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Rome à la campagne : les décors en pierre de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (Mons, Belgique)

Rome in the countryside: The stone decorations of the Grande Boussue villa in Nouvelles (Mons, Belgium)
Catherine Coquelet, Roland Dreesen, Éric Goemaere, Éric Leblois et Marie-Thérèse Raepsaet-Charlier
p. 145-178

Résumés

La villa gallo-romaine de la Grande Boussue est située sur le versant méridional du bassin de la Haine, en province de Hainaut (Belgique). Les campagnes de fouilles successives, menées à la fin du xixe s., puis de 1964 à 1985, démontrent l’étendue et la richesse de cet établissement rural de la cité des Nerviens, distant de 16 km à peine de sa capitale, Bavay. Au cours de ces interventions, une quantité importante de roches ornementales a été recueillie. Celles-ci suggèrent la présence de revêtements d’applique en pierre dans plusieurs pièces de la villa, notamment les bains. Une grande partie appartient cependant au décor complexe d’une pièce chauffée, restée en usage jusque dans les dernières décennies du iiie s. apr. J.-C. Son caractère ostentatoire, son confort et ses dimensions conduisent à l’interpréter comme une salle de réception aménagée à l’écart des bains. Cette étude a nécessité par ailleurs une relecture approfondie des données de fouilles pour l’ensemble du site : confrontées aux chronologies appuyées par les analyses de mobilier déjà réalisées, elles permettent de proposer un schéma de développement général pour cet établissement dont la superficie, estimée au minimum à 4 ha, pourrait être nettement revue à la hausse, eu égard à son extension présumée et son statut aristocratique.

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Texte intégral

1Ces dernières années, la pierre et ses divers usages en Gaule septentrionale ont suscité beaucoup de recherches sur les territoires des Tongres, des Nerviens et des Ménapiens (Hartoch 2015 ; Reniere 2018 ; Thiébaux 2018 ; Picavet 2019). En Belgique, elles ont également alimenté la tenue d’un colloque sur la pierre ornementale en 2016 (Coquelet et al. 2018). Toutes ces études, menées par les archéologues en collaboration étroite avec les géologues, comportent un important volet relatif à la caractérisation des roches et à la recherche de leurs origines géographique et géologique (Dreesen et al. 2014). L’objectif est de restituer la circulation et les techniques de mise en œuvre des pierres afin de disposer d’une image la plus complète possible sur un vaste territoire.

  • 1 À l’exception d’une cinquantaine de fragments, actuellement en dépôt à l’Espace gallo-romain d’Ath (...)

2La collection présentée dans les lignes qui suivent occupe une place toute particulière dans les recherches menées sur l’utilisation des pierres dans le domaine de l’ornement, du fait de la richesse et de la diversité du corpus des matériaux, et des informations conservées à propos de leur contextualisation1. Celles-ci offrent – fait particulièrement rare – de nouvelles perspectives en termes de restitution des décors en pierre.

  • 2 Association sans but lucratif.

3La découverte de la villa de la Grande Boussue remonte au xixe s. Entre 1888 et 1894, Émile de la Roche de Marchiennes organise quelques fouilles sur des terres situées au lieu-dit Grande Boussue ou Petit Bavay, aux confins des villages de Nouvelles, d’Harveng et d’Asquillies, dans la province de Hainaut en Belgique (De Maeyer 1940, p. 89-90) (fig. 1). Ses travaux révèlent la présence d’une vaste villa gallo-romaine, dont les vestiges seront explorés plus largement près d’un siècle plus tard par la famille Leblois, entre 1964 et 1985. Charles Leblois et Yves Leblois, auxquels se joint entre-temps Éric Leblois, mèneront sur ce site dix-huit campagnes de fouilles qui confirmeront la richesse et l’étendue de cet établissement (Leblois, Leblois 1965 ; 1970 ; 1972 ; Herinckx 2008). Quelques relevés seront effectués ultérieurement aux abords de son corps de logis, d’abord en 1992, à l’occasion de la pose d’un gazoduc, par Recherches et prospections archéologiques en Wallonie2 (Collet et al. 2016, p. 108-110 et p. 137 : site 48), puis en 1996, lors de travaux routiers, par le Service public de Wallonie (Leblois 1996-1997 ; Willems 1996-1997) (fig. 2).

Fig. 1 – Localisation de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique)

Fig. 1 – Localisation de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique)

A, en Belgique ; B, à plus petite échelle, aux confins des localités de Nouvelles, Harveng et Asquilies ; C, au sein de la cité antique des Nerviens, par rapport aux sites archéologiques environnants ou mentionnés dans le texte.

DAO : C. Coquelet (AWaP), É. Leblois (FAW&B) ; fond de carte antique : Université catholique de Louvain-Centre de recherche d'archéologie naionale.

Fig. 2 – Localisation cadastrale des vestiges de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique), du tracé de son aqueduc et des aménagements topographiques repérés plus au nord

Fig. 2 – Localisation cadastrale des vestiges de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique), du tracé de son aqueduc et des aménagements topographiques repérés plus au nord

DAO : C. Coquelet (AWaP), É. Leblois (FAW&B).

  • 3 La plupart sont toutefois inédites.

4Le site occupe un petit plateau limoneux localisé sur le versant sud de la vallée de la Trouille, entre les deux affluents les plus importants de ce cours d’eau, à savoir le By ou ruisseau d’Asquillies, traversant le village du même nom, et la Wampe, parcourant ceux d’Harveng et de Nouvelles. En déclivité vers le nord-est, sa partie haute surplombe le paysage, offrant ainsi une vue panoramique sur plusieurs kilomètres. Le lieu est déjà fréquenté au Paléolithique et au Mésolithique, avant d’être occupé au Néolithique moyen (Desterbecq, Leblois 2019), puis au Bronze final IIb-IIIa (ca 1150 à 900 av. J.-C.) (Henton 2017, vol. 1, site 22 et passim ; 2017, vol. 2, pl. 40). Divers indices attestent ensuite la présence d’une ferme laténienne à enclos fossoyés multiples. Le plus vaste, de plan quadrangulaire, s’étire sur une longueur d’au moins 160 m et une largeur de 120 m, soit une superficie minimale de 19 200 m2, ce qui démontre l’ampleur de cette occupation (fig. 3). Plusieurs tronçons de fossés ont été explorés, révélant trois phases de comblement dont la plus ancienne peut être datée du La Tène D2b (ca 50 à 30-20 av. J.-C.). Le mobilier de cette époque – monnaies celtiques (van Heesch 1998, p. 275 ; Severs 2017, p. 43)3, amphores vinaires italiques Dressel 1B, l’une d’elles estampillée MA MA (Monsieur 2003), vaisselle en proto-terra nigra, notamment liée au service du vin (Leblois 2022), tête de bovidé à cornes bouletées (Dufrasnes et al. 2003 ; Severs 2017, p. 42-43), etc. – reflète le statut particulièrement aisé de ses habitants, qui entretiennent déjà des contacts avec le monde romain.

Fig. 3 – Le réseau fossoyé délimitant l’occupation laténienne et la fosse 69/13 de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique), riche en déchets de construction et en rapport avec la présence d’un bâtiment au moins partiellement construit en dur

Fig. 3 – Le réseau fossoyé délimitant l’occupation laténienne et la fosse 69/13 de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique), riche en déchets de construction et en rapport avec la présence d’un bâtiment au moins partiellement construit en dur

DAO : C. Coquelet (AWaP), É. Leblois (FAW&B).

5Dès la première moitié du ier s. apr. J.-C., cette occupation rurale évolue en un établissement gallo-romain dont l’organisation générale interne nous échappe encore. Toutefois, les déchets de construction (fragments de carreaux de pilettes, restes d’enduits peints, etc.) aperçus dans la fosse 69/13 située vers l’angle nord-ouest du plus vaste des enclos y suggèrent la présence d’un premier bâtiment au moins partiellement construit en dur (fig. 3). Le mobilier mis au jour dans divers tronçons de fossés révèle quant à lui deux nouvelles phases de comblement : préflavienne (Claude ?) et flavienne (ca 80-90). La proximité du chef-lieu et un accès facile à la chaussée joignant ce dernier à Cologne (Allemagne), qui passe à moins de 5 km au sud-est du site, ont certainement favorisé son développement. Il se trouve en outre à environ 600 m au sud du « Vieux Chemin de Binche à Valenciennes », probable diverticule reliant les agglomérations de Waudrez (province de Hainaut, Belgique) et Famars (Nord, France), et à 2,40 km à l’est de la chaussée de Bavay à Asse (province du Brabant flamand, Belgique), donnant accès à la vallée de la Haine, distante d’environ 9 km, et à l’agglomération de Nimy-Maisières (province de Hainaut, Belgique).

  • 4 La construction du périphérique R5 en 1996 a totalement gommé du paysage cette modification du reli (...)

6Dès la fin du ier s. ou au tout début du iie s. apr. J.-C., alors que le réseau de fossés est définitivement comblé, le site fait l’objet de travaux de nivellement conséquents. Ceux-ci s’accompagnent, vers le nord, d’un remaniement topographique destiné à prolonger son assiette d’une cinquantaine de mètres dans cette direction4. Ces travaux marquent le début d’une importante phase d’agrandissement des bâtiments, suivie immédiatement par une extension des ailes nord et sud. Un très grand corps de logis conçu en trois ailes s’ouvre vers le sud-est sur une cour d’environ 80 m de large, comme le montrent notamment les photos aériennes du site réalisées par Charles Léva (Centre interdisciplinaire de recherches aériennes, Bruxelles) en juillet 1977 (Martin 1980, p. 42-43 ; Situation 1980, p. 81 : 251 ; Léva 1985, p. 19 ; Léva 1997, p. 47). La cour agricole, aménagée en contrebas de la résidence, est rythmée par au moins cinq pavillons disposés en vis-à-vis et l’ensemble de toutes ces structures est dispersé sur un peu plus de 4 ha. Plusieurs des quelque 150 pièces composant ce corps de logis – dont à peine une cinquantaine ont été fouillées ou délimitées à ce jour – devaient être richement décorées, comme en attestent les nombreux fragments d’enduits peints, de marbres ou de mosaïques régulièrement mis au jour ou ramassés sur le site. Par ailleurs, un aqueduc long d’environ 1,50 km captait les eaux en amont du ruisseau d’Asquillies (de la Roche de Marchiennes 1892 ; Leblois, Leblois 1968, p. 70-71 et p. 77-79 ; Collet et al. 2016, p. 109-110) pour les acheminer vers un bassin localisé à l’extrémité est de l’aile sud. Les bains situés dans la partie orientale de l’aile nord, dans un secteur où la pente naturelle est assez forte, constituent sans doute l’une de ses destinations principales, mais d’autres petites conduites alimentent aussi certaines parties de l’aile sud du corps de logis. À la fin du iie s. ou au début du iiie s., cet ensemble bénéficie d’une campagne d’embellissement, dont témoignent notamment les éléments architectoniques. Une vaste couche d’épandage à l’extérieur de l’aile nord, le long de son mur gouttereau, marque cette transformation, livrant entre autres quelques ratés et ébauches de fabrication en rapport avec les décors en pierre.

  • 5 Une imitation radiée (inédite) et quatre nummi (Constantin I, Lyon, 310-311 ; Constantin I, Rome, 3 (...)
  • 6 Nous ignorons tout de la céramique sigillée décorée à la molette mentionnée par Raymond Brulet (197 (...)
  • 7 Une fibule ansée symétrique et l’ardillon d’une petite boucle (Leblois 2020, p. 34, n. 32).

7Dans le courant du dernier tiers du iiie s., l’aile sud du corps de logis subit un violent incendie, de même que le pavillon 2. Aucune trace de réaménagement postérieur à la fin du iiie s. n’a été constatée dans toutes les zones explorées, donnant l’impression que la villa est délaissée par ses habitants. À peine cinq monnaies5, seuls témoins de l’Antiquité tardive formellement connus à ce jour6, et deux artefacts en alliage cuivreux attribuables au premier Moyen Âge7 attestent une faible fréquentation des ruines antiques. À la période moderne, les vestiges seront exploités comme carrière par les habitants des villages voisins (Leblois, Leblois 1966a ; Leblois 2020, p. 34), activité facilitée par la création d’un chemin longeant les vestiges de l’aile sud, pour relier les villages d’Harveng et Asquillies. Sur la centaine de monnaies modernes et contemporaines recueillies sur le site, une seule (liard d’Albert et Isabelle, 1611-1616) a été mise au jour en contexte, dans le remblai du mur ouest du bassin de l’aqueduc. Le site est finalement mis en culture, situation restée inchangée de nos jours.

  • 8 Michel Reddé (Reddé dir. 2018, p. 162) n’hésite pas à qualifier de « véritables châteaux » les rési (...)

8Il semble donc que, dès le iie s., par son organisation générale symétrique et ses dimensions, l’établissement partage les caractéristiques de la « villa axiale à plan longitudinal » (Reddé dir. 2018, p. 155) et de « la villa gallo-romaine à pavillons multiples alignés », modèle répandu dans le nord de la Gaule (fig. 4). Bien que l’on ignore encore à peu près tout des conditions de sa naissance et des étapes de son développement, ces dimensions justifient à elles seules son classement dans la catégorie des résidences qualifiées « d’aristocratiques » (Ferdière et al. 2010). Le principal réseau de fossés repéré à la phase 1, auquel se superposent les bâtiments résidentiels de la phase 2, atteint déjà à lui seul près de 2 ha. L’évolution architecturale du corps de logis aboutit par ailleurs à un plan en U, associé à la catégorie des plus grandes villae. Son emprise au sol, estimée à 5 800 m2, concurrence largement celle des résidences de Meslin-l’Évêque (environ 3 700 m2 ; Deramaix, Dasseler 2014) et de Merbes-le-Château (2 000 m2 ; Authom, Paridaens 2015, p. 355), dans la province de Hainaut (Belgique), ou encore de Basse-Wavre (environ 3 300 m2), dans la province du Brabant wallon (Belgique)8.

Fig. 4 – Plan théorique de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique) entre le début du iie s. et le iiie s. apr. J.-C.

Fig. 4 – Plan théorique de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique) entre le début du iie s. et le iiie s. apr. J.-C.

Organisation des pavillons dans la cour agricole, selon la conception des « villae gallo-romaines à pavillons multiples alignés » et situation des différents contextes ayant livré des pierres ornementales (repris dans le tabl. II).

DAO : C. Coquelet (AWaP), É. Leblois (FAW&B).

Le corpus des pierres décoratives

9L’inventaire rassemble quelque 2 628 fragments rocheux (pour un poids de 438,931 kg), plusieurs lambeaux de mosaïques, un lot homogène d’environ 1 500 tesselles, 65 tesselles liées à une mosaïque pariétale en verre et quelques cubes isolés dans différents contextes. Dans ce corpus, 48 éléments sont façonnés dans des variétés de pierres spécifiquement employées pour des supports libres essentiellement. L’un d’entre eux porte un graffito. Tous les autres font partie, en raison de leur forme, de revêtements d’applique. Ces décors intérieurs, parmi lesquels figure une plaquette d’opus sectile gravée d’une inscription, sont destinés en très grande majorité à un emploi mural. Cent quinze à peine présentent encore au revers des traces de mortier rose.

Provenance des matériaux

10L’approvisionnement, riche d’au moins 42 variétés, est dominé par les matériaux du nord-ouest de l’Europe et complété par des pierres d’origine méditerranéenne, parmi lesquelles des marbres blancs de différents types dont la provenance doit être encore précisée (fig. 5 à 7 et tabl. I).

Tabl I – Les pierres ornementales mises en œuvre dans les décors de la villa de la Grande Boussue

Tabl I – Les pierres ornementales mises en œuvre dans les décors de la villa de la Grande Boussue

Les numéros se réfèrent à la localisation des régions d’extraction de la fig. 5.

