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Une mise en scène ratée ? La visite perturbée de Michel Debré à Alger (8-11 février 1959)

A failed ceremonial scene? The troubled visit of Michel Debré to Algiers (February 8–11, 1959)
Majid Embarech

Résumés

Cet article propose d’analyser, à partir des archives du préfet d’Alger, le déroulement perturbé de la visite du Premier ministre Michel Debré en Algérie, en février 1959. Après un passage aux monuments aux morts d’Alger, la visite d’une cité d’habitation algéroise va donner lieu à un incident assez exceptionnel dans une mécanique protocolaire codifiée. Cet événement, s’il a troublé de manière inédite la mise en scène protocolaire, a surtout mis au jour la réalité de la répression en Algérie.

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Texte intégral

  • 1 Michel Debré et l’Algérie, actes du colloque de l’Assemblée nationale, 27 et 28 avril 2006, Associa (...)
  • 2 Grey Anderson, La guerre civile en France 1958-1962. Du coup d’État gaulliste à la fin de l’OAS, Pa (...)
  • 3 Michel Debré, Trois Républiques pour une France, Mémoires, 1946-1958, t. 2, Paris, Albin Michel, 1 (...)

1Au début de l’année 1959, la France mène depuis près de quatre ans une guerre en Algérie, même si les autorités n’osent la qualifier ainsi. Après l’établissement de la Ve République en octobre 1958, le général de Gaulle a fait de la restauration de l’autorité de l’État en Algérie une priorité. Il annonce un vaste plan de développement de l’Algérie et il propose dans le même temps aux combattants algériens de cesser les combats, en établissant une « paix des braves », inacceptable pour le Front de libération nationale (FLN). Sur le plan militaire, les succès de l’armée française se confirment, avec, à partir de février 1959, une série d’offensives lancées par le général Challe (commandant en chef des forces françaises en Algérie depuis décembre 1958), qui affaiblissent considérablement l’Armée de libération nationale (ALN) et qui portent à son apogée la domination de l’armée française sur les maquis du FLN. La personne de Michel Debré incarne la défense de l’Algérie française, dans la mesure où il n’a cessé de se dire partisan du maintien de l’Algérie « dans ou avec » la France1. Pour cette raison, il était favorable au redressement de la France par la fin de la IVRépublique et il a œuvré pour le retour au pouvoir de De Gaulle2. Il a même été accusé d’avoir été impliqué dans l’attentat au bazooka contre le général Salan, en janvier 19583. L’accusation a cependant été portée après-coup, pour le mettre en difficulté en raison de sa position délicate en tant que Premier ministre. Nommé garde des Sceaux en juin 1958 dans le gouvernement de Gaulle, dernier président du Conseil de la IVe République, Michel Debré joue un rôle essentiel dans la rédaction de la constitution de la Ve République. Après l’adoption de la nouvelle constitution par référendum et la victoire des gaullistes aux élections législatives, il est nommé Premier ministre le 8 janvier 1959. Il forme alors un nouveau gouvernement composé de vingt-sept membres, majoritairement des hauts fonctionnaires et des membres du parti gaulliste, l’Union pour la nouvelle République (UNR).

  • 4 Il s’agit du dossier des Archives nationales d’outre-mer d’Aix-en-Provence (ANOM), côté 91/1K/1077, (...)
  • 5 ANOM, 91/1K/1077, Note de renseignement au préfet du commandant de la brigade motorisée d’Alger, (...)
  • 6 Sylvie Thénault, Histoire de la guerre d’indépendance algérienne, Paris, Flammarion, 2012, p. 189 (...)
  • 7 Sylvie Thénault, Une drôle de justice, les magistrats dans la guerre d’Algérie, Paris, La Découv (...)

2Le fonds du cabinet du préfet d’Alger disponible aux Archives nationales d’outre-mer (ANOM) recèle un dossier particulièrement intéressant le concernant, au sujet d’un voyage qu’il a effectué en Algérie du 8 au 11 février 19594. Ce dernier se déroule dans un contexte de grande tension, les autorités craignant des manifestations hostiles au Premier ministre en raison de la grâce récente de combattants du FLN condamnés à mort5. Le général de Gaulle mène alors une politique de clémence à l’égard des Algériens réprimés, politique qui amène à libérer des milliers d’internés des centres de triage et de transit militaires, comme des « centres d’hébergement » civils. Les premiers voient leurs effectifs baisser de 20 500 en avril 1958 à 15 000 durant l’été 1958, avant de fluctuer et d’atteindre le chiffre de 17 500 en janvier 19596. Mais, surtout, une fois devenu le premier président de la Ve République, en janvier 1959, le général de Gaulle décide de gracier les condamnés à mort algériens en attente de décision sur leur sort. Au total, 309 condamnés à mort ont bénéficié de cette grâce présidentielle au cours de l’année 19597 Le général de Gaulle rompt ainsi ostensiblement avec la politique antérieure, les exécutions s’enchaînant à un rythme soutenu avant le 13 mai 1958.

  • 8 Olivier Ihl, « Sous le regard de l’indigène. Le voyage du président Loubet en Algérie », dans Olivi (...)

