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Patrimoines, reconstructions et restaurations

La contribution de l’Art déco à la reconstruction des monuments historiques

L’exemple de Pierre Paquet à Arras
The contribution of Art Deco to the reconstruction of historic monuments. The example of Pierre Paquet at Arras
Simon Ducros

Résumés

Largement détruite pendant la Première Guerre mondiale, la ville d’Arras (Pas-de-Calais) devient grâce à sa reconstruction dans les années 1920 et 1930 un laboratoire de l’Art déco dans le nord de la France, à l’instar de Cambrai ou de Saint-Quentin. Toutefois, contrairement à ses voisines, la cité arrageoise tire sa renommée d’édifices emblématiques – cathédrale, hôtel de ville, places et palais Saint-Vaast – dont le relèvement est assuré par l’architecte en chef des monuments historiques Pierre Paquet (1875-1959). Ces monuments ont éclipsé l’architecture privée Art déco de la cité mais ont conduit à l’impression trompeuse d’une ville reconstruite à l’identique. Or, la réalité est plus nuancée tant l’approche de l’architecte en chef se plaît à relire, réinterpréter et rationaliser les constructions d’avant-guerre. En outre, les monuments historiques de la ville deviennent les réceptacles d’une création artistique plurielle et foisonnante, témoignage du développement de l’Art déco. Le palais Saint-Vaast accueille la décoration monumentale de Gustave-Louis Jaulmes (1873-1959) provenant de la salle des fêtes de l’Exposition de 1925, et Pierre Paquet réunit au sein de la cathédrale une pléiade d’artistes rencontrés à l’occasion de l’événement. Peinture murale, sculpture, orfèvrerie, dinanderie témoignent du renouveau des arts décoratifs durant l’entre-deux-guerres. Soumises à l’architecture, ces productions assurent avec finesse la cohérence d’ensemble des monuments qui marquent encore aujourd’hui l’image d’Arras.

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Texte intégral

  • 1 BUSSIÈRE Éric, MARCILLOUX Patrice & VARASCHIN Denis (dir.), La Grande Reconstruction. Reconstruire (...)

1Le développement du mouvement Art déco dans le nord de la France est indissociable des destructions de la Première Guerre mondiale et de la Reconstruction dont le territoire fit l’objet entre les années 1920 et 19301. L’Exposition internationale des arts décoratifs et industriels modernes de 1925, loin de constituer un simple événement consacrant l’avènement d’un style, marque pour Arras et ses monuments, objets du présent article, un moment charnière et le point de départ d’une aventure artistique largement sous-estimée.

2L’historiographie retient souvent les chiffres et le destin tragique du patrimoine monumental arrageois. Détruite à plus de 50 %, Arras subit pendant la guerre des bombardements continus, provoquant dès octobre 1914 la destruction du beffroi de l’hôtel de ville puis du palais Saint-Vaast et de la cathédrale en juillet 1915. De la Reconstruction, on perçoit aisément le patrimoine privé des nombreuses habitations, usant d’un style Art déco teinté de nombreuses références régionalistes. Cette production parfois inégale reflète la variété des commanditaires et des architectes installés spécialement dans la ville pour participer au grand effort de relèvement.

  • 2 Pierre Paquet est assisté par l’architecte ordinaire Paul Decaux (1881-1968) dont le fonds est cons (...)
  • 3 La Réparation des dommages de guerre. Analyse et commentaire de la loi du 17 avril 1919 suivi du Te (...)

3Au contraire, la reconstruction des monuments historiques est confiée par l’État à un seul architecte en chef des monuments historiques, Pierre Paquet (1875-1959) [fig. 1], qui assure la résurrection de l’hôtel de ville, des places, du palais Saint-Vaast et de la cathédrale pendant plus de vingt ans2. Un regard trop rapide jugerait ces interventions respectueuses d’un état d’origine, dit « à l’identique ». Telle est d’ailleurs la position de la commission spéciale, placée sous l’égide du ministère de l’Instruction publique et des Beaux-Arts et dont le rôle est de faire appliquer l’article 12 de la loi du 17 avril 1919 ou « Charte des sinistrés », précisant que la reconstruction des édifices devra présenter « le même caractère, la même importance, la même disposition et les mêmes garanties de durées »3.

Figure 1

Figure 1

Pierre Paquet (1874-1959), vers 1925. Photographie conservée aux archives départementales du Pas-de-Calais, fonds Paul Decaux, Arras (cote 45J).

Photographe inconnu / reproduction archives départementales du Pas-de-Calais.

  • 4 DEHAY Thierry & VASSEUR Delphine, La Grande Reconstruction. Arras, la ville nouvelle à l’époque Art (...)

4Toutefois, cette doctrine ne résiste pas à la réalité, beaucoup plus nuancée, et les répercussions de l’Exposition de 1925 seront bien plus prégnantes à travers la reconstruction du patrimoine historique de la ville que sur les quelques façades Art déco de son centre-ville4. Cet article cherchera à analyser la démarche et les conditions qui ont permis à Pierre Paquet, à travers des édifices de styles totalement différents, d’opérer une synthèse dont les arts décoratifs assurent la lecture commune.

Les monuments historiques à l’épreuve de la Reconstruction : la doctrine Paquet

  • 5 Arras, archives municipales (ci-après AMA), 1M2/4, « Autour de la cérémonie de la pose de la premiè (...)

C’est cette ordonnance d’architecture, soigneusement épurée, qui sera adoptée pour toutes les autres façades, afin de donner une grande unité à l’édifice. […] Nous ne doutons pas qu’avec lui, dans quelques années, Arras ne retrouve ses chers Hôtel de ville et Beffroi, plus beaux même, parce que d’un style plus uniforme5.

  • 6 AMA, 1M2/4, Rapport dactylographié de Pierre Paquet, 31 mai 1924.