Fig. 5 – L’approvisionnement en pierres ornementales employées dans les revêtements décoratifs de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique)

Fig. 5 – L’approvisionnement en pierres ornementales employées dans les revêtements décoratifs de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique)

Les numéros renvoient au tableau d’identification des matériaux (tabl. I). Les matériaux d’origine indéterminée ou dont la localisation ne peut être précisée davantage ne sont pas repris.

DAO : C. Coquelet (AWaP) ; fond de carte : UCL-Cran.

Fig. 6 – Les teintes des pierres ornementales employées dans les revêtements décoratifs intérieurs et extérieurs de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique)

Fig. 6 – Les teintes des pierres ornementales employées dans les revêtements décoratifs intérieurs et extérieurs de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique)

Les numéros renvoient au tableau d’identification des matériaux (tabl. I) et à la carte d’approvisionnement (fig. 5). Les marbres blancs comprennent un marbre blanc saccharoïde (no 39a), un marbre blanc grossier (no 39b), un marbre blanc bleuté (no 39c) et un marbre blanc veiné (no 39d).

Clichés et DAO : C. Coquelet (AWaP), É. Leblois (FAW&B).

Fig. 7 – La diversité des faciès dans les marbres belges

Fig. 7 – La diversité des faciès dans les marbres belges

Nos 1 à 4 : Gris des Ardennes ; nos 5 à 8 : Rouge de Rance.

Clichés et DAO : C. Coquelet (AWaP), É. Leblois (FAW&B).

  • 9 Corsi Collection of Decorative Stones, aujourd’hui conservée dans le musée d’histoire naturelle de (...)

11Vu leur nombre, la détermination de la nature des matériaux repose principalement sur l’identification macro- et mésoscopique des fragments humidifiés pour faire ressortir les contrastes chromatiques. Elle s’appuie sur les études archéométriques menées antérieurement par les auteurs sur un large territoire couvrant le nord de la Gaule, la comparaison avec les collections de référence (analogues ou digitales, telle la collection Corsi9), la connaissance de la géologie régionale et la littérature. Certaines roches ont nécessité une analyse pétrographique en lame mince, appliquée à des matériaux rarement observés dans les corpus d’autres sites déjà étudiés, ou pour lever certains doutes lorsque les critères macroscopiques discriminants étaient absents. Cette analyse destructive a fait l’objet d’un accord préalable et les lames minces ont été mises en collection au Service géologique de Belgique de l’Institut royal des sciences naturelles de Belgique.

  • 10 Sur les marbres belges, voir Coquelet et al. 2020 ; sur la pierre de Meuse, voir Dreesen et al. 202 (...)

12La diversité des pierres belges est remarquable dans ce corpus. L’Entre-Sambre-et-Meuse et, dans une moindre mesure, le Condroz procurent la majorité des variétés rencontrées10. Les matériaux les mieux représentés sont les calcaires gris bleu dévoniens et dinantiens (Carbonifère), reconnaissables par leur contenu en fossiles, dont le calcaire à Siphonodendron martini (formation de Lives, Viséen moyen). Les calcaires dévoniens affleurent au bord nord de l’Allochtone ardennais (anciennement synclinorium de Dinant). Les calcaires dinantiens affleurent dans le Parautochtone brabançon (anciennement le synclinal de Namur) et le bord nord de l’Allochtone ardennais. Ces roches sont recoupées par les affluents de la rive gauche et de la rive droite de la Meuse et de la Sambre.

13Différents calcaires marbriers figurent également parmi les variétés les plus utilisées. Ces marbres, au sens technique du terme, proviennent de petits récifs (monticules de boue ou mudmounds) de l’Entre-Sambre-et-Meuse associés notamment à la région de Philippeville et de Rance (la Calestienne, massif de Philippeville). Plusieurs portent des noms spécifiques commerciaux soit liés à leur localisation, soit à leurs couleurs ou leur contenu en fossiles. La collection recèle ainsi un grand nombre de fragments en « Gris des Ardennes ». La plupart sont de couleur grise et parcourus de veines blanches de calcite, mais ce matériau apparaît aussi sous une forme bréchique tout à fait unique (fig. 7). La calcite, sous-produit de son extraction, a elle-même été exploitée à des fins décoratives. À ces calcaires marbriers gris, parfois rouge et gris, et rouge et blanc comme le « marbre rouge de Rance », s’ajoutent des calcaires argileux foncés du type pierre de Tournai, issus de la vallée de l’Escaut, ainsi que des grès quartzitiques (quartzarénites) très clairs que l’on retrouve fréquemment en surface comme roches témoins de silicifications (silcrètes) de sables d’âge tertiaire (par ex. les grès mamelonnés).

14D’Allemagne proviennent deux roches magmatiques bien diffusées dans l’Antiquité dans la province de Germanie inférieure : le trachyte de Berkum et surtout la diabase métamorphisée de Trèves, substitut du Granito verde a erbetta égyptien.

  • 11 Sur le contexte géologique local, voir Pluquet, Vaillant 2014 (fig. 2). Dans la région de Seclin (N (...)

15Parmi les pierres françaises, trois matériaux sont spécifiquement destinés aux décors extérieurs, notamment les pierres d’Avesnes et de type Lezennes, deux variétés de craie blanche dont les affleurements se localisent dans un périmètre régional. La pierre d’Avesnes se distingue de la craie blanche (pierre de Lezennes) par la présence de nombreux grains minuscules, vert foncé à noirs, de glauconite et celle de bioturbations (taches plus grisâtres). Elle provient de différents endroits dans le bassin de l’Escaut : Avesnes-le-Sec, Hordain, Masnières, Honnecourt-sur-Escaut, Neuvilly et Valenciennes (Nord) (Dusar et al. 2009, p. 135-146). Elle était extraite à l’ouest de Bavay (Nord) ; une carrière romaine a d’ailleurs été récemment explorée sur la commune de Douchy-les-Mines (Nord), à 42 km environ de Nouvelles (Censier à paraître). Dans ce calcaire crayeux blanc ont été façonnés des supports libres découverts à Bavay, mais aussi dans l’agglomération de Famars. La pierre de Lezennes, du nom de la localité proche de la métropole lilloise, distante de quelque 65 km de Nouvelles, est en revanche ici d’un usage plus restreint11. Ces deux roches sont complétées par la pierre d’Euville, un calcaire blanc crémeux, riche en fragments de crinoïdes (entroques), extrait sur les côtes de Meuse. Appartenant au groupe des « pierres blanches » provenant de Lorraine, elle est diffusée principalement dans la cité voisine des Tongres aux iie et iiie s. apr. J.-C. (Coquelet et al. 2013 ; 2019).

  • 12 Dans les sources antiques, la provenance géographique est la manière la plus couramment utilisée po (...)
  • 13 Le Giallo antico est réputé comme l’un des marbres les plus chers d’après l’édit de Dioclétien (Lau (...)

16D’autres matériaux français colorés figurent en quantités bien moindres, comme le calcaire lithographique et le calcaire lutétien, tous deux extraits dans le bassin de Paris, la pierre de Pouillenay, originaire de Bourgogne, et le Campan, provenant des Pyrénées, dans sa variété rose principalement. Le calcaire lithographique de couleur blanc jaunâtre à beige crémeux est un calcaire à grain très fin, sans fossiles ni structures visibles à l’œil nu. En revanche, le calcaire lutétien, de la même couleur, contient de nombreuses coquilles minuscules blanches de microfossiles caractéristiques (foraminifères, milioles) bien observables à la loupe. Ces roches pourraient provenir de la vallée de l’Oise ou de la région de Reims (Fronteau et al. 2010). Les quantités conservées sont réduites, tout comme celles des variétés de pierres méditerranéennes reconnues. Les tonalités majeures parmi ces pierres sont le blanc, porté par différents types de marbres (au sens géologique : calcaires ou calcaires argileux métamorphisés), le rose violacé du Fleur de Pêcher (Fior di Pesco)12 et les variétés de vert pour le Vert antique (Verde antico). Certaines, comme le Jaune antique (Giallo antico) et l’albâtre égyptien, figurent parmi les matériaux les plus précieux du monde romain13. À l’instar de l’Africano, ils se rencontrent rarement, même dans les collections de Bavay (Coquelet et al. 2020).

Situation stratigraphique

  • 14 Près du pavillon 5, les notes de fouilles font également état de « quelques déchets de marbre blanc (...)

17À peine cinq fragments, issus d’une couche d’épandage près du pavillon 5 et du comblement d’une fosse proche du pavillon 3, témoignent de la présence de décors en pierre dans le corps de logis, dans sa forme monumentalisée de la fin du ier s. ou du début du iie s. (tabl. II). Il s’agit de plaques sciées en marbres belges (pierre de Meuse, Gris des Ardennes et Rouge de Rance) et d’un astragale en marbre blanc14.

Tabl. II – Les contextes riches en pierres décoratives de la villa de la Grande Boussue et leur périodisation chronologique

Tabl. II – Les contextes riches en pierres décoratives de la villa de la Grande Boussue et leur périodisation chronologique

* lot de 65 tesselles lithiques (Jaune antique, calcite clivée, craie blanche, marbre blanc ou blanc veiné de gris, porphyre)
** 4 tesselles isolées en pierre de Meuse
*** lot de quelque 1 500 tesselles en pierre de Meuse et de 12 tesselles en pierre de Lezennes

18La majorité des pierres décoratives issues de contextes datables se rapportent donc à l’ornementation de la villa dans la première moitié du iiie s. Leur distribution reflète la mise en œuvre d’un programme d’embellissement portant sur le portique de façade de la résidence, sur des espaces localisés dans les ailes nord et sud, mais aussi sur l’aile principale ouest, comme en témoigne la découverte d’un lot homogène de tesselles en pierre de Meuse, en passe d’être mis en œuvre dans une mosaïque.

19Les trois ensembles les plus importants sont issus de couches d’incendie et de démolition en relation directe avec des pièces de vie. Le premier (fig. 4, NOUV 64 HYP), réunissant 1 479 pièces, se trouve en rapport avec une pièce sur hypocauste au sol orné d’une mosaïque dans l’aile sud de la villa. Le deuxième (fig. 4, NOUV 71 HYP) compte seulement 30 fragments : il a été recueilli dans une petite salle chauffée de l’aile sud également, où il se trouvait associé aux débris d’une mosaïque pariétale de tesselles en verre et en pierre. Quant au dernier (fig. 4, NOUV RDM 1888-1889), rassemblant 159 fragments, il illustre les décors du secteur thermal aménagé dans l’aile nord.

  • 15 Le contexte NOUV 68 F5/F6 comprenait également quelques tesselles en pâte de verre, issues sans dou (...)

20D’autres lots proviennent de couches de comblement de caves et de fosses creusées aux abords du corps de logis. NOUV 77 DEP (fig. 4) désigne une grande couche d’épandage partiellement fouillée sur le flanc nord de l’aile nord. Ce remblai renferme quelques éléments similaires à ceux observés dans l’ensemble NOUV 64 HYP et des pierres appartenant aux décors extérieurs de la villa. La cave fouillée la même année (fig. 4, NOUV 77 CAVE) renfermait également quelques fragments se rapportant au décor extérieur du corps de logis et quelques éléments de placage mural en pierre de Meuse dont la surface a été retravaillée, peut-être lors des travaux de récupération menés à la période moderne (fig. 8). S’ajoutent enfin quelques centaines de trouvailles ponctuelles recueillies dans divers remblais dont la localisation est parfois perdue (NOUV IND), de ramassages de surface (NOUV SURF) ou hors contexte (NOUV HC)15.

Fig. 8 – Fragments de plaques en pierre de Meuse mis au jour dans la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique) portant des tracés préparatoires et des traces d’outils postérieurs à la période romaine

Fig. 8 – Fragments de plaques en pierre de Meuse mis au jour dans la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique) portant des tracés préparatoires et des traces d’outils postérieurs à la période romaine

Clichés et DAO : C. Coquelet (AWaP), É. Leblois (FAW&B).

Le décor de la pièce fouillée dans l’aile sud en 1964 (NOUV 64 HYP)

Les données de fouilles

  • 16 Les résultats de son exploration ont été publiés à deux reprises (Leblois, Leblois 1966b ; 1968). L (...)
  • 17 Le mieux préservé en comportait encore neuf et certains disposent d’une base formée d’un ou de deux (...)

21La salle mesure dans l’œuvre 6,20 m dans le sens nord-ouest – sud-est et 5,70 m dans le sens nord-est – sud-ouest16. Ses murs, montés à l’aide de moellons de grès, de blocs de craie et de rognons de silex maçonnés au mortier gris, subsistent sur une hauteur de 20 à 55 cm. Cet espace est équipé d’un système de chauffage par hypocauste dont la chambre de chaleur a été partiellement préservée (fig. 9). Le sol est formé d’un cailloutis recouvert d’une couche de mortier de chaux d’à peine 7 cm d’épaisseur, incluant des déchets de briques concassées. En surface du radier était encore visible une partie du réseau régulier des 110 pilettes soutenant la suspensura, dont 43 exemplaires ont été retrouvés in situ. Espacées de 40 cm en tous sens, celles-ci se distribuent en rangées écartées de 10 cm par rapport aux murs, sauf vers le sud-est, où les trois dernières rangées sont distantes de 30 cm seulement. Ces supports, constitués de carreaux de terre cuite de 4 à 5 cm d’épaisseur et de 20 cm de côté, sont assemblés à l’argile crue17. Les pilettes disparues se signalent quant à elles par la présence de la petite couche d’argile crue de 1 cm d’épaisseur, destinée à sceller leur base sur le radier (Leblois, Leblois 1966b, p. 808).

Fig. 9 – La pièce fouillée en 1964 dans l’aile sud de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique) en cours de dégagement

Fig. 9 – La pièce fouillée en 1964 dans l’aile sud de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique) en cours de dégagement

Cliché : Y. Leblois.

22Ce réseau régulier supporte une suspensura épaisse de 11 cm. De ses dalles de terre cuite, ont été recueillis quelques fragments dont le plus grand mesure 42 cm de côté et 7 cm d’épaisseur. Une couche de mortier gris et rose, de 4 cm d’épaisseur, appliquée sur sa surface, sert d’assise à une mosaïque. Une double pilette à 1 m environ du mur sud-ouest de l’hypocauste constitue un point de consolidation particulier de la suspensura. Cette disposition pourrait correspondre, selon l’hypothèse privilégiée par les inventeurs, à l’extrémité du canal de chauffe du praefurnium. Le rapport de fouilles fait état en effet d’un demi-carreau supplémentaire dans le prolongement de la double pilette, jouxtant une « petite couche noire » sur le radier.

  • 18 La description publiée par C. et Y. Leblois (Leblois, Leblois 1968, p. 64) est plus explicite que l (...)

23L’incendie dévastant cette partie de l’aile sud dans la seconde moitié du iiie s. a entraîné l’effondrement de la charpente dans la pièce. La découverte d’un grand nombre de clous, d’une poutre brûlée à environ 50 cm de profondeur, d’une couche de cendres et de charbon de bois et de quelques tegulae et imbrices témoigne de cet épisode destructif. La nature des déchets donne cependant des informations importantes sur l’équipement technique et décoratif de la salle. La mention récurrente de « boisseaux » suggère que les parois de la pièce étaient entièrement tubulées, ce que semble corroborer l’écartement continu des pilettes le long des murs de la chambre de chaleur. Par ailleurs, huit terres cuites architecturales doivent appartenir au couronnement de ce dispositif pariétal. Outre la mention (et la localisation approximative) de nombreuses pierres décoratives et de quatre pattes de scellement métalliques, le rapport de fouilles fait état de fragments de stucs, ainsi que de restes de torchis et de terre cuite portant des enduits de différentes couleurs (bleu, rouge et vert) : peut-être faut-il interpréter ces vestiges comme ceux d’un décor de plafond appliqué sur une couche de torchis solidaire d’un lattis de bois18.