3Pour le gouvernement, l’enjeu de la visite de Michel Debré est – sans désavouer ces mesures d’apaisement – de rassurer l’armée et la population européenne d’Algérie, en manifestant dans l’espace public la cordialité et les égards habituels pour ce type de déplacement. Le protocole doit être soigné, en vertu de la fonction traditionnelle des protocoles des voyages officiels en Algérie. Il consiste alors à montrer – aussi bien au visiteur qu’à l’opinion publique métropolitaine et en Algérie – le décor algérien et les effets positifs de la présence française8. De ce point de vue, les archives témoignent d’une certaine forme de continuité des pratiques administratives, bien que, au moment de la visite du Premier ministre, le pouvoir à Alger fait l’objet d’une forte recomposition.

  • 9 Michèle Cointet, De Gaulle et l’Algérie française, Paris, Perrin, 2012, p. 27.

4Par ailleurs, pendant la guerre d’Algérie, la scénographie des voyages officiels recouvre un enjeu spécifique : rendre « invisible » les nationalistes algériens et assurer des progrès de la « pacification » du territoire. En outre, à partir de la fin de l’année 1958, le protocole des voyages s’inscrit dans une logique de promotion des effets de la politique de développement économique et social mise en œuvre par le gouvernement avec le plan de Constantine (ce plan quinquennal a pour objectif de créer 210 000 logements et 400 000 emplois)9. Il doit donc se dérouler selon une scénographie extrêmement rôdée, chargée de montrer les réalisations urbanistiques modernes construites en Algérie et le soutien – si ce n’est l’enthousiasme – des Européens et des Algériens. Néanmoins, contrairement à la quasi-totalité des documents administratifs de la préfecture d’Alger qui dressent en général des comptes rendus lénifiants des visites de personnalités officielles en Algérie, la visite du Premier ministre va faire l’objet d’un incident perturbateur dans la mise en scène bien huilée du protocole des visites de responsables gouvernementaux dans le département d’Alger.

Le rétablissement du pouvoir civil en Algérie au début de l’année 1959

  • 10 L’expression comité de salut public désigne les comités insurrectionnels mis en place en mai 1958 d (...)
  • 11 Sylvie Thénault, Histoire…, op. cit., p. 193 et p. 224.
  • 12 Michèle Cointet, De Gaulle…, op. cit., p. 44-45.
  • 13 Laurent Schiaffino, dernier descendant d’une dynastie d’armateurs d’origine génoise, est aussi él (...)

5Depuis le 13 mai 1958, les militaires d’Algérie sont parvenus au faîte de leur puissance : outre leur implication dans les comités de salut public10, ils cumulent alors, à chaque échelon du découpage territorial, les pouvoirs civils et militaires. Les chefs de corps d’armée d’Oran, d’Alger et de Constantine, les généraux Rethoré, Massu et Olié font aussi fonction de préfet IGAME (inspecteur général de l’administration en mission extraordinaire). Dès lors, le rétablissement de l’autorité de l’État en Algérie a nécessité, outre l’élaboration d’une constitution renforçant l’exécutif, l’éviction des militaires de toute responsabilité civile : dès le 13 octobre 1958, le général de Gaulle rappelle aux militaires leur devoir d’obéissance et il les enjoint d’adopter une stricte neutralité vis-à-vis de la politique du gouvernement en Algérie11. Entré en fonction le 19 décembre 1958, Paul Delouvrier devient délégué général du gouvernement en Algérie alors que le général Challe, le commandant en chef, devient son subordonné. Inspecteur des finances et haut fonctionnaire à la Communauté européenne du charbon et de l’acier (CECA), ancien directeur de cabinet de René Mayer, véritable cacique de la vie politique algérienne, Paul Delouvrier  qui a établi un rapport sur la mise en valeur de l’Algérie et le plan de Constantine  est choisi en partie pour désarmer les éventuelles oppositions des Européens à la politique du gouvernement12. Raymond Deugnier, issu du corps préfectoral et nommé préfet d’Alger en janvier 1959, incarne la politique de restauration de l’autorité de l’État voulue par le général de Gaulle. En plus d’être politique et administrative, cette restauration concerne également les domaines symbolique et honorifique : le préfet s’empresse donc de couvrir d’attention les représentants les plus influents des Français d’Algérie. Il invite par exemple, au nom du Premier ministre, des élus algériens comme le sénateur Laurent Schiaffino13, par ailleurs président de la région économique de l’Algérie. Ce dernier est présent, comme une grande partie des personnalités locales les plus influentes, à la cérémonie au monument aux morts d’Alger. Cette présence ne permet cependant pas de masquer le caractère controversé de la visite du Premier ministre.

Une visite sous tensions

  • 14 Ibid, Note de renseignement des RG (renseignements généraux), 6 février 1959.
  • 15 Ibid, Notes de la préfecture d’Alger aux responsables politiques, syndicaux et religieux à l’occasi (...)