5Par cette brève appréciation, un observateur de l’époque résume l’approche rationnelle de Pierre Paquet pour la reconstruction de l’hôtel de ville. L’architecte s’en justifie dans un rapport6 approuvé le 3 février 1925 par la direction des Beaux-Arts en choisissant l’ordonnance architecturale Renaissance dessinée par Mathias Tesson en 1572. Ainsi, le grand balcon de 1827 est supprimé, et les apports du xixe siècle rendus muets, mais l’architecte va plus loin dans la démarche en simplifiant et en redressant les façades latérales. L’édifice prend alors ses distances avec son image d’avant-guerre, et avec la construction d’origine [fig. 2 et 3]. Si le langage décoratif des façades ne peut être qualifié explicitement d’Art déco, il faut néanmoins reconnaître l’effort de rationalisation de l’architecture et une approche classicisante de l’ensemble. Pierre Paquet rend lisible l’étagement des volumes et régularise les lignes de force de la composition, soulignées par une sculpture décorative épurée mais signifiante.

Figure 2

Figure 2

« Façade de l’hôtel de ville d’Arras (Pas-de-Calais) ouvrant sur la place des Héros avant destruction », 1901-1914, photographie de Louis Séeberger (1872-1932), 13 x 18 cm, conservée à la Médiathèque du patrimoine et de la photographie, Charenton-le-Pont (1FS00186).

Reproduction Médiathèque du patrimoine et de la photographie Charenton-le-Pont.

Figure 3

Figure 3

« Façade de l’hôtel de ville d’Arras ouvrant sur la place des Héros après sa reconstruction », 1937, photographie de Georges Estève (1890-1975), 18 x 24 cm, conservée à la Médiathèque du patrimoine et de la photographie, Charenton-le-Pont (MH0110836).

© Georges Estève / reproduction Médiathèque du patrimoine et de la photographie, Charenton-le-Pont.

6Ce choix de composition, qui reprend sous l’habit d’un décor néo-médiéval les conceptions de l’architecture classique, peut tout autant s’appliquer aux places et à ses pignons qui scandent régulièrement l’espace qu’au palais Saint-Vaast et à la cathédrale, dont Paquet restaure les enveloppes néoclassiques dessinées par Pierre Contant d’Ivry (1698-1777) à la fin du xviiie siècle. Cette approche de la restauration qui consiste à respecter l’édifice d’origine tout en lui insufflant une rigueur quasi géométrique rejoint les conceptions des architectes de la période. Aussi, la restauration des monuments historiques durant l’entre-deux-guerres ne peut-elle être dissociée de la production architecturale qui lui est contemporaine. Les grands questionnements qui animent la pensée architecturale des années 1920 et des années 1930 et le débat sur les styles influencent en retour la conception de la restauration monumentale. Plus encore que l’emploi de matériaux modernes, comme le ciment armé déjà bien étudié et utilisé dans tous les édifices reconstruits d’Arras, le mouvement Art déco est une de ces références moins mises en exergue, dont Paquet sera durablement marqué.

  • 7 MAYEUX Henri, « Un pavillon de repos dans un terrain de jeu à l’Exposition d’Art décoratif moderne  (...)
  • 8 Ibid.

7À ce titre, les architectes en chef des monuments historiques ne sont pas cantonnés aux seules pratiques de la restauration mais réalisent également des édifices participant à ce courant qui s’épanouit au même moment. À titre d’exemple, André Ventre (1874-1951), restaurateur de la cathédrale de Verdun (Meuse), dont il réinterprète la crypte romane avec le sculpteur Gaston Lebourgeois (1880-1956), exécute à la même période le monument de la Tranchée des baïonnettes à Douaumont et la gare de Versailles-Chantiers. Il ne faut pas oublier que le commissariat de l’Exposition de 1925 est assuré en partie par Paul Léon (1874-1962), directeur général des Beaux-Arts et grand promoteur de la doctrine du service des Monuments historiques, assurant le contrôle de la création et de la restauration sous la houlette d’une seule administration. Il est intéressant de constater que durant l’Exposition, Pierre Paquet lui-même présente au Grand Palais non pas un projet de restauration mais un modèle au quart d’exécution d’un pavillon de repos dans un terrain de jeu7. L’œuvre est décrite « d’inspiration moderne »8 tout en restant rationnelle et témoignant de la stéréotomie et de l’art du xviiie siècle. Si discrète soit-elle, cette référence résume l’art de Paquet et les qualités de son approche, insufflées à l’échelle de la ville d’Arras par la reconstruction de ses monuments emblématiques. Toutefois, c’est bien à l’intérieur des édifices que cette modernité connaît son expression la plus évidente, et notamment à travers la pratique du grand décor remise à l’honneur par l’architecte.

Le grand décor, un marqueur symbolique dans la cité

  • 9 SAINTE-FARE GARNOT Nicolas, « La peinture Art déco, Une aventure postmoderne ? », in BRÉON Emmanuel (...)
  • 10 Peintre d’origine suisse, Jaulmes fait partie de la commission d’esthétique et d’organisation de l’ (...)
  • 11 Ibid, p. 134.

8Largement délaissé par les avant-gardes, l’art mural connaît un véritable renouveau au sortir de la guerre et dans le contexte de la première Reconstruction9. L’Exposition de 1925 consacre la carrière de grands décorateurs, parmi lesquels Gustave-Louis Jaulmes (1873-1959) 10et Henri Marret (1878-1954), dont les compositions orneront les murs des édifices arrageois. S’inscrivant dans la logique des grands décors de la seconde moitié du xixe siècle, la peinture décorative continue d’offrir « les symboles qui pouvaient donner à la démocratie les rêves dont elle avait besoin11 ».

  • 12 Henri Marret expose en 1920 au pavillon de Marsan (Louvre) dans le cadre d’une exposition consacrée (...)

9À Arras, Pierre Paquet confie à plusieurs artistes la tâche d’assurer le grand récit de la ville martyre à travers plusieurs cycles peints. Henri Marret, « maître et animateur de la renaissance de la fresque » selon Maurice Denis12, reconstitue les décors de la chapelle de la Vierge dans la cathédrale, ensemble complété par les transepts dans les années 1940 avec deux épisodes de la Vie de saint Vaast, du même artiste, et deux compositions monumentales de Georges Desvallières (1861-1950), illustrant la Nativité et la Résurrection. Charles Hoffbauer (1875-1957) et Gustave-Louis Jaulmes ornent les grandes salles d’apparat de l’hôtel de ville de cycles rappelant les grandes heures de la cité. Dans la salle des fêtes, Hoffbauer s’inspire du style breughélien pour illustrer des scènes de la vie arrageoise tandis que Jaulmes choisit une représentation allégorique du Printemps sur fond de décor local pour symboliser la renaissance de la ville détruite. Si ces décors s’ancrent dans la légende locale, à travers des faits historiques ou religieux, Paquet choisit d’installer dans une immense salle du nouveau musée, prévue à cet effet, un décor plus intemporel, œuvre de Gustave-Louis Jaulmes, ce que permet le réaménagement intérieur du palais Saint-Vaast.

