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1Ce volume constitue les actes d’un colloque qui s’est tenu en 2018 à Greifswald, sous le titre « “Petits évêques” dans le Saint-Empire. Contraintes structurelles, marges de manœuvre et pratiques sociales en mutation (1250-1650) ». Il rassemble quatorze contributions de longueur très inégale (de 17 à 40 pages, hors références bibliographiques), parmi lesquelles figure aussi la version écrite de la conférence publique (Abendvortrag de K.‑H. Spieß) prononcée dans le cadre du colloque (« Des dignitaires contre leur gré ? Les fils de princes comme “petits évêques” au Moyen Âge »). Les bornes chronologiques au titre du volume interrogent tout d’abord, notamment le terminus ad quem finalement choisi (1600), qui semble plaider pour un long Moyen Âge – dans ce cas, pourquoi ne pas aller jusqu’à 1648 ? De l’aveu même des directeurs et directrice de l’ouvrage en préambule, le décalage des bornes chronologiques entre l’intitulé du colloque lui-même (1250-1650) et le titre des actes (1200-1600) a été suggéré par le cadre dans lequel s’inscrivaient finalement les communications présentées, outre le fait que « le contexte du XVII^e siècle offrirait matière à un autre colloque ». Deux index (personnes et lieux) ainsi qu’une abondante iconographie en couleur viennent enrichir le volume.

2Dans une contribution introductive, A. Bihrer propose douze critères ou pistes de recherche sur lesquelles s’appuyer pour étudier les « petits évêques » dans le Saint-Empire au Moyen Âge et à l’époque moderne, à savoir : les bases économiques du territoire (Hochstift) du prince-évêque ; la cour épiscopale ; les puissances/pouvoirs concurrents ; la position du prince-évêque et de son territoire dans l’édifice impérial (tant d’un point de vue géographique, politique, qu’en termes de préséance au sein des institutions impériales) ; les origines du prince-évêque ; le « facteur humain » ; le rang ; les représentations (à travers différents modes de communication : blason, sceau, monnaie, titulature, architecture, cérémonies…) ; les modalités de compensation de cette infériorité supposée ; les évolutions historiques ; le jugement des contemporains et/ou de la postérité ; la définition en droit canonique qui place théoriquement tous les évêques (non métropolitains) sur un même niveau. L’une des réserves que l’on peut formuler à cette liste est la difficulté qu’il pourrait y avoir, selon le contexte et la période d’étude, à trouver des sources capables de documenter ces différents aspects pour telle ou telle principauté-évêché ou figure de prince-évêque. Certains de ces critères donnent l’impression de se recouper (ex. : rang et représentations). De plus, compte tenu des interactions entre les différentes échelles de pouvoirs (locale / territoriale / impériale) dans le Saint-Empire médiéval comme moderne, l’on peut aussi s’interroger sur la pertinence de qualifier de « petit évêque » tel ou tel, dans l’absolu.

3Les contributions suivantes s’offrent comme autant d’études de cas, disséminées dans le Saint-Empire. Elles portent, à travers certains de leurs titulaires, sur les diocèses de Schleswig, Ratzebourg, Schwerin, Riga (archidiocèse), Minden, Verden, Hildesheim, Worms, Bâle, Eichstätt, Salzbourg (et les sièges qui lui sont rattachés, appelés Eigenbistümer), Mersebourg, Meissen. La référence à la problématique centrale du volume – les « petits évêques » – n’est cependant pas systématique, ni l’analyse du rapport qu’entretiennent ces derniers avec l’Empire et ses institutions. Voire, certains traits mis en avant semblent assez fréquents dans le Saint-Empire où, parmi les plus de 350 territoires qui le composent, un très grand nombre – et leurs princes avec eux – pourraient être qualifiés de « petits » : l’influence de certaines maisons princières régionales (sur les évêques de Schwerin, Ratzebourg, Riga, Eichstätt, Meissen), le poids des chapitres qui se veulent corégents (notamment à Bâle, Hildesheim). Certaines conclusions apparaissent en revanche moins attendues (mais peut-être liées au contexte ?), comme le rapport inversement proportionnel entre la noblesse de l’extraction et l’influence des évêques de Schwerin (A. Röpcke).

4La contribution finale, en forme de conclusion générale pour le volume (N. Gallion), souligne les ambiguïtés de cette étiquette de « petit évêque ». Elle met en garde contre le risque de créer une catégorie qui pourrait se révéler peu opératoire, tout en appelant de ses vœux des recherches sur des figures moins connues de l’épiscopat impérial. Elle propose toutefois à son tour différents critères de définition possibles des « petits évêques », parmi lesquels : un ancrage familial dans la petite noblesse régionale ; l’attention aux intérêts de la lignée (mais n’est-ce pas une constante de toutes les familles princières ?) ; l’appartenance au chapitre concerné, antérieure à l’élection ; des ressources financières déficitaires ; une aire d’influence régionale. Elle préconise également, et l’on ne peut que la rejoindre sur ce point, de ne pas laisser de côté le versant ecclésiastique de l’action de ces princes-évêques, afin d’évaluer plus finement encore les contraintes et les marges de manœuvre auxquelles ils doivent faire face, dans l’exercice de leur double pouvoir, politique et ecclésiastique.