sonora), 44 pour l’ameublement (L’Atelier 75, Siège Constant) et 45 pour le tourisme. Source : Sylvain Besson et François Cheval, « Numérisation et indexation de VU. La publicité, étude de cas », communication lors de la journée d’étude La Création photographique qui eut lieu sous la direction de Michel Frizot à l’EHESS à Paris le 22 mai 2012.

34 Tristan Bernard, Les Moyens du bord, Paris, Flammarion, 1927. Le projet d’illustration de Laure Albin Guillot date manifestement d’au moins la décennie suivante pour une nouvelle édition.

35 Albin Guillot est une référence immédiate dans les domaines de la publicité et de l’illustration. Voir le catalogue de l’exposition L’Art publicitaire français, qui se tient à Paris, 2 rue de l’Élysée, du 2 décembre 1949 au 10 janvier 1950 (sans éditeur). L’exposition est organisée sous le patronage du ministère de l’Éducation nationale, de la direction des Arts et Lettres, de l’Union fédérale des Syndicats d’Annonceurs, de la Fédération nationale de la Presse française et de la Fédération française de la Publicité. Elle comprend quatre sections : Les dessinateurs et décorateurs publicitaires ; Les affichistes ; Les photographes publicitaires ; Les éditeurs Publicitaires. Laure Albin Guillot est représentée dans la troisième section avec deux de ses photographies.

36 Elle illustre la Cantate du Narcisse de Paul Valéry en 1941 chez Arta, publie avec lui Arbres chez Rousseau Frères (Paris) en 1943 et Ciels, avec Marcelle Maurette, en 1944 chez Henri Colas (Bordeaux).

37 Laure Albin Guillot avait exposé ses portraits des artisans d’art à l’Exposition de 1925 et Paul Léon fut son interlocuteur privilégié à l’État dans ses fonctions officielles.

38 Albin Guillot illustre les calendriers Mazda 1949 et 1952 (seuls retrouvés à ce jour) avec Ergy Landau, Brassaï, Roger Schall, Marcelle D’Heilly, Emeric Feher…

39 Léandre Vaillat, « Un concert à l’hôtel de Sagonne », L’Illustration, n° 5088, 14 septembre 1940, p. 39 et suivantes.

40 Son style pour la médecine restant proche de ceux de Régis Lebrun, André Vigneau ou Marcel Arthaud.

41 Art et Médecine est publié par les Laboratoires Debat, Diversion par les Laboratoires Longuet, Pro Medico par Produits Lambiotte, Études médicales et artistiques par les Laboratoires Martinet et Synthèse est produit par les Éditions de la Société anonyme française d’Édition et de Publicité. Toutes les ouvertures de sections du n° 3 de Synthèse, publié en mars 1935, sont illustrées par Albin Guillot.

42 Très présente dans la revue qui promeut les travaux publicitaires, en particulier le n° 42 dédié à la publicité en 1934. Les textes de Philippe Soupault (numéro hors-série Photographie de 1931) et Louis Chéronnet (numéros hors-série Photographie de 1933 et 1934) sont des déclarations d’intention sur la photographie, sa place et ses engagements, publicité comprise, ainsi que sur la mémoire qu’il faut conserver de la photographie et des travaux réalisés.

43 Revue mensuelle des industries d’art et de luxe, de l’habitation et des arts décoratifs modernes.

44 Lettre datée du 14 octobre 1948 de M. Fauqueux, directeur de la Société d’Étude et de Publicité, 46 rue Pierre Charron, Paris. Source : Collections Roger-Viollet, archives Laure Albin Guillot, non inventorié.

45 Albin Guillot publie une seule fois dans le numéro spécial de L’Illustration consacré à l’Exposition de 1937.

46 Henri Verne, Le Louvre la nuit, Grenoble, B. Arthaud, 1937.

47 L’ouvrage est édité par le gouvernement français à l’occasion de la visite officielle des souverains britanniques à Paris du 19 au 22 juillet 1938 et publié par les éditions Georges Lang à Paris.

