Vers une géographie culturelle de l’Inde
Jai Pal Singh et Mumtaz Khan, 2002, Mythical Space, Cosmology and Landscape.Towards a Cultural Geography of India, Delhi, Manak Publications, 206 p.
Texte intégral
1Dans le numéro 35 de Géographie et Cultures consacré à l’Inde, les deux auteurs indiens de ce livre avaient publié en 2000 une étude sur "Les marques divines du paysage de Kurukshetra", ce haut lieu du seuil indo-gangétique où la tradition veut que se soit déroulée la bataille centrale de l’épopée du Mahabharata, qui tient une place éminente dans la construction de l’hindouisme. Cet article est repris dans ce recueil de huit essais qui constitue un apport de qualité à la géographie culturelle de l’Inde, qui reste, en tant que telle, assez négligée. Depuis l’ouvrage pionnier de David Sopher publié aux presses de l’université Cornell en 1980, An Exploration of India : Geographical Perspectives on Society and Culture, innombrables ont été les diverses études de toutes disciplines apportant quelque chose aux relations entre culture et territoire, si riches en Inde, mais les recueils de géographes centrés sur ce sujet demeurent rares. D’où l’intérêt de ce volume, qui combine travail de terrain, références aux textes normatifs de la tradition hindoue, souci théorique et mise en lumière des évolutions historiques.
2L’intérêt du recueil de Singh et Khan tient à la diversité des thèmes abordés. La géographie mythique hindoue, centrant l’espace terrestre, structuré en sept continents, sur le pivot qu’est le mont Méru, au nord de l’Himalaya, y a sa place (chap. 1), tout comme la confrontation entre les mythes et les manifestations historiques, dans l’espace sacré de Kurukshetra, des logiques de pèlerinages et des jeux des pouvoirs dynastiques (chap. 2). L’inscription dans l’espace des ségrégations sociales est traitée aussi bien par un exemple rural (chap. 4) que par l’étude de villes médiévales (chap. 5). Le concept de paysage culturel est passé au crible dans la région du Méwat, au Sud de Delhi, célèbre pour combiner traditions tribales, influences rajpoutes et islamisation (chap. 8), tandis qu’au fil du volume d’autres approches sont mises en oeuvres : interprétation du "paysage érotique de Khajuraho", célèbre pour ses temples dont les sculptures sont inspirées des théories sexuelles tantriques (chap. 3), modélisation des migrations de mariage en milieu rural, et analyse de l’usage de l’espace dans les nouvelles et les romans d’un écrivain contemporain porté à la critique sociale et géographe de profession : Mohar Singh Yadav.
3L’ensemble des essais porte sur un fragment de l’Inde du Nord, mais c’est assez pour mesurer la richesse de l’approche d’une géographie culturelle qui relie normes, pratiques, sociétés et paysages. Les bibliographies de chaque chapitre témoignent aussi de l’abondance des sources secondaires, et de l’apport des travaux américains dans ce champ géographique et dans l’approche théorique.
Pour citer cet article
Référence papier
Jean‑Luc Racine, « Vers une géographie culturelle de l’Inde », Géographie et cultures, 50 | 2004, 133-134.
Référence électronique
Jean‑Luc Racine, « Vers une géographie culturelle de l’Inde », Géographie et cultures [En ligne], 50 | 2004, mis en ligne le 04 avril 2022, consulté le 13 septembre 2024. URL : http://journals.openedition.org/gc/17189 ; DOI : https://doi.org/10.4000/gc.17189
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