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2023

Karl Christian Friedrich Krause, Schriften zur Rechtsphilosophie.

Caroula Argyriadis-Kervegan
Référence(s) :

Karl Christian Friedrich Krause, Schriften zur Rechtsphilosophie, Wolfgang Forster, Peter Landau (dir.), Stuttgart-Bad Cannstatt, Frommann-Holzboog, (Ausgewählte Schriften, IV), ISBN 978-3-7728-2344-2, 2022, 484 p, 248€.

Karl Christian Friedrich Krause, Schriften zur Rechtsphilosophie, Wolfgang Forster, Peter Landau (dir.), Stuttgart-Bad Cannstatt, Frommann-Holzboog, (Ausgewählte Schriften, IV), ISBN 978-3-7728-2344-2; 2022, 484 p, 248€.
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Texte intégral

1Karl Christian Friedrich Krause (1781-1832) fut un philosophe issu de l’idéalisme allemand, apprécié au XIXème siècle mais éclipsé par la suite et redécouvert lors des dernières décennies du XXème siècle. Élève de Fichte, Schelling et Fr. Schlegel à l’université d’Iéna où il a soutenu sa thèse. Ses enseignements ont connu une certaine diffusion grâce à ses disciples K.D.A. Röder, H. Ahrens et H.K. Freiherr von Leonhardi en Europe centrale et surtout en Espagne où s’est développé le courant intellectuel du krausismo.

2Depuis 2007 l’éditeur Frommann-Holzboog a entrepris de rééditer ses œuvres en 6 volumes. Les Écrits sur la philosophie du droit, sous la direction des spécialistes Wolfgang Forster et Peter Landau, forment le quatrième volume qui contient trois ouvrages: Grundlage des Naturrechts, (1803), Entwurf eines europäischen Staatenbundes (1814) et Abriss des Systemes der Philosophie des Rechtes, oder des Naturrechtes (1828).

3Grâce à la substantielle Introduction de W. Forster sur « la philosophie du droit de Krause dans le cadre de son système philosophique » (p. VII-XXV), on peut suivre l’historique de la genèse de chaque texte, de sa publication, et sa réception par la pensée contemporaine.

4Le Grundlage des Naturrechts, (p. 1-182) œuvre de jeunesse influencée par le «Fondement du droit naturel » de Fichte (1796/97), comporte deux parties : Philosophische Deduktion des Postulats, des Ideals, der Sphäre und der Möglichkeit einer vernunftgemässen (naturrechtlichen) Staatsverfassung et Grundriss des Weltbürgerrechts ; Selon Krause, il y a une chaîne d’existences partant de l’individu et s’acheminant vers l’univers ; chacune inclut une forme inférieure et s’élève vers la forme supérieure. Tous les peuples forment un seul peuple cosmopolitique, sans distinction entre les nations. L’organe suprême pour résoudre les éventuels conflits est l’« incorruptible » tribunal international, (unbestechliches Völkergericht) (p. 66). L’idéal de l’amour, est un élément fondateur du système juridique de Krause (p. 116 sq.), qui garantit l’égalité de traitement entre hommes et femmes au sein de la famille. Contrairement à la conception fichtéenne, le contrat de mariage n’est pas un contrat de soumission (p. 147). De l’idéal de l’amour et de la beauté émanent plusieurs droits, comme ceux de libre expression par l’activité artistique, de libre circulation (p. 179), et de protection du domicile. L’Etat doit assurer l’existence humaine dans la sagesse, l’amour et les beaux-arts (p. 182) conformément à l’esprit de l’idéal grec de l’antiquité.

5L’Entwurf eines europäischen Staatenbundes (p. 183-204), a été publié initialement dans les Deutsche Blätter de Brockhaus et réédité à plusieurs reprises jusque dans les années 1920. La proposition krausiste, dans le contexte du congrès de Vienne, fait partie d’une mosaïque de projets d’auteurs visant, à la suite de Kant, à la création d’une Confédération européenne. Krause ne se borne pas à suggérer cette création mais envisage la constitution d’une Fédération juridique mondiale (Rechtbund der Erde), élément essentiel de sa philosophie. Le fondement juridique de la Confédération qui doit garantir la liberté et la singularité de chaque membre, est un « contrat fondamental » dont les principales dispositions sont énumérées, et non pas un élément religieux, familial ou quelque autre institution (p. 192). Les organes communs sont un tribunal international et un conseil fédéral (art. 2, §3 et 5). La paix perpétuelle n’est possible que si on respecte le principe de la libre association (p. 190). Toutefois, bien que tous les peuples soient considérés comme juridiquement égaux au sein de la Confédération, la composante germanique est privilégiée : un rôle primordial revient à l’Allemagne au cœur de l’Europe (p. 195). L’auteur suggère l’installation de la capitale à Berlin, et considère que la langue allemande est la plus appropriée comme langue officielle (Art. 10, 11).

6Le Abriss des Systemes der Philosophie des Rechtes oder des Naturrechtes, est issu d’un cours de 1826 (p. 205-466). Cet ouvrage qui complète le Grundlage des Naturrechts, offre une conception globale de la science du droit et du droit humain (menschliches Recht). Les principales thématiques de son livre Urbild der Menschheit (1811) y sont reprises et développées. Il va ainsi établir le droit de l’humanité, des sociétés et des personnes, qu’elles soient organisées en sociétés ou vivent séparément (p. 367sq.). Les associations s’articulent de bas en haut, de l’association familiale, jusqu’à celle de l’humanité (vollendete gesellige Menschheit), qui est dotée d’une personnalité propre (p. 417).

7Selon la pensée évolutionniste de Krause, l’humanité traverse plusieurs phases successives vers une forme de plus en plus « pure, riche et belle » (p. 444). Les individus s’unissent dans l’État grâce à un contrat, conclu librement. Il traite également la question du pouvoir d’État (Staatsgewalt) et du droit pénal, repris par la suite par son élève Röder. Dans ce monde idéalisé, la question du pouvoir tyrannique se pose néanmoins. Sous un régime tyrannique et injuste, le citoyen doit se fier à sa conscience individuelle et à Dieu. L’intervention de la volonté divine permettra à l’humanité d’acquérir la perfection (p. 446).

8Dans une annexe intitulée « Sur le concept du droit et de l’État », Krause étudie ces concepts selon un schéma chronologique conduisant de l’antiquité grecque jusqu’au XIXème siècle, de Pythagore à Hegel (p. 447-466).

9Le volume, complété par une bibliographie et deux Index, offre au lecteur trois des plus importants textes du philosophe allemand, jusqu’alors difficiles d’accès, et lui permet ainsi de prendre connaissance d’une philosophie du droit qui a été éclipsée par l’hégélianisme, puis par le marxisme.

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Pour citer cet article

Référence électronique

Caroula Argyriadis-Kervegan, « Karl Christian Friedrich Krause, Schriften zur Rechtsphilosophie. », Revue de l'IFHA [En ligne], Date de recension, mis en ligne le 07 mars 2023, consulté le 01 juin 2023. URL : http://journals.openedition.org/ifha/12074 ; DOI : https://doi.org/10.4000/ifha.12074

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Auteur

Caroula Argyriadis-Kervegan

CY Cergy Paris Université/CPJP

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Droits d’auteur

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