6La venue de Michel Debré fait l’objet de mesures de sécurité particulièrement renforcées, comme l’indique une note de service de la Sûreté nationale qui appelle à « une vigilance accrue sur l’itinéraire emprunté par le Premier ministre ». Les contrôles aux entrées des immeubles sont stricts ainsi que l’accès aux terrasses, et toutes les personnes désirant assister au passage du cortège depuis celles-ci doivent être fouillées. Des rumeurs circulent dans les milieux politiques au sujet d’un éventuel accueil hostile du Premier ministre, même si l’ensemble des formations politiques algéroises restent globalement dans l’indécision. Les rapports mentionnent le mécontentement d’une population algéroise qui s’interroge sur les conditions dans lesquelles elle doit recevoir le Premier ministre. Une partie des notables politiques locaux, comme par exemple le député Pierre Vigneau, député de Médéa, ont fait savoir qu’ils acceptaient de participer aux cérémonies et aux manifestations officielles, en témoignant « de l’enthousiasme ou avec les plus grandes réserves », selon que Michel Debré apporterait ou non dans ses discours à Alger des apaisements sur la solution du « problème algérien14 ». Les rapports transmis au préfet font état d’un tract distribué à la population dans les boîtes aux lettres, sur lequel figure des messages accusant le Premier ministre de s’engager dans la voie de l’abandon de la souveraineté française en Algérie et qui le compare à Pierre Mendès France, perçu comme l’incarnation de cette politique. En dépit de ce contexte de remise en cause de l’autorité de l’État, le préfet Raymond Deugnier tente de maintenir les us et coutumes protocolaires, du moins sur le plan formel, comme en témoignent les nombreux courriers adressés à la classe politique locale, aux personnalités du monde syndical ainsi qu’aux dignitaires religieux15.

Une première déconvenue : la visite perturbée au monument aux morts (9 février 1959)

  • 16 Le Monument aux morts d’Alger de Paul Landowski (1875-1961), réalisé en collaboration avec Charles (...)
  • 17 Guy Pervillé, « La SFIO, Guy Mollet et l’Algérie », dans Bernard Ménager, Philippe Ratte, Jean-Lou (...)
  • 18 Syvlie Thénault, Histoire…, op. cit., p. 136.

7Pour tout visiteur officiel qui se rend en Algérie, la visite au monument aux morts constitue une étape obligée, le monument représentant un « lieu de mémoire » central de la présence française à Alger16. Les Français d’Algérie, mobilisés en grande partie depuis l’hiver 1955-1956 autour de la défense inconditionnelle de l’Algérie française, ont en effet choisi comme point de ralliement le monument aux morts d’Alger, lieu symbolique du sang versé pour la défense de la France. Rappelons que le 6 février 1956, ce lieu emblématique a donné lieu à une contestation radicale du rituel protocolaire lors de la venue du président du Conseil Guy Mollet17. Une foule de plusieurs milliers d’Européens avait lancé, entre autres, tomates et quolibets, afin de manifester son mécontentement en raison de la nomination du général Catroux, connu pour ses idées libérales et considéré comme susceptible de « brader » l’Algérie française. Le président du Conseil avait alors déposé une gerbe au monument aux morts, gerbe aussitôt piétinée par la foule, et il a dû quitter les lieux après une cérémonie réduite, en raison des circonstances, à cinq minutes. Ces incidents ont mis en lumière le rôle des associations d’ancien combattants  comme le Comité d’entente des anciens combattants – qui s’érigent en porte-parole de l’opinion des Français d’Algérie, où la frange ultra gagne en force. Le monument se situe dans la perspective du boulevard Laferrière, sur l’esplanade qui descend vers la mer à partir de la place du Forum, devant le Gouvernement général de l’Algérie. Ce lieu permet aux Français d’Algérie de manifester à portée de vue des représentants du pouvoir, rappelant les gouvernements à leurs devoirs de solidarité et de fidélité envers ceux qui ne se sont pas dérobés en d’autres temps difficiles18.

  • 19 Ahmed Ben Bella est arrêté en mai 1950 à Alger et il est condamné à sept ans de prison. Il s’év (...)
  • 20 Sur l’influence de Jeune Nation à Alger, voir Anne-Marie Duranton-Crabol, Le temps de l’OAS, Bruxe (...)

8Au cours de la cérémonie du 9 février 1959, la foule est peu nombreuse (elle est évaluée à environ 1 500 personnes), si on la compare à celle qui, trois ans auparavant, avait conspué Guy Mollet. À la descente de voiture de Michel Debré, une partie de la foule présente pousse le cri d’« Algérie française, fusillez Ben Bella ». Emprisonné par les autorités françaises, Ahmed Ben Bella est l’un des neuf « chefs historiques » fondateurs du FLN19. Bien qu’il soit, au début de l’année 1959, en perte d’influence au sein du FLN, son statut de haut responsable de l’organisation indépendantiste explique la vindicte dont il fait l’objet de la part des manifestants. L’exécution de l’hymne national ramène le calme, mais les cris reprennent lorsque Michel Debré passe les troupes en revue puis dépose une gerbe devant le cénotaphe. Après la minute de silence, quelques personnes, minoritaires, ovationnent le Premier ministre au milieu des cris. Avant de regagner sa voiture, Michel Debré et le général Massu s’avancent vers les perturbateurs, dont les cris de « fusillez Ben Bella » redoublent. Michel Debré, ne parvenant pas à établir de contact avec les manifestants, regagne sa voiture. Dispersés par le service d’ordre, les manifestants quittent les lieux, puis un groupe d’une trentaine d’étudiants se reforme et monte au forum pour y abattre la croix de Lorraine. Le groupe s’engage ensuite rue Michelet, certains de ses membres hurlant « Debré à la mer » et, plus rarement, « De Gaulle au poteau ». Le rapport précise enfin que ces incidents proviennent de jeunes appartenant à la Fédération des étudiants nationalistes, un groupuscule issu du mouvement « Jeune Nation », une organisation pro-Algérie française (dissoute depuis 1958) bien implantée au sein des milieux estudiantins algérois20. Cet accueil perturbé lors de la première journée du Premier ministre à Alger, s’il a été en partie anticipé par les services de police, n’a donc pas été évité. Pour le préfet d’Alger, il souligne la nécessité de mettre au planning de la visite un dispositif rodé  limitant les contacts avec la population  et expérimenté de multiples fois lors des visites officielles en Algérie.

