1Depuis plusieurs décennies, l’Association française des anthropologues (AFA), éditrice du Journal des anthropologues (JdA), associe son assemblée générale annuelle à une journée d’étude. Cette année, nous n’avons pas dérogé à cette articulation entre temps démocratique et moment académique.

Politique et production du déchet

Bienvenue à Sami El Amari

3Aux termes de cette journée d’étude, nous avons tenu notre assemblée générale, en présence des membres de l’AFA mais également de quelques collègues qui avaient participé aux échanges sur les déchets. Classiquement, cette AG a consisté en un vote sur les bilans moral et financier (approuvés à l’unanimité) et sur l’élection des nouveaux membres du bureau de l’AFA, lequel prend en charge la vie de l’association, les arbitrages sur les orientations politiques et scientifiques, l’organisation d’événements et un ensemble de tâches administratives. En 2023, seul un poste était vacant, auquel pouvait candidater toute personne adhérente de l’AFA. Sami El Amari a été élu, qui en plus de devenir membre du bureau rejoint automatiquement le comité de rédaction du Journal des anthropologues. Nous lui souhaitons la bienvenue et nous réjouissons des futures collaborations. Sami El Amari est anthropologue. Sa thèse porte sur Le temps des autres. Accumulation du capital, agencements communautaires et constitution de classe chez les patrons de la côte est de Madagascar. Membre du Laboratoire interdisciplinaire solidarités sociétés territoires (le LISST) de l’université de Toulouse Le Mirail, il pourra entre autres prendre bouche avec d’autres collègues du comité de rédaction du JdA basés dans cette même université, pour mieux faire connaître et diffuser les activités de l’AFA et les publications du Journal. Ses thèmes de prédilection et angles d’approche, qui font écho à ceux d’autres membres de l’association, augurent de débats et productions à venir passionné·e·s et passionnant·e·s.

Plus que jamais : faire recherche et faire politique

4Les activités de l’AFA, depuis ses débuts et plus que jamais dans notre contexte tendu, troublé et troublant, l’engagent au cœur des tensions qui traversent le champ disciplinaire et le politique, la place des sciences sociales dans la société, leur reconnaissance ou leur piétinement, la défense de l’enseignement supérieur, de la recherche publique et de l’avenir des jeunes diplômé·e·s, de leur égale possibilité de continuer à penser et faire penser librement. La synergie entre le Journal des anthropologues et les activités de l’AFA – via des séminaires, des journées d’étude ou colloques, etc. – permet d’approcher des publics larges et variés, y compris hors du champ académique. En lien avec ces engagements, l’AFA a pris position dans ses éditoriaux en 2022‑23. Dans le numéro « L’Europe par ses “autres” » (numéro 170‑171), dernier paru avant l’AG, un femmage à Colette Guillaumin a par exemple été rédigé par Armand Aupiais, à l’occasion des 50 ans de la sortie de L’Idéologie raciste. Dans le numéro suivant, sur les imaginaires pandémiques, l’éditorial s’inquiète du tarissement de subventions comme arme contre certaines associations, voire de l’usage plus qu’abusif que le ministère de l’Intérieur fait de la possibilité de dissoudre ou interdire certaines structures.

Diffuser et exister pour convaincre

5L’édition du Journal des anthropologues, les séminaires réguliers « Anthropologie et psychanalyse : regards sur les terrains », les journées d’études annuelles relèvent des activités régulières de l’AFA. En 2022 et 2023, l’amélioration de la diffusion a constitué une part essentielle de nos actions. Dans le cadre du partenariat récent de l’AFA avec la collection « anthropologie critique » de L’Harmattan (depuis fin 2020), signalons la parution de l’ouvrage Devenir en régime pandémique, coordonné par Monique Selim et Pascale Phélinas en 2023. Évoquons également la refonte du site internet de l’AFA, pilotée par Sophie Accolas, avec une nouvelle charte graphique et une meilleure lisibilité. De haute lutte, il est d’ores et déjà à nouveau possible d’accéder à Paypal sur notre site, facilitant des ventes directes. Cette année, un effort important de diffusion du JdA en anglais a également été entrepris, avec l’entrée du Journal sur Cairn international, où sont désormais accessibles les articles publiés en anglais ainsi que la traduction des introductions et de l’ensemble des métadonnées depuis le numéro 147, datant de 2017. Dans un autre registre, les « Livres d’images », initiés lors du rajeunissement de la maquette du Journal des anthropologues en 2020, sont désormais numérisés et accessibles en ligne sur OpenEdition. Grâce à l’investissement d’Émir Mahieddin et de Kassia Aleksic pour Facebook, de Fatiha Kaouès pour Twitter, nous tentons aussi d’être davantage actifs sur les réseaux sociaux.

6Tous ces efforts ne pourraient porter leurs fruits sans l’engagement sans failles depuis vingt-quatre ans maintenant de Françoise Palumbo, notre secrétaire de rédaction, chargée entre autres des relations avec les auteurs et autrices et de la mise en page du JdA (assistée depuis deux ans par Célio Paillard, graphiste), et sans la belle disponibilité d’Adrien Nader, notre secrétaire administratif, qui travaille sans cesse dans l’ombre, discret et indispensable à la fois.

Des inquiétudes

7Mais au-delà de nos activités et de l’énergie que nous mettons à tenter de faire vivre l’AFA et le JdA, les nouveaux attendus des pouvoirs publics visant à faire disparaître toutes formes de « barrière mobile », autrement dit leur volonté de mettre les articles gratuitement en ligne dès leur parution, créent des inquiétudes et enjoignent à la vigilance les revues scientifiques : l’accessibilité libre et immédiate des articles conditionnerait dorénavant l’attribution de subventions publiques. Nous en avons déjà fait les frais puisque l’Institut des sciences humaines et sociales (InSHS) du CNRS n’a pas renouvelé notre subvention, non pas en contestant la qualité du JdA, mais parce que nos publications papiers ne se retrouvent pas dès leur sortie en accès gratuit sur les plateformes de diffusion de la recherche. Cette épée de Damoclès nous oblige à revoir dans les années à venir notre modèle économique, cela en concertation avec les autres revues de sciences sociales et le collectif « Revues en lutte », voire avec les éditeurs privés et avec Cairn qui, contre toute attente, finit par devenir un allier.

8En ces temps où la liberté de débattre, de faire recherche et de faire politique parfois autrement est régulièrement écornée, nos terrains de lutte sont ainsi multiples, économiques autant que philosophiques, ou, osons le mot… anthropologiques !