  • 13 Le cycle n’est plus visible du public depuis les années 1980 et attend une future restauration de s (...)

10Ce décor de douze toiles marouflées, bien que n’étant pas destiné à l’origine pour Arras, fait écho aux autres ensembles en exprimant le renouveau de la cité à travers le cycle des saisons. Il constitue une sorte de clé de lecture et une charnière entre les grands décors civils de l’hôtel de ville et les compositions religieuses de la cathédrale. À l’origine, l’ensemble avait été composé par Jaulmes pour la salle des fêtes du Grand Palais, où il fut effectivement installé, salle aménagée par l’architecte Louis Süe (1875-1968) et le décorateur André Mare (1885-1932) à l’occasion de l’Exposition internationale de 1925 [fig. 4]. Les trois artistes ont l’habitude de collaborer à des décors éphémères et on leur doit notamment, en 1919, le monument des Fêtes de la Victoire placé sous l’arc de Triomphe. En pérennisant ce cycle peint, Paquet offre à Arras un impressionnant vestige du mouvement Art déco13.

Figure 4

Figure 4

Salle des fêtes du Grand Palais à l’Exposition de 1925 à Paris. Photographie conservée aux archives André Mare et reproduite dans l’ouvrage Süe et Mare et la compagnie des arts français, Florence Camard, Paris, Éditions de l’Amateur, 1993.

Photographe inconnu / reproduction Simon Ducros.

  • 14 Entrés dans les collections par achat du 5 décembre 1975, sous les numéros d’inventaire 75-105-1 à  (...)
  • 15 Une Danse champêtre exposée au Salon de 1932 est également installée à une date indéterminée dans l (...)

11Le décor architectural de Süe imitant des draperies et scandé par des fontaines, particulièrement décrié à l’époque, n’est pas restitué par l’architecte, qui reproduit cependant la disposition de la verrière zénithale dans le palais Saint-Vaast [fig. 5]. Le cycle de Jaulmes, dont les dessins préparatoires sont conservés au musée des Beaux-Arts du Havre14, est composé de sept grands panneaux sur toile et d’une frise décorative encadrant la porte d’accès de la salle des fêtes, marouflés sur les murs. L’iconographie reprend le thème traditionnel des travaux et des mois en fête, mais limités à la période d’ouverture de l’Exposition, c’est-à-dire d’avril à octobre [fig. 6]. Lors de l’installation du cycle peint à Arras, Jaulmes complète l’ensemble par quatre dessus de porte et transforme la frise décorative de la porte d’accès initiale en un panneau peint aux dimensions des sept autres compositions mais dont le centre est orné de trois tables laissées sans inscription15.

Figure 5

Figure 5

Salle Jaulmes du palais Saint-Vaast à Arras (Pas-de-Calais), 1937, photographie de Georges Estève (1890-1975), 18 x 24 cm, conservée à la Médiathèque du patrimoine et de la photographie, Charenton-le-Pont (MH0110824).

© Georges Estève / reproduction Médiathèque du patrimoine et de la photographie, Charenton-le-Pont.

Figure 6

Figure 6

Les Vendanges (mois de septembre), de Gustave-Louis Jaulmes (1873-1959), huile sur toile marouflée exposée dans la salle Jaulmes du palais Saint-Vaast à Arras (Pas-de-Calais), 2023.

© Gustave-Louis Jaulmes. © Simon Ducros.

  • 16 Archives nationales, F/21/4500/B, dossier 2 ; pièce 30 ; [Registre d’attribution aux musées].
  • 17 LAROCHE Cynthia, Des artistes au service de la Reconstruction (1919-1934). Gustave-Louis Jaulmes, H (...)

12La décision d’une dépose à Arras est prise en 193016 à la suite d’une proposition de Paquet en mars 192817. Un devis de Jaulmes du 18 janvier 1932 pour la restauration des toiles dans son atelier, avant marouflage dans la salle, permet de dater l’installation à Arras, en même temps que les décors livrés pour l’hôtel de ville. Les différents cycles font d’ailleurs l’objet d’une exposition à Paris en 1932, quelques semaines avant leur marouflage. Jaulmes est exposé à l’Orangerie tandis que les peintures de la grande salle des fêtes de l’hôtel de ville par Hoffbauer sont présentées à l’École des beaux-arts en juillet 1932, toujours sous l’auguste patronage de Paul Léon.

13Dans une étude de 1982, Christiane Guttinger note au sujet de l’artiste :

  • 18 GUTTINGER Christiane, « Jaulmes dans les collections publiques françaises », La Revue du Louvre, 19 (...)

S’il consacre l’essentiel de ses efforts à la peinture décorative, Jaulmes s’intéresse également aux divers aspects de l’aménagement intérieur, à la manière des « ensembliers », considérant l’architecture, son décor et son aménagement comme un tout. Parallèlement à d’autres artistes de sa génération, Louis Süe, André Mare et Paul Véra, il cherche à élaborer un « Nouveau Style » renouant avec une tradition d’équilibre et de bon goût français, s’opposant à la fois à l’académisme, au Modern Style et aux mouvements picturaux d’avant-garde18.

  • 19 Ibid. Christiane Guttinger revient sur la carrière de Jaulmes et justifie son lien avec de nombreux (...)

14C’est cette manière de considérer l’architecture comme un tout et cette tradition d’équilibre qui a sans doute séduit Paquet19. Plus encore, la critique de l’époque se fait l’écho des nombreuses références de Jaulmes à l’art du xviiie siècle, période si chère à l’architecte. L’artiste atteint lors de l’Exposition l’apogée de sa carrière. On l’y retrouve au salon d’honneur de la Manufacture de Sèvres et au salon de réception d’Une Ambassade française, où siège la commission d’esthétique et d’organisation de l’Exposition, dont Jaulmes fait lui-même partie. Pierre Paquet offre au cœur de la ville martyre une place de choix à l’une de ses compositions les plus ambitieuses.