L’autre « passage obligé » : la visite de Diar-es-Saada et de Diar-el-Mahçoul

  • 21 Majid Embarech, Mettre en scène l’Algérie coloniale. Les préfets d’Alger et le protocole (1936-1961 (...)
  • 22 Si l’on s’en tient aux données brutes des recensements successifs, la population totale de l’Algéri (...)
  • 23 Danièle Voldman, Fernand Pouillon, architecte, Paris, Payot, 2006, 360 p. ; idem, « Fernand Pouillo (...)

9La visite des cités d’habitations de Diar-es-Saada et de Diar-el-Mahçoul est, dès le début des années 1950, une étape systématique pour les visiteurs officiels français comme étrangers. Ainsi, sur un ensemble de trente-quatre visites réalisées entre 1952 et 1961, les cités d’Alger sont au programme à seize reprises, soit pour près de la moitié des séjours dans le département, sans que des demandes explicites ne soient formulées par les visiteurs21. Pour comprendre les raisons de la promotion de ces réalisations urbanistiques, qui norment les visites et en figent la mise en scène, il convient de revenir sur les conditions de création de ces ensembles de logements qui surplombent la métropole algéroise. Ces programmes de construction ont été conçus à l’origine comme autant de réponses à la détérioration des conditions de logement de la population algérienne ainsi qu’à l’augmentation du nombre de bidonvilles dans les banlieues algéroises22. Ces unités d’habitation ont été réalisées par l’architecte Fernand Pouillon, qui s’est fait connaître au début des années 1950 à l’occasion de la reconstruction du Vieux-Port de Marseille, démoli sur ordre des Allemands en 1943, et de la construction de logements sociaux à Aix-en-Provence, près du centre-ville. Dans ces différents chantiers, Pouillon a cherché à abaisser les coûts de construction, à limiter la durée des travaux tout en offrant aux classes populaires des habitations de qualité23. Cette réussite attire l’attention des pouvoirs publics confrontés à une forte crise du logement, due à un déficit ancien de constructions aggravé par l’explosion démographique de l’après-guerre. Dans les années 1950, la situation en Algérie est très similaire aux villes métropolitaines. D’ultimes mais tardifs essais pour réformer l’espace urbain algérois, face à la pression démographique des Algériens, sont mis en œuvre, mais le fondement même du rapport colonial rend impossible un réel changement de politique urbaine ; seules quelques retouches sont opérées et « enrobées » dans un discours progressiste. Ainsi, la division entre Européens et Algériens se retrouve dans la disposition des logements : la « cité confort normal », réservée aux Européens, propose un confort supérieur et des vues agréables sur la baie d’Alger tandis que la « cité simple confort », dont les logements sont attribués aux Algériens, est composée d’appartements plus exigus avec vue sur la route. L’organisation de la visite est censée masquer cette réalité, et les autorités – apparemment instruites par le fiasco de l’étape au monument aux morts – souhaitent limiter au maximum les interactions avec la foule algéroise. Ces précautions ne vont toutefois pas empêcher l’apparition d’une autre brèche dans le dispositif protocolaire.

La visite de Diar-el-Mahçoul : l’incident inattendu

10La visite du Premier ministre est marquée par un incident qui met au jour les tensions entre le préfet IGAME d’Alger et l’armée. Le 10 février 1959, Michel Debré, accompagné de Nafissa Sid Cara (députée d’Alger depuis 1958 et secrétaire d’État chargée des questions sociales en Algérie ainsi que de l’évolution du statut personnel de droit musulman), visite, dans la cité de Diar-el-Mahçoul, l’appartement de F’Touma Boukas. Elle est l’épouse d’un certain Mohammed Doum et elle a été choisie après une enquête pour accueillir le chef du gouvernement. Lors de l’entretien entre Michel Debré et l’épouse de Mohammed Doum, cette dernière se plaint de la disparition de son époux – pointeur à la compagnie générale transatlantique – depuis le 18 août 1958, date à laquelle il se serait rendu au commissariat du 11e arrondissement d’Alger. Mohammed Doum aurait été accompagné par deux de ses camarades de travail, qui seraient, le soir même, venus prévenir son épouse que son mari serait relâché le jour suivant. Les deux hommes seraient venus à nouveau le lendemain pour lui annoncer l’arrestation de son époux. Depuis cette date, F’Touma Boukas a effectué de nombreuses démarches et elle a adressé une volumineuse correspondance aux autorités civiles et militaires pour obtenir des nouvelles. Cet entretien est d’autant plus perturbateur que tout a été mis en œuvre pour que les quelques habitants autorisés à dialoguer avec le Premier ministre lui expriment leur gratitude et le remercient pour l’amélioration de leurs conditions d’hébergement.

