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AccueilNuméros52InéditsLa Religieuse de Georges Brassens

Inédits

La Religieuse de Georges Brassens

Jean-Marc Quaranta
p. 139-156

Texte intégral

  • 1 Voici la description succincte des cinq autres ensembles : 12J2 – une feuille quadrillée, arrachée (...)

1Le fonds Brassens fait partie des archives privées de la ville de Sète. Il comprend sept ensembles de manuscrits autographes dont deux sont reproduits dans ce numéro1 :

    • 2 Francine Goujon, Brouillons d’écrivains. Du manuscrit à l’œuvre, GF Flammarion, coll. « étonnants c (...)

    le dossier 12J1, constitué d’une feuille perforée quadrillé grand format contenant une version de L’Orage proche de la version finale, qui ne figure ni dans l’édition Textuel, ni dans le dossier établi par Francine Goujon2 ;

  • le dossier 12J5, comprenant seize folios constituant une partie des avant-textes de La Religieuse. C’est l’ensemble le plus intéressant du fonds. S’il ne représente probablement qu’une petite partie du travail de Brassens sur ce texte, il n’en constitue pas moins un des dossiers les plus étendus des brouillons de l’écrivain. Même si le classement des différentes pages reste difficile à établir, surtout dans le cadre de cette présentation, ces manuscrits autographes offrent un aperçu très intéressant sur la manière de travailler de Brassens.

2Ce dossier comporte dix feuillets utilisés parfois seulement au recto (fig. 3, 4 et 8) ou au verso (fig. 7), mais le plus souvent recto et verso (fig. 1, 2, 5, 6, et de 9 à 16).

3L’unité de travail de Brassens semble être la page, parfois une partie de page ; rectos et versos ne constituent pas une continuité : une tentative de mise au net au recto voisine souvent avec un début d’élaboration au verso (fig. 1, 2, 4, 5, et de 11 à 16). Si de logique on peut parler, ou d’habitude d’écriture, celle de Brassens consistait à utiliser le verso pour le travail d’exploration scripturale, et le recto pour une mise au net accompagnée d’un travail de rédaction plus limité.

4En effet, les phases d’élaboration (fig. 2, 6, 10, 12, 14, 16) semblent alterner avec des phases de mise au net (fig. 1, 4, 8, 11, 13, 15). Dans les premières, l’écriture de Brassens est plus foisonnante, ce qui se traduit par des ratures plus nombreuses, des passages rédigés en travers de la page (fig. 14) des blancs laissés en réserve pour des mots ou des vers qui restent à trouver (fig. 7, 9, 12 et 16). Le poète encadre les strophes qu’il souhaite garder (fig. 14) ; des traits horizontaux marquent une reprise du travail d’écriture (fig. 14). Le trait sert également à séparer des strophes écrites à la suite (fig. 5). Ce travail de structuration se retrouve aussi dans le plan (fig. 3) qui établit la succession de quatre moments de la chanson, ou quand Brassens indique : « 1ère strophe » (fig. 10) ou « 2[e] strophe mais les punaises de sacristie font courir des bruits » (fig. 13).

5S’agissant de feuilles perforées à petit carreaux, on ne sait si Brassens les rangeait, voire les écrivait, dans un classeur. Dans ce cas, il faudrait faire correspondre chaque verso, non avec son recto mais avec celui qui lui faisait face, comme dans un cahier, la page de droite (recto 2) servant de mise au net, celle de gauche (verso 1) étant utilisée pour l’élaboration. Cet usage rejoindrait celui que Proust fait du cahier, avec l’avantage pour l’écrivain (et le cauchemar pour le généticien) de la mobilité des pages. Il y a donc peut-être lieu de considérer, comme chez Proust, le verso comme un complément du recto lui faisant face, un espace de travail et d’additions en regard d’une mise au net transitoire.

6L’arrivée de nombreux manuscrits dans le fonds Brassens de la ville de Sète et à la Bibliothèque nationale de France offre une belle occasion d’explorer ces hypothèses et d’aller plus loin dans la description et l’interprétation du processus d’écriture de Brassens. Ces acquisitions sont, plus généralement, un appel au développement des travaux sur l’écriture de la chanson.

Note sur la transcription : Brassens ponctue très rarement ses manuscrits et les accentue peu. Pour faciliter la lecture, nous avons rétabli les accents, sauf quand leur absence se double d’une autre erreur d’orthographe (« ses patenotre »).

Fig. 1 : La Religieuse, manuscrit autographe. Fonds Brassens, cote 12J5-1.

© Archives municipales de Sète

Fig. 2 : La Religieuse, manuscrit autographe. Fonds Brassens, cote 12J5-2.

© Archives municipales de Sète

Fig. 3 : La Religieuse, manuscrit autographe. Fonds Brassens, cote 12J5-3.