  • 19 Le prolongement dans la chambre de chaleur est estimé à 1,40 m (soit l’équivalent de sept pilettes (...)

24L’analyse des structures et des remblais aboutit aux observations suivantes : la salle dispose d’une chambre de chaleur à pilettes de construction soignée, haute d’au moins 55 cm. Elle supporte une suspensura composée de grandes dalles en terre cuite – des bipedales si l’on se fonde sur l’entraxe des pilettes – surmontée d’une couche de mortier. Les parois de la pièce étaient entièrement tubulées pour assurer l’évacuation des fumées. La position du praefurnium reste imprécise. Aucune ouverture n’a été observée dans les murs nord, est et ouest conservés par endroits sur 55 cm de hauteur. Il serait donc logique de localiser le foyer dans le mur sud, comme le suggèrent les inventeurs, d’autant que la pièce contigüe correspond à une zone de service. L’aménagement d’un canal de chauffe dans le prolongement du foyer reste hypothétique19.

25Le scénario de destruction déduit des données de fouilles tend à montrer que la grande majorité des divers types de restes décoratifs recueillis dans cette pièce (enduits peints, stucs et revêtements en pierre muraux et de sol) provient bien de son ornementation. Ils ont été recueillis dans les couches de remblais de l’incendie, largement remuées lors de la récupération des moellons des murs au début de l’époque moderne. Le démontage des maçonneries, pratiqué jusqu’à un niveau inférieur à celui de la suspensura, a achevé la destruction des décors, dont certaines crustae ont glissé le long des parois jusque dans la chambre de chaleur de la pièce. Si à peine 13 fragments sont totalement brûlés, près de 60 autres, principalement façonnés dans le Gris des Ardennes, le Rouge de Rance et le marbre blanc, présentent aussi les signes d’une exposition au feu (décoloration, réseau de fractures).

Au sol : une mosaïque bichrome, imitation d’un opus sectile

  • 20 Plusieurs fragments, encore en place, voisinaient presque les murs de la pièce, ce qui semble exclu (...)
  • 21 Une mosaïque « F1 » non identifiée, conservée au musée de Vienne (Isère), reproduit ce même motif b (...)

26Plusieurs lambeaux d’une mosaïque ont été découverts dans l’emprise de la pièce, certains encore en connexion avec la suspensura20. Le plus grand fragment, voisinant 1 m2, gisait en place, au bord du mur nord-est (fig. 10). Il dessine une composition en tapis dont le motif principal est formé de rectangles noirs allongés rayonnant autour d’un hexagone de couleur crème, le tout sur un fond crème également. Ce schéma décoratif imite une composition en opus sectile de sol dont l’un des exemplaires les mieux conservés orne une salle de la villa d’Hadrien à Tivoli (Italie)21. Les matériaux utilisés sont ici de provenance régionale : le calcaire gris bleu mosan (pierre de Meuse, marbre noir de Namur) pour le noir et un matériau issu du bassin de Paris pour le crème.

Fig. 10 – A, la mosaïque, imitation d’un opus sectile de sol ; B, les éléments fragmentaires en rapport avec d’autres motifs, mis au jour dans la pièce fouillée en 1964 dans l’aile sud de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique)

Fig. 10 – A, la mosaïque, imitation d’un opus sectile de sol ; B, les éléments fragmentaires en rapport avec d’autres motifs, mis au jour dans la pièce fouillée en 1964 dans l’aile sud de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique)

Clichés et DAO : C. Coquelet (AWaP), É. Leblois (FAW&B).

  • 22 Bien que ce motif soit davantage utilisé en encadrement de tapis ou pour marquer un seuil.

27D’après la position des autres lambeaux en place, ce tapis occupait au moins toute la moitié nord-est de la pièce. Sur l’un de ces morceaux, le motif est interrompu par un filet marquant la transition avec une autre composition occupant le centre de la pièce ou sa partie sud-ouest. Les quelques fragments conservés indiquent plutôt un motif végétalisant animant une bordure (rinceau22, fleuron, etc.).

Sur les murs : un décor en pierre luxueux

  • 23 Parmi les 1 479 fragments de cet ensemble, seuls 46 portent au revers des traces de mortier. Hormis (...)

28Le tableau III illustre la diversité des catégories décoratives représentées, qui se prêtent par nature davantage à une mise en œuvre pariétale qu’à une pose au sol23. Les pièces moulurées, destinées à structurer la composition, puis les plaquettes d’opus sectile, les pièces sculptées et enfin les plaques qui entrent dans la conception des panneaux rythmant les différents registres seront successivement examinées.

Tabl. III – Les catégories décoratives en rapport avec la pièce sur hypocauste dans l’aile sud de la villa de la Grande Boussue (NOUV 64 HYP)

Tabl. III – Les catégories décoratives en rapport avec la pièce sur hypocauste dans l’aile sud de la villa de la Grande Boussue (NOUV 64 HYP)

Nombre de pièces complètes : 87 ; nombre de pièces à la forme restituable : 216.

Les chambranles

29Ces plaques, destinées à souligner les encadrements de baie, ont une moulure caractérisée par des doucines et une découpe biseautée pour l’assemblage des piédroits avec le linteau. Parmi les 32 fragments identifiés, 21 se rapportent à un seul et même type de chambranle de porte en pierre de Tournai, dont deux sections importantes ont été restaurées au plâtre (fig. 11). Larges de 31 cm, celles-ci ont été façonnées dans des plaques d’au moins 4 cm d’épaisseur. Trois autres pièces en pierre de Meuse appartiennent également, d’après leurs dimensions, à des encadrements similaires. La mieux conservée (287) permet d’estimer la largeur à 24 cm et l’épaisseur à 3,10 cm. Les mêmes profils, moulurés dans des plaques plus étroites et moins épaisses, servent aussi à des encadrements de baies de taille plus réduite (fenêtres ?) : les cinq pièces sculptées dans le Gris des Ardennes (de 1,10 à 1,40 cm d’épaisseur) et deux fragments en Pavonazzetto et en marbre blanc entrent dans cette catégorie. Toutes présentent au revers une surface parfaitement polie et, malgré leur épaisseur, aucune ne possède de système de fixation par crampons.

Fig. 11 – Les chambranles mis au jour dans la pièce fouillée en 1964 dans l’aile sud de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique)

Fig. 11 – Les chambranles mis au jour dans la pièce fouillée en 1964 dans l’aile sud de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique)

Clichés et DAO : C. Coquelet (AWaP), É. Leblois (FAW&B).

Les moulures de couronnement ou de base : corniches et pièces chanfreinées

  • 24 De 0,70 à 0,80 cm de diamètre et de 0,60 à 1,40 cm de profondeur.

30Cinquante-cinq fragments de corniche, de forme linéaire et de section triangulaire, se répartissent en quatre types façonnés indifféremment dans la pierre de Tournai et dans la pierre de Meuse, comme si ces deux matériaux étaient en quelque sorte interchangeables (fig. 12). La séquence la mieux représentée est un profil mesurant entre 4,50 et 5 cm de large et 5 à 7,50 cm de haut, constitué d’un quart-de-rond déprimé se prolongeant par un filet et par un quart-de-rond renversé (type 1). La plus grande pièce, pourtant incomplète, mesure plus de 85 cm de long et ne comporte aucun système d’attache (nos 948-950). Les corniches des types 2 et 3 présentent une moulure apparentée, constituée d’un filet et d’une doucine renversée, augmentée d’un quart-de-rond dans le type 2. Leurs dimensions sont également standardisées : de 4,20 à 4,40 cm de large et de 5,60 à 5,80 cm de haut pour le type 2 et à peine plus pour le type 3 (jusqu’à 4,60 cm de large et de 6 à 6,30 cm de haut). Plusieurs sont percées d’une mortaise24 destinée à accueillir un scellement métallique. Enfin, le profilé de type 4 est un élément de section triangulaire non mouluré, mais pourvu d’un talon. Ce type de pièce de facture très simple, à chanfrein, peut également servir de couronnement d’après la position des mortaises (Cormier 2007-2008, vol. 2, p. 184, fig. 40). Les faces non moulurées de tous ces éléments sont parfaitement polies. Sur certaines pièces du type 1, l’arête non visible est chanfreinée et la face arrière, légèrement en débord (jusqu’à 0,90 cm).

Fig. 12 – Les différents types de corniches mis au jour dans la pièce fouillée en 1964 dans l’aile sud de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique)

Fig. 12 – Les différents types de corniches mis au jour dans la pièce fouillée en 1964 dans l’aile sud de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique)

Clichés et DAO : C. Coquelet (AWaP), É. Leblois (FAW&B).

Les astragales et pièces chanfreinées

  • 25 La pièce no 176 pourrait correspondre à un demi-produit mis en œuvre dans le décor.

31L’astragale, plaquette étroite moulurée, sert à souligner les partitions secondaires dans les registres décoratifs (fig. 13). Les 154 fragments conservés portent un bord convexe. Ils sont tous taillés dans le marbre blanc, à l’exception de quatre exemplaires façonnés dans la pierre de Meuse et un dernier brûlé. L’histogramme des épaisseurs met en évidence trois groupes. Le premier rassemble quelques dix-huit pièces entre 1,60 et 1,90 cm. Elles ont peut-être contribué à souligner les grandes subdivisions dans les registres du décor. Les deux autres groupes rassemblent des modèles beaucoup plus minces, entre 0,80 et 1 cm (57 individus) et entre 1,10 et 1,20 cm (68 exemplaires). La présence de pièces biseautées à 45° dans ces deux ensembles indique que ces astragales servent d’encadrement à des panneaux à l’intérieur des registres. Ces éléments ne conservent aucun détail technique spécifique, leurs faces étant toutes polies avec soin ; seul varie le profil mouluré, parfois aminci. Deux autres moulures chanfreinées en marbre blanc (fig. 13, nos 176 et 177)25 semblent jouer également un rôle d’encadrement.

Fig. 13 – Les astragales et les moulures chanfreinées mis au jour dans la pièce fouillée en 1964 dans l’aile sud de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique), avec l’histogramme de leur épaisseur

Fig. 13 – Les astragales et les moulures chanfreinées mis au jour dans la pièce fouillée en 1964 dans l’aile sud de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique), avec l’histogramme de leur épaisseur

Clichés et DAO : C. Coquelet (AWaP), É. Leblois (FAW&B).

Les plaquettes d’opus sectile

32Les 462 crustae identifiées, ou « plaques de “marbre”, de formes variées, découpées à la scie » (Dubois-Pélerin 2007, p. 106), se distribuent en deux groupes selon leur degré de finition, leur épaisseur, leur forme et le type de matériau choisi. Le premier rassemble 81 pièces, en majorité taillées dans des pierres méditerranéennes. Les faces sont soigneusement polies, de même que les tranches bien souvent, parfois aussi le revers. Les bords sont droits ou chanfreinés et l’avers porte parfois un décor réalisé par incisions. Certaines mesurent à peine 0,40 cm d’épaisseur. La plupart reproduisent des formes courbes et participent de toute évidence à une (ou plusieurs) composition(s) figurative(s) végétale(s). Les 381 plaquettes du second groupe sont découpées en majorité dans des matériaux régionaux. Elles dessinent des formes géométriques simples, à savoir le rectangle, le triangle, le losange, mais aussi parfois plus complexes, comme le rectangle biseauté ou le fuseau. Le degré de finition est moins poussé que dans le groupe précédent : la face arrière n’est pas systématiquement polie et les bords sont parfois taillés grossièrement, indice sans doute de la réparation maladroite d’une composition.

Premier groupe : les crustae appartenant à des compositions figuratives

  • 26 Particularité que l’on retrouve sur les grandes feuilles d’acanthe vues de face dans les rinceaux d (...)

33Les pièces les plus remarquables sont cinq feuilles d’acanthes en Jaune antique, toutes incomplètes, épaisses de 0,60 à 1 cm (fig. 14, nos 1381 et EGR 21 à 24). Le carton restitué mesure 14,50 cm de long et 5 cm de large. Reproduit en miroir, il figure une bractée courte et large vue de profil, à trois folioles peu découpées et à l’extrémité pointue recourbée. Deux autres feuilles (nos 281 et 277), dont une acanthe mesurant environ 12 cm de long et 4 cm de large, ont été façonnées dans le marbre blanc (de Carrare [Italie] ?) à partir d’un carton divisé en plusieurs parties. Le fragment 278 se rapporte sans doute à une autre grande feuille d’acanthe comme le suggère l’incision en goutte à la surface de la pièce, de même que les pièces 141, 192 et 279 à 28326, et peut-être aussi 140, épaisses de 0,50 à 0,70 cm. Toujours dans ce matériau ont été façonnées des réglettes de formes trapézoïdales, ornées d’incisions en S (nos 270 à 276). Elles sont à rapprocher d’un unique exemplaire sculpté dans un autre type de marbre (Cipollino ?) (no 1387). Le carton original est une barrette biseautée aux deux extrémités, longue de 15 cm et large de 1,20 à 2,20 cm, de 0,40 à 1,20 cm d’épaisseur. D’autres pièces évoquent l’extrémité recourbée d’un pédoncule, donnant naissance à une fleur (no 154), un bourgeon (no 39) et un pétale (no 81 ?), un élément de raccord pour une fleur (?) (no 145) et de petites baguettes arrondies (no 130 et la pièce brûlée no 143), terminaisons de tiges volubiles.

Fig. 14 – Les crustae en marbre blanc, Rouge antique et Jaune antique, appartenant à des compositions figuratives, mises au jour dans la pièce fouillée en 1964 dans l’aile sud de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique)

Fig. 14 – Les crustae en marbre blanc, Rouge antique et Jaune antique, appartenant à des compositions figuratives, mises au jour dans la pièce fouillée en 1964 dans l’aile sud de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique)

Clichés et DAO : C. Coquelet (AWaP), É. Leblois (FAW&B).

  • 27 Le plus grand exemplaire complet mesure 12 cm de long et deux autres 10,60 cm.

34Dans le Rouge antique sont fabriqués d’autres éléments organiques, comme le cœur d’une fleur épanouie où se devine le carpelle encadré d’étamines (no EGR 26-1) et un calice trilobé et parcouru de sillons en C, élément de raccord entre une feuille, une fleur et/ou une tige, avec une autre tige (no EGR 26-2). La tranche de ces pièces est chanfreinée, tout comme celle des petites baguettes courbes (tiges ?) façonnées dans ce même matériau (nos 98 et 219). La pièce 123 évoque un sépale dont le pendant symétrique n’est pas conservé et la 105, un pétale secondaire comme l’on en trouve intercalé dans la couronne principale des rosettes. Le corpus compte la base au bord concave d’un autre pétale (no 104), également 6 feuilles lancéolées (ou pétales ?) (nos 114, 116, 124, 126, 1392 et 1404)27 et 19 pièces complètes et fragmentaires dont la forme se rapproche davantage d’une feuille (fig. 15). L’épaisseur de tous ces éléments varie entre 0,50 et 1,20 cm.

Fig. 15 – Les feuilles en Rouge antique mises au jour dans la pièce fouillée en 1964 dans l’aile sud de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique)

Fig. 15 – Les feuilles en Rouge antique mises au jour dans la pièce fouillée en 1964 dans l’aile sud de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique)

Clichés et DAO : C. Coquelet (AWaP), É. Leblois (FAW&B).