Pierre Paquet et les arts décoratifs

15Cependant, Jaulmes n’est pas le seul artiste à participer à la reconstruction des monuments historiques d’Arras, puisque Pierre Paquet fait appel à une pléiade d’intervenants dont les noms figurent presque tous à l’Exposition de 1925. Malgré le caractère diffus des productions d’art religieux durant l’événement, l’architecte aura sans doute pu prendre connaissance des œuvres de Marret, Desvallières et Subes dans l’église du Village français, ou du travail de Pierre Seguin au pavillon des Cloches. Bien plus qu’une mise en relation directe dans le cadre d’une manifestation, la collaboration entamée par Paquet avec ces artistes témoigne avant tout de sa personnalité, de sa formation et de son réseau professionnel.

  • 20 Le fonds Genuys est conservé à Paris, au Centre d’archives d’architecture contemporaine sous la cot (...)

16Avant d’entrer à l’École des beaux-arts, voie royale pour un architecte de la période, Paquet est à l’origine élève de la « petite école », ou École nationale des arts décoratifs, à l’image d’André Mare, André Ventre, Raymond Subes ou de son professeur Charles Genuys (1852-1928). Autant de personnalités qui constituent son horizon professionnel, où les arts décoratifs occupent une place centrale. Genuys paraît constituer une figure fondamentale, bien que l’on ne dispose d’aucun témoignage direct. Architecte diocésain, architecte en chef des monuments historiques, Genuys est professeur d’architecture appliquée à la décoration, de perspective et de dessin d’architecture, puis sous-directeur de l’École nationale des arts décoratifs de 1878 à 1928, date de sa mort20. C’est dire l’impact de son enseignement sur certains architectes de la Reconstruction, dont Paquet, à qui il insuffle l’importance des arts décoratifs. Le chemin des deux hommes se croise à plusieurs reprises. Genuys est nommé pendant la guerre inspecteur général des monuments historiques des régions dévastées puis, sous la direction une fois de plus de Paul Léon, membre avec Pierre Paquet de la commission spéciale chargée de donner son avis sur les dossiers de reconstruction des édifices endommagés pendant le conflit. L’Exposition de 1925 constitue une dernière occasion de les réunir, Genuys étant nommé architecte en chef du Village français.

  • 21 Félix Desruelles exécute la statue de Mathias d’Arras pour l’hôtel de ville en 1932, au moment même (...)
  • 22 On doit également à Henri Bouchard les autels de l’église de Lestrem (Pas-de-Calais), restaurée par (...)
  • 23 Pierre Seguin (1872-1958) est un sculpteur originaire de Gironde, élève de Lucien Woog (1867-1937) (...)

17De son apprentissage à l’École des arts décoratifs, Pierre Paquet retient plusieurs principes fondamentaux, théorisés plus tard par Roger Marx et repris par André Vera : le travail commun sous l’autorité de l’architecte, la géométrie comme langage unique entre décorateur et architecte et l’importance du travail de l’artisan. Ces notions, marqueurs de l’Art déco et en rien antinomiques avec la déontologie de la restauration, constituent la ligne directrice des interventions de l’architecte à Arras. Pour mettre en œuvre ces conceptions, Paquet pense et dessine dans les moindres détails le relèvement des édifices en confiant à de nombreux artistes le soin de mettre en œuvre des ensembles décoratifs de grande qualité. Pour la sculpture, outre Marcel Gaumont (1880-1962), Henri Bouchard (1875-1960), Félix Desruelles (1865-1943)21 et Alexandre Descatoires (1874-1949), l’architecte fait appel à Georges Saupique (1889-1961) et Pierre Seguin (1872-1958), membres du groupe de la taille directe à l’Exposition, dans la Pergola de la Douce France. Les deux artistes interviendront à nouveau avec Bouchard22 et Descatoires, sous l’autorité de Paquet, lors de la restauration de l’église Aix-Noulette (Pas-de-Calais), et Saupique exécutera entre 1933 et 1936 les grands bas-reliefs ornant la façade de l’église du Sacré-Cœur de Gentilly (Val-de-Marne). Pierre Seguin, artiste moins gâté par la postérité23, intervient sur l’ensemble des chantiers arrageois de Paquet, puisqu’il est l’auteur d’une grande partie des sculptures de l’hôtel de ville – on lui doit entre autres le modèle du fameux Lion d’Arras – des sculptures néo-xviiie du palais Saint-Vaast et des bénitiers de la cathédrale. À l’instar de l’architecte, le sculpteur démontre son aisance dans le maniement des styles, passant de l’imitation à la création moderne.

  • 24 Louis Pierson, que je remercie vivement, travaille, au moment de l’écriture de cet article, à un mé (...)

18Dans le domaine des arts du métal, si les traditionnelles entreprises Monduit et Poussielgue-Rusand interviennent pour la première en couverture de l’hôtel de ville et du palais Saint-Vaast et la seconde pour les chandeliers du maître-autel et le couvercle des fonts baptismaux de la cathédrale, Pierre Paquet fait appel à des artistes novateurs pour la période : le ferronnier Raymond Subes (1891-1970) et le dinandier Claudius Linossier (1893-1953). Subes, directeur artistique de l’entreprise Borderel et Robert, fournit les grilles, balcons et rampes d’escalier dans le goût néo-xviiie du palais Saint-Vaast mais produit surtout les ferronneries Art déco de l’hôtel de ville [fig. 7] et les superbes bancs de communion du chœur et du transept sud de la cathédrale. Linossier, dont l’œuvre à Arras a été redécouverte très récemment24, exécute une série de six chandeliers et le tabernacle de l’autel du Calvaire, dont la modernité étonne au sein de la cathédrale.

Figure 7

Figure 7

Détail des ferronneries de Raymond Subes pour l’hôtel de ville d’Arras (Pas-de-Calais), photographie de l’agence Pierre Paquet, vers 1930, conservée à la Conservation régionale des monuments historiques des Hauts-de-France (dossier « hôtel de ville d’Arras »), Lille.

© Agence Pierre Paquet / reproduction Conservation régionale des monuments historiques des Hauts-de-France.