  • 24 ANOM, 91/1K/1077, Note de la police des renseignements généraux d’Alger, 15 février 1959.
  • 25 Ibid, Lettre du colonel Godard, délégué général du gouvernement en Algérie au général comma (...)

11Les recherches entreprises n’ont donné aucun résultat et les réponses qu’a reçues F’Touma Doum sont restées négatives24. L’enquête établie par la police des Renseignements généraux (RG) au préfet fait apparaître que Mohammed Doum, connu de l’autorité militaire pour son appartenance au FLN, a été convoqué par un officier du 2e bureau (appartenant au renseignement militaire) traitant une affaire dans laquelle l’intéressé se trouvait impliqué. C’est le gardien en chef de la cité, un dénommé Saïd Khalfa, qui a choisi l’appartement visité par le Premier ministre. Or, d’après les services de renseignement de l’armée, Saïd Khalfa est connu pour ses sentiments « extrémistes » et « séparatistes », selon les termes officiels. Les forces de l’ordre ont saisi des informations provenant d’un responsable du Mouvement national algérien (MNA), le mouvement rival du FLN, qui mentionnent que l’intéressé a été placé sur une liste d’individus « dangereux ». Il a été condamné à six mois d’emprisonnement en 1956 pour collusion avec le FLN et atteinte à la Sûreté extérieure de l’État25. Il a de plus pris une part active à la diffusion de mot d’ordre de grève générale lancé à Alger par le FLN en 1957 et a fait obtenir un logement à un nationaliste algérien recherché par les services de police. Il a enfin été interpellé plusieurs fois par les services de police alors qu’il distribuait dans les boîtes aux lettres des habitants de Diar-el-Mahçoul des tracts du FLN.

Les responsabilités du dysfonctionnement

  • 26 Le Monde, 8 janvier 1959, « Le mouvement préfectoral comporte trois importantes nominations en Algé (...)
  • 27 ANOM, 91/1K/1077, Lettre du délégué général du gouvernement en Algérie au général commandant le cor (...)
  • 28 Ibid., Lettre de Massu au préfet Deugnier, 1er juin 1959.
  • 29 Ibid.

12Les autorités redoutent que cette disparition mette à mal la réputation du gouvernement dans son action de développement économique et social de l’Algérie. Plus largement, cette affaire souligne les relations délicates et la difficile coordination entre les pouvoirs civil et militaire dans le département d’Alger. En effet, dans ce territoire, le délégué général du gouvernement a choisi de séparer les responsabilités civiles et militaires, alors qu’a contrario, il a fait le choix de concentrer les pouvoirs entre les mains de l’armée en Grande-Kabylie, conformément au décret du 16 décembre 1958 relatif à la réorganisation des pouvoirs en Algérie26. Dans cette affaire, le délégué général doit faire preuve de diplomatie car il ne peut ouvertement désavouer les autorités militaires – théoriquement placées sous son autorité – et il doit dans le même temps ménager le préfet dont la tâche est de redonner au pouvoir civil le contrôle de la situation en Algérie. En raison de cette délicate situation, le délégué général questionne à la fois l’armée et la préfecture, et il demande en particulier des explications sur le fait que la responsabilité du choix de l’appartement ait été confiée à Saïd Khalfa27. Il cherche également à connaître les raisons de son maintien en activité comme gardien en chef de la cité évolutive et il ordonne une enquête sur le sort de Mohammed Doum. La correspondance entre le préfet Deugnier et le général Massu témoigne de leurs relations tendues, que même le langage administratif ne parvient pas à masquer. Le général Massu écrit alors au préfet Raymond Deugnier28, pour le prier d’ordonner une enquête sur le comportement de Saïd Khalfa et d’intervenir, en fonction du résultat de l’enquête, en vue de son éventuel licenciement. Jacques Massu précise notamment au préfet qu’il n’est pas possible de « priver de leur gagne-pain toutes les personnes ayant eu des sympathies pour le FLN » même si, en revanche, il est selon lui indispensable « d’agir avec sévérité contre ceux qui ne se sont pas amendés29 ».

  • 30 Ibid., Lettre du délégué général du gouvernement au général exerçant les pouvoirs civils dan (...)

13Si la recherche des responsabilités de cet incident met en lumière la délicate question des périmètres de compétences dévolus aux autorités civiles et militaires dans le département d’Alger, elle souligne également l’importance des questions de sécurité. La gestion du bon déroulement d’une visite du chef du gouvernement comporte, outre les aspects purement protocolaires, une forte dimension sécuritaire, a fortiori dans le contexte d’une guerre qui se déroule depuis près de quatre ans. Pour le préfet, l’interpellation  non prévue dans le programme de la visite – du Premier ministre concerne le maintien de l’ordre, et il fait remarquer que ce domaine ne relève pas de sa compétence. Après avoir rappelé que l’idée de réaliser la visite d’un appartement venait de l’entourage du Premier ministre, il exprime clairement son mécontentement, et il refuse d’assumer une quelconque responsabilité dans l’incident ainsi que d’éventuelles sanctions à l’encontre de Saïd Khalfa, sur lequel il n’est pas en mesure de fournir des renseignements. Le délégué général du gouvernement à Alger n’est pas satisfait de la réponse du préfet : il fait observer que ce n’est pas le préfet d’Alger qui aurait dû répondre aux questions posées, mais le commandant du secteur Alger-Sahel. Il réitère expressément ses demandes de renseignements sur le sort de Mohammed Doum et le licenciement de Saïd Khalfa30. Il apparaît que Paul Delouvrier tient ici rigueur au préfet de ne pas avoir su sélectionner un Algérien « fiable » capable d’indiquer un appartement qui aurait permis de mettre en scène une visite « réussie », montrant un Premier ministre à la rencontre des Algériens et s’assurant des progrès de la politique sociale du gouvernement. Cet incident protocolaire révèle également les incompréhensions et les tensions qui opposent les autorités civiles et militaires, en particulier depuis l’été 1958. Le délégué général prend ce problème au sérieux et il n’accepte pas que les militaires soient incapables de justifier la disparition de Mohammed Doum.

