1Cet ouvrage, fort intéressant, traite de trois thèmes très importants pour le Québec : aménagement, développement, et environnement, le dernier thème étant particulièrement d’actualité. L’ouvrage inclut un grand nombre de données empiriques, utiles pour les chercheurs, les étudiants ou encore les journalistes qui veulent un point rapide sur certaines questions. Les dimensions écologiques, sociales et culturelles sont ainsi couvertes dans l’ouvrage, qui porte sur le Québec en général, mais aussi beaucoup sur ses régions. On sait que le laisser-aller en matière de développement local ou régional fait apparaître un grand nombre d’enjeux dans les régions et territoires du Québec, et cet ouvrage permet de mieux les cerner ces défis, puisqu’il présente un grand nombre de données pertinentes pour alimenter l’action en cette matière.

2L’auteur commence par rappeler les contrastes importants entre les régions et le peuplement, peuplement dont l’auteur souligne qu’il est très déséquilibré, les diverses régions présentant des situations fort contrastées. L’auteur traite de la démographie et des migrations, s’intéressant aux situations contrastées des diverses régions, soit les régions centrales, intermédiaires et périphériques, et soulignant la décroissance de certains territoires. Il évoque la persistance des disparités territoriales et sociales, et ce à divers niveaux, que ce soit les localitésles, MRC ou les régions administratives. Cela offre un regard pluriel, tout en permettant d’illustrer les disparités qui peuvent parfois être cachées lorsqu’on étudie les données à une échelle trop grande. Les différences sur le plan du logement, des revenus de transfert, les situations de faible revenu, la pauvreté, l’aide sociale sont autant de sujets abordés pour mieux dessiner le portrait de ces contrastes et disparités territoriales. Les causes et les effets de la pauvreté sont abordés de manière détaillée; c’est d’ailleurs là un aspect intéressant de l’ouvrage, soit le fait de traiter des causes de la pauvreté, de présenter des analyses approfondies de cette situation, en plus des nombreuses données exposées.

3Les réalités de la marginalisation et de la dévitalisation sont également traitées. Ce sont des réalités observées dans un certain nombre de régions du Québec, et ce, malgré certaines politiques d’intervention au fil des ans, interventions qui n’ont pas réussi à éliminer ces disparités et problèmes de dévitalisation.

4On trouve ici un ouvrage de référence, car il fait un historique de l’évolution des territoires, mais présente aussi présenter les interventions majeures de l’État québécois, notamment celles du Bureau d’aménagement de l’est du Québec (BAEQ), qui reste une référence historique au Québec.

5Un seul regret : les données ne sont pas toujours aussi récentes qu’elles pourraient l’être, par exemple des données sur le revenu moyen des ménages en 2015, ou certaines données sur les disparités en 2016. L’auteur a sans doute commencé la rédaction alors que les nouvelles données du recensement de 2021 n’étaient pas disponibles, mais on aurait peut-être pu trouver d’autres sources pour certains éléments afin d’éviter des questionnements de lecteurs sur l’évolution plus récente.

6Quoi qu’il en soit, les chercheurs et les étudiants trouveront ici un grand nombre de données, mais aussi d’analyses pertinentes pour poursuivre les recherches, mettre à jour les données les plus pertinentes, et aussi tenter d’agir pour corriger les divers problèmes évoqués, qu’il s’agisse des disparités sur le plan des revenus, des ressources, du peuplement ou autres.

7La partie 3 compte deux chapitres particulièrement intéressants, du moins de mon point de vue, puisqu’ils exposent les différentes interventions visant le développement et permettent de rappeler un bon nombre de programmes parfois oubliés aujourd’hui. Les années 60 ont en effet vu se développer les interventions du Bureau d’aménagement de l’est du Québec (BAEQ), les opérations Dignité, ainsi qu’un certain nombre de relocalisations dans l’Est du Québec (paroisses marginales, Forillon, les programmes d’aide aux migrants, les regroupements des travailleurs). L’ouvrage traite de la période 60-80 puis passe aux années subséquentes, avec les conférences socio-économiques, les conseils régionaux de développement et les conférences régionales des élus. L’auteur a fait un excellent travail de documentation pour nous présenter l’ensemble de ces interventions, les situer dans leur contexte et nous permettre de réfléchir aux effets de ces diverses interventions. Différentes stratégies et orientations sont évoquées : Politique nationale de la ruralité, décentralisation, décentralisation durable, etc. On ne peut toutefois pas affirmer que les programmes se soient toujours traduits par des succès, puisque la dévitalisation et les disparités existent encore aujourd’hui, même si l’on observe une reprise et des projets fort intéressants qui ont émergé dans dernières années.

8La partie 4 traite des diverses dimensions de l’aménagement du territoire, la 5^e est largement centrée sur la Loi sur la protection du territoire et des activités agricoles, et la partie 6 sur de nouvelles approches d’aménagement du territoire.

9Tout ceci offre une excellente revue des réalités régionales, mais aussi des modes d’intervention observés au fil des ans, tout en soulignant les limites des diverses interventions. Comme le souligne l’auteur, malgré ces interventions et ces politiques, les disparités et contrastes demeurent.

10L’ouvrage est fort utile pour toutes les personnes qui réfléchissent ou agissent en matière de développement économique, de développement régional, rural ou urbain. Au-delà des milieux universitaires ou collégiaux, il donc peut intéresser un large public préoccupé par les contrastes et disparités entre les régions et le développement des territoires du Québec.

11Pour conclure, on peut d’ailleurs souhaiter que la période post-pandémie puisse présenter davantage d’initiatives venant des individus et des communautés, puisque jusqu’ici, les interventions de l’État, généralement en ‘top-down’ plutôt que ‘bottom-up, n’ont pas réglé les nombreux problèmes. De nouvelles initiatives citoyennes, issues possiblement des personnes qui se sont déplacées des grands centres avec l’augmentation des prix du logement et le télétravail, pourraient apporter de nouvelles perspectives de développement et d’aménagement du territoire. Ainsi, on pourrait attendre une suite à cet ouvrage et ses analyses fort pertinentes afin d’assurer un meilleur développement économique et social du Québec, tout en évitant les trop fortes disparités et contrastes entre les régions.