35Quelques pièces façonnées dans d’autres matériaux méditerranéens appartiennent également à un répertoire naturaliste (fig. 16). Dans le Fleur de Pêcher, deux grandes feuilles ou pétales lancéolés de 16 cm (nos 61 et EGR 25) dont la forme s’accorde avec trois autres pièces incomplètes, l’une en Fleur de Pêcher également (no 1971 : découpée dans un ancien chambranle ?), la deuxième brûlée (no 218), l’autre dans un calcaire à bioclastes non déterminé, mais d’origine méditerranéenne (no 208). Dans la brèche coralline, subsistent la base d’un pétale ou d’une feuille (no 79), ainsi qu’un autre pétale pratiquement complet (no 53) et un dernier élément de forme irrégulière (no 52). Quelques crustae en pierres régionales présentent une découpe complexe : signalons un petit pétale 266 et l’extrémité d’une feuille (?) (no EGR 28), tous deux en Gris des Ardennes, et un unique fer de lance en diabase de Trèves (no 179). Enfin, une série d’éléments d’épaisseur bien supérieure, entre 1,20 et 1,70 cm, ont été découpés dans le marbre rouge de Rance, uniquement dans les surfaces blanches ou beiges de cette pierre, qui correspondent à des colonies de coraux rugueux (fig. 17).

Fig. 16 – Les autres crustae figuratives en pierres méditerranéennes, en diabase (no 179) et en Gris des Ardennes (nos EGR 28 et 266), mises au jour dans la pièce fouillée en 1964 dans l’aile sud de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique)

Fig. 16 – Les autres crustae figuratives en pierres méditerranéennes, en diabase (no 179) et en Gris des Ardennes (nos EGR 28 et 266), mises au jour dans la pièce fouillée en 1964 dans l’aile sud de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique)

Clichés et DAO : C. Coquelet (AWaP), É. Leblois (FAW&B).

Fig. 17 – Les crustae découpées dans les surfaces blanches ou beiges du marbre rouge de Rance mises au jour dans la pièce fouillée en 1964 dans l’aile sud de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique)

Fig. 17 – Les crustae découpées dans les surfaces blanches ou beiges du marbre rouge de Rance mises au jour dans la pièce fouillée en 1964 dans l’aile sud de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique)

Clichés et DAO : C. Coquelet (AWaP), É. Leblois (FAW&B).

Les schémas décoratifs
  • 28 L’interrasum marmor est une technique décorative visant à creuser la surface de plaques de marbre a (...)
  • 29 Un constat similaire a été dressé dans le cadre de la restitution de revêtements muraux dans la vil (...)

36Les pièces en Jaune antique, en marbre blanc et les éléments organiques en Rouge antique appartiennent à un ensemble technologiquement homogène. En dépit de la finesse de certaines pièces, amincies jusqu’à 0,40 cm, et de la finition chanfreinée des bords de certaines plaquettes en Rouge antique, nous écartons a priori l’hypothèse d’un assemblage selon la technique de l’interrasum marmor28, car ces dernières caractéristiques ne s’appliquent qu’à une petite partie des différents motifs29.

  • 30 Les matériaux pour les éléments végétaux sont le Jaune antique (Giallo antico) et le Palombino pour (...)
  • 31 Autres exemples : dans le mausolée impérial à Milan (Italie) élevé vers le milieu du ive s. (Neri e (...)

37Quelques compositions végétales sont exceptionnellement bien conservées en Italie, en particulier une frise de rinceau provenant de la Domus Aurea de Néron élevée sur le Palatin à Rome et surtout les décors provenant d’une salle d’une domus ou villa suburbaine édifiée à la fin du ive s. près de la Porta Marina à Ostie (Italie) (Becatti 1969 ; Guidobaldi 2000). Cette pièce, mesurant 6,60 m de large et 7,45 m de long, pourvue d’une exèdre rectangulaire, était en cours de travaux. Sa fouille a livré les restes d’un décor mural inachevé dans l’espace principal, effondré en même temps que le plafond (constitué d’une mosaïque en pâte de verre dans l’exèdre), sans doute au cours d’un tremblement de terre. Exceptionnellement bien conservé, il a pu être reconstitué sur une partie de sa hauteur (fig. 18). Les frises de rinceau, composées à partir des pierres de mêmes teintes (blanc, jaune et rouge sur un fond de porphyre vert) ornent le registre supérieur des murs latéraux, mais aussi le fût de deux pilastres d’applique, dont les chapiteaux végétalisés sont également conçus en opus sectile30. Toujours à Rome, la Domus Transitoria et la Domus delle Sette Sale, sur la colline de l’Oppius, ont livré un nombre conséquent de crustae similaires (De Nuccio, Ungaro 2002 ; Fusco 2014, p. 56, fig. 36). La mise en œuvre de tels motifs en interrasum marmor est également attestée pour un groupe de chapiteaux de pilastre découverts lors des fouilles des Horti Lamiani créés par Caligula sur l’Esquilin31.

Fig. 18 – Le revêtement pariétal de la salle découverte dans la domus de la Porta Marina, exposé au Museo Nazionale dell’Alto Medioevo à Rome (Italie)

Fig. 18 – Le revêtement pariétal de la salle découverte dans la domus de la Porta Marina, exposé au Museo Nazionale dell’Alto Medioevo à Rome (Italie)

Cliché : C. Coquelet (AWaP).

  • 32 Voir également les fouilles du nymphée de Punta dell’Epitaffio à Baiae, près de Naples (Italie) (Cu (...)

38Dans le sud et dans le centre de la Gaule, les collections de pièces évoquant le règne végétal sont peu nombreuses : dans la villa de Chiragan, aux Martres-Tolosane, en Haute-Garonne (Boube 2011), mais aussi dans la villa de Crépan, à Prusly-sur-Ource, en Côte-d’Or (Paris 1972), dans la maison des Nones de Mars à Limoges, en Haute-Vienne (Vipard et al. 2007, p. 253 ; Loustaud 2020), et dans la villa de Châtigny à Fondettes, en Indre-et-Loire (Blanchet 1909, p. 61). Dans le nord enfin, les quelques crustae mises en œuvre dans une pièce de la domus des iie-iiie s. apr. J.-C. précédant la basilique Notre-Dame à Tongres (province du Limbourg, Belgique) (Groetembril et al. 2017) constituent l’exemple le plus proche de la villa de Nouvelles. Ce type de décor entre également à Trèves (Allemagne), dans le luxueux revêtement mural du ive s. apr. J.-C. de la basilique (Ruppiené 2021), dans celui du « Quadratbau », monument de la seconde moitié du ive s., lié à l’église paléochrétienne (aujourd’hui cathédrale), ainsi que dans celui du complexe palatial tout proche, le Palatiolum de Pfalzel, dans la seconde moitié du ive s. apr. J.-C. également (Deppmeyer et al. 2021). Certains éléments peuvent donc intégrer, à l’image des exemples cités précédemment, la composition d’un rinceau voluté, ponctué de fleurs et de boutons floraux, façonné essentiellement dans le marbre blanc (fig. 19). La cambrure des feuilles d’acanthe en Jaune antique se prête plus difficilement à la courbure régulière d’un rinceau, mais elles pourraient très bien faire partie d’un bouquet matérialisant la base d’un culot d’acanthes. Par ailleurs, dans les exemples de rinceaux conservés, le rouge n’intervient que par petites touches : les feuilles en Rouge antique de la collection de Nouvelles participent donc peut-être à un autre type de composition végétalisante, comme une frise de feuilles alternes (Fusco 2014, p. 56, fig. 36). Les baguettes gravées en S, motif évoquant une torsade, se rencontrent par ailleurs dans les villae de Crépan et de Chiragan (Boube 2011, p. 477, fig. 10)32. Dans cette dernière, elles ont une forme rectangulaire et sont interprétées comme des éléments de frise.

Fig. 19 – Les crustae figuratives au regard du motif de rinceau de la Porta Marina à Ostie (Italie)

Fig. 19 – Les crustae figuratives au regard du motif de rinceau de la Porta Marina à Ostie (Italie)

D’après Boube 2011 (p. 465, fig. 1) ; clichés et DAO : C. Coquelet (AWaP), É. Leblois (FAW&B).

39Enfin, l’usage de plusieurs pièces demeure incertain. Il s’agit par exemple des petites formes arrondies nos 266 et 86 qui évoquent une fleur à trois pétales, vue de profil. Le fer de lance no 179 rappelle le thème de la frise d’oves, comme dans les décors de la Domus Aurea, mais cette pièce peut très bien faire partie également d’un dessin géométrique. Deux éléments en Gris des Ardennes (nos 266 et EGR 28) et deux autres pièces de forme proche en Brèche coralline (nos 52 et 79) peuvent aussi se rapporter à un dessin employé en miroir dans les décors géométriques complexes d’opus sectile de sol.

40La question se pose par ailleurs pour l’ensemble d’éléments courbes très similaires découpés dans les surfaces blanches ou beiges du marbre rouge de Rance. Ils suivent un carton proche, mais à chaque fois différent. Leur attribution à un décor géométrique est pour cette raison peu probable. L’ensemble pourrait alors avoir fait partie d’une grande composition figurative, dont le thème et les dimensions nous échappent malheureusement, la pierre sélectionnée servant alors de substitut à un marbre méditerranéen.

Second groupe : les crustae géométriques

41Deux groupes peuvent être distingués, selon que les crustae jouent un rôle dans les panneaux décoratifs ou qu’ils soulignent ou encadrent ces mêmes panneaux. L’un inclut davantage d’éléments colorés de formes variées, l’autre se compose de bandeaux droits et de baguettes droites et courbes. Les crustae rectangulaires en matériaux méditerranéens sont à considérer plutôt dans la première catégorie, même pour les baguettes dont un nombre restreint est fabriqué dans les Campan rose et vert et dans les Rouge et Vert antiques. Leur attribution repose sur leur finition parfaite sur toutes les faces et la valeur ajoutée du matériau.

  • 33 Le plus grand mesure entre 15,50 et 16 cm de long et 7,50 cm de large. Neuf d’entre eux portent que (...)
  • 34 Seul le triangle en pierre de Meuse no 311 peut résulter de la découpe modulaire d’un carreau de 17 (...)

42Les formes triangulaires dominent dans le premier groupe. Dans la diabase subsiste un ensemble homogène de 26 fuseaux : 11 de grand format et 15 autres plus petits, aux bords grossièrement ébauchés dans quelques cas. Cette forme a été déclinée également en un demi-fuseau façonné dans un matériau indéterminé (fig. 20)33. Par ailleurs, deux fragments (no 71 en Rouge de Rance et no 90 en marbre blanc) peuvent être rapprochés, d’après leur angle, du losange 74 en Rouge de Rance (fig. 21). Par ses dimensions (34 cm de long et 15 cm de large), cette figure semble jouer un rôle particulier dans le décor. Dix autres plaques très fragmentaires en Gris des Ardennes et en Rouge de Rance présentent un angle obtus, dont l’ouverture est toujours différente de celle des losanges. Hormis quelques triangles acutangles et un triangle isocèle (no 311), les autres figures sont de type scalène et ne procèdent pas d’une découpe modulaire34 ; elles constituent peut-être des éléments de remplissage dans des formes quadrangulaires de plus grandes dimensions. S’ajoutent enfin un petit carré en calcite (fig. 21, no 421), une série de plaquettes rectangulaires allongées en matériaux méditerranéens (fig. 21) et un demi-disque en pierre de Meuse (fig. 22, no 256).

Fig. 20 – Les fuseaux en diabase de Trèves mis au jour dans la pièce fouillée en 1964 dans l’aile sud de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique)

Fig. 20 – Les fuseaux en diabase de Trèves mis au jour dans la pièce fouillée en 1964 dans l’aile sud de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique)

Clichés et DAO : C. Coquelet (AWaP), É. Leblois (FAW&B).

Fig. 21 – Les décors géométriques, formes triangulaires et bandeaux mis au jour dans la pièce fouillée en 1964 dans l’aile sud de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique)

Fig. 21 – Les décors géométriques, formes triangulaires et bandeaux mis au jour dans la pièce fouillée en 1964 dans l’aile sud de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique)

Clichés et DAO : C. Coquelet (AWaP), É. Leblois (FAW&B).

Fig. 22 – Les décors géométriques, bandeaux, baguettes et formes circulaires mis au jour dans la pièce fouillée en 1964 dans l’aile sud de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique)

Fig. 22 – Les décors géométriques, bandeaux, baguettes et formes circulaires mis au jour dans la pièce fouillée en 1964 dans l’aile sud de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique)

Clichés et DAO : C. Coquelet (AWaP), É. Leblois (FAW&B).

43Les bandeaux sont conçus majoritairement en deux largeurs, à savoir 12 éléments de 3,50 à 3,60 cm dans le Gris des Ardennes (fig. 22, nos 43, 44, 196 et 214) et 5 autres de 7,40 à 7,70 cm dans la diabase (nos 1 et 2, 4 à 6, certains biseautés à 13°). La découpe d’un bord à 45° suggère l’emploi des plaquettes en Gris des Ardennes en encadrement de composition.

44Les baguettes droites sont les plus nombreuses : 98 sont fabriquées dans le marbre blanc et 40 dans la pierre de Meuse. Les extrémités sont droites et trois faces sont généralement aplanies, alors que la quatrième, placée au contact du liant dans la mise en œuvre, est laissée brute. La sélection de pierres blanches et noires pour leur confection s’explique donc par leur rôle de listel, destiné à souligner les formes géométriques à l’intérieur des panneaux, et combinées pour donner un effet de relief en trompe-l’œil.

45Le diamètre des formes que cernent les baguettes courbes est pratiquement impossible à établir tant les fragments conservés sont petits, mais l’association de plusieurs exemplaires en calcaire gris bleu suggère néanmoins un disque de 45-46 cm. Les baguettes courbes en Gris des Ardennes (à peine 0,40 cm d’épaisseur), dessinent quant à elles deux cercles respectivement de 37 et 44 cm de diamètre. Ces estimations correspondent à la restitution d’un disque en diabase de Trèves (diamètre estimé à 46 cm).

Les plaques/plaquettes

46Sur 647 individus, à peine 44 sont taillés dans des matériaux méditerranéens. Seuls 13 conservent l’angle droit d’un rectangle, 143 un unique bord droit et 8 autres un bord droit chanfreiné. Le Gris des Ardennes, le marbre rouge belge et la pierre de Meuse sont les matériaux les plus fréquemment observés. Une plaque informe en Fleur de Pêcher de 25 cm de long et un rectangle en brèche de Scyros de 18 cm au moins donnent une idée des formats très modestes employés.

  • 35 Elles sont induites par une simple pression exercée en fin d’opération de découpe à la scie, afin d (...)

47Ces plaques, polies en surface et parfois sur les bords, gardent de nombreuses traces de leur fabrication. Seize pièces conservent ainsi une cassure de sciage35. Treize autres présentent également au revers une surface laissée brute, caractéristique de la première ou de la dernière tranche de sciage du bloc. Le polissage soigné de l’avers indique cependant que tous ces éléments ont pourtant bien été mis en œuvre.

Les plaques sculptées

  • 36 La villa de Chiragan a livré quelques panneaux végétalisés, considérés comme des chambranles de por (...)
  • 37 Modèle de chapiteau à une feuille d’acanthe. Un petit chapiteau d’applique en pierre de Meuse a été (...)

48Un bas-relief en marbre blanc suggère une acanthe retombante vue de face (fig. 23). Son intégration dans un panneau végétalisé ne peut être écartée36, mais associé aux deux autres petits fragments épais de 2 cm, il pourrait aussi constituer les restes d’un ordre corinthien dont la corbeille se résume à une acanthe centrale de petites dimensions, comme il en existe dans les décors de la villa de Chiragan37. Un dernier fragment de plaque en marbre blanc, au champ lisse cerné d’un encadrement mouluré, évoque également l’angle d’un autre panneau (no EGR 31).