  • 31 Raphaëlle Branche, La torture et l’armée pendant la guerre d’Algérie (1954-1957), Paris, Gallimard, (...)
  • 32 Sylvie Thénault, « Dérogation générale et déclassification des archives contemporaines. Le cas d’Au (...)
  • 33 Malika Rahal, Ali Boumendjel. Une affaire française, une histoire algérienne, Paris, La Découverte, (...)

14L’incident est d’autant plus grave que les disparitions sont une question importante, très présente dans l’espace public français et qu’elles sont centrales dans la dénonciation de la guerre en métropole depuis l’année 1957. Ces « disparitions forcées », selon la terminologie utilisée en droit international, découlent de la logique de guerre mise en œuvre par les autorités françaises dans leur lutte contre le FLN et son bras armé, l’ALN, qui ne peuvent exister, agir et survivre qu’en symbiose avec les Algériens. Lors de ses opérations, dans les villages comme dans les villes, l’armée française arrête des hommes et des femmes pour les contrôler, les ficher, les interroger, mais aussi pour faire peur et dissuader tout un chacun de s’engager. Les disparitions, consécutives à des exécutions sommaires ou à des décès sous la torture, participaient de la terreur31. Dans ce contexte, l’encadrement légal de la guerre est fondamental, comme le montre l’abondante correspondance administrative disponible sur le cas de Mohammed Doum. Depuis la loi des pouvoirs spéciaux du 17 mars 1956  qui a permis au gouvernement de Guy Mollet de signer un décret autorisant la délégation des pouvoirs de police à l’armée en Algérie , les militaires ont mis en œuvre un système d’« arrestation détention », largement appliqué lors de la « bataille d’Alger » (que les Algériens qualifient de « grande répression d’Alger »), menée entre le 7 janvier et le 9 octobre 1957 et étendu progressivement à l’ensemble du territoire algérien. C’est dans le cadre de ce vaste système autorisant les rafles, les tortures et les exécutions que s’inscrit donc la disparition de Mohammed Doum, comme celles du mathématicien Maurice Audin32, ou encore de l’avocat et membre du FLN Ali Boumendjel33, disparus pendant la « bataille d’Alger ».

  • 34 ANOM, 91/1K/1077, Note de la police des renseignements généraux au préfet d’Alger, 29 juillet 1959.
  • 35 Jim House, « Double présence. Migrations, liens ville-campagne et luttes pour l’indépendance. Alger (...)
  • 36 Archives nationales, 98AJ/3, Archives de Michel Debré Premier ministre (1959-1962).
  • 37 ANOM, 91/1K/1077, Lettre du préfet d’Alger à la police des renseignements généraux, 10 mai 1959.

15En dernier lieu, la documentation administrative montre que le général Massu et le préfet Raymond Deugnier se rejettent la responsabilité de l’incident et que les deux responsables se concentrent avant tout sur le rôle Saïd Khalfa, faute de pouvoir apporter une réponse à la disparition de Mohammed Doum34. Si le sort de ce dernier reste inconnu, les éléments d’informations sur le parcours et le « profil » de Saïd Khalfa sont en revanche nombreux. Les deux responsables semblent compenser leur incapacité à répondre à leur supérieur hiérarchique en fournissant au délégué général une enquête complète sur le parcours d’un individu fortement soupçonné de collusion avec le FLN. Il est possible que Saïd Khalfa ait joué un double jeu en se présentant auprès des militaires comme un indicateur fiable, capable de fournir des renseignements sur une possible activité « rebelle » dans une zone d’habitation urbaine, tout en soutenant, en sous-main, l’action du FLN. Ce double jeu est d’autant plus envisageable qu’il a été établi dans d’autres quartiers de l’agglomération algéroise, comme l’ont montré les travaux de Jim House sur le bidonville algérois de Mahieddine35. Dans ce quartier déshérité, l’interlocuteur privilégié des militaires français était en réalité un Algérien au service du FLN. S’il est difficile de déterminer le sort de Mohammed Doum, il apparaît que le cabinet et les services du Premier ministre n’ont pas fait grand cas de cette disparition : aucune démarche significative n’a été menée au cours des mois qui ont suivi la visite36. F’Touma Boukas a quant à elle cessé d’écrire toute forme de requêtes auprès des services de la préfecture (sa dernière lettre, d’après les services de la préfecture, date du 4 mai 195937), sans doute épuisée par l’absence de réponses des autorités. Il est important de relever ici que ni la classe politique, ni les structures associatives, ni la presse ne se font l’écho des familles des disparus afin de relayer leurs revendications en Algérie. Si les disparitions sont dénoncées, elles le sont avant tout en métropole, par des acteurs métropolitains et français, alors même qu’elles touchent d’abord des familles algériennes qui n’accèdent pas (ou très peu) à l’espace public français.

