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Les infrastructures techniques pour servir la recherche météorologique et climatique

Histoire de ClimServ à travers les âges

ClimServ's story through the ages
Sophie Cloché et Karim Ramage

Résumés

Nous racontons l’histoire de ClimServ, ou l’histoire de la mutualisation de moyens de calcul et de bases données au service de projets de recherche du LMD qui ont décidé de mettre en commun leur moyen au service du collectif. ClimServ est le résultat d’une longue construction au plus près des équipes de recherche pour répondre au mieux à leur besoin, et résultat d’une intégration IPSL en plusieurs étapes (fusion de différentes équipes en gestion de données au fil des ans) et d’une intégration nationale, aujourd’hui ClimServ faisant partie du service ESPRI, Ensemble de Services Pour la Recherche à l’IPSL.

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Mots-clés :

calcul, données, mutualisation
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Texte intégral

1Tout est parti en 1995, de discussions qui ont donné lieu à un texte sur les « interaction Modèles-Données » posant la question de « comment attaquer les problèmes de base de données et logiciels au Laboratoire de météorologie dynamique (LMD) », en pointant en particulier le caractère local et artisanal des solutions mises en place par chaque équipe, et l'absence de coordination.

2En parallèle, c’est le début de l’Institut Pierre-Simon Laplace (IPSL) avec les prémices de la mise en place de la base de données nationale autour de la chimie atmosphérique (qui deviendra ETHER en 2001) mais aussi la volonté de doter en moyens de calcul les laboratoires de l’IPSL. Les questions se posent déjà de créer un lien entre cette initiative IPSL et le besoin évoqué plus haut au niveau du LMD, de partager et mutualiser les ressources. Ce lien se fera mais pas de suite, comme on le verra.

3En attendant, le LMD poursuit sa réflexion, notamment au travers de l’implication nouvelle de Jean-Louis Monge qui propose de constituer une base de données commune au LMD comme une sorte d'étape intermédiaire, permettant d'acquérir une certaine compétence dans un domaine thématique plus restreint, mais avec pour finalité une intégration à terme dans la base de données de l'IPSL.

4A cette composante base de données, vient s’ajouter la mise en place de nouveaux moyens de calcul autour de clusters de PC sous linux, abandonnant progressivement les stations SUN sous Solaris et autres DEC sous VAX/VMS utilisés dans les différentes équipes au LMD-X. Voilà donc posées les bases de ce qui allait devenir le serveur du LMD, ClimServ. Deux équipes se sont emparées rapidement de cette nouvelle façon de partager les moyens de calcul et d'archivage de données, l’équipe Cycle de l’eau dans les tropiques et pollution. Il s’agissait donc de partager des ensembles de données dites climatologiques (satellite, réanalyses, climatologies diverses) sur les thématiques nuages, cycles de l’eau, climat, en les connectant à des moyens de calcul mutualisés entre plusieurs équipes. A partir de la fin des années 1990, Climserv était donc devenu un centre de calcul avec la possibilité d’accéder en ligne à de grands ensembles de données. Ce fût véritablement une idée révolutionnaire pour l’époque que de mettre dans un « pot commun » des ressources financières, humaines et techniques, de partager des ensembles de données utiles à plusieurs groupes de recherche en combinant les infrastructures informatiques et les services d’un centre de calcul et d’un centre de données.

5Les débuts de la mise en place de Climserv ont commencé modestement par l’installation de quelques machines au « prefa » du LMD à Polytechnique. J.-L. Monge se fait aider de stagiaires au début puis embauche en 1998 via l’IPSL une ingénieure, Sophie Cloché, pour construire des bases de données dans le cadre de la campagne INDOEX (Indian Ocean Experiment). Le LMD avait pour mission de centraliser, à travers ClimServ, l’accès aux données INDOEX fournies par les partenaires européens de l’expérience. Les données stockées sur ClimServ sont principalement les données des satellites en fonction au moment de l’expérience. Les plus importantes sont les données du satellite géostationnaire Meteosat-5, qui avait été spécialement déplacé sur l’Océan Indien pour l’expérience. La base de données contient également les données d’autres satellites couvrant la région de la campagne INDOEX, pour les trois mois de l’expérience (janvier-mars 1999), comme ScaRaB à bord du satellite Resurs, SSMI (Special Sensor Microwave Imager Sounder) et SSM/T-2 (Special Sensor Microwave – Humidity) à bord des satellites DMSP (Defense Meteorologica Satellite Program). Enfin les analyses CEPMMT (Centre européen pour les prévisions météorologiques à moyen terme) correspondantes sont disponibles sur le même site. Pour cette expérience, un effort particulier de remise au format NetCDF des données satellites et des sorties de modèles a été fourni, permettant l’utilisation d’outils d’analyse et de visualisation standard commun aux données satellitaires et aux données d’analyses et de modèles.