Fig. 23 – Des plaques sculptées en pierre de Meuse et en marbre blanc et une inscription sur plaquette en marbre blanc, mises au jour dans la pièce fouillée en 1964 dans l’aile sud de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique)

Fig. 23 – Des plaques sculptées en pierre de Meuse et en marbre blanc et une inscription sur plaquette en marbre blanc, mises au jour dans la pièce fouillée en 1964 dans l’aile sud de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique)

A, chapiteau d'applique en marbre blanc ; B, plaque sculptée en pierre de Meuse figurant un animal bondissant ou courant vers la gauche ; C, angles de panneaux sculptés en calcaire gris bleu mosan à Siphonodendron martini et en marbre blanc ; et D, plaquette en marbre blanc portant l'inscription NIVI[.

Clichés et DAO : C. Coquelet (AWaP), É. Leblois (FAW&B).

  • 38 Voir le relief à la lionne dans Roux et al. 2018 (p. 375 et p. 376, fig. 5). Le félin est la figure (...)

49La pièce 284 en pierre de Meuse conserve par ailleurs le bord inférieur non mouluré d’une plaque dont le champ, à l’exécution moins raffinée, porte la patte griffue et en extension d’un animal bondissant ou courant vers la gauche. Il s’agit sans doute d’un lion, sujet fréquemment traité en mosaïque comme en opus sectile, thème également d’une plaque en marbre dolomitique de Thasos découverte dans le Forum de Vaison-la-Romaine (Vaucluse)38. Son esquisse donne une idée de la taille du panneau, d’au moins 60 cm de long et de 40 cm de haut. Étant donné l’absence au revers de toute trace de mortier, il faut supposer que ces plaques étaient fixées à la paroi au moyen d’agrafes métalliques.

  • 39 Dans les fouilles du grand temple nord de Tongres (Coquelet et al. 2014) ainsi que dans un habitat (...)
  • 40 Les séries sculptées dans le schiste armoricain portent de petites scènes mythologiques, mais aussi (...)

50Quelques exemplaires comparables de plaques sculptées dans la pierre de Meuse ont déjà été repérés dans la ville de Tongres39. À Bavay, une plaque en pierre d’Avesnes découverte dans le forum figure aussi un animal défilant (Cormier dir. 2016, p. 144-145). Les fouilles de ce monument ont livré par ailleurs un autre panneau carré sculpté dans le marbre blanc, orné d’un motif géométrique. La mise en œuvre de ces plaques dépend du sujet représenté : à Bavay, l’animal défilant invite à intégrer ce panneau dans une frise, mais d’autres séries analogues, notamment découvertes en Armorique, se suffisent à elles-mêmes et constituent de petits tableautins individuels ou organisés en triptyques (Langouet et al. 2000 ; Labaune-Jean, Le Cloirec 2011)40.

Un nom gravé sur une plaquette d’opus sectile

51Marie-Thérèse Raepsaet-Charlier

52Une plaquette rectangulaire en marbre blanc mesurant 9 cm de long et 5,40 cm de haut, brisée du côté droit, porte une inscription incomplète (fig. 23, no EGR 20). Les lettres, hautes de 3,20 cm, ont été gravées sur la face polie et sont parfaitement alignées. La lecture est NIVI[.

53La facture soignée et la longueur de cette inscription conduisent à écarter l’hypothèse d’un graffito ou celle d’une marque de tâcheron. Si l’on suppose un nom, il pourrait s’agir du gentilice NIVIVS attesté en Hispanie (CIL II, 2469) par exemple, ou encore du potier de sigillée Nivius (Hartley, Dickinson 2010, p. 256-257). Le cognomen Nivus/Nivius est attesté en Norique (CIL III, 5564 et 13707), Nivio en Pannonie (CIL XVI, 96). Tous ces noms sont rarissimes. La même racine NIV a donné Nivalis et son dérivé Nivalius (CIL XIII, 5098, 5099, 2100, 5820 et 5929), notamment en Germanie supérieure. Elle peut être aussi comparée avec les noms en NEV comme NEVTTO (ILB, 59) à Celles chez les Tongres ou Neuto (AE, 1975, 644) à Colijnsplaat chez les Ménapiens. On citera aussi Nevitta (OPEL III, p. 99 et 103) (Flavius Nevitta, un « Barbare » qui fut magister equitum et ensuite consul au ive s. apr. J.-C. : Schönfeld 1965, p. 172 ; Morlet 1968, p. 173). Ce sont des noms germaniques (au moins dans l’espace susceptible de les connaître) en rapport avec le gotique niujis et le vieux-haut-allemand niuwi [nouveau] (Förstemann 1900, col. 1160-1163 ; Weisgerber 1969, p. 283 ; Reichert 1987-1990, p. 523-524 ; Kroonen 2013, p. 389). L’origine germanique n’est pas envisageable partout, notamment en Espagne ; même pour le Norique, Xavier Delamarre (2007, p. 142) propose une origine celtique. Chez les Nerviens, un nom germanique est tout à fait possible (Raepsaet-Charlier 2005).

54D’après sa forme et sa finition, cette plaquette devait prendre place dans l’un des registres du décor mural, sans doute à faible hauteur, étant donné la petitesse des caractères. Il pourrait s’agir d’une signature, peut-être celle de l’exécutant de ces ornements, dont certains sont particulièrement recherchés (l’entrepreneur, l’atelier, etc.). Bien que rares, des cas d’inscriptions et de reliefs signés sont connus, comme la colonne de Jupiter à Mayence, en Allemagne (CIL XIII, 11806 = AE, 1980, 655 et AE, 1906, 54 : Samus et Severus Venicari f. sculpserunt) ou d’autres exemples : AE, 2003, 1971 (Afrique), AE, 1978, 445 (Bretagne), CIL III, 1413 (statuette identique en Dacie), CIL XII, 2319 (Grenoble), CIL V, 784 (Aquilée), etc. Il n’est pas exclu que l’abréviation non explicitée de ILB, 60 : AGS comprenne le verbe S(culpsit) et à Bavay, on connaît également un LA(picida) : AE, 2000, 977.

Un décor mural complexe

55La destruction totale de l’élévation des murs de la pièce constitue un obstacle majeur à toute tentative de restitution (Bitterer 2010), car elle nous prive de l’examen des négatifs des systèmes d’accroche sur les parois, indices du nombre de registres et de leurs dimensions respectives. Dès lors, seule l’analyse des revêtements peut donner quelques pistes de réflexion sur son organisation.

  • 41 La faible quantité d’enduits dans les couches d’incendie et de démolition de la salle, que les inve (...)

56L’existence de quatre types de corniches suggère une composition divisée en registres – et en sous-registres grâce aux astragales –, s’élevant à hauteur d’homme41. Les différentes partitions sont animées par des revêtements lisses sous forme de simples plaques, par des compositions géométriques et par des éléments figuratifs. Hormis la représentation animalière, dont le sens de lecture ne peut être discuté, une mise en œuvre à la fois horizontale et verticale peut être tout à fait envisagée pour les autres motifs. Par ailleurs, même si l’existence d’un ordre demeure hypothétique, le principal fragment, l’acanthe en marbre blanc, se démarque nettement des autres pièces sculptées par sa finesse d’exécution ; il s’agit donc d’une œuvre tout à fait à part, quel que soit son rôle dans ce décor.

  • 42 Ce que corrobore l’estimation des épaisseurs des plaques : à peine 121 fragments sur les 682 ont un (...)

57Le raccord du revêtement mural avec la mosaïque bordée de quelques rangées de tesselles en calcaire gris bleu a pu se faire par l’intermédiaire d’une moulure de base de même couleur, solution que nous pourrions envisager en rapport avec la corniche de type 1. Aucun des fragments de ce modèle de grande taille ne porte de mortaise permettant de l’utiliser en couronnement. Le sommet de la corniche 1 se réduisant à 2 cm, le socle devait accueillir un revêtement d’une épaisseur maximale proche, ce qui tend à exclure d’emblée l’incorporation de plaques de grand module, issues d’une unique tranche de sciage, au profit de plaques de moyen à petit module42. Leurs tonalités majeures sont données par le Gris des Ardennes, par le marbre rouge belge et par la pierre de Meuse.

58La forme circulaire inscrite dans un carré de 49 à 50 cm de côté, soulignée de petites baguettes en Gris des Ardennes et en calcaire mosan, suggère l’existence d’un registre géométrique en partie inférieure du décor. Ce type de composition alterne volontiers avec d’autres formes quadrangulaires, qu’il faut supposer certainement conçues avec des pierres belges, notamment avec le marbre rouge, en complément de la diabase.

  • 43 Voir par exemple les restitutions de la villa d’Arnouville-lès-Gonesse (Val-d’Oise) (Flécher 2012).
  • 44 La restitution des décors de la villa d’Hadrien à Tivoli comprend ce type de composition en couronn (...)

59Le losange en Fleur de Pêcher et les autres pièces apparentées font partie d’un autre registre géométrique de hauteur plus réduite, fondé sur les mêmes principes d’alternance avec des formes géométriques simples ou plus complexes, comme des peltes ou des scuta43. Dans le décor en pierre de la Porta Marina à Ostie, cette séquence est mise en œuvre à deux reprises, horizontalement, sur et sous la frise de rinceau44. Une imitation à fresque découverte à Tongres reproduit également cette forme en couronnement de la partie médiane du décor (Groetembril et al. 2017). Quant aux décors les plus élaborés, à savoir le rinceau et le panneau au félin sculpté en bas-relief, ils constitueraient alors les témoins du registre décoratif supérieur. Selon Hélène Eristov (1994, p. 9) en effet, le rinceau est un motif placé en hauteur dans les décors peints du quatrième style, lequel aurait justement influencé sa transposition horizontale dans les revêtements d’applique (Dubois-Pélerin 2008, p. 209).

60Enfin, les astragales plus épais peuvent être rattachés à une succession encore plus complexe de ces niveaux décoratifs, comme par exemple le découpage du niveau principal en sous-registres, mais ils ont pu aussi assurer la transition dans un ordre architectural entre le fût d’applique et le chapiteau. Les exemplaires chanfreinés, dont une face est couverte de mortier, ont pu en revanche occuper la partie sommitale du décor en pierre, pour assurer ainsi la transition avec une partie peinte à fresque.

Le décor de la pièce fouillée dans l’aile sud en 1971 (NOUV 71 HYP)

  • 45 Dans le rapport de fouilles, les dimensions des murs mentionnées varient dans le texte ; nous nous (...)

61Cette pièce, proche de la salle précédente, mesure dans l’œuvre 3,08 m dans le sens nord-ouest – sud-est et 3,51 m dans le sens nord-est – sud-ouest. Seul subsiste le soubassement des murs arasés pratiquement au niveau du radier de la chambre de chaleur (fig. 24). Les assises inférieures constituées de blocs de grès assemblés au mortier déterminent des maçonneries larges de 0,60 m, sauf pour le mur sud, épais de 0,80 m45.

Fig. 24 – A, la pièce fouillée en 1971 dans l’aile sud de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique) ; B, un aperçu de la palette de couleurs de la mosaïque pariétale en pâte de verre en rapport avec cette pièce

Fig. 24 – A, la pièce fouillée en 1971 dans l’aile sud de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique) ; B, un aperçu de la palette de couleurs de la mosaïque pariétale en pâte de verre en rapport avec cette pièce

Clichés : Y. Leblois, É. Leblois (FAW&B).

62L’espace était occupé, comme dans la pièce précédente, par un réseau de pilettes disposées tous les 40 cm sur un radier formé d’une couche de mortier. Leur éloignement de 10 cm par rapport aux murs est sans doute aussi à mettre en rapport avec la présence d’une tubulature continue. Le praefurnium alimentant le dispositif a été localisé grâce à un percement au milieu du mur sud-est.

  • 46 Les notes de fouilles mentionnent également des « fragments de colonne en béton » et des « fragment (...)
  • 47 Apporté également par quelques tesselles en terre sigillée et en Jaune antique (de couleur saumon).
  • 48 Apporté également par quelques tesselles de phtanites noirs.
  • 49 Apporté également par quelques tesselles en calcite (sous forme de rhomboèdres de clivage), en crai (...)
  • 50 Plusieurs tesselles conservent encore une feuille d’or prise entre deux plaques de verre incolore.

63La suspensura est apparue totalement détruite, sous forme d’une couche « blanchâtre composée de chaux et de terre cuite concassée » épaisse de 6 à 10 cm. Les remblais de destruction comportaient, outre des fragments appartenant à des revêtements d’applique, quelques fragments d’enduits peints (noir et blanc, vert et blanc)46, ainsi qu’une couche riche de 1 570 tesselles, essentiellement en pâte de verre, de 0,25 à 0,50 cm de côté (Goemaere et al. 2023). Elle s’étendait sur toute la longueur du mur sud, plus épais que les autres, et dans les angles sud-est et sud-ouest, sur une largeur de 0,40 à 0,60 m maximum. Une telle concentration au droit du mur indique l’existence d’un panneau mural, dont les tonalités dominantes sont le bleu et le vert. L’ensemble était ponctué de rouge47, de jaune, de noir48 et de blanc49 et rehaussé de quelques tesselles en verre doré50. À cet ensemble étaient associés par ailleurs une baguette taillée dans un mortier en terre sigillée et une boulette de bleu égyptien.

  • 51 Les notes de fouilles font mention également de quelques fragments de plaques en Gris des Ardennes, (...)

64Seuls 30 fragments sont représentatifs des décors en pierre de cette salle. Cet ensemble comprend 17 fragments de réglettes en marbre blanc et 10 en pierre de Meuse, ainsi qu’un petit triangle équilatéral complet en marbre blanc et deux fragments de plaque en marbre de Campan rose51. Ne portant aucune trace de mortier, tous ces éléments sont à mettre en rapport avec le décor mural.

Les décors de la suite thermale de l’aile nord (NOUV RDM 1888-1889)

65Les campagnes de fouilles menées par É. de la Roche de Marchiennes se sont limitées à des sondages ponctuels, si bien que le plan et l’organisation des salles restent difficiles à établir. La destination thermale des structures repose sur la présence d’au moins une pièce bénéficiant d’un chauffage direct par hypocauste, tubulée (caldarium ?). Elle voisine deux pièces, l’une à l’est, l’autre au nord, pourvues d’un sol en mortier rose. Un autre espace mesurant 5,45 sur 4,13 m, beaucoup plus profond (1,45 à 1,60 m sous le sol actuel), également pourvu d’un sol en mortier de tuileau, a pu accueillir une piscina (froide ?). Ses parois sont protégées par une épaisse couche de mortier de tuileau également. Il est encadré d’au moins un mur épais de 0,90 m, indice peut-être d’une couverture voûtée. L’égout longeant cette suite devait servir d’exutoire aux eaux amenées par l’aqueduc après leur passage dans ces bains. Dans toutes ces pièces, É. de la Roche de Marchiennes signale la présence de nombreux « marbres », qu’il qualifie dans certains cas de « ciselés, ornementés », associés à des restes de peintures murales, et dans le frigidarium, à « des morceaux de stucs arrondis en colonne et ayant reçu une couche de peinture rougeâtre » (de la Roche de Marchiennes 1890a, p. 386-387 ; 1890b, p. 519-521).

66Les 159 pièces provenant de cette zone sont toutes façonnées dans des pierres régionales, essentiellement le Gris des Ardennes et la pierre de Meuse, ainsi que dans d’autres variétés de calcaires gris bleu d’origine imprécise (tabl. IV). Le gris clair et le gris anthracite constituent donc les tonalités majeures du décor, ponctué de quelques pièces en marbre rouge de Rance. L’ensemble comporte 91 plaques lisses, dont 73 exemplaires entre 1,10 et 2,10 cm d’épaisseur et 18 autres entre 2,20 et 2,90 cm, 29 plaquettes d’une épaisseur entre 0,40 et 1 cm, 5 pièces interprétées comme des crustae géométriques et quelques rares éléments moulurés, à savoir deux chambranles et un astragale en pierre de Meuse. Ces décors contrastent avec ceux observés dans l’aile sud, en raison non seulement de l’absence de matériaux méditerranéens, mais aussi de la technique de mise en œuvre, puisqu’un tiers des pièces porte au revers des traces de mortier rose et qu’une seule plaque en Gris des Ardennes est percée d’une mortaise. Les pièces moulurées et les 28 plaquettes de faible épaisseur (moins de 1 cm) peuvent être associées au décor mural. Pour les autres appliques, l’emploi au sol ne peut être écarté en raison de l’absence de trace de scellement et de la présence de mortier au revers. Leur épaisseur s’accorde toutefois davantage avec une mise en œuvre sur le soubassement des murs.