Conclusion

  • 38 L’Écho d’Alger, 14 juillet 1958 et 12 novembre 1958.

16Interrompre le cours d’une visite officielle et s’adresser personnellement au chef du gouvernement pour faire entendre ses revendications constitue un incident assez exceptionnel dans une mécanique protocolaire codifiée, a fortiori dans un contexte colonial où les préséances recouvrent un enjeu essentiel. En effet, la documentation préfectorale nous informe avant tout sur la façon dont est structurée une mise en scène qui s’adresse avant tout aux élites ainsi qu’à la classe politique en France et en Algérie. Il faut ici souligner l’intérêt d’archives qui portent ici à notre connaissance un événement inattendu, et qui mettent clairement au jour les tensions entre les différents acteurs du pouvoir à Alger. Cette perspective est bien différente des comptes rendus que l’on trouve dans la presse algéroise et nationale, qui insistent sur les réactions de la partie la plus politisée et engagée des Européens d’Alger en faveur de la défense de l’Algérie française, et, en particulier, sur les marques de défiance à l’égard du Premier ministre et de la politique du gouvernement38. Il s’agit également d’une des rares fois où une Algérienne fait irruption dans le déroulement planifié d’une visite officielle de première importance pour faire entendre ses revendications. Enfin, cet événement, s’il a troublé de manière inédite la mise en scène protocolaire, a surtout mis au jour la réalité de la répression en Algérie, à travers la voix d’une Algérienne qui n’aurait – en temps normal – jamais dû être autorisée à parler « librement » au chef du gouvernement.

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Notes

1 Michel Debré et l’Algérie, actes du colloque de l’Assemblée nationale, 27 et 28 avril 2006, Association des amis de Michel Debré, Paris, Éditions des Champs Élysées, 2007.

2 Grey Anderson, La guerre civile en France 1958-1962. Du coup d’État gaulliste à la fin de l’OAS, Paris, La fabrique, 2018.

3 Michel Debré, Trois Républiques pour une France, Mémoires, 1946-1958, t. 2, Paris, Albin Michel, 1988, p. 276-281.

4 Il s’agit du dossier des Archives nationales d’outre-mer d’Aix-en-Provence (ANOM), côté 91/1K/1077, qui comprend une chemise intitulée « Voyage de Michel Debré en Algérie ». Le dossier est essentiellement composé de notes, de rapports et de courriers adressés au délégué général en Algérie et au préfet d’Alger, ainsi que de quelques coupures de presse.

5 ANOM, 91/1K/1077, Note de renseignement au préfet du commandant de la brigade motorisée d’Alger, 9 février 1959.

6 Sylvie Thénault, Histoire de la guerre d’indépendance algérienne, Paris, Flammarion, 2012, p. 189. La baisse est plus limitée dans les camps d’internements civils dans lesquels les effectifs passent de 7 500 à 6 000 en juillet 1958, avant de remonter.

7 Sylvie Thénault, Une drôle de justice, les magistrats dans la guerre d’Algérie, Paris, La Découverte, 2001, p. 173.

8 Olivier Ihl, « Sous le regard de l’indigène. Le voyage du président Loubet en Algérie », dans Olivier Ihl, Jean-William Dereymez et Gérard Sabatier, Un cérémonial politique. Les voyages officiels des chefs d’État, Paris, L’Harmattan, 1998, p. 226-234.

9 Michèle Cointet, De Gaulle et l’Algérie française, Paris, Perrin, 2012, p. 27.

10 L’expression comité de salut public désigne les comités insurrectionnels mis en place en mai 1958 dans les villes d’Algérie, puis en Corse. Placés sous l'autorité des militaires, ils réclament le retour du général de Gaulle au pouvoir.

11 Sylvie Thénault, Histoire…, op. cit., p. 193 et p. 224.

12 Michèle Cointet, De Gaulle…, op. cit., p. 44-45.

13 Laurent Schiaffino, dernier descendant d’une dynastie d’armateurs d’origine génoise, est aussi élu en 1949 président de la Chambre de commerce d’Alger. Il figure parmi les principaux actionnaires du quotidien La Dépêche algérienne.

14 Ibid, Note de renseignement des RG (renseignements généraux), 6 février 1959.

15 Ibid, Notes de la préfecture d’Alger aux responsables politiques, syndicaux et religieux à l’occasion de la venue du Premier ministre, 13 février 1959.

16 Le Monument aux morts d’Alger de Paul Landowski (1875-1961), réalisé en collaboration avec Charles Bigonet (1877-1931), rend hommage aux morts de la Première Guerre mondiale. Pour une analyse des enjeux du patrimoine dans l’Algérie coloniale, voir Nabila Oulebsir, Les Usages du patrimoine. Monuments, musées et politique coloniale en Algérie, 1830-1930, Paris, Éditions de la Maison des sciences de l’homme, 2004, p. 267.

17 Guy Pervillé, « La SFIO, Guy Mollet et l’Algérie », dans Bernard Ménager, Philippe Ratte, Jean-Louis Thiébault, Robert Vandenbussche, Christian-Marie Wallon-Leducq, Guy Mollet, un camarade en République, Lille, Presses universitaires de Lille, 1987, p. 445-462 ; Grey Anderson, La guerre…, op. cit., p. 45.