© Archives municipales de Sète

Fig. 4 : La Religieuse, manuscrit autographe. Fonds Brassens, cote 12J5-4.

© Archives municipales de Sète

Fig. 5 : La Religieuse, manuscrit autographe. Fonds Brassens, cote 12J5-5.

© Archives municipales de Sète

Fig. 6 : La Religieuse, manuscrit autographe. Fonds Brassens, cote 12J5-6.

© Archives municipales de Sète

Fig. 7 : La Religieuse, manuscrit autographe. Fonds Brassens, cote 12J5-7.

© Archives municipales de Sète

Fig. 8 : La Religieuse, manuscrit autographe. Fonds Brassens, cote 12J5-8.

© Archives municipales de Sète

Fig. 9 : La Religieuse, manuscrit autographe. Fonds Brassens, cote 12J5-9.

© Archives municipales de Sète

Fig. 10 : La Religieuse, manuscrit autographe. Fonds Brassens, cote 12J5-10.

© Archives municipales de Sète

Fig. 11 : La Religieuse, manuscrit autographe. Fonds Brassens, cote 12J5-11.

© Archives municipales de Sète

Fig. 12 : La Religieuse, manuscrit autographe. Fonds Brassens, cote 12J5-12.

© Archives municipales de Sète

Fig. 13 : La Religieuse, manuscrit autographe. Fonds Brassens, cote 12J5-13.

© Archives municipales de Sète

Fig. 14 : La Religieuse, manuscrit autographe. Fonds Brassens, cote 12J5-14.

© Archives municipales de Sète

Fig. 15 : La Religieuse, manuscrit autographe. Fonds Brassens, cote 12J5-15.

© Archives municipales de Sète

Fig. 16 : La Religieuse, manuscrit autographe. Fonds Brassens, cote 12J5-16.

© Archives municipales de Sète

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Notes

1 Voici la description succincte des cinq autres ensembles : 12J2 – une feuille quadrillée, arrachée d’un cahier grand format, présentant, au recto, six vers d’un texte en alexandrins, à l’encre violette, et, à l’encre noire, quatre strophes des Lilas, suivi de l’ébauche d’une cinquième, et au verso des amorces de vers pour cette même chanson ; 12J3 – une feuille perforée quadrillée grand format, présentant une version quasiment définitive des Quatre bacheliers (seule une strophe est supprimée ; le texte commence au verso et se termine au recto) ; 12J4 – manuscrit autographe pour la chanson Jean rentre au village (voir Georges Brassens, Œuvres complètes, J.-P. Liegeois (éd.), Le Cherche Midi, coll. « Voix publiques », Paris, 2007, p. 591) ; 12J6 – manuscrit autographe, extrait d’un poème d’Hégésippe Moreau « Sur la mort d’une cousine de sept ans » (2e strophe) ; 12J7 – « manuscrit autographe signé sur les Compagnons de la chanson », texte de présentation du groupe. Cet ensemble et les informations qui le concernent nous ont été communiqués par Madame Markidès, directrice des archives municipales de Sète que nous tenons à remercier pour son aide précieuse.

2 Francine Goujon, Brouillons d’écrivains. Du manuscrit à l’œuvre, GF Flammarion, coll. « étonnants classiques », Paris, 2004, p. 118-123. Des brouillons de L’Orage sont reproduits dans mon étude sur Brassens, qui précède.

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Table des illustrations

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Pour citer cet article

Référence papier

Jean-Marc Quaranta, « La Religieuse de Georges Brassens »Genesis, 52 | 2021, 139-156.

Référence électronique

Jean-Marc Quaranta, « La Religieuse de Georges Brassens »Genesis [En ligne], 52 | 2021, mis en ligne le 01 juillet 2022, consulté le 16 juin 2025. URL : http://journals.openedition.org/genesis/5879 ; DOI : https://doi.org/10.4000/genesis.5879

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Auteur

Jean-Marc Quaranta

Jean-Marc Quaranta est maître de conférences en littérature française et création littéraire à l’université d’Aix-Marseille, où il est responsable du diplôme universitaire « Formateur en ateliers d’écriture » et de la licence de lettres modernes « Création littéraire et cinématographique ». Chercheur associé à l’ITEM, il est spécialiste de l’étude génétique des brouillons de Marcel Proust. Il a publié Le Génie de Proust (Honoré Champion, 2011), les Lettres au duc de Valentinois de Marcel Proust (Gallimard, coll. « Blanche », 2016), Houellebecq aux fourneaux (Plein Jour, 2016), Marcel Proust, Jean Santeuil (codirigé avec Stéphane Chaudier, aux éditions du Septentrion, 2019) et Un Amour de Proust. Alfred Agostinelli (1888-1914) (Gallimard, 2021).

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