19Est-ce la rencontre entre Paquet et ces artistes à l’occasion de l’Exposition de 1925 qui le conduit à les faire intervenir à Arras ? Les archives sont muettes à ce sujet. Quoi qu’il en soit, il apparaît évident que le mouvement de la Grande Reconstruction des régions dévastées et l’Exposition constituent deux catalyseurs importants, propices à l’éclosion d’ensembles décoratifs majeurs sous la conduite de l’État, rare commanditaire à disposer d’autant de capacités d’action artistique durant l’entre-deux-guerres. La cathédrale d’Arras en fut le point d’orgue.

La cathédrale d’Arras : un monument Art déco

  • 25 La Médiathèque du patrimoine et de la photographie (Charenton-le-Pont) conserve une série de docume (...)

20Symboliquement, la cathédrale Notre-Dame de l’Assomption-et-Saint-Vaast est le dernier des monuments arrageois à être inauguré lors d’une cérémonie, le 13 mai 1934. À cette date, l’ameublement de l’édifice n’est pourtant pas achevé et les principales livraisons n’interviennent qu’en 193625. Pierre Paquet n’en suivra pas l’achèvement puisque les stalles et les autels latéraux du transept sud ne sont réalisés qu’après la Seconde Guerre mondiale, le dessin et l’installation étant assurés par ses successeurs, Bernard Haubold puis Charles Waldschmidt. Malgré tout, dès la fin des années 1930, c’est une vision métamorphosée qu’offre l’édifice.

  • 26 Cité par WINTREBERT Patrick, « L’aménagement mobilier de la cathédrale d’Arras », note dactylograph (...)
  • 27 VERA André, « Le Nouveau Style », L’Art décoratif, janvier 1912, t. XXVI, p. 21-32, cité par VIGATO (...)
  • 28 L’ensemble des marbres (sols et sculptures) est fourni par l’entreprise Octave Bouchez d’Arras.

21À l’occasion de son discours d’introduction à l’académie d’Arras le 1er juillet 1937, Paul Decaux, l’architecte ordinaire et relais local de Pierre Paquet, décrit la philosophie d’intervention voulue pour la cathédrale : « L’idée maîtresse de la décoration qui s’achève est de maintenir la noble simplicité de cette composition grandiose en ne demandant l’effet décoratif qu’à des matériaux strictement liés à l’architecture ; c’est ainsi qu’au mobilier indispensable ne doit s’ajouter que la décoration sculpturale26. » Cette approche rejoint la définition d’André Vera, développée en 1912 dans « Le Nouveau style » en évoquant « un art d’ordonnancement éminemment architectural » dont « l’effort principal aura consisté à faire résider l’intérêt de l’œuvre dans la beauté de l’œuvre et la justesse des proportions27 ». L’ornement se fait discret et ponctuel par un retour à la tradition classique porteur de valeur moderniste et la noblesse des matériaux employés : bronze doré, pierre de Comblanchien, pierre de Lunel et marbre vert du Labrador28.

22Pierre Paquet renoue avec la sobriété néoclassique de Contant d’Ivry, que les aménagements de Mgr de La Tour d’Auvergne, évêque de 1802 à 1851, étaient venus encombrer. Au contraire, l’architecte choisit de réaffirmer les lignes architecturales de l’abbatiale et de fondre le mobilier dans l’architecture en choisissant une pierre et des tonalités qui conduisent à une homogénéité de l’ensemble. Le maître-autel de Saupique, qui avait fait l’objet d’une première proposition plus sculpturale, s’impose sans briser la perspective [fig. 8 et 9], et la chaire monumentale de Marcel Gaumont, dépourvue d’abat-voix, habille discrètement la nef [fig. 10].

Figure 8

Figure 8

Premier projet d’autel double pour la croisée du transept de la cathédrale d’Arras (Pas-de-Calais), 27 avril 1934, encre et gouache sur calque de Pierre Paquet (1875-1959), conservée à la Médiathèque du patrimoine et de la photographie Charenton-le-Pont (0082.62.1031).

© Agence Pierre Paquet / reproduction Simon Ducros.

Figure 9

Figure 9

Maître-autel de la cathédrale d’Arras (Pas-de-Calais) de Pierre Paquet (1875-1959) et Georges Saupique (1889-1961), fonte d’Eugène Rudier, table en marbre vert du Labrador, dés en bronze doré, 2023.

© Agence Pierre Paquet. © Simon Ducros.

Figure 10

Figure 10

Chaire de la cathédrale d’Arras (Pas-de-Calais) en pierre de Comblanchien, 2023. Architecte Pierre Paquet (1875-1959), sculpteur Marcel Gaumont (1880-1962).

© Agence Pierre Paquet. © Marcel Gaumont. © Simon Ducros.

  • 29 Si la coupole de la chapelle de la Vierge était bien prévue en remplacement de l’œuvre de Charles D (...)

23La couleur est ponctuellement réservée aux éléments liturgiques signifiants, marqueur de l’espace sacré et point focal pour le fidèle : les ferronneries des bancs de communion de Subes, le tabernacle du transept sud de Linossier [fig. 11] et le maître-autel dont les dés en bronze doré sont fondus par Eugène Rudier, son tabernacle portatif et ses chandeliers de Poussielgue-Rusand exécutés en cuivre de différents alliages incrusté et damasquiné. Les toiles de Marret, Charles Hollart et Desvallières29, plus colorées mais d’un aspect mat et qui, bien que placées dans la coupole de la chapelle de la Vierge et dans les transepts, ne s’appréhendent pas au premier regard et sont réservés à des espaces de dévotion en périphérie.

Figure 11

Figure 11

Porte du tabernacle de l’autel du Calvaire de la cathédrale d’Arras (Pas-de-Calais), 2023. Dinanderie de Claudius Linossier (1893-1953).

© Simon Ducros.

24Dans cet ensemble, la sculpture domine. Pierre Paquet choisit d’habiller les bas-côtés de la nef de huit grandes statues, autrefois destinées au Panthéon et dont il obtient le dépôt en octobre 1934. Ces œuvres de proportions monumentales en marbre blanc, qui complètent la Vierge de Jean-Pierre Cortot placée au xixe siècle dans la chapelle de la Vierge, constituent l’ensemble décoratif qui manquait jusqu’alors à la cathédrale.

  • 30 Le sculpteur Marcel Gaumont (1880-1962), grand prix à l’Exposition internationale de 1937, particip (...)
  • 31 Les plâtres de l’artiste sont encore conservés dans les réserves du Trésor de la cathédrale.