6Tout le travail réalisé dans le cadre INDOEX fût la base de ce qui sera poursuivi plus tard via le programme AMMA (Analyses multidisciplinaires de la mousson africaine) et la mise en place des bases de données AMMA-SAT (données satellite) et AMMA-MOD (données modèles), avec l’arrivée en 2002 d’un nouvel ingénieur, Karim Ramage. Sophie Cloché et Karim Ramage forment donc le duo qui va accompagner la montée en puissance de ClimServ, avec leur implication dans la base de données de la campagne AMMA, et notamment avec la mise en place d’un service de support opérationnel à la campagne, service qui existe toujours aujourd’hui ! Les deux seront recrutés à l’IPSL (en 2001 et en 2006) pour pérenniser ces activités. J.-L Monge quitte la gouvernance de Climserv et laisse les rennes au duo IPSL. L’intégration de ClimServ comme un outil du centre de données de l’IPSL et d’utilité pour l’ensemble de la fédération est acté dès 2003.

7En 2004 le pôle national de données ICARE sur les thématiques aérosols-nuages-rayonnement et cycle de l'eau est mis en place. ClimServ doit trouver sa place dans ce nouveau paysage national et se positionne comme le Centre d’expertise ICARE de l’IPSL (baptisé CExII) pour offrir au sein de l’IPSL une infrastructure informatique et des services de gestion, de traitement et d’exploitation des données autours des thématiques nuage-aérosols-rayonnement-cycle de l’eau. Cette organisation s’est concrétisée en 2004 du point de vue technique par la mutualisation des moyens informatiques du CExII autour du service de données existant, ClimServ, avec un financement récurrent du Centre nationale d’études spatiales (CNES).

8Le duo IPSL continue d’assurer donc pendant les années qui suivent leurs activités autour de la gestion de grandes bases de données associées à la gestion des moyens de calcul, en s’impliquant autour des années 2010 sur le nouveau programme Mistrals notamment.

9ClimServ a fini par être reconnu officiellement et intégré en 2015 au nouveau pôle de données atmosphère AERIS qui regroupe 4 centres de données dont celui de l’IPSL.

10En 2009, un petit frère de ClimServ est né, un cluster nommé CICLAD arrive et se déploie sur le site de l’IPSL Jussieu !

11Résultat d’une longue construction au plus près des équipes de recherche pour répondre au mieux à leur besoin, et résultat d’une intégration IPSL en plusieurs étapes (fusion de différentes équipes en gestion de données au fil des ans) et d’une intégration nationale, aujourd’hui ClimServ fait partie du service ESPRI, Ensemble de services pour la recherche à l’IPSL, le centre de données et calcul de l’IPSL, qui compte plus de 30 ingénieures et ingénieurs, expertes et experts en gestion d’infrastructure et de bases de données ! En termes de ressources informatiques, ClimServ est ainsi passé en 20 ans de quelques dizaines de To de stockage partagées et quelques centaines de cœurs de calcul à plus de 2Po et plusieurs milliers de cœur.

12Pour finir, ClimServ, né à la fin des années 1990 du besoin d’utilisateurs dynamiques du LMD, a permis de construire au fil des ans un véritable service toujours pertinent à ce jour et reconnu par la communauté, avec un cristal collectif CNRS en 2021 et une certification internationale (CoreTrustSeal) obtenue en 2024.

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Pour citer cet article

Référence électronique

Sophie Cloché et Karim Ramage, « Histoire de ClimServ à travers les âges »Histoire de la recherche contemporaine [En ligne], Tome XIII n°1 | 2024, mis en ligne le 04 février 2025, consulté le 18 mai 2025. URL : http://journals.openedition.org/hrc/10962 ; DOI : https://doi.org/10.4000/13dgt

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Auteurs

Sophie Cloché

Laboratoire de météorologie dynamique - Institut Pierre Simon Laplace - (UMR8539 - CNRS, ENS-PSL, École polytechnique-IP Paris, Sorbonne Université) - Après un postdoc au LMD sur Scarab puis plusieurs années de CDD, dont 2 auprès de J.L. Monge, Sophie Cloché a intégré l’IPSL en 2001 en tant qu’ingénieur de recherche au centre de données de l’IPSL. Elle fut impliquée dans la co-gestion de ClimServ avec Karim Ramage pendant plusieurs années, travaillant sur les bases de données AMMA, Mistrals mais aussi pour la mission spatiale Megha-Tropiques. Aujourd’hui elle est cheffe du service ESPRI-OBS (partie gestion et traitement des données d’observation) du centre de données et calcul de l’IPSL, ESPRI, bâti sur les activités ClimServ

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Karim Ramage

Laboratoire de météorologie dynamique - Institut Pierre Simon Laplace - (UMR8539 - CNRS, ENS-PSL, École polytechnique-IP Paris, Sorbonne Université) - Après une thèse de Méthodes Physiques en Télédétection consacrée à l’estimation des précipitations par imagerie satellite, Karim Ramage a travaillé au sein du LMD puis de l’IPSL sur le développement de systèmes d’information pour l’hébergement, le traitement, l’exploitation et la distribution de données d’observation du système Terre. A la suite de J.L. Monge et en partenariat avec Sophie Cloché, il a construit le service de calcul et données ClimServ, devenu une composante du mésocentre de l’IPSL. Il est aujourd’hui responsable du service informatique de l’IPSL, ESPRI-Infra, en charge de la gestion des infrastructures et services de calcul et de stockage de l’institut.

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