Tabl. IV – Les catégories décoratives en rapport avec la suite thermale de l’aile nord de la villa de la Grande Boussue

Tabl. IV – Les catégories décoratives en rapport avec la suite thermale de l’aile nord de la villa de la Grande Boussue

Les décors extérieurs : l’ordre toscan

67Avec la collaboration de Marie-Thérèse Raepsaet-Charlier

68Quarante-huit pièces sont taillées dans des matériaux destinés à un usage extérieur : 6 sont en pierre d’Euville, 39 en pierre d’Avesnes et 3 en pierre de Lezennes. Parmi ces éléments, un fût de colonne lisse en pierre d’Avesnes (fig. 25, no 1) porte un graffito incomplet. Ce fragment architectonique a été recueilli dans la grande couche d’épandage partiellement fouillée sur le flanc nord de l’aile nord, datée de l’époque sévérienne (NOUV 77 DEP). L’écriture est peu soignée, mixant des aspects de capitale et de cursive. La lecture est : ]IBLIOM[. Il pourrait s’agir du nom indigène IBLIOMARVS, fréquent chez les Trévires (voir par exemple CIL III, 1214 ; AE, 1985, 682 ; CIL XIII, 2839, etc. ; OPEL II, p. 191), d’origine celtique sur iblio- au sens d’« épervier » et maro- « grand » (Delamarre 2007, p. 108 ; 2019, p. 378-379 ; Raybould, Sims-Williams 2007a, 53 ; 2007b, 133).

  • 52 Non illustrés (pièces inventoriées : PB5 et PB10).

69Deux autres petits blocs en pierre d’Avesnes52, sans doute débités dans des éléments architectoniques, portent par ailleurs l’esquisse maladroite d’une petite figure humaine et, pour la première, une série de stries bien marquées, peut-être dues à l’utilisation du bloc pour l’affûtage de tranchants.

Fig. 25 – Restitution des ordres en pierre d’Avesnes et en pierre d’Euville

Fig. 25 – Restitution des ordres en pierre d’Avesnes et en pierre d’Euville

Cliché et DAO : C. Coquelet (AWaP), É. Leblois (FAW&B).

70Les profils conservés dans la pierre d’Avesnes, le matériau le plus fréquemment rencontré, illustrent deux types de colonne. Le premier possède un chapiteau toscan (fig. 25, nos 2 à 6). Le diamètre du fût, estimé à 0,30 m, semble s’accorder avec celui d’une base à tore incisé, pour une hauteur totale d’environ 1,80 m. Le second type de colonne comporte un chapiteau mouluré plus complexe, solidaire du tambour supérieur d’un fût orné d’un astragale, associé à une base attique à double tore caréné. Le diamètre du fût, évalué à 0,42 m, permet d’estimer la hauteur de cette colonne à 2,50 m (fig. 25, nos 7 et 8). Une base identique sert de fondement à une troisième colonne d’à peine 0,25 m de diamètre, dont le chapiteau n’est pas connu (soit une hauteur totale de 1,50 m environ). En raison de ses dimensions réduites, cette colonnette doit être associée à un mur bahut. Outre ces supports libres en pierre d’Avesnes, que l’on rattacherait volontiers à l’ornementation du portique courant le long des trois ailes de la résidence, peut être restitué un unique type de colonne encore plus grande, façonnée en pierre d’Euville. D’un diamètre de minimum 0,50 m, si l’on considère une base à double tore incisé, elle avoisinerait 3,50 m de hauteur et pourrait être associée à une œuvre libre (fig. 25, nos 9 et 10).

De la conception à la mise en œuvre : d’autres salles ornées de marbres dans la villa ?

  • 53 Il s’agit essentiellement de quelques réglettes en Rouge antique, d’un disque (inachevé ?) en diaba (...)

71Près de 910 items proviennent de contextes secondaires ou indéterminés. Outre de nombreuses plaquettes d’opus sectile géométriques53, quelques profils moulurés très semblables aux exemplaires décrits dans les trois ensembles précédents s’y retrouvent (fig. 26) : 2 corniches en pierre de Meuse, 16 chambranles de portes et de fenêtres, le bord d’un panneau sculpté en calcaire givétien à décor géométrique (no 1165), ainsi que 2 plaques sculptées, l’une en marbre blanc à décor végétal (no 818) et l’autre en Gris des Ardennes (no 940), et une plaquette en S en pierre de Meuse (no 242). Certains de ces matériaux régionaux connaissent par ailleurs un emploi encore non documenté dans les ensembles précédents, comme un petit fragment de plaque à bord convexe en trachyte de Berkum, maçonné au mortier rose (giron ? appui ?), quelques astragales en Gris des Ardennes, en grès quartzitique gris bleu et en calcaire lutétien à milioles, ainsi qu’une plaque en pierre de Meuse (no 939) pourvue d’une cannelure d’exécution peu soignée (fût de pilastre ?). Une encoche sur le bord suggère un scellement mural.

Fig. 26 – Les plaques moulurées et sculptées en marbre blanc (no 818), en Gris des Ardennes (no 940), en calcaire givétien (no 1165) et en pierre de Meuse, provenant de contextes divers de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique)

Fig. 26 – Les plaques moulurées et sculptées en marbre blanc (no 818), en Gris des Ardennes (no 940), en calcaire givétien (no 1165) et en pierre de Meuse, provenant de contextes divers de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique)

Clichés et DAO : C. Coquelet (AWaP), É. Leblois (FAW&B).

  • 54 Incomplète, elle mesure 0,44 m de large, 0,57 m de long ; son épaisseur varie entre 2,10 et 2,50 cm

72Quelques rebuts ou déchets de fabrication ont été abandonnés : une série de plaques polies en pierre de Meuse portant des traces de découpes rectilignes, recueillies dans le comblement de la cave fouillée en 1977, ou encore deux chambranles comportant une séquence moulurée presque identique, mais dont les parties concaves, peu profondes, sont restées brutes (fig. 26, nos EGR 37 et 2165). À ces éléments s’ajoutent deux grandes plaques en Gris des Ardennes, également découvertes dans la cave 77, dont une seule54 a été retrouvée (fig. 27, nos 929-935). La seconde, abandonnée en cours de sciage, est décrite dans le rapport de fouilles comme « mesurant 62 cm de long, 44 cm de large et 7 cm d’épaisseur, sciée dans la tranche. La partie sciée (34 cm), épaisse d’environ 3 cm, s’est détachée à l’enlèvement » (Notes de fouilles manuscrites, inédites, 1977, p. 211).

Fig. 27 – Quelques découpes inachevées de plaques en Gris des Ardennes (nos 929-935 et 2167), en pierre de Meuse (no 1783) et en marbre rouge de Rance (no 1012)

Fig. 27 – Quelques découpes inachevées de plaques en Gris des Ardennes (nos 929-935 et 2167), en pierre de Meuse (no 1783) et en marbre rouge de Rance (no 1012)

Clichés et DAO : C. Coquelet (AWaP), É. Leblois (FAW&B).

73Ces témoins ont été laissés par l’atelier en charge, sur place, des travaux de découpe des plaques et de fabrication des éléments moulurés linéaires dans des pierres d’extractions locale et régionale. Son intervention dans les autres types de production, à savoir les panneaux sculptés et la mise en œuvre des pierres méditerranéennes, est sans doute limitée. De ces matériaux étrangers ne subsiste en effet aucun élément en cours de fabrication, excepté un unique demi-produit appartenant à une moulure de facture simple (astragale). La gestion différenciée des pierres n’est donc pas uniquement tributaire de leur origine, mais certainement aussi de leur usage. Il est possible que les compositions d’opus sectile évoquant le règne végétal n’aient pas été assemblées sur place en raison du coût des matériaux et de leur façonnage. Leur acheminement depuis un atelier localisé à Rome, spécialisé dans la production bien spécifique de panneaux préfabriqués, est certainement la solution la plus plausible (Kiilerich 2016).

Le rôle des décors en pierre dans l’interprétation fonctionnelle des espaces

  • 55 L’analyse du mobilier céramique invite à placer la création de cet ensemble dans la première moitié (...)

74Les décors des thermes dans l’aile nord (NOUV RDM 1888-1889) recourent uniquement à des pierres extraites en Gaule septentrionale, selon une mise en forme simple et faisant appel à un faible nombre d’éléments moulurés. Ils couvrent le bas des murs, des enduits peints ornant les parties hautes. Leur style diffère sensiblement de celui des décors des salles dans l’aile sud (NOUV 64 HYP et NOUV 71 HYP), recourant à un plus large panel de pierres d’origine méditerranéenne55. La fonction domestique de ces pièces, qui disposent du confort d’un chauffage direct, est corrélée à l’absence d’équipement balnéaire et à l’organisation des locaux environnants, qui ne permet pas de saisir un parcours thermal clair. À l’appui de ce constat, on observe que, dans les thermes de l’aile nord, une partie au moins des matériaux sont scellés au mortier de tuileau. Ce liant, choisi pour mieux résister aux dégâts provoqués par l’humidité ambiante, a été très rarement observé dans la mise en œuvre des revêtements de l’aile sud.

  • 56 Ces salles de réception sont bien connues dans les demeures aristocratiques de certaines régions da (...)
  • 57 Authom, Paridaens 2015, p. 83 : réaménagement de la pièce P57.
  • 58 De Boe 1975 : salle 22 de la phase II.
  • 59 L’exploration de la villa d’Anthée a révélé la présence de marbres et de mosaïques en différents en (...)

75La plus grande des deux salles (NOUV 64 HYP) peut donc être interprétée comme un espace de réception doté d’un certain apparat. La distribution de ce type de pièce dans les établissements du Haut-Empire reste difficile à établir, en particulier au iiie s., époque marquée par une forte évolution des pratiques du banquet56. Les témoignages archéologiques, en provenance du monde méditerranéen, illustrent les aménagements dont bénéficient surtout les triclinia d’été, largement ouverts sur les jardins et les jeux d’eau. Les exemples recensés dans d’autres grandes villae des cités des Nerviens et des Tongres, comme celles de Merbes-le-Château57, de Haccourt58 ou encore d’Anthée (Belgique)59, illustrent des situations toutes différentes de celle de Nouvelles, où cette pièce ne bénéficie d’aucun artifice architectural, ni même d’une situation privilégiée vis-à-vis d’un jardin d’agrément ou d’une suite balnéaire. Sa forme presque carrée et ses dimensions s’accordent cependant avec celles des salles à manger des maisons pompéiennes, conçues pour recevoir jusqu’à neuf convives (Dunbabin 1991). La grande qualité de ses ornements suggère un rôle ostentatoire et l’aménagement de sol en deux parties, dont une mosaïque en tapis courant le long d’au moins un mur, pourrait s’accorder avec la disposition des lits. La seconde pièce ornée de marbres et d’une mosaïque de verre pariétale, plus petite, participe a priori à une phase de réaménagement : elle prend place dans un espace formant galerie à l’origine et dont le pendant symétrique existe dans l’aile nord. Sa création a nécessité la construction d’un praefurnium dans la moitié est de l’ancienne galerie reconvertie en espace de service. Malgré leur éloignement, il est difficile d’imaginer que ces deux pièces n’ont pas fait partie d’un même « appartement ».

  • 60 Sur la définition du réservoir, voir Dessales 2013, p. 183.
  • 61 La proximité du bassin de rétention de l’aqueduc a été également mise en évidence dans la villa de (...)

76Vers le nord-ouest, la salle de réception voisine une pièce un peu plus grande (7,80 m de long et 6,70 m de large) longée par un corridor et au sud-ouest, par un local de taille réduite, mesurant 3,35 m de large et 4,50 m de long. Les sols de circulation de ces espaces non chauffés, plus hauts que le niveau du terrain actuel, ont été totalement détruits. Ils jouxtaient un bassin de 2,75 m de large et 4,50 m de long. En grande partie démantelé, son fond bétonné et limité par un joint en quart-de-rond a été atteint à 1,40 m de profondeur. Vraisemblablement alimenté par l’une des conduites secondaires de l’aqueduc, il a pu servir de réservoir de stockage60. Sa fouille, bien qu’incomplète, a livré des restes de boisseaux et des carreaux de pilettes, mais aussi un certain nombre d’enduits peints portant des motifs floraux et quelques fragments de « marbre », à mettre en rapport avec des travaux de démolition touchant aux pièces contigües. Au sud-est, une zone de service d’une vingtaine de mètres carrés n’a pas été dégagée dans son entièreté, mais l’on peut supposer, comme le pensaient les inventeurs, qu’elle accueillait le praefurnium alimentant l’hypocauste de la salle de réception. Des activités culinaires ont pu s’y dérouler également, comme le laissent penser la découverte de nombreux rejets fauniques et de 22 huîtres non consommées (Leblois, Leblois 1968, p. 75-76), ainsi que la présence d’une aire constituée de tuiles retournées, fortement rubéfiées, vestiges d’un foyer culinaire adossé au mur mitoyen du réservoir61, mais à un niveau légèrement supérieur (1,10 m sous le sol actuel).

*

* *

77Implantée à 16 km de Bavay, sur les vestiges d’une ferme laténienne à enclos fossoyés multiples qui se distingue déjà par ses dimensions, la villa de Nouvelles naît dans la première moitié du ier s. apr. J.-C. Son organisation générale interne nous échappe toutefois encore aujourd’hui. Elle adopte au plus tard au début du iie s. le plan caractéristique des « villae gallo-romaines à pavillons multiples alignés » et rentre dans la catégorie des « villae axiales à plan longitudinal », propres à l’élite provinciale du nord et du centre-est de la Gaule. Le corps de logis atteint à la fin du iie s. son plein développement architectural. Il présente un plan en U et sa surface bâtie, estimée alors à environ 5 800 m2, résulte certainement de plusieurs campagnes de construction. Il bénéficie en outre d’un programme d’embellissement extérieur et intérieur, s’accompagnant encore de transformations architecturales.

78Les pierres ornementales recueillies au cours des dix-huit campagnes de fouilles conduites sur ce site entre 1964 et 1985 forment une collection particulièrement riche et représentative de la variété des matériaux mis en œuvre dans les décors des habitats aisés des cités des Nerviens et des Tongres. L’approvisionnement pour les revêtements muraux repose dans une large mesure sur les calcaires marbriers extraits principalement dans l’Entre-Sambre-et-Meuse. À ces marbres belges s’ajoutent des roches exploitées dans les environs de Bavay, ainsi que du côté de Tournai (province de Hainaut, Belgique). Leurs tonalités très neutres – excepté le marbre rouge belge – contrastent avec celles des pierres colorées issues d’un commerce de plus longue distance, en premier lieu la diabase de Trèves, substitut du Granito verde a erbetta égyptien, mais aussi plusieurs pierres pyrénéennes et, bien entendu, une série variée de marbres méditerranéens. Les pierres locales de teinte blanche comme la pierre d’Avesnes, extraite non loin de Bavay, sont aussi mises à contribution pour les décors architectoniques extérieurs, tandis que la pierre d’Euville, calcaire blanc d’origine lorraine, semble réservée à une œuvre libre.