25Les créations commandées pour l’édifice – chaire et font baptismaux de Marcel Gaumont30, maître-autel de Georges Saupique, autel du Calvaire d’Henri Bouchard31 [fig. 12], chemin de croix d’Alexandre Descatoires et bénitiers de Pierre Seguin – répondent tous à un même mouvement artistique renouant avec la tradition médiévale. À ce titre, Mgr Julien, l’évêque de la Reconstruction, se voit honoré d’un gisant d’expression gothique par Saupique. La géométrisation induite des formes et la soumission de la sculpture à l’architecture imposent un retour à la loi du cadre dont le même artiste donnera quelques années plus tard un exemple monumental au Sacré-Cœur de Gentilly. Le traitement des scènes épurées sous forme de bas-reliefs et la pratique de la taille directe associée à un matériau noble mais austère qu’est le calcaire de Comblanchien sont autant de pratiques dont les sources puisent dans l’art roman. Les supports du maître-autel, ornés de poissons, colombes et agneaux stylisés, et les plaques en bronze doré des bancs de communion illustrant l’eucharistie par des épis de blé et des grappes de raisin, réactivent le symbolisme des premiers temps de l’art chrétien dans une lecture épurée et signifiante pour le fidèle. Les fonts baptismaux illustrant le baptême du Christ et la prédication de saint Vaast s’inscrivent dans cette production, tout en assumant une inspiration directe des fonts de l’église Notre-Dame de Liège commandés par l’abbé Helin à Renier de Huy au xiie siècle [fig. 13].

Figure 12

Figure 12

Autel du Calvaire dans le transept sud de la cathédrale d’Arras (Pas-de-Calais) en pierre de Comblanchien, 2023. Architecte Pierre Paquet (1875-1959), sculpteur Henri Bouchard (1875-1960).

© Agence Pierre Paquet. © Simon Ducros.

Figure 13

Figure 13

Fonts baptismaux de la cathédrale d’Arras (Pas-de-Calais) en pierre de Comblanchien, 2023. Architecte Pierre Paquet (1875-1959) et sculpteur Marcel Gaumont (1880-1962).

© Agence Pierre Paquet. © Simon Ducros.

26Bien que soumettant ces propositions au clergé, Pierre Paquet reste le grand ordonnateur d’une iconographie dont il dessine lui-même les détails et que les artistes sont chargés de mettre en musique. L’architecte assure par-delà les différentes influences stylistiques – romane ou néoclassique, peu importe – le caractère monolithique de cette cathédrale aussi austère que lumineuse, constituant un témoignage éloquent des arts décoratifs de l’entre-deux-guerres. En redonnant ce caractère solennel à l’ancienne abbatiale Saint-Vaast, Pierre Paquet offrait à l’édifice l’intemporalité des grands monuments commémoratifs de la période, et l’érigeait en symbole d’une ville renaissante.

27Avec Reims, Verdun et Saint-Quentin, Arras partage le destin de ces grandes villes meurtries par la guerre et qui surent faire preuve de résilience pour se relever. Il aura fallu toute la ténacité de personnalités telles que Pierre Paquet pour insuffler une dynamique à l’échelle d’une ville, dont les monuments emblématiques constituent la colonne vertébrale. Le cas d’Arras est un exemple majeur de la synthèse opérée entre les différents styles qui animaient la cité avant-guerre, classique et flamand. Cette cohérence n’aurait sans doute pas été possible sans le renouveau des arts décoratifs, dont l’Exposition internationale de 1925 constitue un moment charnière. L’Art déco trouve ainsi une expression aboutie à Arras, à travers des monuments qu’on aurait tort d’enfermer dans une lecture passéiste et doctrinale.

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Notes

1 BUSSIÈRE Éric, MARCILLOUX Patrice & VARASCHIN Denis (dir.), La Grande Reconstruction. Reconstruire le Pas-de-Calais après la Grande Guerre. Actes du colloque d’Arras, 8-10 novembre 2000, Arras, Archives départementales du Pas-de-Calais, 2002.

2 Pierre Paquet est assisté par l’architecte ordinaire Paul Decaux (1881-1968) dont le fonds est conservé aux archives départementales du Pas-de-Calais (Arras) : voir https://www.archivespasdecalais.fr/Chercher/Fonds-et-collections/Archives-privees/Archives-d-architectes/45-J-Fonds-Paul-Decaux [lien valide en mars 2025].

3 La Réparation des dommages de guerre. Analyse et commentaire de la loi du 17 avril 1919 suivi du Texte officiel des lois, décrets et ordonnances, Paris, Édition & librairies, 1921, p. 26.

4 DEHAY Thierry & VASSEUR Delphine, La Grande Reconstruction. Arras, la ville nouvelle à l’époque Art déco, Arras, Degeorge, 2018.

5 Arras, archives municipales (ci-après AMA), 1M2/4, « Autour de la cérémonie de la pose de la première pierre à l’hôtel de ville d’Arras », Le Courrier du Pas-de-Calais, dimanche 24 et lundi 25 août 1924, n. p.

6 AMA, 1M2/4, Rapport dactylographié de Pierre Paquet, 31 mai 1924.

7 MAYEUX Henri, « Un pavillon de repos dans un terrain de jeu à l’Exposition d’Art décoratif moderne », L’Architecture, vol. XXXIX, no 4, 25 février 1926, p. 56.

8 Ibid.

9 SAINTE-FARE GARNOT Nicolas, « La peinture Art déco, Une aventure postmoderne ? », in BRÉON Emmanuel & RIVOIRARD Philippe (dir.), Quand l’art déco séduit le monde, cat. exp., Paris, Cité de l’architecture et du patrimoine, 16 octobre 2013-17 février 2014, Paris, Cité de l’architecture & du patrimoine, Norma, 2013, p. 132-135.

10 Peintre d’origine suisse, Jaulmes fait partie de la commission d’esthétique et d’organisation de l’Exposition de 1925, qui siège dans l’Ambassade française, dont il décore le salon. En outre, il décore le Salon d’honneur de la Manufacture de Sèvres et expose dans la salle des Manufactures du Grand Palais une tapisserie de Beauvais intitulée Entrée en guerre de l’Amérique. On lui doit également le décor du grand salon du palais de Chaillot, le rideau de scène de l’opéra de Lyon, les peintures décoratives à l’antique du foyer du théâtre de Carcassonne et, avec Adrien Karbowsky, les décors de la villa Kérylos (Beaulieu-sur-Mer).