48 Secrétaire aux Beaux-Arts.

49 Henri Massis et Maximilien Vox dir., Nouveaux Destins de l’intelligence française, ministère de l’Information et Union bibliophile de France, Montrouge, Draeger frères, 1942.

50 Réalisé à compte d’auteur, imprimé par Desfossez.

51 Ses travaux publicitaires et de commandes ont souvent permis à la photographe de réaliser ce à quoi elle tient le plus : ses ouvrages de bibliophilie.

52 Maurice Edmond Sailland, dit Curnonsky, Cuisine et vins de France, Paris, Larousse, 1953.

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Table des illustrations

Titre Synthèse, n° 9, septembre 1935, p. 59, page illustrée d’une photographie de Laure Albin Guillot, remploi d’une photographie publicitaire pour tourne-disques
Crédits © Musée Nicéphore Niépce, Ville de Chalon‑sur-Saône.
URL http://journals.openedition.org/focales/docannexe/image/1919/img-1.jpg
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Titre Vu, n° 196, 10 décembre 1931, p. 2746, encart publicitaire pour Bénédictine illustré d’une photographie de Laure Albin Guillot
Crédits © Musée Nicéphore Niépce, Ville de Chalon-sur-Saône.
URL http://journals.openedition.org/focales/docannexe/image/1919/img-2.jpg
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Titre Couverture de L’Art vivant, n° 154, novembre 1931, photographie de Laure Albin Guillot
URL http://journals.openedition.org/focales/docannexe/image/1919/img-3.jpg
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Titre Laure Albin Guillot, Projet d'illustration pour Les Moyens du bord, Paris, vers 1950
Crédits © Collections Roger-Viollet, BHVP/Ville de Paris.
URL http://journals.openedition.org/focales/docannexe/image/1919/img-4.jpg
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Titre Laure Albin Guillot, Vœux de collaboration de la revue, Synthèse, n° 1, janvier 1936
Crédits © Musée Nicéphore Niépce, Ville de Chalon-sur-Saône.
URL http://journals.openedition.org/focales/docannexe/image/1919/img-5.jpg
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Titre Laure Albin Guillot, Publicité pour les laboratoires Cortial, Synthèse, n° 5, mai 1935
Crédits © Musée Nicéphore Niépce, Ville de Chalon-sur-Saône.
URL http://journals.openedition.org/focales/docannexe/image/1919/img-6.jpg
Fichier image/jpeg, 80k
Titre Laure Albin Guillot, « André Gide rue Vanneau, Paris, vers 1935 »
Crédits © Collection particulière.
URL http://journals.openedition.org/focales/docannexe/image/1919/img-7.jpg
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Titre Laure Albin Guillot, « Portrait dédicacé de Françoise Rosay, vers 1935 »
Crédits © Collection particulière.
URL http://journals.openedition.org/focales/docannexe/image/1919/img-8.jpg
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Pour citer cet article

Référence électronique

Delphine Desveaux, « Laure Albin Guillot, artiste et/ou publiciste »Focales [En ligne], 7 | 2023, mis en ligne le 01 juin 2023, consulté le 03 décembre 2023. URL : http://journals.openedition.org/focales/1919 ; DOI : https://doi.org/10.4000/focales.1919

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Auteur

Delphine Desveaux

Delphine Desveaux est docteur en histoire de l’art. Elle est directrice des Collections Roger‑Viollet et conservatrice à la Bibliothèque historique de la Ville de Paris. Chargée de la conservation et de la valorisation de ces collections depuis 1997, elle a été commissaire d’expositions monographiques où thématiques dont deux consacrées à Laure Albin Guillot depuis 2013 (Paris, Jeu de Paume ; Nogent-sur-Marne, Maison des Artistes). Elle écrit sur l'histoire de la photographie ainsi que sur l’histoire de l’art et ses rapports avec la littérature.

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Droits d’auteur

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