79Les décors d’applique sont déjà présents dans la villa originale, mais leur mise en œuvre est documentée essentiellement pour le corps de logis dans son dernier état, vers le milieu du iiie s. apr. J.-C. Un portique à colonnade en pierre d’Avesnes rythme les façades longues d’une centaine de mètres, ouvrant sur la cour de la pars urbana. Les marbres ornent les thermes dans l’aile nord et deux pièces chauffées dans l’aile sud, mais la grande quantité d’éléments décorés recueillis en surface ou dans des couches de remblais suppose la mise en œuvre de ces marbres dans d’autres salles de la partie résidentielle.

80Dans les bains de l’aile nord (NOUV RDM 1888-1889), les décors en pierre répondent à un souci de salubrité : les matériaux sont essentiellement d’origine régionale et leur usage semble cantonné aux parties basses des murs, avec un agencement de plaques sciées associées à une corniche. Dans l’aile sud en revanche, il est fait appel à un large panel supplémentaire de pierres méditerranéennes, en particulier pour orner une salle d’une trentaine de mètres carrés, interprétée comme un espace de réception. Elle possède un sol agrémenté d’une mosaïque bichrome imitant un opus sectile, accueillant un motif particulier en son centre. À cet aménagement de sol répond un décor mural se développant en plusieurs registres, dont deux ressortent tout particulièrement. Un premier ensemble de crustae en marbre blanc, en Rouge antique et en Jaune antique dessine un décor végétal, sans doute un rinceau d’acanthe. Le second rassemble des fragments de panneaux figuratifs sculptés en bas-relief en marbre blanc et en pierre de Meuse. Ceux-ci dialoguent avec des décors géométriques de format variable, composés à partir de plaques sciées. La comparaison avec les décors en pierre de la domus de la Porta Marina à Ostie, datés de la fin du ive s., offre quelques pistes de réflexion pour le positionnement du rinceau et de certains des panneaux sculptés en parties haute et basse de la composition, la zone médiane étant rythmée par les formes géométriques. À ce décor courant sur une grande partie des murs, étaient associés des ornements stuqués et un plafond peint. Cette pièce hautement décorée avoisinait d’autres salles non chauffées, aux murs décorés de fresques, et une seconde petite pièce chauffée au décor mural en pierre et en mosaïque de verre. L’ensemble, doté d’un certain confort et d’une dimension clairement ostentatoire, était desservi par une zone de service accueillant un espace culinaire, et jouxtait une petite réserve d’eau alimentée par l’aqueduc.

81Les marbres belges constituent une réponse financièrement adaptée au désir de suivre la mode romaine des revêtements en marbre. Présents dans ce corps de logis comme dans celui de bon nombre d’autres sites dans l’Entre-Sambre-et-Meuse et en région mosane, ils portent la « modernité ». Leur mise en œuvre dans plusieurs pièces de la villa et surtout leur association avec des ornements plaqués très élaborés, sculptés dans des matériaux méditerranéens et composés par des artisans expérimentés, constituent en revanche un signe de grand luxe. Les découvertes de crustae appartenant à des décors végétaux sont particulièrement rares en Gaule et la restitution graphique de ces derniers y connaît très peu de parallèles, si ce n’est dans la villa de Chiragan près de Toulouse (Haute-Garonne) et, publiée tout récemment, dans la basilique de Trèves. Évoquer ces exemples donne une idée du statut et des moyens des propriétaires de la villa de la Grande Boussue.

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Bibliographie

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Notes

1 À l’exception d’une cinquantaine de fragments, actuellement en dépôt à l’Espace gallo-romain d’Ath (EGR), cette collection est conservée par la famille Leblois.

2 Association sans but lucratif.

3 La plupart sont toutefois inédites.

4 La construction du périphérique R5 en 1996 a totalement gommé du paysage cette modification du relief au bout du plateau. Les deux aménagements devaient présenter une pente abrupte de 6 à 7 m.

5 Une imitation radiée (inédite) et quatre nummi (Constantin I, Lyon, 310-311 ; Constantin I, Rome, 314 ; Constantin I, atelier indéterminé, 324-330 ; Constance II, Arles, 332-333) sont actuellement inventoriés (Leblois 2020, p. 34).

6 Nous ignorons tout de la céramique sigillée décorée à la molette mentionnée par Raymond Brulet (1975, I, p. 117-118 ; 1990, p. 231), puis par Paul Van Ossel (1992, p. 287-288) : son existence demande à être confirmée.

7 Une fibule ansée symétrique et l’ardillon d’une petite boucle (Leblois 2020, p. 34, n. 32).

8 Michel Reddé (Reddé dir. 2018, p. 162) n’hésite pas à qualifier de « véritables châteaux » les résidences d’autres villae axiales à plan longitudinal d’ampleur similaire, comme celle de Liéhon en Lorraine (4 800 m2 ; Nüsslein et al. 2017, p. 581, fig. 17), Estrées-sur-Noye en Picardie (5 200 m2 ; reprise dans Ferdière et al. 2010) et Lux en Bourgogne (6 000 m2 ; Bénard et al. 2017, p. 772, fig. 10).

9 Corsi Collection of Decorative Stones, aujourd’hui conservée dans le musée d’histoire naturelle de l’université d’Oxford (http://www.oum.ox.ac.uk/corsi/).

10 Sur les marbres belges, voir Coquelet et al. 2020 ; sur la pierre de Meuse, voir Dreesen et al. 2021.

11 Sur le contexte géologique local, voir Pluquet, Vaillant 2014 (fig. 2). Dans la région de Seclin (Nord), l’exploitation de craie locale dans une petite carrière à ciel ouvert est attestée dans l’établissement rural des Hauts de Clauwiers (Révillion et al. 1994).

12 Dans les sources antiques, la provenance géographique est la manière la plus couramment utilisée pour désigner les « marbres », soulignant ainsi l’importance accordée d’un point de vue symbolique à leur origine. Les dénominations modernes données par les marbriers italiens s’appuient en revanche essentiellement sur l’aspect des pierres (Granito verde a erbetta [herbe]) et sur leur couleur (Giallo antico – Jaune antique) (Borghini 1998). Ces dénominations sont reprises dans le catalogue de la Corsi Collection of Decorative Stones.

13 Le Giallo antico est réputé comme l’un des marbres les plus chers d’après l’édit de Dioclétien (Lauffer 1971).

14 Près du pavillon 5, les notes de fouilles font également état de « quelques déchets de marbre blanc et noir » et d’une « attache pour marbre » (Notes de fouilles manuscrites, inédites, 1976, p. 199) ainsi que de « fragments de marbre (blanc ou du pays ?) » (ibid., p. 200). Ces éléments n’ont pas été retrouvés.

15 Le contexte NOUV 68 F5/F6 comprenait également quelques tesselles en pâte de verre, issues sans doute de la démolition de la salle NOUV 71 HYP.

16 Les résultats de son exploration ont été publiés à deux reprises (Leblois, Leblois 1966b ; 1968). La description proposée dans le présent article s’appuie sur la relecture du rapport de fouille rédigé par Charles Leblois, intitulé « notes 1964 – 2817/64 F 2321 », et sur les données publiées dans ces deux articles.

17 Le mieux préservé en comportait encore neuf et certains disposent d’une base formée d’un ou de deux carreaux plus larges, mesurant 23 à 25 cm de côté.

18 La description publiée par C. et Y. Leblois (Leblois, Leblois 1968, p. 64) est plus explicite que les observations consignées dans le rapport de fouilles : « […] fragments de clayonnage, épais d’environ 4 cm, mélange d’argile et de paille hachée, qui avait été appliqué sur des lattes de bois. Sur la face lissée, qui forme parfois un angle, on voit encore de la peinture bleue, beige, des filets blancs ; on se demande si ce clayonnage ne provient pas d’un plafond en caissons plutôt que d’un mur ». À propos de la mise en œuvre de cette technique en Gaule romaine, voir le cas de la villa de Mane Vechen à Plouhinec (Morbihan) : Boislève, Provost 2011, p. 549.

19 Le prolongement dans la chambre de chaleur est estimé à 1,40 m (soit l’équivalent de sept pilettes juxtaposées). Si l’allongement du canal de chauffe est souvent lié à l’installation d’une baignoire (Degbomont 1984), l’arasement très important des structures n’a laissé aucune trace de ce type d’équipement hydraulique.

20 Plusieurs fragments, encore en place, voisinaient presque les murs de la pièce, ce qui semble exclure la présence d’une bande de raccord sous la forme par exemple de longues dalles. Tous n’ont pas fait l’objet de prélèvements. Leur localisation, assortie parfois de commentaires descriptifs, est précisée en fonction de la position des pilettes, toutes numérotées.

21 Une mosaïque « F1 » non identifiée, conservée au musée de Vienne (Isère), reproduit ce même motif bichrome en négatif (polygones noirs et rectangles blancs, voir Lancha 1974 (p. 72, fig. 8). Sur les sectilia pavimenta noir et blanc, voir Dugué 2003.

22 Bien que ce motif soit davantage utilisé en encadrement de tapis ou pour marquer un seuil.

23 Parmi les 1 479 fragments de cet ensemble, seuls 46 portent au revers des traces de mortier. Hormis un astragale et un fragment de corniche, 22 sont attribuables à des plaques ou des plaquettes de forme indéterminée et 22 autres à des plaquettes géométriques, notamment une partie des fuseaux en diabase de Trèves présentés ci-après.

24 De 0,70 à 0,80 cm de diamètre et de 0,60 à 1,40 cm de profondeur.

25 La pièce no 176 pourrait correspondre à un demi-produit mis en œuvre dans le décor.

26 Particularité que l’on retrouve sur les grandes feuilles d’acanthe vues de face dans les rinceaux de la domus de la Porta Marina à Ostie (Italie) (Becatti 1969).

27 Le plus grand exemplaire complet mesure 12 cm de long et deux autres 10,60 cm.

28 L’interrasum marmor est une technique décorative visant à creuser la surface de plaques de marbre afin d’y incruster de petits éléments en pierre colorée (Bonanni 1998 ; Dubois-Pélerin 2007, p. 106).

29 Un constat similaire a été dressé dans le cadre de la restitution de revêtements muraux dans la villa d’Hadrien à Tivoli. L’amincissement des crustae a été observé en relation avec certains matériaux très spécifiques. La production de pièces fines résulterait avant tout de la volonté de rentabiliser un maximum ce matériau précisément (Cinque, Lazzerri 2012, p. 181).

30 Les matériaux pour les éléments végétaux sont le Jaune antique (Giallo antico) et le Palombino pour figurer la structure principale (feuilles et tiges volubiles), le Rouge antique (Rosso antico) venant ponctuer l’ensemble de ce décor (corolles de fleurs, calices, etc.), le tout sur un fond de Porphyre vert (Porfido verde) dont les nuances sombres font ressortir les détails de la frise.

31 Autres exemples : dans le mausolée impérial à Milan (Italie) élevé vers le milieu du ive s. (Neri et al. 2018), dans les établissements ruraux de Gabia (Marín Díaz, Orfila Pons 2016) et d’Antequera en Espagne (Gutiérrez Deza 2005) ou encore dans les bains de Dioclétien à Palmyre en Syrie (Wielgosz 2013).

32 Voir également les fouilles du nymphée de Punta dell’Epitaffio à Baiae, près de Naples (Italie) (Cuccurullo 2018, p. 513, fig. 2b).

33 Le plus grand mesure entre 15,50 et 16 cm de long et 7,50 cm de large. Neuf d’entre eux portent quelques traces de mortier rose.

34 Seul le triangle en pierre de Meuse no 311 peut résulter de la découpe modulaire d’un carreau de 17 cm de côté. Du reste, les pièces 37 et 194 sont les répliques exactes à 50 % des pièces 416 et 1395 ; les triangles fragmentaires 193, 200 et 201 sont conçus suivant le même modèle.

35 Elles sont induites par une simple pression exercée en fin d’opération de découpe à la scie, afin d’en protéger la lame (Seigne 2000 ; Roux 2020).

36 La villa de Chiragan a livré quelques panneaux végétalisés, considérés comme des chambranles de porte. Le feuillage occupe tout le champ limité par un listel. Voir : https://villachiragan.saintraymond.toulouse.fr (consulté le 04/05/2021).

37 Modèle de chapiteau à une feuille d’acanthe. Un petit chapiteau d’applique en pierre de Meuse a été également identifié à Tongres dans un habitat (Coquelet et al. 2018).

38 Voir le relief à la lionne dans Roux et al. 2018 (p. 375 et p. 376, fig. 5). Le félin est la figure principale du décor en opus sectile de la Porta Marina d’Ostie.

39 Dans les fouilles du grand temple nord de Tongres (Coquelet et al. 2014) ainsi que dans un habitat de la ville (Coquelet et al. 2018).

40 Les séries sculptées dans le schiste armoricain portent de petites scènes mythologiques, mais aussi des décors architectoniques avec des détails végétalisants, comme sur les chapiteaux d’applique, ou de pièces d’armement en référence aux frises d’armes, ainsi que de décors géométriques. Sculptés en creux, ils sont parfois incrustés de pierres pour jouer sur le contraste chromatique, comme le montrent les plaques de schiste bitumineux à Autun (Saône-et-Loire) (Rebourg 1996).

41 La faible quantité d’enduits dans les couches d’incendie et de démolition de la salle, que les inventeurs associent volontiers au décor du plafond plutôt qu’à celui des murs, plaide également en ce sens.

42 Ce que corrobore l’estimation des épaisseurs des plaques : à peine 121 fragments sur les 682 ont une épaisseur supérieure à 2 cm. Les principaux matériaux sont le Gris des Ardennes et la calcite (58 items), la pierre de Meuse (26 items) et le marbre rouge belge (18 items).

43 Voir par exemple les restitutions de la villa d’Arnouville-lès-Gonesse (Val-d’Oise) (Flécher 2012).

44 La restitution des décors de la villa d’Hadrien à Tivoli comprend ce type de composition en couronnement du registre principal (Cinque, Lazzerri 2012).

45 Dans le rapport de fouilles, les dimensions des murs mentionnées varient dans le texte ; nous nous sommes donc fondés sur le croquis annoté associé à la description des structures.

46 Les notes de fouilles mentionnent également des « fragments de colonne en béton » et des « fragments de béton plat ».

47 Apporté également par quelques tesselles en terre sigillée et en Jaune antique (de couleur saumon).

48 Apporté également par quelques tesselles de phtanites noirs.

49 Apporté également par quelques tesselles en calcite (sous forme de rhomboèdres de clivage), en craie (attribuée à la pierre d’Avesnes) et en marbre blanc ou blanc veiné de gris.

50 Plusieurs tesselles conservent encore une feuille d’or prise entre deux plaques de verre incolore.

51 Les notes de fouilles font mention également de quelques fragments de plaques en Gris des Ardennes, d’un « grand fragment de marbre noir » et d’un « rectangle en marbre blanc ».

52 Non illustrés (pièces inventoriées : PB5 et PB10).

53 Il s’agit essentiellement de quelques réglettes en Rouge antique, d’un disque (inachevé ?) en diabase de Trèves ou de rectangles et de triangles façonnés principalement dans le Gris des Ardennes, dans la pierre de Meuse et dans la diabase de Trèves. Seuls six éléments dépassent les 2 cm d’épaisseur.

54 Incomplète, elle mesure 0,44 m de large, 0,57 m de long ; son épaisseur varie entre 2,10 et 2,50 cm.

55 L’analyse du mobilier céramique invite à placer la création de cet ensemble dans la première moitié du iiie s. Les couches de destruction renfermaient notamment un gobelet à col court Niederbieber 33a orné de guillochis (Leblois, Leblois 1968, p. 66 et fig. 5a) et des fragments d’un gobelet à dépressions Niederbieber 33c, tous deux en céramique métallescente de Trèves, un fragment de mortier Drag. 45 et un fragment de coupelle Drag. 46.