11 Ibid, p. 134.

12 Henri Marret expose en 1920 au pavillon de Marsan (Louvre) dans le cadre d’une exposition consacrée à l’art religieux en vue de la Reconstruction dans les églises des régions dévastées. Cette exposition constitue le point de départ de nombreuses commandes religieuses. On lui doit notamment des décors à Arvilliers, Moreuil, Beuvraignes, Irles, Roye et Drocourt en Picardie, souvent en collaboration avec les architectes Duval et Gonse. Notre-Dame des Missions d’Épinay-sur-Seine (Seine-Saint-Denis) et Saint-Louis de Vincennes (Val-de-Marne) font partie de ses interventions majeures.

13 Le cycle n’est plus visible du public depuis les années 1980 et attend une future restauration de sa configuration voulue par Pierre Paquet.

14 Entrés dans les collections par achat du 5 décembre 1975, sous les numéros d’inventaire 75-105-1 à 7.

15 Une Danse champêtre exposée au Salon de 1932 est également installée à une date indéterminée dans l’ancien réfectoire de l’abbaye.

16 Archives nationales, F/21/4500/B, dossier 2 ; pièce 30 ; [Registre d’attribution aux musées].

17 LAROCHE Cynthia, Des artistes au service de la Reconstruction (1919-1934). Gustave-Louis Jaulmes, Henri Bouchard, Pierre Paquet, brochure du service culturel du musée des Beaux-Arts d’Arras, s.d., p. 27.

18 GUTTINGER Christiane, « Jaulmes dans les collections publiques françaises », La Revue du Louvre, 1982, no 2, p. 133.

19 Ibid. Christiane Guttinger revient sur la carrière de Jaulmes et justifie son lien avec de nombreux architectes de la période. Avant de se diriger vers la peinture, Jaulmes avait entamé des études d’architecture, d’où son intérêt pour cet art.

20 Le fonds Genuys est conservé à Paris, au Centre d’archives d’architecture contemporaine sous la cote 89 IFA.

21 Félix Desruelles exécute la statue de Mathias d’Arras pour l’hôtel de ville en 1932, au moment même où Bouchard fournit une statue d’Adam de la Halle et Saupique une statue de Mahaut d’Artois.

22 On doit également à Henri Bouchard les autels de l’église de Lestrem (Pas-de-Calais), restaurée par Pierre Paquet, et l’autel majeur du Mont-Saint-Michel, où l’architecte en chef œuvre durant les années 1930.

23 Pierre Seguin (1872-1958) est un sculpteur originaire de Gironde, élève de Lucien Woog (1867-1937) puis professeur à l’École des arts décoratifs de 1918 à 1935, à qui l’on doit un bas-relief néoceltique, Les Serpents des druides, à l’Exposition de 1925 (auj. au jardin de la tour Guinette, Étampes, Essonne). À Arras, il exécute les bénitiers de la cathédrale, les sculptures du palais Saint-Vaast et de l’hôtel de ville.

24 Louis Pierson, que je remercie vivement, travaille, au moment de l’écriture de cet article, à un mémoire de recherche de master 2 sur l’artiste Claudius Linossier, sous la direction de Laurent Baridon à l’université Lumière Lyon II.

25 La Médiathèque du patrimoine et de la photographie (Charenton-le-Pont) conserve une série de documents relatifs à ces travaux d’aménagement : F.1999.34.11-114, F.2011.22.23-1, 0082.62.2001, 0082.62.1031.

26 Cité par WINTREBERT Patrick, « L’aménagement mobilier de la cathédrale d’Arras », note dactylographiée, 4 p., Arras, archives départementales du Pas-de-Calais, fonds CAOA, AD62-11fi-0078 à 0081.

27 VERA André, « Le Nouveau Style », L’Art décoratif, janvier 1912, t. XXVI, p. 21-32, cité par VIGATO Jean-Claude, « L’architecture de la reconstruction, entre régionalisme et Art déco », in La Première Reconstruction. Architecture et urbanisme en Lorraine et dans l’Est (1919-1939), Ars-sur-Moselle, Serge Domini, 2019, p. 232.

28 L’ensemble des marbres (sols et sculptures) est fourni par l’entreprise Octave Bouchez d’Arras.

29 Si la coupole de la chapelle de la Vierge était bien prévue en remplacement de l’œuvre de Charles Daverdoingt (1813-1895) détruite pendant le conflit, les toiles de la Nativité et de la Résurrection de Georges Desvallières et les deux autres compositions de Charles Hollart et Henri Marret n’étaient pas souhaitées à l’origine par Paquet. Desvallières accepte les conditions de la commande en juillet 1939. Les deux œuvres sont achevées en 1942 et présentées au Salon d’Automne. Le marouflage et le complément des toiles en partie contrée ne sont mis en œuvre qu’en 1962 par l’atelier Mallesset. Il s’agit des derniers aménagements de la cathédrale avec les stalles et les autels latéraux du transept sud.

30 Le sculpteur Marcel Gaumont (1880-1962), grand prix à l’Exposition internationale de 1937, participa à la reconstruction de plusieurs églises du Cambrésis, en collaboration avec l’architecte Pierre Leprince-Ringuet (1874-1954).