18 Syvlie Thénault, Histoire…, op. cit., p. 136.

19 Ahmed Ben Bella est arrêté en mai 1950 à Alger et il est condamné à sept ans de prison. Il s’évade en 1952 et se réfugie au Caire auprès d’Hocine Aït Ahmed et de Mohammed Khider avec lesquels il forme plus tard la délégation extérieure du FLN. Il est arrêté une deuxième fois le 22 octobre 1956 lorsque l’avion civil marocain qui le conduit du Maroc à la Tunisie en compagnie des principaux responsables du FLN est détourné par les forces armées françaises. Voir Omar Carlier, « Ben Bella : l’homme, le mythe et l’histoire », Confluences Méditerranée, vol. 81, n° 2, 2012, p. 41-54.

20 Sur l’influence de Jeune Nation à Alger, voir Anne-Marie Duranton-Crabol, Le temps de l’OAS, Bruxelles, Éditions Complexe, 1995, p. 52.

21 Majid Embarech, Mettre en scène l’Algérie coloniale. Les préfets d’Alger et le protocole (1936-1961), thèse de doctorat sous la direction de Xavier Huetz de Lemps, soutenue le 26 novembre 2021 à l’université Côte-d’Azur, p. 436-438.

22 Si l’on s’en tient aux données brutes des recensements successifs, la population totale de l’Algérie a augmenté de près de 64 % entre 1921 et 1954, l’augmentation de la population algérienne représentant une part essentielle de cet accroissement exponentiel. Voir Charles-Robert Ageron (dir.), Histoire de l'Algérie contemporaine 1871-1954, t. 2, Paris, PUF, 1979, p. 467-547 ; Kamel Kateb, « Population et organisation de l'espace en Algérie », L’Espace géographique, t. 2, n° 4, 2003, p. 311-331.

23 Danièle Voldman, Fernand Pouillon, architecte, Paris, Payot, 2006, 360 p. ; idem, « Fernand Pouillon et le logement social en Algérie », dans Abderrhamane Bouchène et alii, Histoire de l'Algérie à la période coloniale 1830-1962, Paris, La Découverte, 2014, p. 628-633.

24 ANOM, 91/1K/1077, Note de la police des renseignements généraux d’Alger, 15 février 1959.

25 Ibid, Lettre du colonel Godard, délégué général du gouvernement en Algérie au général commandant provisoirement le corps d’armée d’Alger exerçant les pouvoirs civils dans le groupe de départements d’Alger, 16 mars 1959.

26 Le Monde, 8 janvier 1959, « Le mouvement préfectoral comporte trois importantes nominations en Algérie ».

27 ANOM, 91/1K/1077, Lettre du délégué général du gouvernement en Algérie au général commandant le corps d’armée d’Alger, 16 mars 1959.

28 Ibid., Lettre de Massu au préfet Deugnier, 1er juin 1959.

29 Ibid.

30 Ibid., Lettre du délégué général du gouvernement au général exerçant les pouvoirs civils dans le département d’Alger, 14 mai 1959.

31 Raphaëlle Branche, La torture et l’armée pendant la guerre d’Algérie (1954-1957), Paris, Gallimard, 2001.

32 Sylvie Thénault, « Dérogation générale et déclassification des archives contemporaines. Le cas d’Audin et des disparus de la guerre d’indépendance algérienne », Annales. Histoire, Sciences sociales, vol. 74, septembre 2019, p. 687-709.

33 Malika Rahal, Ali Boumendjel. Une affaire française, une histoire algérienne, Paris, La Découverte, 2022.

34 ANOM, 91/1K/1077, Note de la police des renseignements généraux au préfet d’Alger, 29 juillet 1959.

35 Jim House, « Double présence. Migrations, liens ville-campagne et luttes pour l’indépendance. Alger, Casablanca, Hanoi et Saigon », Monde(s), vol. 12, 2017, p. 95-119.

36 Archives nationales, 98AJ/3, Archives de Michel Debré Premier ministre (1959-1962).

37 ANOM, 91/1K/1077, Lettre du préfet d’Alger à la police des renseignements généraux, 10 mai 1959.

38 L’Écho d’Alger, 14 juillet 1958 et 12 novembre 1958.

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Pour citer cet article

Référence électronique

Majid Embarech, « Une mise en scène ratée ? La visite perturbée de Michel Debré à Alger (8-11 février 1959) »Histoire Politique [En ligne], 48 | 2022, mis en ligne le 01 octobre 2022, consulté le 12 mai 2025. URL : http://journals.openedition.org/histoirepolitique/8713 ; DOI : https://doi.org/10.4000/histoirepolitique.8713

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Auteur

Majid Embarech

Professeur agrégé et docteur en histoire, Majid Embarech est chercheur associé au Centre de la Méditerranée moderne et contemporaine (CMMC). Il est l’auteur d’une thèse soutenue intitulée « Mettre en scène l’Algérie coloniale. Les préfets d’Alger et le protocole (1936-1961) », qui a obtenu en 2022 le Prix d’histoire de l’Institut des hautes études du ministère de l’Intérieur (IHEMI). Ses recherches portent sur l’Algérie et le Maghreb colonial, ainsi que sur l’histoire de l’administration, du protocole et de la diplomatie.

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