56 Ces salles de réception sont bien connues dans les demeures aristocratiques de certaines régions dans l’Antiquité tardive, comme en Aquitaine (Balmelle 2001), mais aussi en Italie et en Orient (Morvillez 1995). Elles se caractérisent souvent par un aménagement triconque et par un décor au sol suggérant la disposition du stibadium. Sur la question de l’abside, voir également Morvillez 2011.

57 Authom, Paridaens 2015, p. 83 : réaménagement de la pièce P57.

58 De Boe 1975 : salle 22 de la phase II.

59 L’exploration de la villa d’Anthée a révélé la présence de marbres et de mosaïques en différents endroits, surtout dans les pièces 7 (où l’inventeur signale la présence d’un opus sectile), 21 (triclinium ?), 63 et 66 (réceptions ?), 76 (bains ?) et 105 (réception à l’écart du bâtiment principal ?) (Del Marmol 1877).

60 Sur la définition du réservoir, voir Dessales 2013, p. 183.

61 La proximité du bassin de rétention de l’aqueduc a été également mise en évidence dans la villa de Goiffieux à Saint-Laurent-d’Agny (Rhône), où l’espace culinaire est adossé aux thermes (Poux 2013).

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Table des illustrations

Titre Fig. 1 – Localisation de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique)
Légende A, en Belgique ; B, à plus petite échelle, aux confins des localités de Nouvelles, Harveng et Asquilies ; C, au sein de la cité antique des Nerviens, par rapport aux sites archéologiques environnants ou mentionnés dans le texte.
URL http://journals.openedition.org/gallia/docannexe/image/6938/img-1.jpg
Fichier image/jpeg, 696k
Titre Fig. 2 – Localisation cadastrale des vestiges de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique), du tracé de son aqueduc et des aménagements topographiques repérés plus au nord
Crédits DAO : C. Coquelet (AWaP), É. Leblois (FAW&B).
URL http://journals.openedition.org/gallia/docannexe/image/6938/img-2.jpg
Fichier image/jpeg, 532k
Titre Fig. 3 – Le réseau fossoyé délimitant l’occupation laténienne et la fosse 69/13 de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique), riche en déchets de construction et en rapport avec la présence d’un bâtiment au moins partiellement construit en dur
Crédits DAO : C. Coquelet (AWaP), É. Leblois (FAW&B).
URL http://journals.openedition.org/gallia/docannexe/image/6938/img-3.jpg
Fichier image/jpeg, 161k
Titre Fig. 4 – Plan théorique de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique) entre le début du iie s. et le iiie s. apr. J.-C.
Légende Organisation des pavillons dans la cour agricole, selon la conception des « villae gallo-romaines à pavillons multiples alignés » et situation des différents contextes ayant livré des pierres ornementales (repris dans le tabl. II).
Crédits DAO : C. Coquelet (AWaP), É. Leblois (FAW&B).
URL http://journals.openedition.org/gallia/docannexe/image/6938/img-4.jpg
Fichier image/jpeg, 748k
Titre Tabl I – Les pierres ornementales mises en œuvre dans les décors de la villa de la Grande Boussue
Légende Les numéros se réfèrent à la localisation des régions d’extraction de la fig. 5.
URL http://journals.openedition.org/gallia/docannexe/image/6938/img-5.jpg
Fichier image/jpeg, 672k
Titre Fig. 5 – L’approvisionnement en pierres ornementales employées dans les revêtements décoratifs de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique)
Légende Les numéros renvoient au tableau d’identification des matériaux (tabl. I). Les matériaux d’origine indéterminée ou dont la localisation ne peut être précisée davantage ne sont pas repris.
Crédits DAO : C. Coquelet (AWaP) ; fond de carte : UCL-Cran.
URL http://journals.openedition.org/gallia/docannexe/image/6938/img-6.jpg
Fichier image/jpeg, 1,0M
Titre Fig. 6 – Les teintes des pierres ornementales employées dans les revêtements décoratifs intérieurs et extérieurs de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique)
Légende Les numéros renvoient au tableau d’identification des matériaux (tabl. I) et à la carte d’approvisionnement (fig. 5). Les marbres blancs comprennent un marbre blanc saccharoïde (no 39a), un marbre blanc grossier (no 39b), un marbre blanc bleuté (no 39c) et un marbre blanc veiné (no 39d).
URL http://journals.openedition.org/gallia/docannexe/image/6938/img-7.jpg
Fichier image/jpeg, 2,3M
Titre Fig. 7 – La diversité des faciès dans les marbres belges
Légende Nos 1 à 4 : Gris des Ardennes ; nos 5 à 8 : Rouge de Rance.
Crédits Clichés et DAO : C. Coquelet (AWaP), É. Leblois (FAW&B).
URL http://journals.openedition.org/gallia/docannexe/image/6938/img-8.jpg
Fichier image/jpeg, 533k
Titre Tabl. II – Les contextes riches en pierres décoratives de la villa de la Grande Boussue et leur périodisation chronologique
Légende * lot de 65 tesselles lithiques (Jaune antique, calcite clivée, craie blanche, marbre blanc ou blanc veiné de gris, porphyre)** 4 tesselles isolées en pierre de Meuse*** lot de quelque 1 500 tesselles en pierre de Meuse et de 12 tesselles en pierre de Lezennes
URL http://journals.openedition.org/gallia/docannexe/image/6938/img-9.jpg
Fichier image/jpeg, 326k
Titre Fig. 8 – Fragments de plaques en pierre de Meuse mis au jour dans la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique) portant des tracés préparatoires et des traces d’outils postérieurs à la période romaine
Crédits Clichés et DAO : C. Coquelet (AWaP), É. Leblois (FAW&B).
URL http://journals.openedition.org/gallia/docannexe/image/6938/img-10.jpg
Fichier image/jpeg, 1,5M
Titre Fig. 9 – La pièce fouillée en 1964 dans l’aile sud de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique) en cours de dégagement
Crédits Cliché : Y. Leblois.
URL http://journals.openedition.org/gallia/docannexe/image/6938/img-11.jpg
Fichier image/jpeg, 732k
Titre Fig. 10 – A, la mosaïque, imitation d’un opus sectile de sol ; B, les éléments fragmentaires en rapport avec d’autres motifs, mis au jour dans la pièce fouillée en 1964 dans l’aile sud de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique)
Crédits Clichés et DAO : C. Coquelet (AWaP), É. Leblois (FAW&B).
URL http://journals.openedition.org/gallia/docannexe/image/6938/img-12.jpg
Fichier image/jpeg, 861k
Titre Tabl. III – Les catégories décoratives en rapport avec la pièce sur hypocauste dans l’aile sud de la villa de la Grande Boussue (NOUV 64 HYP)
Légende Nombre de pièces complètes : 87 ; nombre de pièces à la forme restituable : 216.
URL http://journals.openedition.org/gallia/docannexe/image/6938/img-13.jpg
Fichier image/jpeg, 505k
Titre Fig. 11 – Les chambranles mis au jour dans la pièce fouillée en 1964 dans l’aile sud de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique)
Crédits Clichés et DAO : C. Coquelet (AWaP), É. Leblois (FAW&B).
URL http://journals.openedition.org/gallia/docannexe/image/6938/img-14.jpg
Fichier image/jpeg, 2,0M
Titre Fig. 12 – Les différents types de corniches mis au jour dans la pièce fouillée en 1964 dans l’aile sud de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique)
Crédits Clichés et DAO : C. Coquelet (AWaP), É. Leblois (FAW&B).
URL http://journals.openedition.org/gallia/docannexe/image/6938/img-15.jpg
Fichier image/jpeg, 1,0M
Titre Fig. 13 – Les astragales et les moulures chanfreinées mis au jour dans la pièce fouillée en 1964 dans l’aile sud de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique), avec l’histogramme de leur épaisseur
Crédits Clichés et DAO : C. Coquelet (AWaP), É. Leblois (FAW&B).
URL http://journals.openedition.org/gallia/docannexe/image/6938/img-16.jpg
Fichier image/jpeg, 356k
Titre Fig. 14 – Les crustae en marbre blanc, Rouge antique et Jaune antique, appartenant à des compositions figuratives, mises au jour dans la pièce fouillée en 1964 dans l’aile sud de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique)
Crédits Clichés et DAO : C. Coquelet (AWaP), É. Leblois (FAW&B).
URL http://journals.openedition.org/gallia/docannexe/image/6938/img-17.jpg
Fichier image/jpeg, 896k
Titre Fig. 15 – Les feuilles en Rouge antique mises au jour dans la pièce fouillée en 1964 dans l’aile sud de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique)
Crédits Clichés et DAO : C. Coquelet (AWaP), É. Leblois (FAW&B).
URL http://journals.openedition.org/gallia/docannexe/image/6938/img-18.jpg
Fichier image/jpeg, 612k
Titre Fig. 16 – Les autres crustae figuratives en pierres méditerranéennes, en diabase (no 179) et en Gris des Ardennes (nos EGR 28 et 266), mises au jour dans la pièce fouillée en 1964 dans l’aile sud de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique)
Crédits Clichés et DAO : C. Coquelet (AWaP), É. Leblois (FAW&B).
URL http://journals.openedition.org/gallia/docannexe/image/6938/img-19.jpg
Fichier image/jpeg, 352k
Titre Fig. 17 – Les crustae découpées dans les surfaces blanches ou beiges du marbre rouge de Rance mises au jour dans la pièce fouillée en 1964 dans l’aile sud de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique)
Crédits Clichés et DAO : C. Coquelet (AWaP), É. Leblois (FAW&B).
URL http://journals.openedition.org/gallia/docannexe/image/6938/img-20.jpg
Fichier image/jpeg, 1,1M
Titre Fig. 18 – Le revêtement pariétal de la salle découverte dans la domus de la Porta Marina, exposé au Museo Nazionale dell’Alto Medioevo à Rome (Italie)
Crédits Cliché : C. Coquelet (AWaP).
URL http://journals.openedition.org/gallia/docannexe/image/6938/img-21.jpg
Fichier image/jpeg, 2,0M
Titre Fig. 19 – Les crustae figuratives au regard du motif de rinceau de la Porta Marina à Ostie (Italie)
Crédits D’après Boube 2011 (p. 465, fig. 1) ; clichés et DAO : C. Coquelet (AWaP), É. Leblois (FAW&B).
URL http://journals.openedition.org/gallia/docannexe/image/6938/img-22.jpg
Fichier image/jpeg, 1,3M
Titre Fig. 20 – Les fuseaux en diabase de Trèves mis au jour dans la pièce fouillée en 1964 dans l’aile sud de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique)
Crédits Clichés et DAO : C. Coquelet (AWaP), É. Leblois (FAW&B).
URL http://journals.openedition.org/gallia/docannexe/image/6938/img-23.jpg
Fichier image/jpeg, 1,1M
Titre Fig. 21 – Les décors géométriques, formes triangulaires et bandeaux mis au jour dans la pièce fouillée en 1964 dans l’aile sud de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique)
Crédits Clichés et DAO : C. Coquelet (AWaP), É. Leblois (FAW&B).
URL http://journals.openedition.org/gallia/docannexe/image/6938/img-24.jpg
Fichier image/jpeg, 1,1M
Titre Fig. 22 – Les décors géométriques, bandeaux, baguettes et formes circulaires mis au jour dans la pièce fouillée en 1964 dans l’aile sud de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique)
Crédits Clichés et DAO : C. Coquelet (AWaP), É. Leblois (FAW&B).
URL http://journals.openedition.org/gallia/docannexe/image/6938/img-25.jpg
Fichier image/jpeg, 1,5M
Titre Fig. 23 – Des plaques sculptées en pierre de Meuse et en marbre blanc et une inscription sur plaquette en marbre blanc, mises au jour dans la pièce fouillée en 1964 dans l’aile sud de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique)
Légende A, chapiteau d'applique en marbre blanc ; B, plaque sculptée en pierre de Meuse figurant un animal bondissant ou courant vers la gauche ; C, angles de panneaux sculptés en calcaire gris bleu mosan à Siphonodendron martini et en marbre blanc ; et D, plaquette en marbre blanc portant l'inscription NIVI[.
URL http://journals.openedition.org/gallia/docannexe/image/6938/img-26.jpg
Fichier image/jpeg, 568k
Titre Fig. 24 – A, la pièce fouillée en 1971 dans l’aile sud de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique) ; B, un aperçu de la palette de couleurs de la mosaïque pariétale en pâte de verre en rapport avec cette pièce
Crédits Clichés : Y. Leblois, É. Leblois (FAW&B).
URL http://journals.openedition.org/gallia/docannexe/image/6938/img-27.jpg
Fichier image/jpeg, 2,0M
Titre Tabl. IV – Les catégories décoratives en rapport avec la suite thermale de l’aile nord de la villa de la Grande Boussue
URL http://journals.openedition.org/gallia/docannexe/image/6938/img-28.jpg
Fichier image/jpeg, 125k
Titre Fig. 25 – Restitution des ordres en pierre d’Avesnes et en pierre d’Euville
Crédits Cliché et DAO : C. Coquelet (AWaP), É. Leblois (FAW&B).
URL http://journals.openedition.org/gallia/docannexe/image/6938/img-29.jpg
Fichier image/jpeg, 634k
Titre Fig. 26 – Les plaques moulurées et sculptées en marbre blanc (no 818), en Gris des Ardennes (no 940), en calcaire givétien (no 1165) et en pierre de Meuse, provenant de contextes divers de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (province de Hainaut, Belgique)
Crédits Clichés et DAO : C. Coquelet (AWaP), É. Leblois (FAW&B).
URL http://journals.openedition.org/gallia/docannexe/image/6938/img-30.jpg
Fichier image/jpeg, 676k
Titre Fig. 27 – Quelques découpes inachevées de plaques en Gris des Ardennes (nos 929-935 et 2167), en pierre de Meuse (no 1783) et en marbre rouge de Rance (no 1012)
Crédits Clichés et DAO : C. Coquelet (AWaP), É. Leblois (FAW&B).
URL http://journals.openedition.org/gallia/docannexe/image/6938/img-31.jpg
Fichier image/jpeg, 568k
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Pour citer cet article

Référence papier

Catherine Coquelet, Roland Dreesen, Éric Goemaere, Éric Leblois et Marie-Thérèse Raepsaet-Charlier, « Rome à la campagne : les décors en pierre de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (Mons, Belgique) »Gallia, 80-2 | 2023, 145-178.

Référence électronique

Catherine Coquelet, Roland Dreesen, Éric Goemaere, Éric Leblois et Marie-Thérèse Raepsaet-Charlier, « Rome à la campagne : les décors en pierre de la villa de la Grande Boussue à Nouvelles (Mons, Belgique) »Gallia [En ligne], 80-2 | 2023, mis en ligne le 16 novembre 2023, consulté le 25 mars 2025. URL : http://journals.openedition.org/gallia/6938 ; DOI : https://doi.org/10.4000/gallia.6938

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Auteurs

Catherine Coquelet

Agence wallonne du patrimoine, Direction opérationnelle Zone Centre, avenue Einstein, 12, B-1300 Wavre

Articles du même auteur

Roland Dreesen

Service géologique de Belgique, Institut royal des sciences naturelles de Belgique, rue Vautier, 29, B-1000 Bruxelles

Éric Goemaere

Service géologique de Belgique, Institut royal des sciences naturelles de Belgique, rue Vautier, 29, B-1000 Bruxelles

Éric Leblois

Fédération des archéologues de Wallonie et de Bruxelles, rue de Stambruges, 24, B-7321 Harchies

Marie-Thérèse Raepsaet-Charlier

SociAMM, Université libre de Bruxelles, CP 133/01, avenue F. D. Roosevelt, 50, B-1050 Bruxelles

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