31 Les plâtres de l’artiste sont encore conservés dans les réserves du Trésor de la cathédrale.

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Table des illustrations

Titre Figure 1
Légende Pierre Paquet (1874-1959), vers 1925. Photographie conservée aux archives départementales du Pas-de-Calais, fonds Paul Decaux, Arras (cote 45J).
Crédits Photographe inconnu / reproduction archives départementales du Pas-de-Calais.
URL http://journals.openedition.org/insitu/docannexe/image/44441/img-1.JPG
Fichier image/jpeg, 250k
Titre Figure 2
Légende « Façade de l’hôtel de ville d’Arras (Pas-de-Calais) ouvrant sur la place des Héros avant destruction », 1901-1914, photographie de Louis Séeberger (1872-1932), 13 x 18 cm, conservée à la Médiathèque du patrimoine et de la photographie, Charenton-le-Pont (1FS00186).
Crédits Reproduction Médiathèque du patrimoine et de la photographie Charenton-le-Pont.
URL http://journals.openedition.org/insitu/docannexe/image/44441/img-2.jpg
Fichier image/jpeg, 323k
Titre Figure 3
Légende « Façade de l’hôtel de ville d’Arras ouvrant sur la place des Héros après sa reconstruction », 1937, photographie de Georges Estève (1890-1975), 18 x 24 cm, conservée à la Médiathèque du patrimoine et de la photographie, Charenton-le-Pont (MH0110836).
Crédits © Georges Estève / reproduction Médiathèque du patrimoine et de la photographie, Charenton-le-Pont.
URL http://journals.openedition.org/insitu/docannexe/image/44441/img-3.jpg
Fichier image/jpeg, 331k
Titre Figure 4
Légende Salle des fêtes du Grand Palais à l’Exposition de 1925 à Paris. Photographie conservée aux archives André Mare et reproduite dans l’ouvrage Süe et Mare et la compagnie des arts français, Florence Camard, Paris, Éditions de l’Amateur, 1993.
Crédits Photographe inconnu / reproduction Simon Ducros.
URL http://journals.openedition.org/insitu/docannexe/image/44441/img-4.jpg
Fichier image/jpeg, 216k
Titre Figure 5
Légende Salle Jaulmes du palais Saint-Vaast à Arras (Pas-de-Calais), 1937, photographie de Georges Estève (1890-1975), 18 x 24 cm, conservée à la Médiathèque du patrimoine et de la photographie, Charenton-le-Pont (MH0110824).
Crédits © Georges Estève / reproduction Médiathèque du patrimoine et de la photographie, Charenton-le-Pont.
URL http://journals.openedition.org/insitu/docannexe/image/44441/img-5.jpg
Fichier image/jpeg, 261k
Titre Figure 6
Légende Les Vendanges (mois de septembre), de Gustave-Louis Jaulmes (1873-1959), huile sur toile marouflée exposée dans la salle Jaulmes du palais Saint-Vaast à Arras (Pas-de-Calais), 2023.
Crédits © Gustave-Louis Jaulmes. © Simon Ducros.
URL http://journals.openedition.org/insitu/docannexe/image/44441/img-6.JPG
Fichier image/jpeg, 211k
Titre Figure 7
Légende Détail des ferronneries de Raymond Subes pour l’hôtel de ville d’Arras (Pas-de-Calais), photographie de l’agence Pierre Paquet, vers 1930, conservée à la Conservation régionale des monuments historiques des Hauts-de-France (dossier « hôtel de ville d’Arras »), Lille.
Crédits © Agence Pierre Paquet / reproduction Conservation régionale des monuments historiques des Hauts-de-France.
URL http://journals.openedition.org/insitu/docannexe/image/44441/img-7.JPG
Fichier image/jpeg, 706k
Titre Figure 8
Légende Premier projet d’autel double pour la croisée du transept de la cathédrale d’Arras (Pas-de-Calais), 27 avril 1934, encre et gouache sur calque de Pierre Paquet (1875-1959), conservée à la Médiathèque du patrimoine et de la photographie Charenton-le-Pont (0082.62.1031).
Crédits © Agence Pierre Paquet / reproduction Simon Ducros.
URL http://journals.openedition.org/insitu/docannexe/image/44441/img-8.JPG
Fichier image/jpeg, 229k
Titre Figure 9
Légende Maître-autel de la cathédrale d’Arras (Pas-de-Calais) de Pierre Paquet (1875-1959) et Georges Saupique (1889-1961), fonte d’Eugène Rudier, table en marbre vert du Labrador, dés en bronze doré, 2023.
Crédits © Agence Pierre Paquet. © Simon Ducros.
URL http://journals.openedition.org/insitu/docannexe/image/44441/img-9.JPG
Fichier image/jpeg, 218k
Titre Figure 10
Légende Chaire de la cathédrale d’Arras (Pas-de-Calais) en pierre de Comblanchien, 2023. Architecte Pierre Paquet (1875-1959), sculpteur Marcel Gaumont (1880-1962).
Crédits © Agence Pierre Paquet. © Marcel Gaumont. © Simon Ducros.
URL http://journals.openedition.org/insitu/docannexe/image/44441/img-10.JPG
Fichier image/jpeg, 255k
Titre Figure 11
Légende Porte du tabernacle de l’autel du Calvaire de la cathédrale d’Arras (Pas-de-Calais), 2023. Dinanderie de Claudius Linossier (1893-1953).
Crédits © Simon Ducros.
URL http://journals.openedition.org/insitu/docannexe/image/44441/img-11.JPG
Fichier image/jpeg, 204k
Titre Figure 12
Légende Autel du Calvaire dans le transept sud de la cathédrale d’Arras (Pas-de-Calais) en pierre de Comblanchien, 2023. Architecte Pierre Paquet (1875-1959), sculpteur Henri Bouchard (1875-1960).
Crédits © Agence Pierre Paquet. © Simon Ducros.
URL http://journals.openedition.org/insitu/docannexe/image/44441/img-12.JPG
Fichier image/jpeg, 342k
Titre Figure 13
Légende Fonts baptismaux de la cathédrale d’Arras (Pas-de-Calais) en pierre de Comblanchien, 2023. Architecte Pierre Paquet (1875-1959) et sculpteur Marcel Gaumont (1880-1962).
Crédits © Agence Pierre Paquet. © Simon Ducros.
URL http://journals.openedition.org/insitu/docannexe/image/44441/img-13.JPG
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Pour citer cet article

Référence électronique

Simon Ducros, « La contribution de l’Art déco à la reconstruction des monuments historiques »In Situ [En ligne], 55 | 2025, mis en ligne le 26 avril 2025, consulté le 17 mai 2025. URL : http://journals.openedition.org/insitu/44441 ; DOI : https://doi.org/10.4000/13tdr

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Auteur

Simon Ducros

Conservateur des monuments historiques – Drac Hauts-de-France – site de Lille
simon.ducros@culture.gouv.fr

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Droits d’auteur

CC-BY-NC-ND-4.0

Le texte seul est utilisable sous licence CC BY-NC-ND 4.0. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.

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